Canada, Débats de la Chambre des communes, « Le projet de résolution relative à la loi constitutionnelle, 1981 », 32e parl, 1re sess (23 novembre 1981)
Informations sur le document
Date: 1981-11-23
Par: Canada (Parlement)
Citation: Canada, Parlement, Débats de la Chambre des communes, 32e parl, 1re sess, 1981 à 13082-13147.
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[Traduction]
LA CONSTITUTION
RÉSOLUTION RELATIVE À LA LOI CONSTITUTIONNELLE, 1981
La Chambre reprend l’étude, interrompue le vendredi 20
novembre 198 1, de la motion de M. Chrétien:
13082 DEBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
THAT, WHEREAS in the past certain
amendments to the Constitution of Canada
have been made by the Parliament of the
United Kingdom at the request and with the
consent of Canada;
AND WHEREAS it is in accord with the
status of Canada as an independent state
that Canadians be able to amend their Constitution
in Canada in all respects;
AND WHEREAS it is also desirable to 1
provide in the Constitution of Canada for the
recognition of certain fundamental rights
and freedoms and to make other amendments
to that Constitution;
A respectful address be presented to Her 1
Majesty the Queen in the following words:
To the Queen’s Most Excellent Majesty:
Most Gracious Sovereign:
CONSIDÉRANT:
que le Parlement du Royaume-Uni a
modifié à plusieurs reprises la Constitution
du Canada à la demande et avec le consen-
5 tement de celui-ci; 5
que, de par le statut d’État indépendant du
Canada, il est légitime que les Canadiens
aient tout pouvoir pour modifier leur
Constitution au Canada;
0 qu’il est souhaitable d’inscrire dans la 10
Constitution du Canada la reconnaissance
de certains droits et libertés fondamentaux
et d’y apporter d’autres modifications,
5 il est proposé que soit présentée respectueusement
à Sa Majesté la Reine l’adresse dont 15
la teneur suit :
A Sa Très Excellente Majesté la Reine,
Très Gracieuse Souveraine :
We, Your Majesty’s loyal subjects, the Nous, membres de la Chambre des com-
House of Commons of Canada in Parliament 20 munes du Canada réunis en Parlement, fidèles20
assembled, respectfully approach Your sujets de Votre Majesté, demandons respec-
Majesty, requesting that you may graciously tueusement à Votre Très Gracieuse Majesté de
be pleased to cause to be laid before the bien vouloir faire déposer devant le Parlement
Parliament of the United Kingdom a measure du Royaume-Uni un projet de loi ainsi conçu:
containing the recitals and clauses hereinafter 25
set forth:
23 novembre 1981 DÉ13ATS DES COMMUNES 13083
13084 DÉBATS DES COMMUNES 23novembre 1981
La Constitution
An Act to give effect to a request by the
Senate and House of Commons of
Canada
ANNEXE A-SCHEDULE A
Loi donnant suite à une demande du Sénat et
de la Chambre des communes du
Canada
Sa Très Excellente Majesté la Reine,
Whereas Canada has requested and con- considérant : 5
sented to the enactment of an Act of the 5 qu’à la demande et avec le consentement
Parliament of the United Kingdom to give du Canada, le Parlement du Royaume-Uni
effect to the provisions hereinafter set forth est invité à adopter une loi visant à donner
and the Senate and the House of Commons effet aux dispositions énoncées ci-après et
of Canada in Parliament assembled have que le Sénat et la Chambre des communes 10
submitted an address to Her Majesty 10 du Canada réunis en Parlement ont prerequesting
that Her Majesty may graciously senté une adresse demandant à Sa Très
be pleased to cause a Bill to be laid before Gracieuse Majesté de bien vouloir faire
the Parliament of the United Kingdom for déposer devant le Parlement du Royaumethat
purpose. Uni un projet de loi à cette fin, 1 5
Be it therefore enacted by the Queen’s 15 sur l’avis et du consentement des Lords spiri-
Most Excellent Majesty, by and with the tuels et temporels et des Communes réunis
advice and consent of the Lords Spiritual en Parlement, et par l’autorité de celui-ci,
and Temporal, and Commons, in this present édicte:
Parliament assembled, and by the authority
of the same, as follows: 20
Constitution 1. The Constitution Act, 1981 set out in
Act, 1981 ti c st nce o
enacted Schedule B to this Act is hereby enacted for
and shall have the force of law in Canada
and shall come into force as provided in that
Act.
Termination of
power to
legislate for
Canada
2. No Act of the Parliament of the United
Kingdom passed after the Constitution Act,
1981 comes into force shall extend to
Canada as part of its law.
French version 3. So far as it is not contained in Schedule 3C
B, the French version of this Act is set out in
Schedule A to this Act and has the same
authority in Canada as the English version
thereof.
Short title
1. La Loi constitutionnelle de 1981, énon- 20 Adoption de la
cée à l’annexe B, est édictée pour le Canada ,oi
et y a force de loi. Elle entre en vigueur /98/
conformément à ses dispositions.
2. Les lois adoptées par le Parlement du cessation du
puor de Royaume-Uni après l’entrée en vigueur de la 25 lé°ér pour e
Loi constitutionnelle de 1981 ne font pas Canada
partie du droit du Canada.
3. La partie de la version française de la version
présente loi qui figure à l’annexe A a force françaie
de loi au Canada au même titre que la 30
version anglaise correspondante.
4. This Act may be cited as the Canada 35 4. Titre abrégé de la présente loi : Loi sur Titre abrégé
Ct. le Canada.
13084 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13085
SCHEDULEB
CONSTITUTION ACT, 1981
PART I
CANADIAN CHARTER OF RIGHTS AND
FREEDOMS
Whereas Canada is founded upon principles
that recognize the supremacy of God
and the rule of law:
Guarantee of Rights and Freedoms
Rights and 1. The Canadian Charter of Rights and
Canada I’ Freedoms guarantees the rights and freedoms
set out in it subject only to such
reasonable limits prescribed by law as can be
demonstrably justified in a free and democratic
society.
Fundamental Freedoms
La Constitution
ANNEXEB
LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1981
PARTIE I
CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET
LIBERTES
Attendu que le Canada est fondé sur des
principes qui reconnaissent la suprématie de
Dieu et la primauté du droit :
Garantie des droits et libertés
1. La Charte canadienne des droits et Droits et 5liberté% au 5 libertés garantit les droits et libertés qui y 5’Canada
sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints
que par une règle de droit, dans des limites
qui soient raisonnables et dont la justification
puisse se démontrer dans le cadre d’une
société libre et démocratique. 10
Libertés fondamentales
Fundamental 2. Everyone has the following fundamen- 10 2. Chacun a les libertés fondamentales Libertés
freedoms tal freedoms: suivantes :
(a) freedom of conscience and religion; a) liberté de conscience et de religion;
(b) freedom of thought, belief, opinion b) liberté de pensée, de croyance, d’opiand
expression, including freedom of the nion et d’expression, y compris la liberté 15
press and other media of communication; 15 de la presse et des autres moyens de
(c) freedom of neacefu1 assemblv and communication;
(d) freedom of association.
Democratic Rights
c) liberté de réunion pacifique;
d) liberté d’association.
Droits démocratiques
Democratic 3. Every citizen of Canada has the right to 3. Tout citoyen canadien a le droit de vote 20 Droits
rights of r ebr lcin ‘é démocratiques
citizens vote in an election of members of the House et est éligible aux élections législatives fédé- de » citoyens
of Commons or of a legislative assembly and 20 rales ou provinciales.
to be qualified for membership therein.
Maximum
duration of
legisiative
bodies
4. (1) No House of Commons and no 4. (1) Le mandat maximal de la Chambre Mandat
maximal des
legislative assembly shall continue for longer des communes et des assemblées législatives assemblées
than five years from the date fixed for the est de cinq ans à compter de la date fixée 25
return of the writs at a general election of its 25 pour le retour des brefs relatifs aux élections
members. générales correspondantes.
Continuation in (2) In time of real or apprehended war, (2) Le mandat de la Chambre des commu- Prolongations
cstances invasion or insurrection, a House of Com- nes ou celui d’une assemblée législative peut speciales
mons may be continued by Parliament and a être prolongé respectivement par le Parle- 30
legislative assembly may be continued by the 30 ment ou par la législature en question aulegislature
beyond five years if such con- delà de cinq ans en cas de guerre, d’invasion
tinuation is not opposed by the votes of more ou d’insurrection, réelles ou appréhendées,
than one-third of the members of the House pourvu que cette prolongation ne fasse pas
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13085
fondamentales
13086 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Consiltuuion
of Commons or the legislative assembly, as
the case may be.
Annual sitting 5. There shall be a sitting of Parliament
of legislative
bodies and of each legislature at least once every
twelve months.
Mobility Rights
Mobility of 6. (l) Every citizen of Canada has the
citizens right to enter, remain in and leave Canada.
Rights to move (2) Every citizen of Canada and every
and gain
livelihood person who has the status of a permanent
resident of Canada has the right
(a) to move to and take up residence in
any province; and
Limitation
l’objet d’une opposition exprimée par les voix
de plus du tiers des députés de la Chambre
des communes ou de l’assemblée législative.
5. Le Parlement et les législatures tiennent
une séance au moins une fois tous les
5 douze mois.
Liberté de circulation et d’établissement
6. (1) Tout citoyen canadien a le droit de
demeurer au Canada, d’y entrer ou d’en
sortir.
Séance annuelle
5
Liberté de
circulation
(2) Tout citoyen canadien et toute per- 10 Liberté
sonne ayant le statut de résident permanent d’établissement
10 au Canada ont le droit :
a) de se déplacer dans tout le pays et
d’établir leur résidence dans toute pro-
(b) to pursue the gaining of a livelihood in vince; 15
any province. b) de gagner leur vie dans toute province.
(3) The rights specified in subsection (2) 15 (3) Les droits mentionnés au paragraphe Restriction
are subject to (2) sont subordonnés:
(a) any laws or practices of general
application in force in a province other
than those that discriminate among persons
primarily on the basis of province of20
present or previous residence; and
(b) any laws providing for reasonable residency
requirements as a qualification for
the receipt of publicly provided social
services. 25
a) aux lois et usages d’application générale
en vigueur dans une province donnée, 20
s’ils n’établissent entre les personnes
aucune distinction fondée principalement
sur la province de résidence antérieure ou
actuelle;
b) aux lois prévoyant de justes conditions 25
de résidence en vue de l’obtention des services
sociaux publics.
Affirmative (4) Subsections (2) and (3) do not pre- (4) Les paragraphes (2) et (3) n’ont pas Programmes de
action ~ t .ojt4 ~promotion
programs clude any law, program or activity that has pour objet d’interdire les lois, programmes ou sociale
as its object the amelioration in a province of activités destinés à améliorer, dans une pro- 30
conditions of individuals in that province who vince, la situation d’individus défavorisés
are socially or economically disadvantaged if 30socialement ou économiquement, si le taux
the rate of employment in that province is d’emploi dans la province est inférieur à la
below the rate of employment in Canada. moyenne nationale.
Legal Rights Garanties juridiques
Life, liberty 7. Everyone has the right to life, liberty 7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à 35 vie. libertéet
and securîty of sécurité
person and security of the person and the right not la sécurité de sa personne; il ne peut être
to be deprived thereof except in accordance 35 porté atteinte à ce droit qu’en conformité
with the principles of fundamental justice. avec les principes de justice fondamentale.
Search or 8. Everyone has the right to be secure seizure against unreasonable search or seizure.
8. Chacun a droit à la protection contre Fouilles.
les fouilles, les perquisitions ou les saisies 40 pertsn ou
abusives.
Detention or 9. Everyone has the right not to be arbi- 9. Chacun a droit à la protection contre la
iniprisonment trarily detained or imprisoned. 40 détention ou l’emprisonnement arbitraires.
Détention ou
« pri »sonne
mient
13086 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
2novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 38
Arrest or 10. Everyone has the right on arrest or
detention detention
(a) to be informed promptly of the reasons
therefor;
(b) to retain and instruct counsel without
delay and to be informed of that right; and
(c) to have the validity of the detention
determined by way of habeas corpus and
to be released if the detention is not
lawful.
Proceedings in 11. Any person charged with an offence
criminal and
penal matters has the right
(a) to be informed without unreasonable
delay of the specific offence;
(b) to be tried within a reasonable time;
(c) not to be compelled to be a witness in
proceedings against that person in respect
of the offence;
(d) to be presumed innocent until proven
guilty according to law in a fair and public
hearing by an independent and impartial
tribunal;
(e) not to be denied reasonable bail without
just cause;
(f) except in the case of an offence under
military law tried before a military tribunal,
to the benefit of trial by jury where
the maximum punishment for the offence
is imprisonment for five years or a more
severe punishment;
(g) not to be found guilty on account of
any act or omission unless, at the time of
the act or omission, it constituted an
offence under Canadian or international
law or was criminal according to the general
principles of law recognized by the
community of nations;
(h) if finally acquitted of the offence, not
to be tried for it again and, if finally found
guilty and punished for the offence, not to
be tried or punished for it again; and
(i) if found guilty of the offence and if the
punishment for the offence has been varied
between the time of commission and the
time of sentencing, to the benefit of the
lesser punishment.
La Constitution
10. Chacun a le droit, en cas d’arrestation Arrestation ou
ou de détention : detenion
a) d’être informé dans les plus brefs délais
des motifs de son arrestation ou de sa
5 détention; 5
b) d’avoir recours sans délai à l’assistance
d’un avocat et d’être informé de ce droit;
c) de faire contrôler, par habeas corpus,
la légalité de sa détention et d’obtenir, le
10 cas échéant, sa libération. 10
11. Tout inculpé a le droit: Affaires
criminelles et
a) d’être informé sans délai anormal de pénales
l’infraction précise qu’on lui reproche;
b) d’être jugé dans un délai raisonnable;
15 c) de ne pas être contraint de témoigner 15
contre lui-même dans toute poursuite
intentée contre lui pour l’infraction qu’on
lui reproche;
d) d’être présumé innocent tant qu’il n’est
20 pas déclaré coupable, conformément à la 20
loi, par un tribunal indépendant et impartial
à l’issue d’un procès public et
équitable;
e) de ne pas être privé sans juste cause
25 d’une mise en liberté assortie d’un caution- 25
nement raisonnable;
j) sauf s’il s’agit d’une infraction relevant
de la justice militaire, de bénéficier d’un
procès avec jury lorsque la peine maximale
30 prévue pour l’infraction dont il est accusé 30
* est un emprisonnement de cinq ans ou une
* peine plus grave;
g) de ne pas être déclaré coupable en
raison d’une action ou d’une omission qui,
35 au moment où elle est survenue, ne consti- 35
tuait pas une infraction d’après le droit
interne du Canada ou le droit international
et n’avait pas de caractère criminel d’après
les principes généraux de droit reconnus
40 par l’ensemble des nations; 40
h) d’une part de ne pas être jugé de nouveau
pour une infraction dont il a été
définitivement acquitté, d’autre part de ne
pas être jugé ni puni de nouveau pour une
45 infraction dont il a été définitivement 45
déclaré coupable et puni;
i) de bénéficier de la peine la moins
sévère, lorsque la peine qui sanctionne l’infraction
dont il est déclaré coupable est
13087
23 novembre
1981
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
Treatment or 12. Everyone has the right not to be subpunishment
jected to any cruel and unusual treatment or
punishment.
Self-crimina- 13. A witness who testifies in any proceed-
°ion ings has the right not to have any incriminating
evidence so given used to incriminate
that witness in any other proceedings, except
in a prosecution for perjury or for the giving
of contradictory evidence.
Interpreter
modifiée entre le moment de la perpétration
de l’infraction et celui de la sentence.
12. Chacun a droit à la protection contre
tous traitements ou peines cruels et inusités.
Cruauté
13. Chacun a droit à ce qu’aucun témoi- 5 Témoignage
5 gnage incriminant qu’il donne ne soit utilisé incriminant
pour l’incriminer dans d’autres procédures,
sauf lors de poursuites pour parjure ou pour
témoignages contradictoires.
14. A party or witness in any proceedings 10 14. La partie ou le témoin qui ne peuvent 10 Interprète
who does not understand or speak the lan- suivre les procédures, soit parce qu’ils ne
guage in which the proceedings are conduct- comprennent pas ou ne parlent pas la langue
ed or who is deaf has the right to the assist- employée, soit parce qu’ils sont atteints de
ance of an interpreter. surdité, ont droit à l’assistance d’un interprète.
15
Equality Rights Droits à l’égalité
15. (1) Every individual is equal before 15 15. (1) La loi ne fait acception de per- Egalité devant
and under the law and has the right to the sonne et s’applique également à tous, et la loi. égalité de tous °ééfcee
equal protection and equal benefit of the law ont droit à la même protection et au même protection égale
without discrimination and, in particular, bénéfice de la loi, indépendamment de toute d’ l loi
without discrimination based on race, nation- discrimination, notamment des discrimina- 20
al or ethnic origin, colour, religion, sex, age 20 tions fondées sur la race, l’origine nationale
or mental or physical disability. ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe,
l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.
Affirmative (2) Subsection (1) does not preclude any
programs law, program or activity that has as its object
the amelioration of conditions of disadvantaged
individuals or groups including those 25
that are disadvantaged because of race, national
or ethnic origin, colour, religion, sex,
age or mental or physical disability.
Official Languages of Canada
official 16. (1) English and French are the official
laniguages of
Canada languages of Canada and have equality of 30
status and equal rights and privileges as to
their use in all institutions of the Parliament
and government of Canada.
(2) Le paragraphe (1) n’a pas pour effet 25 Programmes de
d’interdire les lois, programmes ou activités prc° »°c
destinés à améliorer la situation d’individus
ou de groupes défavorisés, notamment du fait
de leur race, de leur origine nationale ou
ethnique, de leur couleur, de leur religion, de 30
leur sexe, de leur âge ou de leurs déficiences
mentales ou physiques.
Langues officielles du Canada
16. (1) Le français et l’anglais sont les Langues
officielles du langues officielles du Canada; ils ont un Canada
statut et des droits et privilèges égaux quant 35
à leur usage dans les institutions du Parlement
et du gouvernement du Canada.
Official (2) English and French are the official (2) Le français et l’anglais sont les langues Langues languages of offi.clles du
New Brunswick languages of New Brunswick and have 35 officielles du Nouveau-Brunswick; ils ont un Nouveuequality
of status and equal rights and privi- statut et des droits et privilèges égaux quant 40 Brunswick
leges as to their use in all institutions of the à leur usage dans les institutions de la Légis-
Equality before
and under law
and equal
protection and
benefit of law
13088 23 novemibre 1981
La Constitution
legislature and government of New Bruns- lature et du gouvernement du Nouveauwick.
Brunswick.
Advancement (3) Nothing in this Charter limits the
status a authority of Parliament or a legislature to
advance the equality of status or use of English
and French.
Proceedings of 17. (1) Everyone has the right to use Eng-
Parliament lish or French in any debates and other
proceedings of Parliament.
Proceedings of (2) Everyone has the right to use English 10
New Brunswick
legislature or French in any debates and other proceedings
of the legislature of New Brunswick.
Parliamentary 18. (1) The statutes, records and journals
statuteS and
records of Parliament shall be printed and published
in English and French and both language 15
versions are equally authoritative.
(3) La présente charte ne limite pas le Progression vers
pouvoir du Parlement et des législatures de gate
5 favoriser la progression vers l’égalité de 5
statut ou d’usage du français et de l’anglais.
17. (1) Chacun a le droit d’employer le
français ou l’anglais dans les débats et travaux
du Parlement.
Travaux du
Parlement
(2) Chacun a le droit d’employer le fran- 10 Travaux de la
çais ou l’anglais dans les débats et travaux de Légslature du
la Législature du Nouveau-Brunswick. Brunswick
18. (1) Les lois, les archives, les comptes
rendus et les procès-verbaux du Parlement
sont imprimés et publiés en français et en 15
anglais, les deux versions des lois ayant également
force de loi et celles des autres documents
ayant même valeur.
Documents
parlementaires
New Brunswick (2) The statutes, records and journals of (2) Les lois, les archives, les comptes Documents de
statutes and l éiltr
records the legislature of New Brunswick shall be rendus et les procès-verbaux de la Législa- 20fdeulata.
printed and published in English and French ture du Nouveau-Brunswick sont imprimés Brunswick
and both language versions are equally 20et publiés en français et en anglais, les deux
authoritative. versions des lois ayant également force de loi
et celles des autres documents ayant même
valeur. 25
Proceedings in
courts
established by
Parliament
19. (1) Either English or French may be
used by any person in, or in any pleading in
or process issuing from, any court established
by Parliament.
Proceedings in (2) Either English or French may be used
New Brunswick
courts by any person in, or in any pleading in or
process issuing from, any court of New
Brunswick.
Communications
by public
with federal
institutions
19. (1) Chacun a le droit d’employer le Procédures
devant les
français ou l’anglais dans toutes les affaires tribunaux
dont sont saisis les tribunaux établis par le établis par le
25 Parlement et dans tous les actes de procédure Parlement
qui en découlent. 30
(2) Chacun a le droit d’employer le fran- Procédures
devant les
çais ou l’anglais dans toutes les affaires dont tribunaux du
sont saisis les tribunaux du Nouveau-Bruns- Nouveauwick
et dans tous les actes de procédure qui Brunswick
en découlent. 35
20. (1) Any member of the public in 30 20. (1) Le public a, au Canada, droit à Communica-
Canada has the right to communicate with, l’emploi du français ou de l’anglais pour adinistreest
and to receive available services from, any communiquer avec le siège ou l’administra- les institutions
head or central office of an institution of the tion centrale des institutions du Parlement ou fédérales
Parliament or government of Canada in Eng- du gouvernement du Canada ou pour en 40
lish or French, and has the same right with 35 recevoir les services; il a le même droit à
respect to any other office of any such insti- l’égard de tout autre bureau de ces institutution
where tions là où, selon le cas :
(a) there is a significant demand for com- a) l’emploi du français ou de l’anglais fait
munications with and services from that l’objet d’une demande importante; 45
office in such language; or 40 b) l’emploi du français et de l’anglais se
justifie par la vocation du bureau.
23 novembre 1981l DÉBATS DES COMMUNES 13 089
La Contiiiuion
(b) due to the nature of the office, it is
reasonable that communications with and
services from that office be available in
both English and French.
(2) Any member of the public in New 5
Brunswick has the right to communicate
with, and to receive available services from,
any office of an institution of the legislature
or government of New Brunswick in English
or French. 10
(2) Le public a, au Nouveau-Brunswick,
droit à l’emploi du français ou de l’anglais
pour communiquer avec tout bureau des institutions
de la législature ou du gouvernement
ou pour en recevoir les services. 5
Communications
by public
with New
Brunswick
institutions
Continuation of
existing
const itutional
provisions
Rights and
privilcges
preservcd
Communica.
ions entre les
administrés et
les institutions
du Nouveau-
Brunswick
Maintien en
vigueur de
certaines
dispositions
Droits préservés
Minority Language Educational Rights
Language of 23. (1) Citizens of Canada
instruction
(a) whose first language learned and still
understood is that of the English or French 25
linguistic minority population of the province
in which they reside, or
(b) who have received their primary
school instruction in Canada in English or
French and reside in a province where the 30
language in which they received that
instruction is the language of the English
or French linguistic minority population of
Droits à l’instruction dans la langue de la
minorité
23. (1) Les citoyens canadiens: Langue
d’instruction
a) dont la première langue apprise et 20
encore comprise est celle de la minorité
francophone ou anglophone de la province
où ils résident,
b) qui ont reçu leur instruction, au niveau
primaire, en français ou en anglais au 25
Canada et qui résident dans une province
où la langue dans laquelle ils ont reçu cette
instruction est celle de la minorité francophone
ou anglophone de la province,
the province, ont, dans l’un ou l’autre cas, le droit d’y faire 30
have the right to have their children receive 35 instruire leurs enfants, aux niveaux primaire
primary and secondary school instruction in et secondaire, dans cette langue.
that language in that province.
Continuity of (2) Citizens of Canada of whom any child (2) Les citoyens canadiens dont un enfant Continuite
la nguage asd’emploi de la
instruction has received or is receiving primary or a reçu ou reçoit son instruction, au niveau eanguc
secondary school instruction in English or40primaire ou secondaire, en français ou en35dînstruction
French in Canada, have the right to have all anglais au Canada ont le droit de faire instheir
children receive primary and secondary truire tous leurs enfants, aux niveaux prischool
instruction in the same language. maire et secondaire, dans la langue de cette
instruction.
21. Nothing in sections 16 to 20 abrogates 21. Les articles 16 à 20 n’ont pas pour
or derogates from any right, privilege or effet, en ce qui a trait à la langue française
obligation with respect to the English and ou anglaise ou à ces deux langues, de porter
French languages, or either of them, that atteinte aux droits, privilèges ou obligations
exists or is continued by virtue of any other 15 qui existent ou sont maintenus aux termes 10
provision of the Constitution of Canada. d’une autre disposition de la Constitution du
Canada.
22. Nothing in sections 16 to 20 abrogates 22. Les articles 16 à 20 n’ont pas pour
or derogates from any legal or customary effet de porter atteinte aux droits et privilèright
or privilege acquired or enjoyed either ges, antérieurs ou postérieurs à l’entrée en 15
before or after the coming into force of this 20 vigueur de la présente charte et découlant de
Charter with respect to any language that is la loi ou de la coutume, des langues autres
not English or French. que le français ou l’anglais.
13090 DÉ13ATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
Application (3) The right of citizens of Canada under
where numbers
warrant subsections (1) and (2) to have their children
receive primary and secondary school
instruction in the language of the English or
French linguistic minority population of a
province
(a) applies wherever in the province the
number of children of citizens who have
such a right is sufficient to warrant the
provision to them out of public funds of 1
minority language instruction; and
(b) includes, where the number of those
children so warrants, the right to have
them receive that instruction in minority
language educational facilities provided 1
out of public funds.
Enforcement
Enforcement of
guaranteed
rights and
frecdoms
Exclusion of
evidence
bringing
administration
of »justice into
disrepute
(3) Le droit reconnu aux citoyens cana- Justification
diens par les paragraphes (l) et (2) de faire par le nombre
instruire leurs enfants, aux niveaux primaire
et secondaire, dans la langue de la minorité
5 francophone ou anglophone d’une province : 5
a) s’exerce partout dans la province où le
nombre des enfants des citoyens qui ont ce
droit est suffisant pour justifier à leur
endroit la prestation, sur les fonds publics,
0 de l’instruction dans la langue de la 10
minorité;
b) comprend, lorsque le nombre de ces
enfants le justifie, le droit de les faire
instruire dans des établissements d’ensei-
5 gnement de la minorité linguistique finan- 15
cés sur les fonds publics.
Recours
24. (1) Anyone whose rights or freedoms, 24. (1) Toute personne, victime de viola- Recours en cas
d’atteinte aux
as guaranteed by this Charter, have been tion ou de négation des droits ou libertés qui droits et libertés
infringed or denied may apply to a court of lui sont garantis par la présente charte, peut
competent jurisdiction to obtain such remedy 20 s’adresser à un tribunal compétent pour obte- 20
as the court considers appropriate and just in nir la réparation que le tribunal estime conthe
circumstances. venable et juste eu égard aux circonstances.
(2) Where, in proceedings under subsec- (2) Lorsque, dans une instance visée au Irrecevabilité
d’éléments de
tion (1), a court concludes that evidence was paragraphe (1), le tribunal a conclu que des preuve qui
obtained in a manner that infringed or 25 éléments de preuve ont été obtenus dans des 25 risqueraient de
denied any rights or freedoms guaranteed by conditions qui portent atteinte aux droits ou l’administration
this Charter, the evidence shall be excluded libertés garantis par la présente charte, ces de la justice
if it is established that, having regard to all éléments de preuve sont écartés s’il est établi,
the circumstances, the admission of it in the eu égard aux circonstances, que leur utilisaproceedings
would bring the administration 30 tion est susceptible de déconsidérer l’admi- 30
of justice into disrepute. nistration de la justice.
General
Aboriginal
rights and
freedoms not
affected by
Charter
Other rights
and freedoms
not affected by
Charter
Dispositions générales
25. The guarantee in this Charter of cer- 25. Le fait que la présente charte garantit Maintien des
tain rights and freedoms shall not be con- certains droits et libertés ne porte pas dros utorhtes
strued so as to abrogate or derogate from any atteinte aux droits ou libertés – ancestraux,
aboriginal, treaty or other rights or freedoms 35 issus de traités ou autres – des peuples 35
that pertain to the aboriginal peoples of autochtones du Canada, notamment :
Canada including a) aux droits ou libertés reconnus par la
(a) any rights or freedoms that have been Proclamation royale du 7 octobre 1763;
recognized by the Royal Proclamation of b) aux droits ou libertés acquis par règle-
October 7, 1763; and 40 ment de revendications territoriales. 40
(b) any rights or freedoms that may be
acquired by the aboriginal peoples of
Canada by way of land claims settlement.
26. The guarantee in this Charter of cer- 26. Le fait que la présente charte garantit Maintien des
tain rights and freedoms shall not be con- 45 certains droits et libertés ne constitue pas autes drots et
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13 091
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
strued as denying the existence of any other
rights or freedoms that exist in Canada.
une négation des autres droits ou libertés qui
existent au Canada.
Mullicultural 27. This Charter shall be interpreted in a 27. Toute interprétation de la présente Maintien du
heritage manner consistent with the preservation and charte doit concorder avec l’objectif de pro- pautur »m »n
enhancement of the multicultural heritage of 5 mouvoir le maintien et la valorisation du 5
Canadians. patrimoine multiculturel des Canadiens.
28. Notwithstanding anything in this
Charter except section 33, the rights and
freedoms referred to in it are guaranteed
equally to male and female persons.
29. Nothing in this Charter abrogates or
derogates from any rights or privileges guaranteed
by or under the Constitution of
Canada in respect of denominational, separate
or dissentient schools.
28. Indépendamment des autres disposi- Egalitéde
tions de la présente charte, exception faite de rcto ds
l’article 33, les droits et libertés qui y sont deux sexes
l0mentionnés sont garantis également aux per- 10
sonnes des deux sexes.
29. Les dispositions de la présente charte Maintien des
ne portent pas atteinte aux droits ou privilè- certines cles
ges garantis en vertu de la Constitution du
Canada concernant les écoles séparées et 15
1 5 autres écoles confessionnelles.
30. A reference in this Charter to a prov- 30. Dans la présente charte, les disposi- Application aux
ince or to the legislative assembly or legisla- tions qui visent les provinces, leur législature tcrioies
ture of a province shall be deemed to include ou leur assemblée législative visent égalea
reference to the Yukon Territory and the ment le territoire du Yukon, les territoires du 20
Northwest Territories, or to the appropriate 20 Nord-Ouest ou leurs autorités législatives
legislative authority thereof, as the case may compétentes.
be.
31. Nothing in this Charter extends the
legislative powers of any body or authority.
Application of Charter
32. (1) This Charter applies 25
(a) to the Parliament and government of
Canada in respect of all matters within the
authority of Parliament including all matters
relating to the Yukon Territory and
Northwest Territories; and 30
(b) to the legislature and government of
each province in respect of all matters
within the authority of the legislature of
each province.
(2) Notwithstanding subsection (1), sec- 35
tion 15 shall not have effect until three years
after this section comes into force.
31. La présente charte n’élargit pas les Non-elargissecompétences
législatives de quelque orga- compéteces
nisme ou autorité que ce soit. 25 législatives
Application de la charte
32. (1) La présente charte s’applique:
a) au Parlement et au gouvernement du
Canada, pour tous les domaines relevant
du Parlement, y compris ceux qui concernent
le territoire du Yukon et les territoi- 30
res du Nord-Ouest;
b) à la législature et au gouvernement de
chaque province, pour tous les domaines
relevant de cette législature.
^pplication de
a charte
(2) Par dérogation au paragraphe (l), l’ar- 35 Restriction
ticle 15 n’a d’effet que trois ans après l’entrée
en vigueur du présent article.
Exception 33. (1) Parliament or the legislature of a 33. (1) Le Parlement ou la législature Dérogation par
where express declaration
declaration province may expressly declare in an Act of d’une province peut adopter une loi où il est expresse
Parliament or of the legislature, as the case 40 expressément déclaré que celle-ci ou une de 40
may be, that the Act or a provision thereof ses dispositions a effet indépendamment
shal operate notwithstanding a provision d’une disposition donnée de l’article 2 ou des
included in section 2 or sections 7 to 15 of articles 7 à 15 de la présente charte, ou de
Rights
guaranteed
equally both
sexes
Rights
respecting
certain sehools
preserved
Application to
territories and
territorial
authorities
Legislative
powers not
extended
Application of
Charter
Exception
13092 23 novembre 1981
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13093
this Charter, or section 28 of this Charter in
its application to discrimination based on sex
referred to in section 15.
Operation of (2) An Act or a provision of an Act in
exception respect of which a declaration made under
this section is in effect shall have such operation
as it would have but for the provision of
this Charter referred to in the declaration.
La Constitution
l’article 28 de cette charte dans son application
à la discrimination fondée sur le sexe et
mentionnée à l’article 15.
(2) La loi ou la disposition qui fait l’objet
5 d’une déclaration conforme au présent article 5
et en vigueur a l’effet qu’elle aurait sauf la
disposition en cause de la charte.
Five year (3) A declaration made under subsection (3) La déclaration visée au paragraphe (1)
limitation (1) shall cease to have effect five years after 10 cesse d’avoir effet à la date qui y est précisée
it comes into force or on such earlier date as ou, au plus tard, cinq ans après son entrée en 10
may be specified in the declaration. vigueur.
Re-enactment (4) Parliament or a legislature of a province
may re-enact a declaration made under
subsection (1).
Five year (5) Subsection (3) applies in respect of a
limitation re-enactment made under subsection (4).
Citation
Citation 34. This Part may be cited as the Canadian
Charter of Rights and Freedoms.
PART Il
(4) Le Parlement ou une législature peut Nouvelle
adopter de nouveau une déclaration visée au adoption
15 paragraphe (1).
(5) Le paragraphe (3) s’applique à toute 15 Durée de
déclaration adoptée sous le régime du para- validite
graphe (4).
Titre
34. Titre de la présente partie : Charte Titre
canadienne des droits et libertés.
PARTIE Il
EQUALIZATION AND REGIONAL DISPARITIES PÉRÉQUATION ET INÉGALITÉS RÉGIONALES
Commitment to 35. (1) Without altering the legislative 20
promote equal
opportunities authority of Parliament or of the provincial
legislatures, or the rights of any of them with
respect to the exercise of their legislative
authority, Parliament and the legislatures,
together with the government of Canada and 25
the provincial governments, are committed to
(a) promoting equal opportunities for the
well-being of Canadians;
(b) furthering economic development to
reduce disparity in opportunities; and 30
(c) providing essential public services of
reasonable quality to all Canadians.
Commitment (2) Parliament and the government of
respectng Cadar
public services Canada are committed to the principle of
making equalization payments to ensure that 35
provincial governments have sufficient revenues
to provide reasonably comparable levels
of public services at reasonably comparable
levels of taxation.
35. (1) Sous réserve des compétences 20 Engagements
législatives du Parlement et des législatures relatifs a légisativs es’égalité des
et de leur droit de les exercer, le Parlement chances
et les législatures, ainsi que les gouvernements
fédéral et provinciaux, s’engagent à :
a) promouvoir l’égalité des chances de 25
tous les Canadiens dans la recherche de
leur bien-être;
b) favoriser le développement économique
pour réduire l’inégalité des chances;
c) fournir à tous les Canadiens, à un 30
niveau de qualité acceptable, les services
publics essentiels.
(2) Le Parlement et le gouvernement du Engagement
relatif aux Canada prennent l’engagement de principe services publics
de faire des paiements de péréquation pro- 35
pres à donner aux gouvernements provinciaux
des revenus suffisants pour les mettre
en mesure d’assurer les services publics à un
niveau de qualité et de fiscalité sensiblement
comparables. 40
Effet de la
dérogation
Durée de
validité
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13093
DÉBATS DES COMMUNES
La Constituiion
PART lIl PARTIE III
CONSTITUTIONAL CON FERENCE
Constitutional 36. (1) A constitutional conference comconference
posed of the Prime Minister of Canada and
the first ministers of the provinces shall be
convened by the Prime Minister of Canada
within one year after this Part comes into
force.
CONFÉRENCE CONSTITUTIONNELLE
36. (1) Dans l’année suivant l’entrée en
vigueur de la présente partie, le premier
ministre du Canada convoque une conférence
constitutionnelle réunissant les premiers
5 ministres provinciaux et lui-même.
Participation of (2) The conference convened under sub- (2) Sont placées à l’ordre du jour de la Participation
aboriginal i *- ~sa des peuples
peoples section (1) shall have included in its agenda conférence visée au paragraphe (1) les ques- autochtones
an item respecting constitutional matters tions constitutionnelles qui intéressent directhat
directly affect the aboriginal peoples of 10tement les peuples autochtones du Canada,
Canada, including the identification and notamment la détermination et la définition 10
definition of the rights of those peoples to be des droits de ces peuples à inscrire dans la
included in the Constitution of Canada, and Constitution du Canada. Le premier ministre
the Prime Minister of Canada shall invite du Canada invite leurs représentants à partirepresentatives
of those peoples to participate 15 ciper aux travaux relatifs à ces questions.
in the discussions on that item.
Participation of (3) The Prime Minister of Canada shall (3) Le premier ministre du Canada invite 15 Participation
territories invite elected representatives of the govern- des représentants élus des gouvernements du des territoires
ments of the Yukon Territory and the North- territoire du Yukon et des territoires du
west Territories to participate in the discus- 20 Nord-Ouest à participer aux travaux relatifs
sions on any item on the agenda of the à toute question placée à l’ordre du jour de la
conference convened under subsection (1) conférence visée au paragraphe (1) et qui, 20
that, in the opinion of the Prime Minister, selon lui, intéresse directement le territoire
directly affects the Yukon Territory and the du Yukon et les territoires du Nord-Ouest.
Northwest Territories. 25
PART IV PARTIE IV
PROCEDURE FOR AMENDING
CONSTITUT[ON OF CANADA
37. (l) An amendment to the Constitution
of Canada may be made by proclamation
issued by the Governor General under the
Great Seal of Canada where so authorized
by 30
(a) resolutions of the Senate and House of
Commons; and
(b) resolutions of the legislative assemblies
of at least two-thirds of the provinces
that have, in the aggregate, according to 35
the then latest general census, at least fifty
per cent of the population of all the
provinces.
Majority of (2) An amendment made under subsection
members (1) that derogates from the legislative 40
powers, the proprietary rights or any other
rights or privileges of the legislature or gov-
PROCÉDURE DE MODIFICATION DE LA
CONSTITUTION DU CANADA
37. (1) La Constitution du Canada peut Procédure
être modifiée par proclamation du gouver- modification
neur général sous le grand sceau du Canada, 25
autorisée à la fois :
a) par des résolutions du Sénat et de la
Chambre des communes;
b) par des résolutions des assemblées
législatives d’au moins deux tiers des pro- 30
vinces dont la population confondue représente,
selon le recensement général le plus
récent à l’époque, au moins cinquante pour
cent de la population de toutes les
provinces. 35
(2) Une modification faite conformément Majorité siniple
au paragraphe (1) mais dérogatoire à la
compétence législative, aux droits de propriété
ou à tous autres droits ou privilèges
Conférence
contitution
nelle
5
General
procedure
for
amnending
Constitution of
Canada
13094 23 novembre 1981
La Constitution
ernment of a province shall require a resolu- d’une législature ou d’un gouvernement protion
supported by a majority of the members vincial exige une résolution adoptée à la
of each of the Senate, the House of Com- majorité des sénateurs, des députés fédéraux
mons and the legislative assemblies required et des députés de chacune des assemblées
under subsection (1). 5 législatives du nombre requis de provinces. 5
Expression of (3) An amendment referred to in subsec- (3) La modification visée au paragraphe Désaccord
dissent tion (2) shall not have effect in a province (2) est sans effet dans une province dont
the legislative assembly of which has l’assemblée législative a, avant la prise de la
expressed its dissent thereto by resolution proclamation, exprimé son désaccord par une
supported by a majority of its members prior 10résolution adoptée à la majorité des députés, 10
to the issue of the proclamation to which the sauf si cette assemblée, par résolution égaleamendment
relates unless that legislative ment adoptée à la majorité, revient sur son
assembly, subsequently, by resolution sup- désaccord et autorise la modification.
ported by a majority of its members, revokes
its dissent and authorizes the amendment. 15
Revocation of (4) A resolution of dissent made for the (4) La résolution de désaccord visée au Levée du purposes of subsection (3) may be revoked at paragraphe (3) peut être révoquée à tout 1 désaccord
any time before or after the issue of the moment, indépendamment de la date de la
proclamation to whîch it relates. proclamation à laquelle elle se rapporte.
Restriction on 38. (1) A proclamation shal1 not be issued 20 38. (1) La proclamation visée au paragra- Restriction
proclamation under subsection 37(l) before the expiration phe 37(l) ne peut être prise dans l’année
of one year from the adoption of the resolu- suivant l’adoption de la résolution à l’origine 20
tion initiating the amendment procedure de la procédure de modification que si l’asthereunder,
unless the legislative assembly of semblée législative de chaque province a
each province bas previously adopted a reso- 25 préalablement adopté une résolution d’agrélution
of assent or dissent, ment ou de désaccord.
Idem (2) A proclamation shall not be issued (2) La proclamation visée au paragraphe 25 Idem
under subsection 37(1) after the expiration 37() ne peut être prise que dans les trois ans
of three years from the adoption of the reso- suivant l’adoption de la résolution à l’origine
lution initiating the amendment procedure 30de la procédure de modification.
thereunder.
Compensation 39. Where an amendment is made under 39. Le Canada fournit une juste compen- Compensation
subsection 37(1) that transfers provincial sation aux provinces auxquelles ne s’applique 30
legislative powers relating to education or pas une modification faite conformément au
other cultural matters from provincial legis- 35 paragraphe 37(1) et relative, en matière
latures to Parliament, Canada sha l provide d’éducation ou dans d’autres domaines cultureasonable
compensation to any province to rels, à un transfert de compétences législatiwhich
the amendment does not apply. ves provinciales au Parlement. 35
Amendment by 40. An amendment to the Constitution of 40. Toute modification de la Constitution Consentement
unanimous unanime
consent Canada in relation to the following matters 40 du Canada portant sur les questions suivanmay
be made by proclamation issued by the tes se fait par proclamation du gouverneur
Governor General under the Great Seal of général sous le grand sceau du Canada, auto-
Canada only where authorized by resolutions risée par des résolutions du Sénat, de la 40
of the Senate and House of Commons and of Chambre des communes et de l’assemblée
the legislative assembly of each province: 45 législative de chaque province :
(a) the office of the Queen, the Governor a) la charge de Reine, celle de gouverneur
General and the Lieutenant Governor of a général et celle de lieutenant-gouverneur;
province;
23 novembre 1981 DÉ13ATS DES COMMUNES 13095
13096 DBT E O MNS2 oebe18
La Constitution
(b) the right of a province to a number of
members in the House of Commons not
less than the number of Senators by which
the province is entitled to be represented at
the time this Part comes into force; 5
(c) subject to section 42, the use of the
English or the French language;
(d) the composition of the Supreme Court
of Canada; and
(e) an amendment to this Part. 10
41. (1) An amendment to the Constitution
of Canada in relation to the following matters
may be made only in accordance with
subsection 37(1):
(a) the principle of proportionate 15
representation of the provinces in the
House of Commons prescribed by the
Constitution of Canada;
(b) the powers of the Senate and the
method of selecting Senators; 20
(c) the number of members by which a
province is entitled to be represented in the
Senate and the residence qualifications of
Senators;
(d) subject to paragraph 40(d), the 25
Supreme Court of Canada;
(e) the extension of existing provinces into
the territories; and
(f) notwithstanding any other law or practice,
the establishment of new provinces. 30
(2) Subsections 37(2) to (4) do not apply
in respect of amendments in relation to matters
referred to in subsection (1).
b) le droit d’une province d’avoir à la
Chambre des communes un nombre de
députés au moins égal à celui des sénateurs
par lesquels elle est habilitée à être représentée
lors de l’entrée en vigueur de la 5
présente partie;
c) sous réserve de l’article 42, l’usage du
français ou de l’anglais;
d) la composition de la Cour suprême du
Canada; 10
e) la modification de la présente partie.
41. (1) Toute modification de la Constitution
du Canada portant sur les questions
suivantes se fait conformément au paragraphe
37(1) :
Procdure
normale de
modification
a) le principe de la représentation proportionnelle
des provinces à la Chambre des
communes prévu par la Constitution du
Canada;
b) les pouvoirs du Sénat et le mode de 20
sélection des sénateurs;
c) le nombre des sénateurs par lesquels
une province est habilitée à être représentée
et les conditions de résidence qu’ils
doivent remplir; 25
d) sous réserve de l’alinéa 40d), la Cour
suprême du Canada;
e) le rattachement aux provinces existantes
de tout ou partie des territoires;
f) par dérogation à toute autre loi ou 30
usage, la création de provinces.
Amendment by
general
procédure
Exception
Amenedment of
provisions
relatîng to some
but net ail
provinces
Exception
42. An amendment to the Constitution of 42. Les dispositions de la Constitution du 35 Modification a
Canada in relation to any provision that 35 Canada applicables à certaines provinces certaines
applies to one or more, but not all, provinces, seulement ne peuvent être modifiées que par provinces
including proclamation du gouverneur général sous le
(a) any alteration to boundaries between grand sceau du Canada, autorisée par des
provinces, and résolutions du Sénat, de la Chambre des 40
(b) any amendment to any provision that 40 communes et de l’assemblée législative de
relates to the use of the English or the chaque province concernée. Le présent arti-
French language within a province, cle s’applique notamment :
may be made by proclamation issued by the a) aux changements du tracé des frontie-
Governor General under the Great Seal of res interprovinciales; 45
Canada only where so authorized by resolu- 45 b) aux modifications des dispositions relations
of the Senate and House of Commons tives à l’usage du français ou de l’anglais
dans une province.
(2) Les paragraphes 37(2) à (4) ne s’appliquent
pas aux questions mentionnées au
paragraphe (1).
DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 198 1
l 3096
23novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13097
and of the legislative assembly of each province
to which the amendment applies.
Amendments 43. Subject to sections 40 and 41, Parliaby
Parliament ment may exclusively make laws amending
the Constitution of Canada in relation to the
executive government of Canada or the
Senate and House of Commons.
Amendments 44. Subject to section 40, the legislature
provincial of each province may exclusively make laws
amending the constitution of the province.
La Constitution
43. Sous réserve des articles 40 et 41, le
Parlement a compétence exclusive pour
5 modifier les dispositions de la Constitution
du Canada relatives au pouvoir exécutif fédéral,
au Sénat ou à la Chambre des
communes.
44. Sous réserve de l’article 40, une législature
a compétence exclusive pour modifier
10 la constitution de sa province.
Initiation of 45. (1) The procedures for amendment 45. (1) L’initiative des procédures de amendment
procedures under sections 37, 40, 41 and 42 may be modification visées aux articles 37, 40, 41 et
initiated either by the Senate or the House of 42 appartient au Sénat, à la Chambre des
Commons or by the legislative assembly of a communes ou à une assemblée législative.
province. 15
Revocation of (2) A resolution of assent made for the
authorization purposes of this Part may be revoked at any
time before the issue of a proclamation
authorized by it.
(2) Une résolution d’agrément adoptée 15 Possibilité de
dans le cadre de la présente partie peut être révocation
révoquée à tout moment avant la date de la
proclamation qu’elle autorise.
Amendments 46. (1) An amendment to the Constitution 20 46. (1) Dans les cas visés à l’article 37, 40, Modification
reoutenate of Canada made by proclamation under sec- 41 ou 42, il peut être passé outre au défaut 20’dutSéna
tion 37, 40, 41 or 42 may be made without a d’autorisation du Sénat si celui-ci n’a pas
resolution of the Senate authorizing the issue adopté de résolution dans un délai de cent
of the proclamation if, within one hundred quatre-vingts jours suivant l’adoption de celle
and eighty days after the adoption by the25de la Chambre des communes et si cette
House of Commons of a resolution authoriz- dernière, après l’expiration du délai, adopte 25
ing its issue, the Senate has not adopted such une nouvelle résolution dans le même sens.
a resolution and if, at any time after the
expiration of that period, the House of Commons
again adopts the resolution. 30
Computation of (2) Any period when Parliament is proroperiod
gued or dissolved shall not be counted in
computing the one hundred and eighty day
period referred to in subsection (1).
(2) Dans la computation du délai visé au Computation
paragraphe (1), ne sont pas comptées les du délai
périodes pendant lesquelles le Parlement est
prorogé ou dissous. 30
Advice to issue 47. The Queen’s Privy Council for 35 47. Le Conseil privé de la Reine pour le Demande de
proclamation Canada shall advise the Governor General to Canada demande au gouverneur général de proclamation
issue a proclamation under this Part forth- prendre, conformément à la présente partie,
with on the adoption of the resolutions une proclamation dès l’adoption des résolurequired
for an amendment made by procla- tions prévues par cette partie pour une modi- 35
mation under this Part. 40 fication par proclamation.
Constitutional 48. A constitutional conference composed 48. Dans les quinze ans suivant l’entrée en Conférence
conrerence the Prime Minister of Canada and the vigueur de la présente partie, le premier nie
first ministers of the provinces shall be con- ministre du Canada convoque une conférence
vened by the Prime Minister of Canada constitutionnelle réunissant les premiers 40
within fifteen years after this Part comes into 45 ministres provinciaux et lui-même, en vue du
force to review the provisions of this Part. réexamen des dispositions de cette partie.
Modification
par le
Parlement
5
Modification
par les
1010législatures
Initiative des
procédures
23 novembre 1981l DÉBATS DES COMMUNES 13097
109- DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
PART V PARTIE V
AMENDMENT TO THE CONSTITUTION ACT,
1867
Amendment to 49. The Constitution Act, 1867 (formerly
ct,1867I named the British North America Act, 1867)
is amended by adding thereto, immediately
after section 92 thereof, the following heading
and section:
« Non- Renewable Natural Resources,
Forestry Resources and Electrical Energy
Laws respecting
non-renewable
natural
resources,
forestry
resources and
electnîcal
energy
92A. (1) In each province, the legislature
may exclusively make laws in relation
to
(a) exploration for non-renewable natural
resources in the province; 10
(b) development, conservation and
management of non-renewable natural
resources and forestry resources in the
province, including laws in relation to
the rate of primary production there- 15
from; and
(c) development, conservation and management
of sites and facilities in the
province for the generation and production
of electrical energy. 20
Export from (2) In each province, the legislature may
provinces of make laws in relation to the export from
resources mk asi eaint h xotfo
the province to another part of Canada of
the primary production from non-renewable
natural resources and forestry 25
resources in the province and the production
from facilities in the province for the
generation of electrical energy, but such
laws may not authorize or provide for
discrimination in prices or in supplies 30
exported to another part of Canada.
Authority of (3) Nothing in subsection (2) derogates
Parliament from the authority of Parliament to enact
laws in relation to the matters referred to
in that subsection and, where such a law of 35
Parliament and a law of a province conflict,
the law of Parliament prevails to the
extent of the conflict.
MODIFICATION DE LA LOI
CONSTITUTIONNELLE DE 1867
49. La Loi constitutionnelle de 1867
(antérieurement désignée sous le titre: Acte
de l’Amérique du Nord britannique, 1867)
est modifiée par insertion, après l’article 92,
5de la rubrique et de l’article suivants :
«Ressources naturelles non renouvelables,
ressources forestières et énergie électrique
Modification de
la Loi
constitution
5nelle de 1867
92A. (1) La législature de chaque pro- Compétence
vince a compétence exclusive pour légifé- provinciale
rer dans les domaines suivants : 10
a) prospection des ressources naturelles
non renouvelables de la province;
b) exploitation, conservation et gestion
des ressources naturelles non renouvelables
et des ressources forestières de la 15
province, y compris leur rythme de production
primaire;
c) aménagement, conservation et gestion
des emplacements et des installations
de la province destinés à la produc- 20
tion d’énergie électrique.
(2) La législature de chaque province a Exportation
compétence pour légiférer en ce qui con- provinces
cerne l’exportation, hors de la province, à
destination d’une autre partie du Canada, 25
de la production primaire tirée des ressources
naturelles non renouvelables et des ressources
forestières de la province, ainsi que
de la production d’énergie électrique de la
province, sous réserve de ne pas adopter de 30
lois autorisant ou prévoyant des disparités
de prix ou des disparités dans les exportations
destinées à une autre partie du
Canada.
(3) Le paragraphe (2) ne porte pas 35 Pouvoir du
atteinte au pouvoir du Parlement de légifé- Parlement
rer dans les domaines visés à ce paragraphe,
les dispositions d’une loi du Parlement
adoptée dans ces domaines l’emportant sur
les dispositions incompatibles d’une loi 40
provinciale.
23 novembre 1981
13098
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13099
Taxation of (4) In each province, the legislature may
resources make laws in relation to the raising of
money by any mode or system of taxation
in respect of
(a) non-renewable natural resources
and forestry resources in the province
and the primary production therefrom,
and
(b) sites and facilities in the province
for the generation of electrical energy
and the production therefrom,
whether or not such production is exported
in whole or in part from the province, but
such laws may not authorize or provide for
taxation that differentiates between production
exported to another part of
Canada and production not exported from
the province.
-Primary (5) The expression « primary producproduction
tion » has the meaning assigned by the
Sixth Schedule.
Existing powers (6) Nothing in subsections (1) to (5)
or rights derogates from any powers or rights that a
legislature or government of a province
had immediately before the coming into
force of this section. »
Idem 50. The said Act is further amended by
adding thereto the following Schedule:
« THE SIXTH SCHEDULE
Primary Production from Non-Renewable
Natural Resources and Forestry Resources
1. For the purposes of section 92A of this
Act,
(a) production from a non-renewable
natural resource is primary production
therefrom if
(i) it is in the form in which it exists
upon its recovery or severance from its
natural state, or
La Constitution
(4) La législature de chaque province a
compétence pour prélever des sommes
d’argent par tout mode ou système de
taxation :
a) des ressources naturelles non renou- 5
velables et des ressources forestières de
la province, ainsi que de la production
primaire qui en est tirée;
b) des emplacements et des installations
de la province destinés à la production 10
d’énergie électrique, ainsi que de cette
production même.
Cette compétence peut s’exercer indépendamment
du fait que la production en
cause soit ou non, en totalité ou en partie, 15
exportée hors de la province, mais les lois
adoptées dans ces domaines ne peuvent
autoriser ou prévoir une taxation qui établisse
une distinction entre la production
exportée à destination d’une autre partie 20
du Canada et la production non exportée
hors de la province.
(5) L’expression «production primaire» a
le sens qui lui est donné dans la sixième
annexe. 25
(6) Les paragraphes (1) à (5) ne portent
pas atteinte aux pouvoirs ou droits détenus
par la législature ou le gouvernement
d’une province lors de l’entrée en vigueur
du présent article.» 30
50. Ladite loi est en outre modifiée par
adjonction de l’annexe suivante :
Taxation des
ressources
«Production
primaire.
Pouvoirs ou
droits existants
Idem
«SIXIÈME ANNEXE
Production primaire tirée des ressources
naturelles non renouvelables et des
ressources forestières
1. Pour l’application de l’article 92A:
30 a) on entend par production primaire tirée
d’une ressource naturelle non renouvela- 35
ble :
(i) soit le produit qui se présente sous la
même forme que lors de son extraction
;35 du milieu naturel,
(ii) soit le produit non manufacturé de 40
la transformation, du raffinage ou de
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13 099
13-0 DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
(ii) it is a product resulting from processing
or refining the resource, and is
not a manufactured product or a product
resulting from refining crude oil,
refining upgraded heavy crude oil, refin- 5
ing gases or liquids derived from coal or
refining a synthetic equivalent of crude
oil; and
(b) production from a forestry resource is
primary production therefrom if it consists 10
of sawlogs, poles, lumber, wood chips, sawdust
or any other primary wood product,
or wood pulp, and is not a product manufactured
from wood. »
PART VI
GENERAL
Primacy of 51. (1) The Constitution of Canada is the 15
Constitution of
Canada supreme law of Canada, and any law that is
inconsistent with the provisions of the Constitution
is, to the extent of the inconsistency,
of no force or effect.
Constitution of (2) The Constitution of Canada includes 20
Canada (a) the Canada Act, including this Act;
(b) the Acts and orders referred to in
Schedule 1; and
(c) any amendment to any Act or order
referred to in paragraph (a) or (b). 25
Amendments to (3) Amendments to the Constitution of
Constitution of
Canada Canada shall be made only in accordance
with the authority contained in the Constitution
of Canada.
Repealsand 52. (1) The enactments referred to in 30
new names Column I of Schedule I are hereby repealed
or amended to the extent indicated in
Column Il thereof and, unless repealed, shall
continue as law in Canada under the names
set out in Column III thereof. 35
l’affinage d’une ressource, à l’exception
du produit du raffinage du pétrole brut,
du raffinage du pétrole brut lourd amélioré,
du raffinage des gaz ou des liquides
dérivés du charbon ou du raffinage 5
d’un équivalent synthétique du pétrole
brut;
b) on entend par production primaire tirée
d’une ressource forestière la production
constituée de billots, de poteaux, de bois 10
d’oeuvre, de copeaux, de sciure ou d’autre
produit primaire du bois, ou de pâte de
bois, à l’exception d’un produit manufacturé
en bois.»
PARTIE VI
DISPOSITIONS GENERALES
51. (1) La Constitution du Canada est la 15 Primauté de la
suprême du Canada; elle rend inopérantes Constitution du
loi surm uCnd;el edioéats Canada
les dispositions incompatibles de toute autre
règle de droit.
(2) La Constitution du Canada comprend: Constitution du
a) la Loi sur le Canada, y compris la 20
présente loi;
b) les textes législatifs et les décrets figurant
à l’annexe 1;
c) les modifications des textes législatifs et
des décrets mentionnés aux alinéas a) ou 25
(3) La Constitution du Canada ne peut
être modifiée que conformément aux pouvoirs
conférés par elle.
Modification
52. (1) Les textes législatifs et les décrets 30 Abrogation et
énumérés à la colonne I de l’annexe I sont
abrogés ou modifiés dans la mesure indiquée à
la colonne Il. Sauf abrogation, ils restent en
vigueur en tant que lois du Canada sous les
titres mentionnés à la colonne Ill. 35
Consequential (2) Every enactment, except the Canada (2) Tout texte législatif ou réglementaire, Modifications
amendments Act, that refers to an enactment referred to sauf la Loi sur le Canada, qui fait mention
in Schedule I by the name in Column I d’un texte législatif ou décret figurant à l’anthereof
is hereby amended by substituting nexe I par le titre indiqué à la colonne I est
for that name the corresponding name in40modifié par substitution à ce titre du titre40
Column III thereof, and any British North correspondant mentionné à la colonne III;
America Act not referred to in Schedule I tout Acte de l’Amérique du Nord britannimay
be cited as the Constitution Act fol- que non mentionné à l’annexe I peut être cité
sous le titre de Loi constitutionnelle suivi de
23 novembre 1981
13100
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
lowed by the year and number, if any, of its l’indication de l’année de son adoption et
enactment. éventuellement de son numéro.
Repeal and 53. Part III is repealed on the day that is
ameqentil one year after this Part comes into force and
this section may be repealed and this Act
renumbered, consequential upon the repeal
of Part III and this section, by proclamation
issued by the Governor General under the
Great Seal of Canada.
53. La partie III est abrogée un an après
l’entrée en vigueur de la présente partie et le
5 gouverneur général peut, par proclamation
sous le grand sceau du Canada, abroger le
présent article et apporter en conséquence de
cette double abrogation les aménagements
qui s’imposent à la présente loi.
French version 54. A French version of the portions of the 10 54. Le ministre de la Justice du Canada 10 version
ofCanada »u° » Constitution of Canada referred to in est chargé de rédiger, dans les meilleurs ferains dees
Schedule I shall be prepared by the Minister délais, la version française des parties de la constitutionnels
of Justice of Canada as expeditiously as pos- Constitution du Canada qui figurent à l’ansible
and, when any portion thereof sufficient nexe 1; toute partie suffisamment importante
to warrant action being taken has been so 15 est, dès qu’elle est prête, déposée pour adop- 15
prepared, it shall be put forward for enact- tion par proclamation du gouverneur général
ment by proclamation issued by the Gover- sous le grand sceau du Canada, conforménor
General under the Great Seal of Canada ment à la procédure applicable à l’époque à
pursuant to the procedure then applicable to la modification des dispositions constitutionan
amendment of the same provisions of the 20nelles qu’elle contient. 20
Constitution of Canada.
English and
French versions
of certain
constitutional
texts
55. Where any portion of the Constitution 55. Les versions française et anglaise des versions
of Canada has been or is enacted in English parties de la Constitution du Canada adop- anaise e
and French or where a French version of any tées dans ces deux langues ont également certains textes
portion of the Constitution is enacted pursu- 25 force de loi. En outre, ont également force de constitutionnels
ant to section 54, the English and French loi, dès l’adoption, dans le cadre de l’article 25
versions of that portion of the Constitution 54, d’une partie de la version française de la
are equally authoritative. Constitution, cette partie et la version
anglaise correspondante.
English and 56. The English and French versions of
Frenchi versions
of this Act this Act are equally authoritative.
Commence- 57. Subject to section 58, this Act shall
ment come into force on a day to be fixed by
proclamation issued by the Queen or the
Governor General under the Great Seal of
Canada.
Commencement
of
paragraph
23(l (a) in
respect of
Quebec
56. Les versions française et anglaise de la versions
30 présente loi ont également force de loi. 30 fanaise eta
présente loi
57. Sous réserve de l’article 58, la présente Entrée en
loi entre en vigueur à la date fixée par pro- vigueur
clamation de la Reine ou du gouverneur
général sous le grand sceau du Canada.
35
58. (1) Paragraph 23(1)(a) shall corne 58. (1) L’alinéa 23(1)a) entre en vigueur 35 Entrée en
into force in respect of Quebec on a day to be pour le Québec à la date fixée par proclama- vainéar 23)a)
fixed by proclamation issued by the Queen or tion de la Reine ou du gouverneur général pour le Québec
the Governor General under the Great Seal sous le grand sceau du Canada.
of Canada. 40
Authorization (2) A proclamation under subsection (1) (2) La proclamation visée au paragraphe Autorisation du
of Quebec shall be issued only where authorized by the (1) ne peut être prise qu’après autorisation 4 0 Québec
legislative assembly or government of de l’assemblée législative ou du gouverne-
Quebec. ment du Québec.
Abrogation et
modirications
qui en 5 découlent
23 novembre 1981 13101
DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
Rcpeal of this (3) This section may be repealed on the
section day paragraph 23(1)(a) comes into force in
respect of Quebec and this Act amended and
renumbered, consequential upon the repeal
of this section, by proclamation issued by the
Queen or the Governor General under the
Great Seal of Canada.
(3) Le présent article peut être abrogé à la Abrogation du
date d’entrée en vigueur de l’alinéa 23(1 )a) present articl
pour le Québec, et la présente loi faire l’objet,
dès cette abrogation, des modifications et
5 changements de numérotation qui en décou- 5
lent, par proclamation de la Reine ou du
gouverneur général sous le grand sceau du
Canada.
Short title and 59. This Act may be cited as the Consti- 59. Titre abrégé de la présente annexe : Titres
citations tution Act, 1981, and the Constitution Acts Loi constitutionnelle de 1981; titre commun 10
1867 to 1975 (No. 2) and this Act may be 10des lois constitutionnelles de 1867 à 1975
cited together as the Constitution Acts, 1867 (n° 2) et de la présente loi : Lois constituto
1981. tionnelles de 1867 à 1981.
13102
80107-7
La Constiltution
SCHEDULE I
to the
CONSTITUTION ACT, 1981
MODERN IZATION 0F THE CONSTITUTION
Column I Column Il Column 111
Item Act Affected Amendment New Namne
1. British North America Act, 1867,
30-31 Vict., c. 3 (U.K.)
2. An Act to amend and continue the
Act 32-33 Victoria chapter 3; and to
establish and provide for the Government
of the Province of Manitoba,
1870, 33 Vict., c. 3 (Can.)
3. Order of Her Majesty in Council
admitting Rupert’s Land and the
North-Western Territory into the
union, dated the 23rd day of June,
1870
4. Order of Her Majesty in Council
admitting British Columbia into the
Union, dated the 16th day of May,
1871
5. British North America Act, 1871,
34-35 Vict., c. 28 (U.K.)
6. Order of Her Majesty in Council
admitting Prince Edward Island into
the Union, dated the 26th day of
June, 1873
7. Parliament of Canada Act, 1875,
38-39 Vict., c. 38 (U.K.)
8. Order of Her Majesty in Council
admitting ail British possessions and
Territories in North America and
islands adjacent thereto into the
Union, dated the 3lst day of July,
(1) Section I is repealed and
the following substituted therefor:
« I. This Act may be cited as
the Constitution Act, J1867. »
(2) Section 20 is repealed.
(3) Class 1 of section 91 is
repealed.
(4) Class 1 of section 92 is
repealed.
(1) The long titie is repealed
and the following substituted
therefor:
« Manitoba Act, 1870. »
(2) Section 20 is repealed.
Constitution Act, 1867
Manitoba Act, 1870
Rupert’s Land and North-Western
Territory Order
British Columbia Terms of Union
Section I is repealed and the
following substituted therefor:
-1. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1871. »
Constitution Act, 1871
Prince Edward Island Terms of
Union
Parliament of Canada Act, 1875
Adjacent Territories Order
13104 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
ANNEXE I
LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1981
ACTUALISATION DE LA CONSTITUTION
Colonne I Colonne II Colonne III
Loi visée Modification Nouveau titre
1. Acte de
nique,
(R.-U.)
l’Amérique du Nord britan-
1867, 30-31 Vict., c. 3
2. Acte pour amender et continuer
l’acte trente-deux et trente-trois Victoria,
chapitre trois, et pour établir
et constituer le gouvernement de la
province de Manitoba, 1870, 33
Vict., c. 3 (Canada)
3. Arrêté en conseil de Sa Majesté
admettant la Terre de Rupert et le
Territoire du Nord-Ouest, en date
du 23 juin 1870
4. Arrêté en conseil de Sa Majesté
admettant la Colombie-Britannique,
en date du 16 mai 1871
5. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1871, 34-35 Vict., c. 28
(R.-U.)
6. Arrêté en conseil de Sa Majesté
admettant l’Île-du-Prince-Édouard,
en date du 26 juin 1873
7. Acte du Parlement du Canada,
1875, 38-39 Vict., c. 38 (R.-U.)
8. Arrêté en conseil de Sa Majesté
admettant dans l’Union tous les territoires
et possessions britanniques
dans l’Amérique du Nord, et les îles
adjacentes à ces territoires et posses-
(1) L’article 1 est abrogé et
remplacé par ce qui suit :
«I. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1867.»
(2) L’article 20 est abrogé.
(3) La catégorie 1 de l’article
91 est abrogée.
(4) La catégorie 1 de l’article
92 est abrogée.
(1) Le titre complet est abrogé
et remplacé par ce qui suit :
«Loi de 1870 sur le Manitoba.
»
(2) L’article 20 est abrogé.
Loi constitutionnelle de 1867
Loi de 1870 sur le Manitoba
Décret en conseil sur la terre de
Rupert et le territoire du Nord-
Ouest
L’article 1 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«I. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1871.»
Conditions de l’adhésion de la
Colombie-Britannique
Loi constitutionnelle de 1871
Conditions de l’adhésion de
l’Île-du-Prince-Édouard
Loi de 1875 sur le Parlement du
Canada
Décret en conseil sur les territoires
adjacents
23 novembre 1981 13105
La Constitution
SCHEDULE I
to the
CONSTITUTION ACT, 1981-Continued
Column 1 Column Il Column 111
Item Act Affected Amendment New Name
9. British North America Act, 1886,
49-50 Vict., c. 35 (U.K.)
10. Canada (Ontario Boundary) Act,
1889, 52-53 Vict., c. 28 (U.K.)
Il. Canadian Speaker (Appointment of
Deputy) Act, 1895, 2nd Sess., 59
Vict., c. 3 (U.K.)
Section 3 is repealed and the
following substituted therefor:
« 3. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1886. »
Constitution Act, 1886
Canada (Ontario Boundary) Act,
1889
The Act is repealed.
12. The Alberta Act, 1905, 4-5 Edw. Alberta Act
VII, c. 3 (Cari.)
13. The Saskatchewan Act, 1905, 4-5
Edw. VI[, c. 42 (Cani.)
14. British North America Act, 1907, 7
Edw. VII, c. 11 (U.K.)
15. British North America Act, 1915,
5-6 Geo. V, c. 45 (U.K.)
16. British North America Act, 1930,
20-21 Geo. V, c. 26 (U.K.)
17. Statute of Westminster, 1931, 22
Geo. V, c. 4 (U.K.)
18. British North America Act, 1940,
3-4 Geo. VI, c. 36 (U.K.)
19. British North America Act, 1943,
6-7 Geo. VI, c. 30 (U.K.)
Saskatchewan Act
Section 2 is repealed and the
following substituted therefor:
-2. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1907. »
Section 3 is repealed and the
following substituted therefor:
« 3. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1915. »
Section 3 is repealed and the
following substituted therefor:
« 3. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1930. »
In SO far as they apply to
Canada,
(a) section 4 is repealed; and
(b) subsection 7(l) is
repealed.
Section 2 is repealed and the
following substituted therefor:
« 2. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1940. »
Constitution Act, 1907
Constitution Act, 1915
Constitution Act, 1930
Statute of Westminster, 1931
Constitution Act, 1940
The Act is repealed.
13106 DÉ13ATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
ANNEXE I (suite)
LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1981
Colonne I Colonne Il Colonne III
Loi visée Modification Nouveau titre
9. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1886, 49-50 Vict., c. 35
(R.-U.)
10. Acte du Canada (limites d’Ontario)
1889, 52-53 Vict., c. 28 (R.-U.)
11. Acte concernant l’Orateur canadien
(nomination d’un suppléant) 1895,
21 session, 59 Vict., c. 3 (R.-U.)
12. Acte de l’Alberta, 1905, 4-5 Ed.
VII, c. 3 (Canada)
13. Acte de la Saskatchewan, 1905, 4-5
Ed. VII, c. 42 (Canada)
14. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1907, 7 Ed. VII, c. 11 (R.-U.)
15. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1915, 5-6 Geo. V, c. 45
(R.-U.)
16. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1930, 20-21 Geo. V, c. 26
(R.-U.)
17. Statut de Westminster, 1931, 22
Geo. V, c. 4 (R.-U.)
18. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1940, 3-4 Geo. VI, c. 36
(R.-U.)
19. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1943, 6-7 Geo. VI, c. 30
(R.-U.)
L’article 3 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«3. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1886.»
Loi constitutionnelle de 1886
Loi de 1889 sur le Canada (frontières
de l’Ontario)
La loi est abrogée.
Loi sur l’Alberta
Loi sur la Saskatchewan
L’article 2 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«2. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1907.»
L’article 3 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«3. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1915.»
L’article 3 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«3. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1930.»
Dans la mesure où ils s’appliquent
au Canada :
a) l’article 4 est abrogé;
b) le paragraphe 7(1) est
abrogé.
L’article 2 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«2. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1940.»
Loi constitutionnelle de 1907
Loi constitutionnelle de 1915
Loi constitutionnelle de 1930
Statut de Westminster de 1931
Loi constitutionnelle de 1940
La loi est abrogée.
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13107
La Constitution
SCHEDULE I
to the
CONSTITUTION ACT, 1981 Continued
Columnn 1 Column Il Column 111
Item Act Affected Amendment New Name
20. British North America Act, 1946,
9-10 Geo. VI, c. 63 (U.K.)
The Act is repealed.
21. British North America Act,
12-13 Geo. VI, c. 22 (U.K.)
1949, Section 3 is repealed and the
following substituted therefor:
« 3. This Act may be cited as
the Newfoundland Act. »
Newfoundland Act
22. British North America (No. 2) Act,
1949, 13 Geo. VI, c. 81 (U.K.)
23. British North America Act, 1951,
14-15 Geo. VI, c. 32 (U.K.)
24. British North America Act, 1952, I
Eliz. 11, c. 15 (Can.)
25. British North America Act, 1960, 9
Eliz. I1, c. 2 (U.K.)
26. British North America Act, 1964,
12-13 Eliz. 11, c. 73 (U.K.)
27. British North America Act, 1965,
14 Eliz. 11, c. 4, Part I (Cani)
28. British North America Act, 1974,
23 Eliz. 11, c. 13, Part I (Cari.)
The Act is repealed.
The Act is repealed.
The Act is repealed.
Section 2 is repealed and the
following substituted therefor:
« 2. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1960. »
Section 2 is repealed and the
following substituted therefor:
« 2. This Act may be cited as
the Constitution Act, 1964. »
Section 2 is repealed and the
following substituted therefor:
« 2. This Part may be cited as
the Constitution Act, 1965. »
Section 3, as amended by
25-26 Eliz. 11, c. 28, s. 38(l)
(Can.) is repealed and the following
substîtuted therefor:
« 3. This Part may be cited as
the Constitution Act, 1974. »
Constitution Act, 1960
Constitution Act, 1964
Constitution Act, 1965
Constitution Act, 1974
23 novembre 1981
La Constitution
ANNEXE I (suite)
LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1981
Colonne I Colonne II Colonne III
Loi visée Modification Nouveau titre
20. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1946, 9-10 Geo. VI, c. 63
(R.-U.)
21. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1949, 12-13 Geo. VI, c. 22
(R.-U.)
22. Acte de l’Amérique du Nord britannique
(No 2), 1949, 13 Geo. VI, c.
81 (R.-U.)
23. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1951, 14-15 Geo. VI, c. 32
(R.-U.)
24. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1952, 1 Eliz. II, c. 15
(Canada)
25. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1960, 9 Eliz. II, c. 2 (R.-U.)
26. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1964, 12-13 Eliz. II, c. 73
(R.-U.)
27. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1965, 14 Eliz. II, c. 4, Partie I
(Canada)
28. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1974, 23 Eliz. II, c. 13, Partie
I (Canada)
La loi est abrogée.
L’article 3 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«3. Titre abrégé : Loi sur
Terre-Neuve.»
Loi sur Terre-Neuve
La loi est abrogée.
La loi est abrogée.
La loi est abrogée.
L’article 2 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«2. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1960.»
L’article 2 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«2. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
de 1964.»
L’article 2 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«2. Titre abrégé de la présente
partie : Loi constitutionnelle
de 1965.»
L’article 3, modifié par le paragraphe
38(1) de la loi 25-26 Elizabeth
Il, c. 28 (Canada), est
abrogé et remplacé par ce qui
suit :
«3. Titre abrégé de la présente
partie : Loi constitutionnelle
de 1974.»
Loi constitutionnelle de 1960
Loi constitutionnelle de 1964
Loi constitutionnelle de 1965
Loi constitutionnelle de 1974
23 novembre 1981 DÉB3ATS DES COMMUNES 13109
La Constitution
SCHEDULE I
to the
CONSTITUTION ACT, 1981-Concluded
Column I
Item Act Affected
Column Il
Amendment
Column III
New Name
29. British North America Act, 1975,
23-24 Eliz. II, c. 28, Part I (Can.)
30. British North America Act (No. 2),
1975, 23-24 Eliz. II, c. 53 (Can.)
Section 3, as amended by
25-26 Eliz. II, c. 28, s. 31 (Can.)
is repealed and the following substituted
therefor:
« 3. This Part may be cited as
the Constitution Act (No. 1),
1975. »
Section 3 is repealed and the
following substituted therefor:
« 3. This Act may be cited as
the Constitution Act (No. 2),
1975. »
Constitution Act (No. 1), 1975
Constitution Act (No. 2), 1975
23 novembre 1981
13110
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
ANNEXE I (fin)
LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1981
Colonne I Colonne Il Colonne III
Loi visée Modification Nouveau titre
29. Acte de l’Amérique du Nord britannique,
1975, 23-24 Eliz. II, c. 28,
Partie I (Canada)
30. Acte de l’Amérique du Nord britannique
n° 2, 1975, 23-24 Eliz. II, c. 53
(Canada)
L’article 3, modifié par l’article
31 de la loi 25-26 Elizabeth 11, c.
28 (Canada), est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«3. Titre abrégé de la présente
partie : Loi constitutionnelle
n° 1 de 1975.»
L’article 3 est abrogé et remplacé
par ce qui suit :
«3. Titre abrégé : Loi constitutionnelle
n, 2 de 1975.»
Loi constitutionnelle n 1 de 1975
Loi constitutionnelle n° 2 de 1975
23 novembre 1981 13111
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
Mme le Président: Avant que la Chambre ne poursuive, je
tiens à l’informer que j’ai examiné l’amendement que le député
de Yellowhead (M. Clark) a proposé avec l’appui du député de
Kingston et les Îles (M », MacDonald) et que je l’ai jugé
recevable. Je suis prête à en donner lecture.
Une voix: Suffit.
Mme le Président: Plaît-il à la Chambre que je m’abstienne
d’en donner lecture?
Des voix: Non.
Mme le Président: Le très honorable député de Yellowhead,
avec l’appui du député de Kingston et les Îles, propose:
28. Indépendamment des autres dispositions
de la présente charte, les droits et libertés qui y
sont mentionnés sont garantis également aux
personnes des deux sexes.
b) en remplaçant l’article 33(1) par ce qui suit:
33. (1) Le Parlement ou la législature d’une
province peut adopter une loi où il est expressément
déclaré que celle-ci ou une de ses dispositions
a effet indépendamment d’une disposition
donnée de l’article 2 ou des articles 7 à 15 de la
présente charte.
Égalité de
garantie des
droits pour les
deux sexes
Dérogation par
déclaration
expresse
* (1510)
M. John Bosley (Don Valley-Ouest): Monsieur l’Orateur,
juste avant l’ajournement du débat, vendredi dernier, j’ai cité
pour les fins du compte rendu un extrait du télex dans lequel le
premier ministre de l’Ontario exposait la position de son
gouvernement à l’égard de l’article 28 et de l’enchâssement des
droits des autochtones issus de traités. Bien des choses se sont
passées au cours de la fin de semaine. D’une certaine manière,
je me réjouis d’avoir eu cette interruption au milieu de mon
discours car je suis fier de consigner aujourd’hui au compte
rendu ce que le procureur général de l’Ontario a déclaré au
sujet de l’article 28. En effet, le procureur général de l’Ontario
et le premier ministre du Nouveau-Brunswick ont avoué qu’il
n’a jamais été question, avant son élaboration et sa présentation
à la Chambre, de la résolution dont nous sommes actuellement
saisis visant à assujettir l’article 28 aux dispositions
dérogatoires. Cette question n’a pas été abordée lors des
négociations, et maintenant qu’elle a été rendue publique,
j’espère que nous pourrons nous y reporter abondamment tout
au cours du débat, précisément parce que les ministériels, en
particulier le premier ministre (M. Trudeau) et le ministre de
la Justice (M. Chrétien), estiment si important de ne pas
modifier l’accord.
Non seulement certaines modifications qui ont été proposées
à la résolution n’avaient pas été examinées lors des discussions
qui ont abouti à l’accord du 5 novembre, mais il est de plus en
plus évident que la modification à l’article 28, dont les ministériels
se servent pour tenter de faire obstruction à l’amendement
présentée par le chef de mon parti, a été proposée après
l’accord. A mesure que l’affaire s’éclaircit, j’espère qu’on
admettra que ce serait tout simplement juste d’accepter
l’amendement à l’article 28.
Avant de poursuivre les remarques que j’ai commencées la
semaine passée, je voudrais dire que, après avoir écouté mon
premier ministre-et je parle en connaissance de cause à titre
de citoyen-je suis désolé de le voir faire de la diplomatie à
coups de canon. A mon avis, au beau milieu de négociations
très complexes tenues à huis clos pour en arriver à un accord
général sur l’amendement à l’article 28 et sur les amendements
au reste de la charte proposés par mon chef, la plupart des
députés se rendront compte, si ce n’est pas déjà public, que,
d’après les conversations tenues avec plusieurs personnes de la
province de Québec, c’est frustrant, et j’emploie ce terme après
mûre réflexion, de revenir à la Chambre à Ottawa et d’entendre
le premier ministre dire que tout ira bien, à condition que
nous nous prononcions sur l’amendement au plus tard demain
soir. C’est une autre forme de guillotine, monsieur l’Orateur.
A ce stade-ci du débat, il est bon de se rappeler que c’était le
même premier ministre qui a voulu imposer la même guillotine
l’an dernier. C’est le même premier ministre qui essaie d’imposer
la guillotine relativement à des articles qui ne comprenaient
pas ces droits dans le document original présenté à la
Chambre des communes. C’est le même premier ministre qui
s’est opposé au comité qui a essayé d’inclure ces droits. Le
premier ministre blâme maintenant les premiers ministres des
provinces, qu’il a d’abord refusé de rencontrer, pour l’exclusion
de ces droits.
Il devrait sûrement être clair maintenant que la résolution a
été amputée des droits des autochtones, des droits reconnus
par traité et des droits des femmes, parce qu’on s’est manifestement
entendu pour le faire. J’espère donc que ces efforts
pour jeter la pierre aux premiers ministre des provinces n’auront
aucun effet sur le grand public, parce qu’il a fallu que le
premier ministre du Canada consente à retirer ces droits pour
que l’accord aboutisse aux Communes. Ne l’oublions pas.
Je reviendrai à la question précise de nos amendements,
mais je voudrais contribuer quelques observations générales au
débat qui se poursuit et que, je le répète je ne voudrais pas voir
s’éterniser. Je voudrais aussi faire remarquer à cet égard qu’en
tant que Canadien, je crois que toutes les délibérations de cette
semaine qui aideront à améliorer la charte ne peuvent qu’être
considérées comme utiles par nous tous à la Chambre. Je veux
qu’il soit bien consigné que tous, sans exception, nous sommes
disposés à abandonner le débat pour passer à celui du budget
s’il faut plus de temps pour poursuivre les négociations dans la
coulisse. Je voudrais que cela soit bien compris de tous en ce
moment.
13112 23 novembre 1981
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13113
On tentera de prétendre que ceux d’entre nous qui veulent
améliorer la charte considèrent celle-ci, ses résolutions et ses
modifications comme une priorité du parti conservateur. A
l’heure actuelle les Canadiens accordent la priorité au retour
des chômeurs au travail. Au Canada, le droit à l’emploi est
aussi important que le droit à l’égalité. S’il devenait nécessaire
d’interrompre le débat en cours pour terminer celui sur le
budget-telle était la position prise par notre leader à la
Chambre la semaine dernière-puisque nous ignorons quand
nous serons en mesure d’en terminer l’étude-le plus tôt
possible, espérons-nous-je suis persuadé que les députés de ce
côté-ci appuieraient non seulement cette initiative mais estimeraient
aussi qu’il importe d’abord et avant tout de terminer
l’étude des mesures financières.
Je voudrais réfuter une opinion courante au sujet de ce qui
s’est passé depuis douze ou quinze mois. Non seulement il
convient de souligner les points sur lesquels notre parti propose
des amendements-j’y reviendrai tantôt-maintenant que
nous avons tous fait l’expérience des difficultés auxquelles on
peut se heurter quand on rédige une constitution pour notre
État fédéral formé d’éléments variés, cette expérience, dis-je
doit provoquer notre émerveillement et susciter notre reconnaissance
envers les pères de notre pays qui se sont révélés
tellement perspicaces et compétents en mettant au point ce qui
forme maintenant l’ossature de notre constitution écrite, l’Acte
de l’Amérique du Nord britannique.
Maintenant que nous semblons être si près de nous doter
d’une constitution totalement canadienne, il me paraît bon de
faire remarquer à quel point ils se trompaient tous ceux qui
jugeaient que notre pays avait été durant toutes ces années
fondamentalement imparfait et en quelque sorte émasculé.
C’est précisément grâce à la sagesse de nos prédécesseurs que
l’on peut à juste titre dire exactement le contraire. Grâce à
leur sagesse, en effet, nous avons pu élaborer un ensemble de
lois et de conventions et instituer un régime de collaboration
qui nous a permis de coexister aussi bien que nous l’avons fait
tandis que nous avons cherché à établir un consensus sur
l’étape suivante à entreprendre, un consensus où se traduit bien
l’âme de notre confédération, un consensus qui porte en soi le
moyen de modifier à l’avenir notre constitution dans le respect
de la réalité et de l’esprit de notre fédéralisme.
Certains ont soutenu que le fédéralisme ne pouvait pas
fonctionner. Certains ont soutenu que ce n’est pas en tenant
davantage de conférences l’an dernier que nous pourrions
réussir à sortir de l’impasse, que nous ne pouvions pas attendre
plus longtemps et que pour nous réaliser comme pays il nous
fallait agir unilatéralement. Lorsque notre parti a décidé de
s’opposer à un projet aussi radicalement unilatéral, une décision
qui a exigé de la part du chef de notre parti du courage,
un attachement aux principes et une fidélité à la façon traditionnelle
de faire les choses au Canada-et j’espère que de plus
en plus de Canadiens en viendront à voir dans ces qualités la
meilleure qualification pour exercer la charge la plus élevée au
pays-certains, et notamment ceux qui croient que c’est dans
la chronique d’un journal plutôt que dans la mêlée de la
politique que l’on peut le mieux gouverner le monde, ont cru
La Constitution
que nous plaisantions ou que nous étions devenus fous, suicidaires
ou voués à l’auto-destruction.
Avec le temps et suite à la décision rendue par la Cour
suprême, on a pu constater que ce n’était pas le cas. On a pu
découvrir qu’il était possible d’en arriver à un compromis. On
s’est rendu compte qu’il était possible d’obtenir un consensus et
de s’entendre si on le voulait vraiment et si l’on était prêt à
faire l’effort nécessaire. Même depuis la réunion des premiers
ministres provinciaux et la signature de l’accord qui en a
découlé, on a constaté qu’il était encore possible de s’entendre
sur autre chose. Je veux parler des efforts fournis depuis la
réunion pour empêcher les dispositions relatives à l’égalité des
droits des femmes et des hommes d’être affaiblies par la
mesure d’exception prévue à l’article 33, et de tout le travail
accompli à cette fin par un si grand nombre de femmes et
quelques hommes ces derniers jours.
Je ne veux nullement déprécier le rôle que d’autres ont joué
dans les entretiens qui ont eu lieu à cet égard, mais je voudrais
mentionner encore une fois le télégramme envoyé par l’honorable
John Buchanan de la Nouvelle-Ecosse suite au travail
intense accompli par l’honorable député de Kingston et les Îles
(M »‘* MacDonald).
Des voix: Bravo!
M. Bosley: Lorsque notre parti a lutté pour obtenir plus de
temps l’automne et l’hiver derniers, c’était parce que nous
croyions que nos conventions, nos lois et nos usages constitutionnels
étaient suffisamment solides pour que nous puissions
prendre le temps d’apporter les changements appropriés du
premier coup au lieu de se hâter de tout modifier même si cela
pouvait avoir des conséquences désastreuses. Selon nous, c’est
au moins ce que l’on avait promis aux Québécois, et surtout
aux fédéralistes du Québec, au printemps de 1980.
e (1520)
[Français]
Monsieur l’Orateur, nous le croyons toujours et voilà pourquoi
un amendement à la section 39 est important, à savoir
qu’une province qui désire conserver le droit d’assurer des
services dans un domaine quelconque qui, jusqu’à maintenant,
a été de responsabilité provinciale, doit recevoir une aide
financière si ce domaine de responsabilité est, à l’avenir,
transféré par un amendement constitutionnel des provinces au
gouvernement fédéral. Il est seulement juste et équitable
qu’une province qui continue à offrir des services reçoive une
compensation raisonnable de la part d’Ottawa, si le gouvernement
fédéral offre et paye pour ces services dans d’autres
provinces. Non seulement cela est juste, mais aussi, le fait
d’omettre une clause aussi raisonnable a probablement été la
première des trois raisons citées pour lesquelles le gouvernement
du Québec n’a pas voulu signer l’entente.
[Traduction]
L’amendement est appuyé au moins par les huit provinces
qui n’étaient pas d’accord à l’origine, y compris le Québec, et
seul le gouvernement fédéral semble s’y opposer. Par conséquent,
non seulement cet amendement est juste, mais il est
essentiel qu’il soit adopté à la Chambre si nous voulons
vraiment essayer de faire participer le peuple québécois à cet
événement historique.
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13113
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
[Français]
Quoi qu’on pense de la qualité de l’engagement au fédéralisme
du premier ministre du Québec, je ne peux trop souligner
aux opposants la justice profonde de l’amendement auquel ce
dernier et les autres premiers ministres attachent tant d’importance.
Je refuse de croire qu’il y en a qui iraient jusqu’à songer
sérieusement à ne pas tendre la branche d’olivier au peuple
Québécois lorsque cela non seulement est possible, mais offre
l’avantage de renforcer la résolution, sans pour autant diminuer
l’appui de l’ensenble des provinces.
[Traduction]
Non seulement, par conséquent, cette proposition est équitable
et raisonnable, mais, il convient de signaler, contrairement
à ce qu’a dit le chef du Nouveau parti démocratique (M.
Broadbent) la semaine dernière, que l’amendement tend d’une
certaine façon à protéger les provinces riches qui seront en
mesure de se retirer des programmes sociaux, alors qu’en fait,
cela aura l’effet tout à fait contraire. Il est donc très clair pour
ceux qui lisent le hansard ou écoutent les débats, que
l’amendement stipule que dans le cas d’une modification constitutionnelle-
autrement dit, une modification qui, à l’avenir,
aura l’appui d’au moins sept provinces, ce qui signifie qu’une
majorité d’entre elles auront déjà décidé qu’il faut entreprendre
un programme-contrairement à ce que prétend le chef du
Nouveau parti démocratique, dans ce cas-là, si une province
refuse d’y participer, elle devrait avoir droit à un dédommagement
financier tout de même. Cela vise à protéger les provinces
qui, autrement, risqueront de devoir voter lors d’une
conférence constitutionnelle sans être protégées par celles qui
sont plus riches qu’elles. Tel est sans aucun doute l’esprit du
fédéralisme.
J’ai déjà dit qu’il est regrettable que l’article 28 s’applique
sans limites-j’espère que les députés ne m’en voudront pas de
penser ainsi-afin que les hommes se voient enfin garantir les
mêmes droits que les femmes aux termes de la loi. Sans ce
changement, il est évident que la résolution comporterait une
faille fondamentale, et sans ce changement, certains députés
prétendront que nous ne pouvons pas l’appuyer. D’autres
diront qu’outre ce changement, le compromis qui permet aux
assemblées législatives de passer outre, au moins provisoirement,
aux décisions des tribunaux qui leur semblent incongrues,
supprime également une imperfection du document.
Au début de mon intervention, vendredi, j’ai parlé de mon
expérience passée à la municipalité de Toronto, où j’ai participé
à l’élaboration du plan d’urbanisme du centre de la ville; à
ce sujet, un critique avait dit que c’était nécessairement une
réussite puisqu’il indisposait tous les intéressés. Il en va de
même pour les dispositions dérogatoires, mais ce compromis
est typiquement et indiscutablement canadien. Ceux qui sont
en faveur de la suprématie parlementaire pourront dire que
cette résolution l’a maintenue, et c’est peut-être vrai. Ceux qui
préfèrent voir nos droits protégés grâce à la constitutionnalisation
pourront dire que nous avons atteint cet objectif, ou
presque, et que des pressions politiques empêcheront que l’on
recoure trop fréquemment à cette clause dérogatoire. Comme
dans le cas du plan de Toronto, autrement dit, ce changement
réussira à mécontenter tout le monde.
La difficulté, c’est qu’il s’agit de concilier deux importants
principes du fédéralisme. Le premier c’est qu’il ne doit pas y
avoir de changements constitutionnels sans le consentement
des intéressés, c’est-à-dire de nos provinces. L’autre correspond
au désir de ne pas faire dépendre de l’État certaines de nos
libertés qui ne sont pas définitivement consacrées par le doit,
car les Parlements peuvent faire ce qu’ils veulent.
Mon opinion à moi, la voici: Quand nous-et je suis de ce
nombre-quand nous avons défendu le droit des provinces à
consentir, l’idée ne m’était jamais venue qu’elles demanderaient
le droit de déroger aux libertés fondamentales. J’aurais de
beaucoup préféré, et je préfère encore une énumération négociée,
et au besoin abrégée des libertés individuelles, qui ferait
l’accord des provinces et de l’État fédéral. Cela tiendrait
compte des usages canadiens et lierait les gouvernements, ce
qui empêcherait toute dérogation.
J’estime que les gouvernements sont devenus si puissants
qu’il est dérisoire de compter sur des pressions politiques pour
les empêcher de nous enlever nos droits individuels-et quand
je dis gouvernements, je pense tout spécialement à celui d’en
face. Seuls les historiens seront peut-être en mesure de dire si
une négociation fédérale plus avisée, ou une approche graduelle
qui aurait consisté simplement à procéder au rapatriement
avec une formule d’admendements convenue, aurait
donné de meilleurs résultats. Mais on peut quand même se
poser la question.
D’accord, un important compromis est intervenu sur la
charte. Mais il n’en subsiste pas moins d’autres imperfections
qui demandent à être corrigées et j’espère qu’elles le seront. Je
pense ici spécialement au refus de la part d’un trop grand
nombre de gouvernements et de partis d’y faire figurer le droit
de propriété, droit que la plupart des Canadiens considèrent
comme indispensable à leur bien-être. Il y a une autre imperfection
majeure qu’il faudrait rectifier avant l’adoption de ce
document, car je suis persuadé qu’il y a peu de chance d’y faire
figurer le droit de propriété. Je n’en veux pour preuve que les
sourires qu’on m’oppose. L’an dernier, j’ai observé les néosocialistes
et les vrais socialistes faire front commun pour
empêcher l’insertion du droit de propriété, et je soupçonne que
leur position n’a pas changé d’un iota.
L’autre grande imperfection qu’il y a lieu de rectifier avant
l’adoption de cette résolution, c’est l’absence de reconnaissance
des droits autochtones et des droits reconnus par traité. Certains
répondront que trop de provinces s’opposent à l’incorporation
de l’article 34, mais je constate avec plaisir que leur
nombre décroît de jour en jour. Je répète que ce serait une
honte si la date prévue pour ces documents par l’agenda
particulier du premier ministre privait d’effets le mouvement
qui semble s’amplifier en faveur de la reconnaissance de ces
droits.
D’aucuns soutiendront que trop de provinces s’opposent à ce
que l’ancien article 34 soit incorporé dans la Constitution. Or,
cet article ne fait que reconnaître l’existence officielle de
certains traités, et de certains droits, ce que notre common law
a d’ailleurs confirmé clairement. A ces gens-là et à ces provinces
je me bornerai à dire que les droits créés par la Couronne-
autrement dit par notre reine-par les traités conclus
avec nos autochtones sont antérieurs aux provinces ellesmêmes
et, bien que celles-ci puissent à bon droit ne pas être
d’accord avec l’interprétation donnée à ces traités, si elles
refusaient que notre droit constitutionnel reconnaisse l’existence
de ces droits elles feraient preuve d’un manque de sens
pratique puisque notre jurisprudence les a déjà reconnus, et
13114 23 novembre 1981
La Constitution
témoigneraient aussi d’un manque d’élévation morale, c’est le
moins qu’on puisse dire. Tout comme le Parlement a le devoir
d’assurer aux provinces qu’il recherchera leur adhésion au
projet constitutionnel canadien, de même le Parlement et les
autres assemblées législatives ont le devoir de protéger les
droits reconnus par traités de ceux dont les droits ont été créés
avant même ceux de notre parlement.
e (1530)
J’ai dit que je serais bref aujourd’hui. Les députés de notre
parti, et moi en particulier, n’ont pas l’intention de retarder
inutilement la conclusion de cette affaire, comme nous le
prouverons durant tout le débat. J’ai déjà dit que je préférerais,
au besoin, en revenir au budget. Cependant, je tiens, pour
terminer, à traiter d’une ou deux questions.
Je reviens précisément sur les propos des députés d’en face,
notamment du premier ministre et du ministre de la Justice
qui, dans leur exposé de vendredi, ont dit qu’il était impossible
de modifier la résolution car cela irait à l’encontre de l’esprit
de l’Accord. Deuxièmement, et c’est ce qui me cause le plus
gros problème, le ministre de la Justice, parlant au nom de son
gouvernement, a employé les termes suivants: «Que nous
devons tenir notre promesse envers les provinces>. Est-il utile
de rappeler que ce serait bien la première fois, depuis l’arrivée
au pouvoir de notre gouvernement, qu’il tiendrait sa promesse
sur quoi que ce soit.
J’hésite donc à accepter la défense de certaines personnes
qui nous ont donné le contrôle des prix et des salaires, nous ont
promis qu’il n’y aurait pas d’augmentation du prix du pétrole
et qu’ils démissionneraient s’ils étaient élus parce s’ils ne
pouvaient pas faire ce que l’on attendait d’eux parce qu’ils
désiraient tenir leur parole. D’autre part, il est possible que les
députés d’en face aient appris que lorsqu’on donne sa parole, il
faut la tenir. Peut-être apprendront-ils cette leçon.
J’aimerais en venir maintenant à une question plus
importante.
Des voix: Oh, oh!
M. Bosley: Les députés d’en face réagissent parfois. Je suis
on ne peut plus heureux de faire partie d’un groupe qui les fait
réagir lorsqu’on parle de la façon dont ils tiennent promesse.
J’aimerais répéter au député de Willowdale (M. Peterson) que
j’espère que son parti en tirera une leçon.
Pour terminer, j’aimerais en revenir brièvement à une question
plus importante, celle de la proposition d’amendement. La
résolution ajoute des dispositions qui ne font pas partie de
l’accord, notamment l’article tendant à appliquer ce que l’on
appelle «les articles du Canada sur les droits linguistiques des
minorités». Cela voudrait dire, à mes yeux, étant donné que
l’on ne peut pas proposer d’amendement sur des points non
visés par l’Accord, que seul le gouvernement peut présenter des
amendements ou modifier l’Accord.
Je tiens à dire, et les députés de notre parti le répéteront
sans cesse, qu’il est ridicule d’essayer de dire aux membres de
l’opposition loyale de Sa Majesté qu’ils ne peuvent rien faire
en vue d’améliorer un processus ou une résolution. Ce document,
comme nous n’aurons de cesse de le répéter jusqu’à ce
qu’il soit modifié, a des défauts fondamentaux.
Il est tellement rétrograde de demander aux députés d’appuyer,
en 1981, un document qui non seulement ne reconnaît
pas les droits ancestraux et conventionnels des autochtones
mais qui tente de nier un élément de justice fondamentale
auquel souscrivent tous les Canadiens, soit l’égalité entre les
sexes, entre les hommes et les femmes, que si nous n’en
n’étions pas saisis, j’aurais juré qu’il aurait été impossible
qu’un tel document nous soit jamais présenté.
Comme je l’ai dit au début de mes remarques, la réforme
constitutionnelle est un événement historique. Si nous nous
engageons sur cette voie et si nous sommes prêts à aller de
l’avant, il est essentiel pour les membres de mon parti et
moi-même d’honorer les engagements pris pendant la période
référendaire de 1980. Il est essentiel de répondre aux attentes
des Canadiens et de respecter l’esprit qui a originalement
inspiré les auteurs de notre droit constitutionnel. Maintenant
que le temps des réformes est venu, à cause de la force qu’ils
ont insufflée à notre pays pendant toutes ces années, respectons
leur engagement envers le Canada et les Canadiens
aujourd’hui et assurons-nous que nous agirons dans la justice
et l’honneur dès la première fois.
L’hon. Donald J. Johnston (président du Conseil du
Trésor): Monsieur l’Orateur, je n’ai pas besoin de rappeler aux
députés la signification historique du débat en cours, que vient
de souligner le député de Don Valley-Ouest (M. Bosley), ni le
caractère exceptionnel du consensus issu des divers intérêts qui
composent le Canada, ni, bien sûr, l’importance de constitutionnaliser
une charte des droits et libertés. En revanche, je
n’ai pas non plus à leur rappeler les compromis et déceptions
auxquels il a fallu se résoudre pour atteindre ce consensus. A
mon sens, on ne saurait échapper à ce genre de compromis, à
cause du plus grand bien que peut apporter le consensus.
Le député de Don Valley-Ouest a parlé de l’égalité entre les
hommes et les femmes, et des droits des autochtones. Ces
problèmes sont vraiment très aigus; ils revêtent une telle
importance que certains députés menacent de rejeter la résolution
si on n’y trouve pas une solution. Pour ma part, quelquesuns
de mes commettants de la circonscription de Saint-Henri-
Westmount m’ont demandé de voter contre la résolution précisément
pour ces raisons-là.
Il nous faut tous espérer que ces questions seront résolues
avant que la Chambre n’ait terminé l’étude de la résolution.
De toute façon, aux députés qui ne voient pas la résolution
d’un oil positif pour cette raison et à ceux de nos concitoyens
qui ne sont pas physiquement présents ici mais nous demandent
de rejeter la résolution pour la même raison, je demanderai
de réflechir sur le fait que voici.
A quoi servirait de rejeter la résolution? Le rejet de la
résolution sous sa forme actuelle reviendrait-il à une victoire
en faveur de l’égalité des sexes? Cela accroîtrait-il le moindrement
les droits des autochtones dont vient de parler le député
de Don Valley-Ouest? Cela ne servirait-il pas seulement à
réactiver le marchandage et les débats constitutionnels qui
perdurent depuis tant d’années? J’invite les députés à se rendre
compte que le projet de résolution dont nous sommes saisis ne
porte préjudice à personne. Il accorde des droits. Il n’enlève
rien. Il ne fait qu’en ajouter, et, plus important encore, il nous
donne le moyen d’effectuer d’autres changements constitutionnels
ici au Canada. Le projet de résolution donne aux Canadiens
les outils nécessaires pour achever le travail, pour
améliorer la charte en vue de répondre aux inquiétudes et
exigences légitimes de ceux qui pourraient avoir besoin d’une
protection accrue.
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13115
13116 DBT E O MNS2 oebe18
La Constitution
[Français]
Alors, monsieur le président, si nous votons contre la résolution
à cause de quelques lacunes, nous risquons de reculer, de
reléguer aux oubliettes tout le progrès réalisé jusqu’à maintenant,
de faire ressurgir des attitudes amères, sans pour autant
venir en aide aux individus et aux groupes qui n’ont pas reçu
tout ce qu’ils voulaient, tout ce qu’ils cherchaient dans la
Charte canadienne des droits et libertés. Mais ils n’ont rien
perdu non plus, monsieur le président. Ils n’ont pas encore
gagné tout ce qu’ils cherchaient, mais peut-être ceux qui ont
l’intention de voter contre la résolution le feront-ils toujours en
sachant qu’elle sera quand même adoptée, parce qu’un nombre
suffisant de leurs collègues vont agir d’une façon responsable
en appuyant un geste qui va carrément dans les meilleurs
intérêts de tous les Canadiens, y compris ceux qu’ils prétendent
protéger.
[Traduction]
Voter contre cette résolution parce qu’elle ne prévoit pas
suffisamment de choses serait une drôle de façon, à mon sens,
de faire avancer la cause de l’égalité des sexes ou des droits des
autochtones. Cela reviendrait à dire que si d’aucuns ne peuvent
obtenir maintenant tout ce qu’ils veulent en ce qui concerne
cette résolution, les autres ne devraient rien avoir. Je sais que
ce n’est pas là la mentalité ou l’idée de ceux qui contestent la
résolution, mais cela revient malheureusement au même. Voilà
ce que signifierait un vote contre la résolution.
Il est certes égoïste de priver des Canadiens des droits que
contient la charte parce que celle-ci montre certaines faiblesses,
faiblesses que, je suis le premier à l’admettre, nous
devrions tous chercher à corriger dès que la constitution aura
été rapatriée du Royaume-Uni. Mais les faiblesses n’enlèvent
rien à la résolution; ce sont des omissions. Voilà, monsieur
l’Orateur, ce que c’est que de faire des compromis et ce qui,
selon la Cour suprême du Canada, est un élément essentiel de
la tradition constitutionnelle. La tradition a maintenant été
respectée.
e (1540)
[Français]
C’est dans ce contexte, monsieur le président, que j’aimerais
aborder un sujet d’intérêt tout particulier pour les citoyens de
langue anglaise de la province de Québec. J’ai déjà cité les
requêtes que m’ont adressées ceux et celles qui m’ont demandé
de voter contre la résolution en raison des défectuosités que je
viens de mentionner et que je viens d’identifier. Il y en a bien
d’autres qui m’ont supplié de ne pas y donner mon appui parce
que dans leur optique les droits linguistiques des citoyens
québécois de langue anglaise ne sont pas suffisamment protégés
par rapport à la protection donnée aux francophones hors
Québec.
[Traduction]
Je voudrais parler quelques instants des droits à l’instruction
en anglais au Québec et surtout expliquer pourquoi j’estime
important et même essentiel, en tant que Québécois anglophone
d’appuyer la résolution sous sa forme actuelle.
C’est l’article 93 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique
qui a toujours protégé l’instruction en anglais au Québec.
Cet article garantissait le droit de dissidence à la minorité
protestante ou catholique, selon le cas, ce qui allait de pair
avec le droit d’établir une commission scolaire distincte, de
payer les taxes scolaires séparément, si vous voulez, de former
un système scolaire différent basé sur la différence de religion.
Tous ces droits existent toujours, bien sûr. D’après certains
juristes les dispositions de l’article 93 pourraient également
protéger les droits linguistiques. La Cour suprême du Canada
ne s’est jamais prononcée sur ce point.
J’en arrive à l’article 23 de la résolution à l’étude. Quel est
son rôle? Il prévoit que les citoyens qui ont le français ou
l’anglais pour langue maternelle peuvent faire instruire leurs
enfants dans leur langue maternelle. Telle est la disposition
dont je parlerai tout à l’heure et qui ne s’applique pas au
Québec. Cet article prévoit également qu’ils peuvent faire
instruire leurs enfants dans la langue dans laquelle ils ont
eux-mêmes reçu leur instruction au Canada.
Cette dernière disposition de l’article 23 a été baptisée
clause du Canada car elle permet aux citoyens canadiens de
circuler librement d’une province à l’autre. Toutes les provinces,
sauf la mienne, ont accepté intégralement les dispositions
de l’article 23 à savoir les critères relatifs à la langue maternelle
et à la langue dans laquelle les parents ont reçu leur
instruction.
Les neuf autres provinces les ont acceptés et c’est là un très
grand pas en avant. La minorité francophone hors Québec se
trouve ainsi protégée pour la première fois de notre histoire et
c’est là un progrès très important. L’acceptation du critère de
la langue maternelle est particulièrement important pour les
provinces autres que le Québec car il y avait jusqu’ici peu
d’écoles pour les minorités francophones. Par conséquent, le
critère de la langue maternelle est essentiel pour assurer la
protection de la minorité francophone hors Québec.
Au Québec, la situation est différente. Grâce à l’article 93
dont je parlais il y a un instant, les Québécois anglophones ont
toujours eu leurs écoles. Le critère de la clause Canada protège
les Québécois anglophones et tous les citoyens canadiens originaires
des autres provinces qui viennent au Québec et dont le
père ou la mère a suivi les cours primaires en anglais dans
n’importe quelle région du Canada.
La disposition relative à la langue maternelle dont j’ai parlé
serait également avantageuse pour le Québec. Elle protégerait
les Canadiens anglophones et les citoyens naturalisés originaires
d’autres pays du monde dont les enfants voudraient éventuellement
suivre les cours dans une école anglaise au niveau
primaire. C’est à ce point de vue que la disposition sur la
langue maternelle serait la plus intéressante, à mon sens. Pour
des raisons dont je parlerai dans un moment, cette disposition
n’entrera en vigueur que lorsque l’Assemblée nationale ou le
gouvernement de la province le permettra. En réalité, il ne faut
pas s’attendre à ce que le gouvernement actuel accepte, pour
des motifs d’ordre politique. C’est la différence qui existe entre
l’application de l’article 23 au Québec et son application dans
le reste du Canada.
Pourquoi accepterions-nous de modifer l’application de l’article
23 dans le cas du Québec? Pourquoi moi, à titre de
représentant anglophone d’une circonscription québécoise où
habitent beaucoup d’anglophones, suis-je d’accord pour
appuyer la résolution dans sa forme actuelle? J’ai pris ma
décision après avoir pesé les avantages et les inconvénients à
long terme de la position que, instinctivement et intellectuellement,
je dois le dire, je trouve la plus intéressante. En d’autres
termes, l’article devrait être imposé en entier. Dans le monde
DEBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
13116
La Constitution
rationnel de la pure théorie, monsieur l’Orateur, ce serait non
seulement l’attitude logique à adopter, mais aussi, à mon avis,
dans le monde actuel, ce serait agir comme une personne
civilisée.
Cependant, dans le monde réel tel que nous le connaissons
maintenant au Québec, la prudence et la sagesse politiques
dictent une autre ligne de conduite. Nous ne devons pas gagner
la bataille pour ensuite perdre la guerre. La guerre contre le
séparatisme se poursuit. Mes collègues du Québec sont convaincus
qu’on interpréterait mal l’imposition de la disposition
sur la langue maternelle et que cela donnerait une arme
dangereuse aux partisans du séparatisme.
Quant à la clause Canada, c’est une toute autre question. En
1977, lors de la conférence des premiers ministres tenue à St.
Andrews, M. Lévesque avait proposé à chacune des autres
provinces un accord semblable. Il leur a refait son offre l’année
suivante à Montréal. La clause Canada s’inspire donc d’une
idée de M. Lévesque et le principe de réciprocité qu’elle
renferme figure dans l’article 86 de la loi 101. Voilà pourquoi
la clause Canada n’apporte rien de neuf. Ce n’est pas une
disposition à laquelle M. Lévesque ou encore ses partisans
séparatistes pourraient s’opposer pour des questions de principe.
En outre, cette disposition me paraît jouir de la faveur
d’une bonne majorité des députés du parti libéral provincial du
Québec.
Voilà qui m’amène au deuxième objet de mes préoccupations.
Indubitablement, monsieur l’Orateur, nous aurons une
autre confrontation avec M. Lévesque et son gouvernement
séparatiste avant que ne se dissipe enfin l’incertitude qui règne
en ce moment sur le Québec. Cette confrontation pourra
prendre divers aspects, entre autres celui d’un référendum ou
d’élections provinciales. M. Lévesque et ses collègues choisiront
sûrement le moment qui leur semblera le plus opportun.
L’heure venue, il nous faudra alors pouvoir compter sur l’appui
concerté qui nous a valu notre éclatante victoire lors du
référendum de 1980. Il nous faudra l’appui de tous les Québécois.
Même si, dans un sens, beaucoup d’entre eux sont nationalistes,
ils demeurent néanmoins entièrement fédéralistes.
Certains de ces fédéralistes ont pour principe qu’on ne saurait
rien imposer qui porte atteinte de quelque façon que ce soit
aux pouvoirs de l’Assemblée nationale. Voilà les mises en
garde qu’on m’a faites. Certes, je respecte ces points de vue,
mais je persiste à refuser néanmoins de souscrire à toute
résolution constitutionelle qui n’impose pas au moins la clause
Canada.
Du côté opposé, il faut compter avec les membres de la
collectivité anglophone, qui réclament avec insistance l’application
intégrale de l’article 23, en dépit du fait que pareille
initiative donnerait de nouvelles armes au Parti québécois pour
les raisons que j’ai déjà mentionnées.
0 (1550)
En outre, l’imposition de cet article risquerait de diviser le
parti libéral provincial lui-même, de lui faire un tort irréparable.
Nos collègues provinciaux sont indispensables à la coalition
qu’il faut établir pour vaincre réellement et définitivement
le Parti québécois et son option séparatiste. J’espère que le
terrain mitoyen que nous avons choisi servira de plate-forme à
cette coalition et que M. Ryan, qui réellement a joué un rôle
magnifique dans le débat référendaire et pour lequel j’ai le
plus grand respect et une admiration profonde viendra se
joindre à nous. Plutôt que de faire éclater le groupe des
fédéralistes québécois, j’accepte un compromis invoquant la
clause Canada, laquelle élargit les droits des Québécois anglophones
et permettra à tous les fédéralistes de tous partis et
opinions de s’unir pour combattre le séparatisme. Bien sûr, je
préférerais que s’appliquent les dispositions de la première
partie de l’article 23 qui concernaient la langue maternelle,
mais il faut quand même tenir compte des réalités politiques
du Québec en ces années 80.
Et à propos de question linguistique, permettez-moi de
revenir à mes observations du début. La résolution apporte un
complément de protection à la minorité anglophone du
Québec. Elle impose la clause Canada, laquelle va empêcher
tout affaiblissement nouveau des droits de la collectivité anglophone
existante et garantir que les autres Canadiens anglophones
venus au Québec pourront fréquenter de droit les écoles
anglophones. Ces garanties n’existent pas en ce moment.
Il pourrait en falloir de nouvelles, par exemple celle de la
langue maternelle. Toutefois, envisageons de pareilles améliorations
dans l’optique de mes observations antérieures sur les
droits autochtones et l’égalité des sexes. Une fois la constitution
rapatriée, faisons en sorte de l’améliorer par rapport à
celle qui fait l’objet de la résolution à l’étude. Mais ne compromettons
pas les progrès remarquables accomplis et les droits
supplémentaires acquis grâce à la clause Canada, qui va
s’appliquer au Québec aux termes de cette résolution. Voter
contre une résolution qui élargit la garantie actuelle au bénéfice
des Québécois anglophones parce qu’il y a de nouvelles
garanties pour les Canadiens francophones hors Québec, ce
serait jouer les chiens du jardinier qui ne mangent pas de
choux et n’en laissent pas manger aux autres. Un peu comme
le paysan qui ruinerait sa récolte pour en priver les citadins.
[Français]
J’aimerais également discuter dans ce contexte, monsieur le
président, de la liaison entre l’économie de la province de
Québec et ce débat constitutionnel. On sait très bien qu’il est
quasiment impossible d’arriver à une entente avec le gouvernement
du Québec en ce qui a trait à ces questions constitutionnelles,
si l’option sépératiste demeure toujours son objectif. Je
suis avec mes collègues très déçu de cette situation, non
seulement parce que j’aimerais que cette histoire de la constitution
soit réglée, mais parce que tant que cette période
d’incertitude existera et sera prolongée, j’ai peu d’espoir de
voir un relancement de notre économie dans la province de
Québec. Voilà la liaison entre l’économie et la constitution que
parfois on oublie. Le Québec est bel et bien en difficulté
financière. Cela a été confirmé, il me semble, par le ministre
des Finances, M. Jacques Parizeau, la semaine dernière. Et,
bien sûr, le gouvernement du Québec continue de blâmer le
Canada pour tous ses problèmes. Cette stratégie va sans doute
s’accélérer afin de camoufler une gestion économique déplorable.
Qui peut faire confiance à un gouvernement qui est prêt à
donner des millions de dollars des contribuables pour satisfaire
de désir nationaliste de ses ministres d’acheter la société
Asbestos mais qui, en même temps, réduit d’un demi-milliard
de dollars les services sociaux? C’est honteux!
23 novembre 1981 DÉB3ATS DES COMMUNES 13117
13118 DÉBATS DES COMMUNES 2 oebe18
La Constitution
Avant que le gouvernement de M. Lévesque ne cesse de
semer la zizanie dans le monde des affaires provinciales,
canadiennes et internationales, le Québec est destiné à rester
dans ce gouffre économique. Un élément fondamental qui
pourrait nous aider à en sortir, monsieur le président, c’est la
fin de ce débat interminable sur la constitution et l’avenir du
Québec assuré au sein d’un Canada fort et uni.
Dans l’intérêt de tous les Québécois, M. Lévesque devrait
accepter les compromis offerts par M. Trudeau, mais il ne veut
rien savoir. Ces compromis, appuyés par les députés fédéraux
qui parlent pour les intérêts et les aspirations des Québécois,
sont très raisonnables et très importants. Par exemple, s’il nous
manque des ressources financières dans la province de Québec,
parfois il nous manque également des ressources humaines. Il
nous arrive très souvent, monsieur le président, d’avoir besoin
d’ingénieurs, de scientifiques, de professeurs et de spécialistes
dans le domaine de la haute technologie. Nous avons besoin de
ces gens comme chaque pays, chaque province, chaque région
en a besoin, si nous désirons progresser sur le plan industriel.
Leur présence est indispensable. La modernisation et les industries
de haute technologie sont absolument indispensables pour
l’avenir industriel de notre province, si nous désirons rationaliser
les secteurs mous de l’économie, comme le textile et la
chaussure. Et le gouvernement fédéral, comme on le sait,
monsieur le président, vient de consacrer plus de 250 millions
de dollars à cette fin. Ces gens-là ne vont pas remplacer les
Québécois, mais ils vont créer des emplois dans de nouvelles
entreprises, des emplois plus rentables dans les domaines où
nous pouvons entrer en concurrence au niveau mondial. Je cite
comme exemple l’industrie aérospatiale où, grâce aux programmes
fédéraux, nous avons déjà au Québec l’infrastructure
sur laquelle nous pouvons bâtir davantage.
Voilà l’importance de l’article 23, qu’on appelle la clause
Canada. Cette clause importante parle que si un citoyen
canadien qui vient dans la province de Québec a reçu son
éducation à l’école anglaise, il aura droit d’envoyer ses enfants
à une école anglaise dans la province de Québec. Cette protection
minimale est indispensable si l’on veut attirer les Canadiens
au Québec pour commencer à satisfaire aux besoins que
je viens de mentionner. Comme je l’ai déjà indiqué en anglais,
monsieur le président, parce que M. Lévesque lui-même a
offert en 1977, à cette conférence à St. Andrews, d’exécuter
des accords réciproques avec les provinces pour garantir les
écoles aux minorités francophones ou anglophones, selon le
cas, la clause Canada imposée par cette résolution aura pour
effet de faire valoir les idées qu’il a lui-même exprimées. Donc,
avec cette clause Canada, monsieur le président, nous avons un
élément très important pour l’économie de la province de
Québec.
[Traduction]
En terminant, s’il y a vraiment un cas où l’on peut dire que
le tout est plus grand que ses parties, c’est bien celui de notre
pays, le Canada. Les pères de la Confédération ont eu la
perspicacité de chercher à réaliser ce rêve et ces 144 années
écoulées apportent un témoignage éloquent à l’appui de leur
conviction. Peu de temps avant sa mort, sir John A. Macdonald
déclarait ce qui suit:
Si je pouvais influencer les Canadiens, si j’avais une certaine emprise sur eux,
je leur laisserais en héritage le conseil suivant: Quoi que vous fassiez, demeurez
unis. Nous formons un grand pays et deviendrons un des plus puissants au
monde si nous le préservons; nous serons réduits à l’insignifiance et à l’adversité,
si nous permettons qu’il soit morcelé. Dieu et la Nature ont fusionné les deux
Canadas en un seul, ne laissons aucun séditieux les séparer.
Tous les députés, je crois, acceptent le défi de sir John
Macdonald. Nous ne laisserons pas les séditieux séparer le
Canada et priver des générations de Canadiens de ce grand
patrimoine.
g (1600)
L’adoption de la résolution dont la Chambre est saisie
aujourd’hui, monsieur l’Orateur, constitue une étape importante
visant à assurer que le Canada restera plus grand que la
somme de ses parties, au grand avantage de toutes les générations
futures de Canadiens.
Des voix: Bravo!
L’hon. Jake Epp (Provencher): Monsieur l’Orateur, c’est
une fois encore un honneur pour moi que de participer à
l’élaboration de notre constitution canadienne. Mais avant
d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais remercier le ministre
de la Justice (M. Chrétien) qui, avant de quitter la Chambre
cet après-midi, m’a fait savoir qu’il ne pourrait pas assister à
mon intervention. J’ai cru comprendre qu’il lui fallait téléphoner
à certains premiers ministres, chose que certains d’entre
nous ont également dû faire au cours des derniers jours, des
dernières semaines et des derniers mois. Je me rends compte
du travail que cela représente pour lui aujourd’hui.
Il y a 116 ans, le Parlement provincial du Canada entamait
le débat sur la confédération des colonies britanniques d’Amérique
du Nord. Tandis que ce sont des hommes pragmatiques
comme MacDonald, Cartier, Brown et Galt qui ont exposé les
avantages immédiats du programme confédératif, c’est
Thomas D’Arcy McGee qui a énoncé pour sa part le principe
général qui devait servir de fondement à la nouvelle nation.
Voici ce qu’il a déclaré:
L’être humain, parmi les peuples les plus libres, porte fréquemment au
principe fédéral un attachement profond, dans les temps faciles aussi bien que
dans l’adversité, qui m’incite à croire que ce principe a des racines très profondes
dans la nature humaine elle-même, et que c’est une excellente base de
gouvernement.
Depuis 114 ans que dure la confédération que ces hommes
ont contribué à créer, les Canadiens ont débattu du principe
fédéral qui constitue la pierre angulaire de la nation
canadienne.
D’un côté, il y a ceux qui ont commencé à s’impatienter
devant le régime fédéral et qui se sont mis à croire que le
fédéralisme n’était plus une solution viable. Ils ont estimé qu’il
se justifiait d’abandonner la tradition canadienne voulant
qu’on arrive à un compromis et à un consensus sur les grandes
questions constitutionnelles au profit de la constitutionnalisation
d’une charte des droits et d’un clarification de l’administration
des ressources.
23 novembre 1981
l3118
23 novembre 1981DBASDSCMUE139
D’autre part, il y a ceux qui se sont battus pour le respect du
fédéralisme. Selon nous, le rapatriement unilatéral se fondait
sur une fausse hypothèse, soit que le régime fédéral ne fonctionnait
plus et qu’il était impossible de réaliser des progrès
grâce à des compromis et à un consensus. Nous n’étions pas du
tout d’accord là-dessus.
Le 2 octobre 1980, le très honorable chef de l’opposition (M.
Clark) a déclaré que le projet constitutionnel du gouvernement
allait à l’encontre du principe du fédéralisme. Depuis, sous ses
ordres, le parti progressiste conservateur fédéral a insisté à
tous coups auprès du gouvernement pour que le régime fédéral
soit protégé. Nous étions de ceux qui croyaient que le régime
fédéral pouvait encore fonctionner si tous nos dirigeants politiques
le voulaient vraiment.
Le 2 novembre dernier, près d’un an après la date limite que
le gouvernement avait fixée à l’origine pour le débat sur son
projet de rapatriement unilatéral, il s’est passé une chose pour
laquelle ceux d’entre nous qui avaient défendu le principe du
fédéralisme avaient lutté durement. Onze dirigeants politiques
qui représentaient et reflétaient la diversité du Canada se sont
réunis pour discuter de la résolution constitutionnelle.
Si cette réunion a eu lieu, c’est parce que la Cour suprême
du Canada avait décidé que le projet du gouvernement était
anticonstitutionnel. C’est de l’aboutissement de cette réunion
que nous discutons maintenant. Si la Cour suprême a pu
rendre cette décision avant que le gouvernement ne se hâte de
faire adopter son projet en Grande-Bretagne c’est uniquement
parce que, dirigé par notre chef, notre parti a lutté longuement
au Parlement le printemps dernier. Bien des Canadiens ont
peut-être oublié que le chef du Nouveau parti démocratique
(M. Broadbent) nous avait dit à l’époque que nous étions en
train de gaspiller l’argent des contribuables et que nous
devrions en finir, même s’il avait appuyé notre position plus
tôt.
Malgré cela, nous avons continué à lutter pour permettre à
la Cour suprême du Canada de rendre sa décision. Nous avons
continué à espérer que les premiers ministres du Canada
profiteraient de l’occasion que nous leur avions donnée pour se
réunir une fois de plus.
Ils ont profité de cette occasion le 2 novembre. Puis, le 5
novembre, les dirigeants politiques du Canada nous ont
redonné confiance dans le régime fédéral. Ils ont prouvé qu’ils
pouvaient oublier leurs intérêts personnels, politiques et régionaux
et aboutir à un compromis pour le bien de tous les
Canadiens. Je signale aux députés que le même esprit doit
nous animer à la Chambre.
Quand nous nous portions à la défense de la tradition
fédérale du consensus, nous étions souvent taxés de naïveté ou
encore accusés de ne point vouloir souscrire à des mesures
valables comme la Charte des droits et libertés. Nous avons
toutefois conservé notre foi en la nation, en le principe du
fédéralisme et en nos dirigeants politiques. En fin de compte,
j’estime que tous les Canadiens partageant nos convictions en
ce sens en ont été récompensés.
Quelle est donc cette résolution dont on nous a saisis et
comment se compare-t-elle à l’originale? Les Canadiens ont
été récompensés de leur patience par une nouvelle résolution
constitutionnelle passablement différente de celle que nous
avons discuté l’automne, l’hiver et le printemps derniers.
La Constitution
Lors de nos interventions dans ces débats, moi-même et
d’autres de mes collègues avons exposé quatre principales
objections à la proposition gouvernementale. La première
objection portait sur le caractère unilatéral de l’initiative fédérale.
La résolution à l’étude aujourd’hui a été sanctionnée par
dix gouvernements canadiens et représente le fruit des compromis
consentis par toutes les parties intéressées. Voilà pourquoi
les Canadiens auront une constitution véritablement canadienne,
élaborée au Canada, grâce à la tradition canadienne
du consensus.
Nous nous opposions en deuxième lieu à la formule provisoire
d’amendement qui aurait assujetti le Canada à la tyrannie
de l’unanimité plusieurs années durant. Pareille formule
compliquée nous avait paru inutile car il était possible de
s’entendre une fois pour toutes sur une méthode pour modifier
la constitution dans le futur, si les gouvernements fédéral et
provinciaux acceptaient de se réunir encore une fois pour en
discuter.
Il n’y a pas de formule provisoire d’amendement dans la
nouvelle résolution. Et il y a donc lieu de nous demander
pourquoi il en est ainsi. La réponse est simple; l’accord que
nous avons toujours cru possible s’est enfin concrétisé.
L’ancienne résolution renfermait aussi une formule permanente
d’amendement à laquelle nous nous opposions. La formule
de Victoria, formule dépassée, ne correspondait ni aux
réalités de l’actualité canadienne, ni au Canada de demain.
Les provinces n’y étaient pas traitées sur le même pied d’égalité
et le centre du Canada jouissait d’un veto permanent aux
dépens des autres régions.
Depuis le 2 octobre de l’année dernière, notre parti a
maintenu que la formule d’amendement dite de Vancouver qui
a rallié l’opinion de la majorité représentait la base raisonnable
d’une entente entre tous les gouvernements. La formule de
Vancouver avait l’avantage de placer les provinces sur un pied
d’égalité et d’être souple tout en protégeant toujours la diversité
du Canada.
C’est cette formule, adaptée grâce à la coopération entre les
gouvernements, qui a été retenue dans le projet de résolution.
Mais c’est l’autre formule d’amendement, qui créait diverses
catégories de provinces et donc, par extension, diverses catégories
de citoyens au Canada, que nous nous sommes acharnés à
faire supprimer du projet de résolution. Ceux d’entre nous qui
ne viennent pas des provinces centrales ont jugé qu’il était
temps que non seulement on nous reconnaisse des droits égaux,
mais qu’on nous donne également l’occasion de contribuer à la
vie du pays tout autant que les autres.
Parmi les propositions initiales du gouvernement, il en était
une que nous trouvions très dangereuse et considérions comme
un grave facteur de division. Il s’agissait de la disposition
prévoyant la tenue d’un référendum, contrôlée entièrement par
le gouvernement fédéral, qui se prêtait à des abus éventuels et
aurait suscité d’inutiles conflits dans le pays. D’après certaines
personnes, c’est dans le référendum que la démocratie s’exprime
sous la forme la plus concrète, mais quand on étudie
l’ancienne résolution, on constate que le référendum en question
risquait de semer la discorde, la contestation et la rancoeur
au lieu de déboucher sur une entente. Les Canadiens ne
voulaient pas d’une constitution qui risque de provoquer un
affrontement entre régions et entre voisins. Les Canadiens
DEBATS DES COMMUNES 13119
23 novembre 1981
La Constitution
avaient besoin d’une constitution qui les unisse et c’est ce qu’ils
voulaient.
Il n’est nullement question de référendum permanent dans
la résolution actuelle. Les chefs politiques canadiens ont eu la
sagesse de signaler qu’il était inutile de prévoir un mécanisme
dangereux qui soit une source de dissensions et qui, à l’instar
des décisions unilatérales, soit l’indice d’une certaine méfiance
à l’égard du principe même du fédéralisme.
Tout au long du débat sur l’ancienne résolution, notre parti
a proposé une série de compromis qui nous auraient permis
d’écarter nos principales objections. Nous avons surtout
demandé que tous nos gouvernements se remettent à discuter
des propositions constitutionnelles. Quand ils se sont finalement
décidés à renégocier, ils ont écarté les mesures les plus
contestables de l’ancienne résolution et ils ont préparé une
toute nouvelle résolution dont les Canadiens devraient être
fiers.
L’entente constitutionnelle intervenue entre dix gouvernements
canadiens et les partis de l’opposition à la Chambre,
s’est réalisée dans une charte des droits et des libertés dont les
Canadiens devraient être extrêmement fiers.
La charte des droits et des libertés à l’étude aujourd’hui
renferme les dispositions essentielles introduites par le comité
spécial mixte de la constitution, pour répondre aux instances
de plusieurs milliers de Canadiens, sauf quelques-unes dont je
parlerai plus tard. Aujourd’hui, ces instances sont incorporées
dans un document qui permettra aux tribunaux, au Parlement
et aux assemblées législatives de protéger activement les droits
de tous les Canadiens.
e (1610)
Les premiers ministres provinciaux ont fait un apport particulier
en introduisant la notion de prépondérance législative. Il
s’agit d’une innovation importante qui rendra encore plus
efficace la charte des droits et des libertés. Je crois qu’il est
important que les Canadiens comprennent bien cette innovation,
surtout que certains laissent entendre qu’il en résulte une
charte «diluée».
Aucun pays du monde, pas même le Canada, n’a mis au
point un régime qui puisse garantir parfaitement le respect des
droits des citoyens. Le Parlement et les Assemblées législatives
du Canada ne sont pas parfaits. Ces institutions ont commis
des injustices envers des particuliers et des groupes minoritaires.
Mais la Cour suprême du Canada n’est pas infaillible non
plus. Elle est également susceptible de se tromper et de
commettre des injustices envers les Canadiens. Dans un monde
imparfait, les Canadiens doivent choisir entre les fragiles
institutions humaines et décider à laquelle de ces institutions
confier l’autorité suprême.
La prépondérance législative accorde cette autorité suprême
aux représentants élus du peuple, mais seulement en dernier
recours. Voici comment cela fonctionne en pratique. Supposons
qu’à l’avenir, la Cour suprême décide qu’en autorisant la
prière dans les écoles publiques, une loi provinciale enfreint la
charte et plus précisément ses dispositions concernant la liberté
de culte. L’Assemblée législative de la province devra alors se
demander si cette loi est suffisamment importante ou populaire
pour qu’il soit impérieux de l’appliquer. L’Assemblée
pourrait décider que le tribunal a mal interprété l’intention des
auteurs de la charte ou encore la volonté du peuple.
Ayant décidé que la loi vaut la peine d’être conservée, le
Parlement ou l’Assemblée législative devra alors déclarer
publiquement son intention d’adopter la loi en question tout en
sachant qu’elle va à l’encontre de la charte des droits et des
libertés. De plus, l’Assemblée devra adopter cette loi tout en
sachant qu’il faudra la réétudier et l’adopter de nouveau tous
les cinq ans. Manifestement, un gouvernement ne s’engagera à
le faire que s’il est convaincu que la loi en question est très
importante et est appuyée par la majorité du peuple. Voilà
probablement pourquoi, au Canada, aucun des gouvernements
provinciaux qui ont inclus des clauses dérogatoires dans leur
déclaration des droits n’y a encore jamais eu recours.
Il importe que les Canadiens comprennent que ni le Parlement
ni une assemblée provinciale ne choisiraient de ne pas
respecter la garantie, dans le cas qui nous occupe, de la liberté
de culte. Tout ce qu’ils feraient, ce serait de déclarer que telle
ou telle loi devrait être promulguée même si elle entre en
conflit avec la liberté de culte. Les divers gouvernements du
Canada se sont tous engagés à protéger nos droits traditionnels,
telles les libertés de culte et de parole. Dix gouvernements
du Canada se sont aussi engagés à garantir des droits d’inspiration
plus moderne, et je songe ici plus précisément aux droits
des personnes handicapées mentalement et physiquement.
C’est cela qui, à mon sens, fait de notre charte une charte
vraiment avant-gardiste, si je puis dire, et je suis heureux que
ces dispositions en fassent partie.
L’importance de l’engagement qu’ont pris les gouvernements
fédéral et provinciaux à l’égard des droits contenus dans la
charte ne devrait pas être sous-estimée. Cet engagement est un
pas vers la constitutionnalisation d’autres garanties pour lesquelles
notre parti a manifesté un certain intérêt. Il y a plus,
tous les efforts qui ont été accomplis, tous les beaux discours
qui ont été prononcés et toutes les promesses qui ont été faites
par tous les partis représentés à la Chambre pendant les
audiences du comité de la Constitution auraient été vains si les
gouvernements provinciaux ne s’étaient pas engagés fermement
à respecter la Charte des droits et des libertés. Il eût été
impensable d’accepter une charte des droits et des libertés que
les provinces refusent parfois d’observer. Comment décider de
ne pas respecter certains droits, par exemple?
Certains députés s’entêtent et prétendent qu’une charte des
droits et des libertés est un document purement symbolique,
qui ne peut pas protéger les droits des citoyens. Je suis de ceux
qui tiennent beaucoup aux droits hérités du droit coutumier
britannique, mais je suis convaincu que la charte des droits et
des libertés permettra au gouvernement de réparer certaines
injustices. Ainsi, les Américains d’origine japonaise, sans être
protégés par le charte des droits américaine, ont reçu des
indemnités après la guerre. Par contre, les Canadiens de même
origine n’ont pas encore été indemnisés. Il y en a un dans ma
circonscription. Ce qu’il faut craindre, c’est que le gouvernement
lui-même, non pas nos concitoyens, viole nos droits.
Par ailleurs, certains soulignent que l’URSS et d’autres
dictatures ont constitutionnalisé une charte des droits, ce qui
n’empêche pas ces pays de violer les droits de la personne tous
les jours. Que répondons-nous à cela?
J’ai dit plus tôt que nos institutions gouvernementales sont
faillibles parce que nous sommes des êtres humains faillibles.
Cependant, la différence entre l’URSS et les démocraties est
évidente. Les dictateurs se servent des chartes pour faire de la
13120 DÉBATS DES COMMUNES 23 novennbre 1981
11t novepmbre 1981 DÉBATS DES COMMUNES132
propagande et ils n’ont aucune intention, dans leur pays ou sur
la scène internationale, de respecter les droits qu’ils confèrent
si pieusement.
J’aimerais maintenant faire quelques remarques personnelles.
Mon père et sa famille sont arrivés au Canada dans les
années 1920. On leur a donné la liberté. Certes, on leur a
donné la liberté sans une charte. Mais pour beaucoup d’immigrants,
parce qu’ils ont perdu leur pays et leur citoyenneté, la
charte est un symbole, une garantie écrite des droits qu’ils
défendent si vigoureusement. Une charte peut bien n’avoir
aucune signification. Mon oncle a passé 22 ans aux travaux
forcés dans le Goulag soviétique. Encore aujourd’hui on défend
à mes cousins de retourner en Ukraine où leur famille a vécu;
ils doivent rester dans ce qu’on appelle les terres vierges. Le
fait que les Soviétiques reconnaissent certains droits ne veut
rien dire. Leur charte sert purement et simplement à des fins
de propagande. Mais le but que poursuivent les autorités
soviétiques et les mesures qu’elles prennent ne peuvent se
comparer à la situation du Canada et au désir des Canadiens
de protéger leurs droits fondamentaux.
Le 6 octobre 1980, le ministre de la Justice (M. Chrétien) a
laissé entendre que le gouvernement poursuivait l’oeuvre du
très honorable John George Diefenbaker. A ce moment-là, rien
ne pouvait être plus faux. Le premier ministre Diefenbaker
aimait et respectait beaucoup trop le Canada pour agir unilatéralement,
à l’encontre des principes d’un régime fédéral.
Mais je suis aussi convaincu que le premier ministre Diefenbaker
rêvait du jour où tous les gouvernements provinciaux
s’engageraient à constitutionnaliser une charte des droits. Les
premiers ministres fédéral et provinciaux actuels ont fait en
sorte que ce rêve puisse devenir réalité.
La Charte canadienne des droits et libertés affirme et étend
les libertés de tous les Canadiens. Toutes les générations à
venir de Canadiens devraient en être fières.
Si les premiers ministres ont rédigé un document dont tous
les Canadiens doivent être fiers, certains s’étonneront que
notre parti propose des changements à l’accord. C’est peut-être
parce que, comme sir John A. Macdonald l’a dit un jour de la
constitution américaine:
Dire qu’elle a des défauts, c’est dire qu’elle n’est pas l’ouvre de l’omniscience,
mais de l’intelligence humaine.
Nous ne devons pas oublier que nos premiers ministres, en
quatre jours de réunions intensives, n’ont peut-être pas eu le
temps de peser toutes les répercussions de certaines de leurs
décisions.
Je dis que le Parlement a un rôle à jouer pour veiller à ce
qu’il soit tenu compte des droits de tous les Canadiens, et pour
soumettre le travail des premiers ministres à un second examen
objectif, expression qu’on n’applique pas souvent à la Chambre.
Qu’il y ait place pour des améliorations et un travail de
réflexion est évident du fait que la résolution que nous débattons
n’est pas identique à celle qu’aurait donnée l’accord
constitutionnel.
Le fait d’assujettir à l’article de dérogation la garantie de
droits égaux pour les hommes et les femmes a causé un tollé
général, et celui de ne pas garantir les droits des autochtones
dans la nouvelle résolution a aussi causé un scandale. Les
protestations des femmes et des autochtones étaient entièrement
justifées. Il semble maintenant que les droits de ces deux
groupes importants de Canadiens seront confirmés dans l’accord
final qu’approuvera le Parlement. C’est bon signe.
La Constitution
C’est bon signe parce que cela indique que bien des Canadiens
veulent jouer un rôle dans les accords, lesquels sont
souvent conclus à huis clos par les premiers ministres. Les
Canadiens veulent faire en sorte que ces accords reflètent
vraiment la diversité de la Fédération canadienne. Les Canadiens
ont prouvé qu’ils voulaient participer à la modification de
la constitution.
Je voudrais me pencher quelques instants sur les droits des
autochtones. On me demande parfois pourquoi je voudrais que
la constitution donne de meilleures garanties que les droits
prévus maintenant à l’article 25. Voici un des exemples concrets
dont je me sers pour expliquer ma position. Supposons,
monsieur l’Orateur, que vous avez acheté un terrain d’un quart
de section et que, quand vous recevez le titre de propriété, vous
constatez que les 40 acres du fond ne sont pas inclus dans votre
quart de section. Vous découvrez tout à coup qu’au lieu d’avoir
160 acres comme c’était entendu au moment de la vente, vous
n’en avez que 120.
0 (1620)
Elles sont nombreuses aujourd’hui au Canada les tribus
indiennes dont on n’a pas respecté les traités. Elles ont toujours
droit aux avantages qu’on leur avait promis. Elles n’ont pas
encore accès à certaines terres en Colombie-Britannique et il
reste des traités à signer pour les terres situées au nord du 60-
parallèle. Les Canadiens doivent savoir que nous cherchons
simplement à rétablir la justice. Nous leur recommandons de
se mettre à la place des autochtones et de se demander s’il est
acceptable que la suite donnée aux accords soit différente de ce
qui avait été entendu au départ.
En ce qui concerne l’article 28, notre parti, comme l’a
proposé mon chef vendredi dernier, veut que l’on reprenne
dans la résolution le texte approuvé par le comité mixte.
A en juger par les progrès accomplis dans les négociations
qui se déroulent ces jours-ci, on peut espérer qu’un accord
interviendra et que des amendements seront apportés à la
proposition constitutionnelle.
Vendredi dernier également, le ministre de la Justice (M.
Chrétien) a invité chaque député à exercer de douces pressions
pour faciliter un accord sur les questions litigieuses. C’est dans
cet esprit, en toute objectivité, que notre parti a cherché un
terrain d’entente concernant les droits des femmes et des
autochtones. Tous les partis et tous les députés doivent éviter
d’insister sur le rôle qu’ils entendent jouer dans ces ultimes
négociations. Il est plutôt temps pour nous tous de nous
appliquer calmement à faire en sorte que ces changements
figurent dans la résolution.
C’est dans ce même esprit que des membres de notre parti
ont cherché à rendre l’accord constitutionnel acceptable pour
les Québécois et peut-être aussi pour leur gouvernement. En
ma qualité de Canadien de l’Ouest, je me souviens de l’isolement
et de l’aliénation que nous avons ressentis au moment où
l’on a voulu nous imposer le projet constitutionnel, projet qui
nous semblait contraire aux intérêts de notre région et de nos
concitoyens. Nous ne devrions pas oublier aujourd’hui que les
habitants d’une autre région importante de notre pays risquent
d’éprouver les mêmes sentiments.
Encouragés par notre chef, nous nous efforçons de rendre les
propositions constitutionnelles acceptables pour les Québécois.
Telle est la raison d’être de notre amendement sur l’indemnisation
financière. Voilà pourquoi, aujourd’hui même, notre chef
13121
23 novembre
1981
13122 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
s’est mis en rapport avec le premier ministre du Québec pour
aborder la question de l’éducation dans la langue de la minorité.
Le chef de l’opposition a demandé au premier ministre du
Québec de clairement s’engager, au nom de son gouvernement,
à reconnaître à tous les citoyens canadiens le droit de s’instruire
dans la langue de la minorité. Nous demandons au
premier ministre de faire le premier pas en garantissant ces
droits, d’engager ainsi son gouvernement à accepter volontairement
de reconnaître à tous les Canadiens le droit de s’instruire
dans la langue de la minorité.
Tous les Canadiens voudraient que toutes les régions souscrivent
à l’accord constitutionnel final afin de se sentir chez
eux dans n’importe quelle province. Nous voulons, en fait, un
compromis permettant au gouvernement du Québec d’accepter
cette entente.
D’aucuns, parmi les députés, la presse et le public, pourront
dire que c’est impossible. Si c’est vrai, soyons certains que les
Québécois comprennent bien que leur gouvernement va rejeter
toutes les propositions raisonnables. Si c’est malheureusement
le cas, faisons bien comprendre aux Québécois que leur isolement
n’est qu’apparent, qu’ils le doivent à un gouvernement
qui désire davantage affirmer ses opinions séparatistes que
conclure un accord sincère dans le cadre de la fédération
canadienne.
Je voudrais m’attarder un peu sur les conséquences que cet
accord aura pour les gens vivant au nord du 60, parallèle, dans
les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon.
L’accord prévoit une formule d’amendement qui doit, je
crois, être modifiée de façon à répondre aux besoins des
Canadiens vivant au nord du 60, parallèle. Nous sommes
nombreux à espérer qu’un jour les résidents des Territoires du
Nord-Ouest et du Yukon auront un gouvernement entièrement
autonome. C’est une nécessité. Je n’arrive pas à comprendre
pourquoi ces territoires n’ont pas encore de gouvernement
entièrement autonome, pourquoi nous n’acceptons pas que les
élus du peuple n’aient de compte à rendre qu’aux citoyens qui
les ont élus et pourquoi nous ne délivrons pas cette région du
joug de la bureaucratie fédérale qui lui est imposé depuis si
longtemps. Je suppose que le changement se fait très
graduellement.
Cela dit, nous espérons qu’un jour les territoires auront un
gouvernement entièrement autonome et qu’ils pourront décider
s’il vaut mieux pour eux devenir ou non des provinces. Les
citoyens de ces régions pourront prendre cette décision sans
qu’il soit nécessaire de modifier encore la formule d’amendement;
ce n’est pas le nombre de provinces qui entre en ligne de
compte, c’est une formule surement mathématique. Un des
articles de l’Accord remet sérieusement en question, à mon
avis, l’avenir des Canadiens établis au nord du 60-; il s’agit de
l’article 41 et, plus précisément, du paragraphe (41e).
Tandis que le Parlement réexamine la résolution de façon
posée, il y aurait peut-être également lieu d’étudier les dispositions
traitant de la transformation des territoires du Canada en
de nouvelles provinces. Le pouvoir de créer de nouvelles provinces
à partir des territoires incombe à l’heure actuelle au
gouvernement fédéral. C’est ce que prévoit l’annexe 2 des
amendements apportés à l’Acte de l’Amérique du Nord britannique
de 1871. Dans la résolution, ce pouvoir incombe en
partie au Parlement, mais dans un autre article, le 41-et sur
ce point l’annexe ne correspond plus à l’article 41-le gouvernement
fédéral et les provinces se partagent ce pouvoir. Il y
aurait donc lieu de tirer au clair cette contradiction afin que
les intentions du gouvernement en cette affaire apparaissent
très clairement à tous les intéressés. Le ministre de la Justice
devrait examiner de plus près l’annexe et le paragraphe 41 e)
pour voir si nous ne pourrions pas tirer au clair la question
avant que la Chambre ne sanctionne la résolution de façon
définitive.
M. Nielsen: Il y a également le paragraphe (41j).
M. Epp: Mon collègue, le député de Yukon (M. Nielsen),
nous rappelle également le paragraphe 41 j). Je crois savoir
qu’il interviendra plus tard dans le débat pour nous donner de
plus amples détails sur la situation où se trouve le nord du
Canada.
Il est normal, lorsqu’on en arrive à un compromis, que l’une
ou l’autre des parties intéressées souhaite des changements qui
ne sauraient être apportés à ce moment-là sans sérieusement
menacer l’entente même. Par exemple, je déplore, personnellement
que les droits de propriété aient été exclus de la résolution,
et je sais que beaucoup de mes collègues, de ce côté-ci de
la Chambre du moins, partagent mon avis. J’exhorte les provinces
à revoir leur opposition à cette disposition. S’il est
possible d’inclure dans la résolution les droits relatifs à la
propriété en ce qui concerne d’autres groupes, par exemple les
autochtones, il y a sûrement moyen de garantir les droits de
propriété en laissant toute latitude aux gouvernements provinciaux,
sur le plan administratif, pour acquérir des propriétés
dans l’intérêt du bien commun.
Je voudrais également mettre en garde le Parlement et les
futurs législateurs au sujet de l’absence de droits de l’enfant à
naître. A ce sujet, je ne me fais pas le porte-parole de mon
parti et je vous expose plutôt mon opinion personnelle. Le
ministre de la Justice et ses collaborateurs prétendent que la
charte est neutre à ce sujet. J’espère que les législateurs et les
tribunaux, à cause de cette neutralité, n’aboliront pas les droits
de nos concitoyens absolument dépourvus de tout moyen de
défense. S’il me reste quelque inquiétude aujourd’hui, monsieur
le Président, c’est bien à ce propos.
Des voix: Bravo!
M. Epp: Je signale en terminant que grâce à ce débat, tous
les députés se rendent enfin compte qu’il est possible d’arriver
à un compromis constitutionnel. Quand le débat prendra fin, le
Canada aura une constitution qui renferme toutes les caractéristiques
valables de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique
qui a été si efficace par le passé. Le Canada sera également en
mesure de modifier sa constitution et nous y aurons enchâssé le
principe de l’égalité, une définition plus complète du droit des
provinces à la propriété des ressources ainsi que la charte des
droits et des libertés dont je parlais tantôt.
Je constate avec soulagement que le débat qui a débuté dans
la colère et qui a creusé de profondes divisions au Canada se
termine dans un esprit de bonne volonté. J’espère que d’autres
qui, comme moi-même, ont eu foi dans le principe fédéral dont
s’inspire notre constitution ont été récompensés et que d’autres
ont retrouvé la foi en ce principe.
13122 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
* (1630)
Dans les prochaines décennies, de nombreux défis ne pourront
être relevés que grâce à cette même tradition canadienne
de consensus et de compromis. Il est temps que nous mettions
fin à nos disputes. Il est temps d’oublier complètement les
paroles amères de l’an dernier et de nous attaquer aux défis de
l’avenir.
Il a été dit, et John A. Macdonald avait l’habitude de le
répéter, que le Canada est plus qu’une simple entité géographique.
Tous ceux d’entre nous qui se sont penchés sur la géographie
canadienne connaissent l’immensité de notre pays. Quelle
que soit la direction dans laquelle on dirige ses pas au Canada,
on ne peut qu’être impressioné par notre pays. Le Canada est
plus qu’une entité géographique. C’est un pays que chacun de
ses habitants veut améliorer à sa façon.
Au cours du débat constitutionnel de 1865, l’honorable
Georges-Étienne Cartier a déclaré:
Voici comment je perçois la diversité raciale de l’Amérique du Nord britannique:
si nous sommes de races différentes, ce n’est pas pour nous quereller mais
pour nous concurrencer et nous surpasser en vue du bien-être général. Cette
diversité fait notre force.
On peut se demander comment nous pourrions nous acquitter
de notre dette à l’égard de ceux qui ont fondé notre pays.
C’est Lord Tweedsmuir qui l’a probablement le mieux exprimé
lorsqu’il a dit: «Nous ne pouvons faire qu’une seule chose pour
payer notre dette envers le passé, et c’est de travailler pour
l’avenir». Voilà ce que nous faisons, monsieur l’Orateur, et ce
que nous devrons léguer aux générations futures.
L’hon. Judy Erola (ministre d’État (Mines)): Monsieur
l’Orateur, je suis très fière d’être Canadienne aujourd’hui.
L’égalité pour moi et pour toutes les Canadiennes n’est plus un
vain rêve. Au contraire, elle devient réelle, façonnée par des
générations. C’est l’égalité, non pas comme le veut la vieille
maxime «En tant que personnes dans des questions de peines et
de punitions», mais en tant que personnes dans des questions
de droits et d’égalité. C’est bien évident que nous voulons
l’égalité.
Quelle est cette égalité pour laquelle nous, les femmes, nous
battons? Combien de générations d’hommes et de femmes ont
posé la question: qu’est-ce que veulent les femmes? Eh bien, au
nom de nos grand-mères qu’on ne considérait même pas
comme des personnes et qui ont combattu pour le droit de vote,
au nom de nos mères qui ont travaillé pendant la guerre et qui
travaillent encore, et au nom de nos seurs, de nos filles et de
nos petites-filles, je vais vous dire ce que nous voulons. Nous
voulons que les droits soient garantis dans la charte des droits
et des libertés aussi bien aux femmes qu’aux hommes. Autrement
dit, nous voulons la version originale de l’article 28:
Indépendamment des autres dispositions de la présente charte, les droits et
libertés qui y sont mentionnés sont garantis également aux personnes des deux
sexes.
C’est aussi simple que cela. Nous voulons soustraire l’article
28 à l’application de l’article dérogatoire, et nous voulons que
le renvoi à l’article 33 soit supprimé. La charte constituera
alors une puissante déclaration d’égalité. Les tribunaux seront
ainsi invités à examiner de près toute affaire de la discrimination
fondée sur le sexe.
Je rappelle à ceux qui prétendent qu’en soustrayant l’article
28 à l’application de l’article 33, on entrave les programmes de
promotion sociale, que le projet consitutionnel déclare expressément
que les règles générales interdisant la discrimination
fondée sur le sexe, ne s’appliquent pas à ces programmes.
Pour revenir brièvement à l’histoire des Canadiennes, je suis
certaine que beaucoup de gens ne savent pas que bien avant
l’époque des suffragettes, les femmes au Québec, en NouvelleÉcosse
et au Nouveau-Brunswick avaient eu le droit de voter
et d’exercer une fonction politique. Pourquoi? Que s’est-il
passé? Il est tout simplement arrivé que personne n’avait songé
à adopter des lois leur interdisant le droit de vote. Mais vous
devinez évidemment ce qui s’est produit par la suite; on a tôt
fait d’adopter des lois les privant de ce droit.
Ce n’est que le 25 avril 1940, avec la capitulation de
Québec, la dernière province à accorder le droit de vote aux
femmes, que l’injustice a été redressée. Il est curieux de
rappeler qu’à notre époque dite évoluée, il est presque impossible
de croire qu’il a fallu attendre 1970 pour que feu le
sénateur Thérèse Casgrain devienne la première des principales
suffragettes du Canada à détenir un poste fédéral.
J’aime à croire que M- » Casgrain, qui est morte il y a
seulement trois semaines, aurait voulu être à la tribune cet
après-midi. Mais je suis sûre que son esprit est avec nous.
Les femmes ont obtenu le droit de vote et comme la plupart
des femmes le savent, nous qui nous affairions à construire nos
maisons, à nourrir le bétail, à labourer les champs, à traire les
vaches-comme ma mère l’a fait-à mettre des enfants au
monde et à les élever, avons dû nous battre pour avoir le droit
d’être reconnues comme des personnes. La plupart d’entre
nous à la Chambre connaissons bien l’affaire des «personnes»,
mais je crois utile de la rappeler. En 1928, cinq Albertaines,
les «cinq personnes» comme on les a surnommées plus tard,
Henrietta Edwards, Irene Parlby, Louise McKenney, Nellie
McClung et Emily Murphy ont demandé à la Cour suprême
du Canada de décider si les femmes étaient des «personnes»
pouvant être nommées au Sénat. La Cour suprême a évidemment
dit que non. L’affaire a été portée devant le comité
judiciaire du Conseil privé d’Angleterre qui a déclaré que oui,
les femmes étaient des personnes. Cela fait maintenant partie
du droit constitutionnel de notre pays.
Toutefois, ce fait devrait servir à rappeler aux Canadiens
que, depuis des décennies, des femmes ont participé avec
angoisse à cette démarche constitutionnelle.
Nous estimons que les femmes elles-mêmes ont influé dans
une large mesure sur les événements qui se sont déroulés
depuis un an. Elles n’ont pas laissé les rédacteurs de la
constitution l’oublier. Dès le mois de février 1981, des milliers
de femmes disaient au gouvernement fédéral que l’égalité
devait être garantie dans toute charte des droits et des libertés
constitutionnalisée. Le gouvernement y a consenti et a inséré
dans la section générale de la charte, l’article 28, donnant une
garantie spéciale.
En 1981, les trois partis à la Chambre ont souscrit à cette
garantie d’égalité entre les femmes et les hommes. Les femmes
croyaient qu’on leur garantissait ainsi que toutes les lois au
Canada placeraient les hommes et les femmes sur un même
pied. Nous avions donc une charte nettement définie renfer-
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13123
La Constitution
mant la disposition voulue. Nous avions cru avoir gagné la
bataille. Toutefois, il n’en était rien. Pourquoi? C’est que les
provinces, la Cour suprême et les partis de l’opposition ont
obligé le gouvernement à marchander pour obtenir l’assentiment
général. Les provinces ont modifié la charte sans consulter
les citoyens vivant sur leur territoire.
Tous les députés le savent-mais sans doute vaut-il mieux le
leur rappeler ainsi qu’à tous nos concitoyens-le gouvernement
fédéral a tenu des audiences constitutionnelles et un comité
comprenant des représentants de tous les partis a siégé pendant
des mois. Ce comité a écouté les observations de 303
témoins représentant des particuliers et des groupes, et il a pris
connaissance de près d’un millier de mémoires, de lettres et de
télégrammes. C’est fort de ce qu’il avait entendu que le comité
a élaboré une charte conforme aux besoins et aus aspirations
des Canadiens.
Lorsqu’elles ont constaté que la charte avait été édulcorée à
la suite des pressions que les premiers ministres provinciaux
avaient exercées, les femmes ont relevé la tête et elles ont dit
«non». Unies comme jamais auparavant, elles ont dit «non». Le
moment était venu de dire «non» aux provinces. Une bonne
partie du mérite en revient à certains groupes spéciaux et à
certaines personnes dynamiques que je nommerai tantôt. Mais
le mérite d’avoir exprimé ce «non» revient d’un manière générale
aux filles, aux mères et aux grand-mères du Canada,
qu’elles exercent leur activité à l’intérieur ou à l’extérieur du
foyer, et tout particulièrement à celles qui siègent à la Chambre.
Je songe notamment à l’honorable représentante de Kingston
et les Iles (Me Macdonald), à celle de New Westminster-
Coquitlam (Me Jewett) à celle de Vancouver-Est (M », Mitchell),
et celle de Vancouver-Centre (MI » Carney) à vrai dire à
toutes les femmes qui font partie de l’opposition à la Chambre.
0 (1640)
Il va sans dire-mais peut-être vaut-il mieux pourtant que je
le dise-que nous avons obtenu l’appui des femmes de ce
côté-ci de la Chambre et tout particulièrement celui de ma
bonne amie et collègue le ministre de la Santé nationale et du
Bien-être social (M »e Bégin) qui nous guide une fois de plus
dans nos efforts vers une réforme du régime des pensions,
réforme absolument nécessaire si nous voulons assurer la sécurité
des Canadiennes.
Je tiens également à rendre hommage au premier ministre
(M. Trudeau) qui a manifesté sa parfaite adhésion à cette
cause et sa parfaite confiance à mon égard lorsqu’il m’a
nommée ministre d’État et m’a chargé de veiller à la condition
de la femme.
Nous avons en outre obtenu l’appui sans réserve des femmes
qui siègent à l’autre endroit. Je veux parler des honorables
sénateurs Bird, Rousseau et Neiman qui ont travaillé sans
relâche à la poursuite de ces objectifs.
Qui donc a vraiment convaincu ces femmes de passer à
l’action? Deux groupes ont fourni l’élan principal, soit le
comité spécial, qui comprend notamment des femmes comme
Pat Hacker, Lynda Ryan Nye, Rosemary Billings, Marylou
McPhedran et de nombreuses autres, et le Conseil consultatif
canadien du statut de la femme-habilement dirigé, je me
réjouis de le dire, par son président Lucie Pepin-qui tous
deux ont fourni un effort très considérable au cours des
dernières semaines. Or, par pure coïncidence, le conseil se
réunissait à Vancouver au moment de la signature du projet
final de résolution, et il a agi avec une grande rapidité et une
grande efficacité. S’il subsistait le moindre doute quant à la
force et à l’intégrité du Conseil canadien sur le statut de la
femme, les événements de ces dix derniers jours ont sûrement
réussi à le dissiper.
Je tiens à rappeler à la Chambre que la présidente du
Conseil consultatif, Lucie Pepin, et bon nombre des membres
des conseils de section provinciale se sont réunis le week-end
dernier en Saskatchewan. Ces groupes ont réussi à atteindre
pratiquement toutes les Canadiennes et, je dois le dire, cela
donne des résultats. Ce réseau-on ne peut le décrire autrement-
est passé à l’action, et les femmes se sont fait entendre
auprès des premiers ministres. Les pressions se sont fait de
plus en plus fortes sur chacun d’eux jusqu’à ce qu’ils cèdent
l’un après l’autre. Mais aurons-nous la Saskatchewan? Pour
respecter l’esprit de l’accord, il nous faut avoir l’adhésion de
toutes les provinces. Je presse la Saskatchewan, son premier
ministre, ses habitants et, plus spécialement, ses femmes, de se
joindre à nous. Je suis convaincue que la raison et la justice
l’emporteront.
Je dois également dire qu’il faut attribuer une bonne partie
du mérite à un groupe de femmes qui a surtout oeuvré dans les
coulisses ces deux dernières semaines. Je veux parler de mon
bureau, celui de la Condition féminine au Canada, et de sa
coordinatrice, M-, Maureen O’Neil, qui, avec un personnel
modeste mais hautement spécialisé, nous ont tenus mes collègues
et moi au courant des conséquences qu’auraient les
diverses propositions et options présentées en cours de
négociation.
Vendredi, le chef de l’opposition (M. Clark), nous a dit qu’il
avait grandi dans une ferme où les femmes étaient égales aux
hommes. Je viens du même milieu. J’ai grandi dans une ferme,
avec cet avantage, cependant, qu’elle était voisine d’une
réserve indienne. C’est ce qui m’a aidée à comprendre qu’on
est plus injuste encore envers les femmes autochtones. Ces
femmes, y compris Sandra Lovelace, Jeanette Lavell et Mary
Two Axe Early, doivent être reconnues égales aux hommes
devant la loi; il ne doit y avoir qu’une seule loi pour tous les
Canadiens et les Canadiennes.
Je reviens encore une fois au chef de l’opposition qui,
vendredi dernier et à diverses autres occasions, nous a dit
combien il était sensible au problème, combien il le comprenait.
Une pareille attitude est bénéfique pour le pays et pour la
Chambre, car depuis une semaine, comme jamais auparavant,
les hommes qui siègent aux communes ont permis que les vues
des femmes y soient exprimées. De crainte qu’on n’aille croire
que cette lutte a été menée seulement pour les femmes et avec
les femmes, je me dois de vous citer un passage d’une lettre
reçue cet après-midi même d’un citoyen âgé.
Je suis ancien combattant et je crois avoir lutté pour l’avènement d’un monde
et d’une société meilleurs.
J’ai peine à comprendre qu’il ait fallu charger un ministre de veiller à ce que
les droits des Canadiens soient maintenus. Il ne devait pas être question de porter
atteinte aux droits d’un citoyen, quel qu’il soit. En écrivant cette lettre, j’entends
à la radio que l’on se demande si l’on va insérer ces droits ou non dans la
Constitution, ce qui me désole. Les Canadiens doivent avoir les mêmes droits et
l’on ne devrait même pas se poser de questions à ce sujet. C’est une honte
d’entendre un député oser dire le contraire.
Merci des efforts que vous faites pour que le Canada soit un pays où tous les
citoyens sont égaux.
Monsieur l’Orateur, pardonnez-nous, à nous les femmes
canadiennes, d’être optimistes, d’avoir de l’espoir et d’être un
13124 DÉBATS DES COMMUNES 23 novenmbre 1981
La Constitution
petit peu effrontées. Nous avons parcouru bien du chemin mais
nous avons encore un pas de plus à franchir.
Je terminerai sur une note plutôt optimiste et légère car
l’humour nous aide toujours dans notre croisade. Je dois
ressentir à peu près la même impression que le quart arrière
des Eskimos d’Edmonton hier, à peu près à la même heure. On
ne peut tout de même pas perdre. Un dernier botté! La partie
n’est pas encore jouée.
Des voix: Bravo!
LA MOTION D’AJOURNEMENT
[Traduction]
QUESTIONS À DÉBATTRE
L’Orateur suppléant (M. Ethier): A l’ordre. En conformité
de l’article 40 du Règlement, je dois informer la Chambre des
questions qui seront soulevées ce soir au moment de l’ajournement:
le député d’Ottawa-Vanier (M. Gauthier)-La constitution-
On propose que des représentants des minorités soient
convoqués à une réunion; le député d’Esquimalt-Saanich (M.
Munro)-Radio-Canada-La participation de joueurs de cornemuse
canadiens au carrousel international d’Édimbourg-
On demande que l’émission soit diffusée au Canada; le député
de Lethbridge-Foothills (M. Thacker)-Le budget-On
demande si le ministre est conscient des répercussions du
budget.
ORDRES INSCRITS AU NOM DU
GOUVERNEMENT
[Traduction]
LA CONSTITUTION
RÉSOLUTION CONCERNANT LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE
1981
La Chambre reprend l’étude de la motion de M. Chrétien
sur la constitution du Canada, ainsi que de l’amendement de
M. Clark (p. 13050).
M. John Kushner (Calgary-Est): Monsieur l’Orateur, c’est
un honneur et un privilège pour moi de prendre part à ce débat
historique sur notre constitution. Je suis donc rempli de fierté
mais, d’un autre côté, je suis également l’un des députés les
plus déçus de la Chambre des communes, parce que le gouvernement
actuel se trompe dans ses priorités.
Dans ma circonscription, l’été dernier, je me suis trouvé
dans des situations embarrassantes; en effet, on me demandait
ce que je faisais au sujet des taux d’intérêt, du chômage et de
la crise de l’énergie. On me demandait quand nous prendrions
enfin des mesures en vue de remettre le pays dans la bonne
voie. Que faut-il donc que les Canadiens fassent pour nous
convaincre de remettre de l’ordre dans nos priorités et de nous
attaquer enfin aux problèmes qui assaillent les Canadiens? Les
Canadiens perdent leur maison et leur emploi. Que faisonsnous?
Nous discutons de la constitution au lieu de nous
occuper des problèmes du pays.
A qui peut-on demander de l’aide quand on perd sa maison
à cause des taux d’intérêt élevés? Le gouvernement dit qu’il ne
peut rien faire à ce sujet parce que nos taux sont liés à ceux
qui ont cours aux Etats-Unis. Les Canadiens devraient-ils donc
écrire à M. Reagan, le président des États-Unis, pour lui
demander de faire baisser les taux d’intérêt, afin que les
Canadiens puissent répondre à leurs besoins? Ou bien
devraient-ils reconnaître que le gouvernement libéral a complètement
perdu les pédales, ce qui est la vérité? En fait, ce sont
les bureaucrates qui gouvernent le Canada. Les Canadiens
devraient peut-être s’adresser aux bureaucrates et non aux
députés, car les élus du peuple ont certainement perdu toute
influence.
C’est triste, car nous vivons dans un pays d’abondance. En
fait, notre pays est l’un des plus riches du monde. C’est une des
raisons pour lesquelles ma famille a émigré de Pologne. Nous
sommes venus nous installer au Canada pendant la dépression
à cause des libertés que le pays offrait. Toutefois, nous avons
moins de liberté que jamais. Certains pays dotés de la meilleure
charte, de la meilleure déclaration des droits ou de la
meilleure constitution qui soit ont un régime moins démocratique
et jouissent de moins de liberté que nous.
e (1650)
Le débat constitutionnel n’a pas fait fructifier une seule
affaire ni créé un seul emploi. Tout ce à quoi il a servi, c’est à
faire baisser l’activité au Canada et à faire perdre à nos
concitoyens des emplois et des débouchés financiers, et tout
cela, parce que le gouvernement n’a pas su répondre aux
besoins du pays. Il s’est contenté plutôt de parler de constitution.
Le premier ministre (M. Trudeau) ne s’occupe pas des
affaires de la nation et prête aux députés son jouet favori, la
constitution, pour les distraire. Mais pour un Canadien qui a
perdu sa maison ou son travail, la constitution n’a pas beaucoup
d’importance, en fait, elle n’en a même pas du tout.
Ce débat, il n’est pas terminé. On va en réentendre parler,
cela ne fait aucun doute. Le premier ministre a l’intention de
chercher coûte que coûte à passer à la postérité et à voir son
nom inscrit dans les livres d’histoire pour avoir rapatrié au
Canada son jouet, la constitution. Cette entreprise aura certainement
coûté très cher aux Canadiens qui ont perdu leur
entreprise. C’est ce que je ressens ainsi que ceux que je
représente.
Le député de Provencher (M. Epp), président de notre
comité de la constitution, a consacré beaucoup de temps, fait
de nombreux sacrifices et travaillé d’arrache-pied pour que la
réforme constitutionnelle soit une entreprise réussie. Il est
difficile de se faire une idée des sacrifices que ce député a faits
pour que ce débat constitutionnel soit couronné de succès.
Le Canada n’est pas composé que de Français et d’Anglais.
Personnellement, je ne suis ni anglais ni français, mais je suis
un Canadien bon teint. Je me suis rendu au Québec, et c’est
une belle province. Les mots ne me suffiraient pas à décrire
l’hospitalité et l’honnêteté des Québécois. Il est bien rare que
j’aie manqué le carnaval de Québec. J’y suis allé presque tous
les ans, et c’est vraiment une attraction formidable.
Ce ne sont pas les francophones ou les Québécois qui
causent des problèmes. Un homme se présente comme un
messie et un autre comme un héros. Diviser pour régner. C’est
ce qui se passe à l’heure actuelle. C’est extrêmement regrettable
parce que l’économie québécoise est chancelante. En fait,
elle se porte très mal. J’espère seulement que le premier
ministre, qui est un bon ami du premier ministre du Québec,
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13125
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
tentera de régler une fois pour toutes les problèmes du Québec,
de remettre l’économie sur pied et donner du travail aux
Québécois.
Des milliers de Québécois ont quitté leur province pour aller
dans l’Ouest. En fait, mon voisin d’en face est Québécois. Il est
heureux d’être en Alberta. Son anglais n’est pas très bon et
mon français n’est pas fameux, mais nous sommes bon voisins.
Nous nous comprenons.
Ces gens sont venus dans l’Ouest du Canada pour les mêmes
raisons qui ont poussé ma famille à s’établir au Canada. Ils
n’ont pas nécessairement agi par choix, mais par le désir de s’y
bâtir une vie meilleure. A leur arrivée ici, certains d’entre nous
ne possédaient même pas une bonne valise. Cependant, les
gens qui arrivent dans l’Ouest ont travaillé dur. Ce sont les
pionniers qui ont fait de ce pays ce qu’il est aujourd’hui.
Le débat constitutionnel a divisé ce pays comme jamais
auparavant, ce dont on pouvait se passer. Nous aurions plutôt
dû régler nos problèmes économiques. Je ne suis pas contre le
rapatriement de la constitution. Cela fait partie d’une maturation
normale. Il n’y a rien de mal à cela. Aucun Canadien n’est
contre le rapatriement de la Constitution. Mais si c’est aussi
compliqué que certains l’ont prétendu, pourquoi se donner
toute cette peine? Mais il n’en est pas ainsi.
Nous parlons de convention, d’enchâssement et d’accord. La
majorité des Canadiens ne comprennent même pas ce que ces
termes signifient. Nous parlons de conventions, de traditions et
de coutumes. Pourquoi ne pas le faire de manière à ce que les
gens comprennent? Je vais vous donner un exemple. Si la
Chambre avait adopté aujourd’hui une motion de défiance,
même si cela ne figure pas dans la constitution, le gouvernement
défait aurait démissionné et des élections auraient eu
lieu. Cela ne figure pas dans la constitution, mais c’est une
tradition, une coutume acceptée.
En tant que député, je suis extrêmement déçu. Si j’avais su
ce que je sais aujourd’hui, je me demande si je me serais porté
candidat. Le gouvernement actuel s’adonne énormément à la
manipulation. Voyez la façon dont il s’est occupé de la constitution,
des problèmes économiques et du pays en général. Il ne
faut pas s’étonner que les Canadiens perdent confiance en leur
gouvernement et en leurs députés.
Je me souviens que le premier ministre a fait des déclarations
du genre: «Nous vaincrons l’inflation» et «Notre pays est
fort». Je me souviens du temps où le séparatisme était à peu
près inexistant au Québec ou dans l’Ouest. Il y est vivace
aujourd’hui. Je me souviens du temps où l’on disait qu’il fallait
voter pour Pierre Trudeau parce qu’il était le seul qui pouvait
garder le Canada uni. Il est le seul qui ait divisé le Canada et
qui ait amené le séparatisme, non seulement au Québec mais
dans l’Ouest également.
• (1700)
Je ne voulais pas tenir de tels propos, mais il est bon que ces
choses soient dites parce que les gens, du moins dans ma
circonscription, si je puis ainsi m’exprimer, en ont vraiment
plein le dos de ce débat constitutionnel et de cette manipulation.
Ce n’était certainement pas et ce n’est certainement pas
une priorité. Sans aucun doute, ce n’est pas la fin mais
seulement le début, si Pierre Trudeau fait à sa tête.
Je n’ai pas l’intention de parler encore longtemps, mais j’ai
quelques remarques à faire sur les gouvernements. J’ai été
échevin à Calgary pendant à peu près dix ans. J’ai occupé tous
les postes clés. J’ai aussi été commissaire d’école et fait partie
du personnel administratif en même temps. De même, j’ai été
député à l’assemblée législative de l’Alberta. J’ai connu beaucoup
de monde dans le domaine de la politique. Je n’ai
sûrement pas besoin de lire un livre sur la politique et sur son
fonctionnement. Je me suis occupé de questions syndicales. A
l’âge de 26 ans, j’étais président du conseil du travail de
Calgary. En parlant des travailleurs, je ne sais pas ce que les
Canadiens vont être obligés de faire pour se faire entendre du
gouvernement libéral. Lorsque 50,000 personnes viennent
manifester sur la colline du parlement au sujet des taux
d’intérêt et ne peuvent pas se faire entendre …
L’Orateur suppléant (M. Ethier): A l’ordre, je vous prie.
J’invite le député à se limiter à la résolution constitutionnelle
et en particulier à l’amendement dont la Chambre est saisie.
M. Kushner: Monsieur l’Orateur, il va falloir faire quelque
chose. Il me semble que cette question est étroitement liée au
débat constitutionnel. Je le répète, il est bien évident que nous
devrions discuter de l’économie plutôt que de cette constitution,
de cette résolution. Nous ne devrions pas gaspiller notre
temps. Nous avons déjà passé tout l’été et tout l’automne à
parler de constitution alors que nous aurions dû nous occuper
d’économie.
Vendredi dernier des représentants des propriétaires de maisons
de la Colombie-Britannique, du Manitoba, de l’Alberta,
de la Saskatchewan, de l’Ontario ainsi que du Congrès du
travail du Canada sont venus me voir pour me demander ce
qu’ils devaient faire. Certains allaient perdre leur maison,
d’autres allaient être mis à pied, d’autres encore avaient déjà
reçu leur avis de renvoi. Ce sont certaines des choses qu’il
m’ont dites. Comment faire bouger ou agir le gouvernement
sur la question des taux d’intérêt de manière que nous ne
perdions pas notre maison et peut-être que l’industrie du
bâtiment se réveille pour que les gens aient les moyens de
construire et d’emprunter, comme nous pouvions le faire il n’y
a tant d’années? Le gouvernement dit que la constitution le
préoccupe davantage et qu’il ne peut rien contre les taux
d’intérêt élevés. A qui devons-nous nous adresser?
Comme je l’ai déjà dit, le gouvernement a perdu tout
contrôle. Il ne gouverne plus. Ce sont les bureaucrates qui
dirigent le pays. Devrions-nous écrire aux prêteurs hypothécaires
au sujet des taux d’intérêt élevés? Aux banques? Aux pays
étrangers? A qui devons-nous nous adresser? Le gouvernement
ne peut rien faire. On commence à se demander qui gouverne
le pays.
Je veux bien faire comprendre que ce sont les bureaucrates.
Les libéraux ont perdu le contrôle; il est temps de le mettre
dehors. Au lieu de constitution, nous devrions parler de création
d’emplois et de relance économique.
Nous avons un gouvernement majoritaire. Nous avons
également un chômage, des taux d’intérêt et une inflation qui
inquiètent la majorité des Canadiens. Le gouvernement se
trouve dans une situation dangereuse en ce moment. J’ignore
ce que les Canadiens devraient faire maintenant pour inciter le
gouvernement à se préoccuper des besoins du pays.
13126 23 novembre 1981
La Constitution
Vendredi, des milliers d’autochtones ont jugé nécessaire de
manifester sur la colline du Parlement afin d’être reconnus. Ils
ont demandé que leurs droits soient garantis dans la constitution,
comme cela se devrait.
Pour conclure, d’une part, je suis fier d’être député et de
faire de mon mieux pour que l’on s’intéresse aux intérêts de
mes commettants; d’autre part, comme je l’ai dit précédemment,
je suis très embarrassé et tout à fait déçu d’être député.
La manière dont le gouvernement a traité les Canadiens est
honteuse. Au lieu de se préoccuper des besoins du pays, il
préfère tripatouiller la constitution. Non seulement le gouvernement
n’a créé aucun emploi mais il en a supprimé et n’a
apporté aucun stimulant au pays. De nombreux Canadiens ont
perdu des millions de dollars de revenu, parce que le gouvernement
n’a pas voulu assumer ses responsabilités et gouverner le
pays.
Le premier ministre n’a même pas le mandat de rapatrier la
constitution. Je n’ai pas reçu un grand nombre de lettres
demandant que la constitution soit une priorité et les Canadiens
ont demandé qu’on modifie la constitution seulement
lorsque le gouvernement a commencé à la tripatouiller. La
constitution nous a très bien servis au cours des 100 dernières
années. Je ne dis pas qu’il ne faille pas la rapatrier. Je ne dis
pas une telle chose. Toutefois, nous ne devrions pas procéder
comme nous le faisons maintenant.
Je vais conclure bientôt parce que je sais que d’autres
députés veulent prendre la parole. Mais je veux qu’il soit
consigné sans équivoque au compte rendu que je souscris au
rapatriement de la constitution. Cependant, je n’approuve pas
le premier ministre qui s’en est servi comme d’un jouet et d’un
écran de fumée au lieu de se pencher sur les problèmes
économiques du pays et d’y trouver des solutions.
* (1710)
M. Jack Masters (secrétaire parlementaire du ministre des
Communications): Monsieur l’Orateur, j’éprouve une grande
fierté et j’ai l’impression de vivre un moment historique en
prenant aujourd’hui la parole à la Chambre pour participer au
débat sur la constitution. Je n’ai pas préparé de discours
officiel mais j’aimerais vous communiquer certaines de mes
impressions générales sur la nécessité de s’attaquer au problème
de la Constitution à l’heure actuelle. Je n’ai entendu que
les dernières remarques de l’orateur qui m’a précédé, mais
elles serviront de point de départ aux observations que j’aimerais
faire consigner au compte-rendu aujourd’hui.
Nous avons souvent entendu dire l’an dernier qu’au lieu de
perdre notre temps avec les questions constitutionnelles, nous
ferions mieux de nous attaquer aux problèmes économiques. Je
pense très respectueusement que le moment est on ne peut
mieux choisi pour parler de la constitution et pour en parler
sur un plan économique. Nous sommes en pleine évolution au
Canada. Nous avons fait de gros progrès en assez peu de
temps, sur le plan historique, mais nous pouvons faire encore
bien davantage en adoptant cette résolution visant à faire un
Canada uni, à être tous Canadiens à parts égales, à construire
un pays encore plus fort dont nous pourrons tous profiter.
On a tort de dire qu’en traitant de la constitution, nous
négligeons les problèmes économiques. Nous devons déterminer
notre situation actuelle et l’objectif que nous voulons atteindre
en tant que pays. Grâce au dialogue constitutionnel-et
c’est exactement ce que c’est devenu-les Canadiens se sont
réellement posé des questions très complexes. Pendant le
déroulement du débat et de ce dialogue, certains ont trouvé des
réponses très satisfaisantes. Au moment où nous sommes sur le
point d’envoyer la Constitution à Westminster, qui nous la
renverra, nous sommes plus déterminés que jamais et nous
nous sentons plus que jamais Canadiens d’une côte à l’autre,
d’un océan à l’autre. Ce sera plus facile de diriger le pays. Ce
sera plus facile pour les provinces de comprendre leur rôle dans
l’édification du pays. Cela nous aidera certainement, en tant
que Parlement fédéral, à comprendre ce que nous pouvons ou
ne pouvons pas faire. L’essentiel, toutefois, c’est que cette
résolution réaffirme une chose que nous savions déjà: que nous
sommes un pays unique.
Tout le processus d’élaboration de la constitution était
remarquable. Aux yeux de certains, il a commencé par un rêve
que nourissait le premier ministre (M. Trudeau), son chant du
cygne. Ce n’est pas le cas. Le premier ministre a dit au pays
qu’il était temps de résoudre certains problèmes fondamentaux
et de réfléchir à ce que nous étions. Il a mobilisé le pays à ce
sujet. Il a fait ce qu’il a si bien réussi en de maintes occasions:
il a agi en chef. Il a joui d’un grand appui, non seulement de la
part du caucus libéral qui lui a permis de réaliser ses objectifs,
mais également de l’ensemble des Canadiens.
Lorsque nous avons amorcé la discussion, bien des provinces
se sont mises à grommeler parce que c’était un sujet qui les
mettait mal à l’aise. Les gens, dans certains milieux, ne
tenaient pas du tout à en parler. Après tout, on préfère
toujours discuter de questions qu’on peut trancher sans difficulté;
aussi les uns et les autres éprouvaient-ils des sentiments
divers au moment où ils ont amorcé la discussion. Certains
débordaient d’enthousiasme parce qu’ils estimaient urgent de
régler la question constitutionnelle, de rapatrier la constitution
et de mettre au point une formule d’amendement. D’autres
pensaient que le moment était venu de doter les Canadiens
d’une charte des droits et des libertés. Les uns se disaient: «Je
sais que je devrai renoncer à certains privilèges. Je sais en
outre que la question est importante, que la lutte sera longue et
ardue, et je me demande si je suis vraiment prêt pour cette
lutte».
Au début, pour une raison ou pour une autre, tout le monde
n’a pas abordé le débat constitutionnel avec le même enthousiasme.
Mais le débat a progressé de façon remarquable. A ma
connaissance aucune autre démarche constitutionnelle n’a
autant bénéficié que celle-ci de la participation du public, de
son analyse et de ses critiques, ainsi que de l’examen de
personalités juridiques. Même s’il reste beaucoup de difficultés
à résoudre dans le sens où le souhaitent tous les députés, je fais
confiance aux Canadiens pour les résoudre. Au moins nous
avons fait avancer la chose au point de pouvoir maintenant
dire que bientôt nous aurons la constitution, la formule
d’amendement et la charte des droits des libertés–ce qui est
une invitation à faire encore plus.
23 novembre 1981 DEBATS DES COMMUNES 13127
13128 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
J’aimerais en revenir à la question de leadership. Comme je
l’ai déjà dit, malgré que certains se seraient donné énormément
de mal pour réunir tout cela, il a fallu la détermination,
la perspicacité et les dons de leader de mon chef pour faire
aboutir cela, pour notre plus grande fierté à tous. Il y a un
schéma qui ne s’est pas réalisé comme prévu. Il y a eu
bifurcation, le comité s’en est mêlé, et le reste. Mais tous nous
pouvons avoir le sentiment d’avoir participé d’une façon ou de
l’autre à un moment particulièrement significatif de l’histoire
du Canada. Il y a eu un comité mixte extrêmement travailleur,
composé de représentants des deux chambres, et de tous les
partis. Nous avons entendu 97 groupes de témoins. Il y a eu
1,280 mémoires présentés. Il y a eu plus de 267 heures de
délibérations en comité seulement. La résolution initiale a reçu
67 amendements. Cela prouve que les gens ont pris la chose au
sérieux. Ensuite il y a eu l’étape législative et, finalement, la
rencontre de dernière heure des premiers ministres provinciaux,
et l’accord s’est fait … neuf provinces sur dix ont donné
leur adhésion à la constitution. Nous regrettons qu’il ait
manqué une dixième signature à l’accord, mais il faut se
rappeler qu’au fond le Québec était d’accord avec ce qui se
passait. Le fait que trois points soient restés en suspens n’enlève
rien au fait qu’en gros l’accord était déjà réalisé à 99 p.
100.
Ce qui a pris le dessus c’est le côté partisan, politique de
l’affaire, et non celui des préoccupations du Québec. Les
Québécois ont toujours été bons Québécois; ils ont prouvé à
maintes reprises qu’ils sont tout d’abord bons Canadien; je
crois vraiment que la population du Québec, si on l’interrogeait-
et elle a déjà été consultée-désire que cela se fasse.
Nous sommes en train de négocier des points très importants,
fondamentaux même, qu’il faut faire figurer dans la charte des
droits et libertés. J’ai l’espoir sincère que ces points seront
insérés dans la résolution avant qu’elle ne sorte du pays.
* (1720)
Comme je le disais tout à l’heure, ce n’est pas une solution
définitive, mais seulement un début. Même si la charte
actuelle ne tient pas compte des droits des femmes et des
autochtones, contrairement aux voeux exprimés par tous les
députés à la Chambre, nous disposerons au moins d’un mécanisme
qui nous permettra de reprendre très rapidement les
négociations. A partir de là, nous pourrons poursuivre le
processus et apporter des améliorations. Je suis fier de notre
régime politique qui a permis aux assemblées législatives du
Canada de réaliser tout cela, même s’il a fallu y consacrer
beaucoup d’énergie.
Au cours du débat, nous avons vécu beaucoup de moments
émouvants. Il y a eu aussi beaucoup de moments inquiétants,
par exemple quand le chef de l’opposition (M. Clark), après le
jugement de la Cour suprême, a déclaré en substance «Mettons
toute cette affaire en veilleuse, car nous avons maintenant le
temps d’y penser». Si l’on en juge par l’attitude qu’il a adoptée
subséquemment à la Chambre, il semble avoir pris conscience
que dans une affaire de ce genre, il vient toujours un moment
où il faut agir sans retard ou bien tout mettre au rancart.
C’eût été un crime impardonnable que d’avoir vécu cette
longue année d’angoisse et de remise en question, d’être venus
si près de s’entendre sur une nouvelle constitution et de devoir
dire in extremis: «Laissons tout tomber, nous reprendrons tout
cela plus tard, un jour, n’importe quand.» Ce n’est pas du tout
ce qui se passe, monsieur l’Orateur. Je crois que les députés
sont résolus à achever l’oeuvre commencée il y a plus d’un an.
J’ai dit qu’en apportant mon humble contribution à ce
débat, j’avais le sentiment de participer à l’histoire. Quand on
a déjà quelques cheveux blancs, on se souvient d’une époque
révolue. Je me souviens qu’à l’école, dans ce qui était alors la
ville de Port-Arthur, quand on nous demandait d’indiquer
notre nationalité, on voulait dire par là notre pays d’origine. Il
ne fallait pas inscrire «citoyen canadien». Non, il fallait écrire
Italien, Écossais, Anglais, tout sauf «citoyen canadien». Je me
souviens très bien de la fierté de l’étudiant que j’étais en
1947 … quand un gouvernement libéral a adopté une loi sur la
citoyenneté.
C’était là une autre étape de notre évolution, monsieur
l’Orateur. Nous avons voulu nous définir nous-mêmes, reconnaître
que nous formons un peuple, que nous ne constituons
plus une colonie, que nous sommes Canadiens. Nous avons pris
part à des guerres et nous avons amplement prouvé que nous
étions en train de bâtir un pays.
Nous avons fini par adopter notre propre drapeau, non sans
un débat similaire au débat constitutionnel, mais nous avons
maintenant un drapeau que nous sommes fiers d’arborer et qui
nous fait reconnaître dans le monde comme un pays souverain
et comme Canadiens.
Nous avons accompli autre chose, et non des moindres,
lorsque nous avons adopté notre hymne national, le «O
Canada». J’espère que nous aurons un jour une fête du
Canada.
Nous en arrivons maintenant à l’essentiel, monsieur l’Orateur,
à l’adoption d’une constitution canadienne. Je trouve
excellente celle qui nous est proposée. Elle passe dans le monde
entier pour la meilleure qui soit. La charte des droits et des
libertés contribuera beaucoup à assurer nos libertés. Les adversaires
de la charte font valoir qu’en consignant une chose par
écrit, on ne la consacre pas nécessairement pour toujours, car
on peut en faire tout ce qu’on veut; mais j’estime trop les
Canadiens pour leur attribuer une telle mentalité, monsieur
l’Orateur. Je pense que l’intention est là de respecter les droits
qui ont été énoncés dans la charte des droits et libertés, et je
pense que nous allons continuer à l’améliorer.
Nous allons obtenir le rapatriement de la constitution, ce qui
fait que jamais plus il ne faudra s’adresser à un autre Parlement
pour obtenir l’autorisation de la modifier. Nous aurons
alors une formule d’amendement, ce qui veut dire que le
travail pourra se poursuivre sans qu’on ait à se demander si ce
que nous désirons finira jamais par se réaliser. Nous aurons
donc tout cela, et surtout nous allons avoir la charte des droits
et libertés.
Nous avons un magnifique pays, monsieur l’Orateur, mais
nous en faisons trop peu de cas. Si un romancier décrivait
notre pays avec son étroite bande peuplée bordant la frontière
où il fait bon vivre, avec ses nombreuses régions, ses nombreux
points de diversité, sa population qui se rattache principalement
à deux cultures et son aspect multiculturaliste, le lecteur
se dirait que cela ne peut pas marcher, qu’il est impossible de
faire tout ce que nous désirons. Monsieur l’Orateur, non
seulement c’est possible, mais cela marche effectivement.
13128 DÉ13ATS DES COMMUNES 23 novenmbre 1981
DÉBATS DES COMMUNES
Et les choses iront encore mieux parce que nous avons pris le
temps d’ouvrir la porte au magnifique avenir qui nous attend.
Plus que n’importe où ailleurs au monde il fait bon vivre ici,
mais cela ne fait que commencer. Les choses vont aller beaucoup
mieux parce que nous avons pris le temps de nous
examiner, de nous définir. Et nous avons fini par nous dire que
nous ne formons qu’un Canada, que nous pouvons travailler de
concert. Nous allons avoir notre constitution et notre charte
des droits et libertés pour nous en assurer.
Des voix: Bravo!
Mlle Pauline Jewett (New Westminster-Coquitlam): Monsieur
l’Orateur, moi aussi je suis reconnaissante d’avoir l’occasion
de participer à ce débat. Sauf erreur, c’est la troisième fois
que je parle du rôle des femmes dans la société canadienne et
de l’égalité future des femmes et des hommes dans la société
canadienne. C’est pourquoi, comme d’autres, je suis désolée de
constater qu’on ait ajouté une clause dérogatoire à l’article 28,
la disposition sur l’égalité des droits.
Comme beaucoup de mes collègues, j’étais très contente de
voir que l’accord conclu l’autre jour entre les premiers ministres
provinciaux et le premier ministre (M. Trudeau) comprenait
des dispositions qui sont bonnes, progressistes, fortes et
souhaitables. A ce propos, j’ai été ravie d’apprendre que le
nouveau premier ministre du Manitoba a déclaré qu’il n’a pas
l’intention de retirer les droits linguistiques accordés aux francophones
de sa province ni de soumettre ces droits à l’approbation
de l’Assemblée législative.
Des voix: Bravo!
Mlle Jewett: Il y a de bonnes choses dans la résolution, mais
il est presque déchirant de voir que les assemblées législatives
ont le pouvoir d’annuler certaines des parties les plus fondamentales
et les plus importantes de la charte des droits et
libertés. Quand la proposition a été soumise aux Communes,
nous avons tous pensé que l’une des parties les plus fortes de la
charte était l’article 15, qui reconnaît les droits à l’égalité et
interdit la discrimination fondée notamment sur la race, la
couleur, la religion et le sexe, et dont la seconde disposition
encourage les assemblées législatives à établir des programmes
de promotion sociale en faveur des groupes désavantagés. C’est
peut-être parce qu’aucune femme, aucune personne handicapée
et aucun Noir n’était présent que les premiers ministre ont
tronqué cet article de la charte.
On a beau dire qu’une loi précise peut désavantager pendant
cinq ans seulement, à mon sens cela va à l’encontre de l’objet,
du symbolisme et de l’essence de l’article. Mais assujettir
ensuite l’article 28-que les Canadiennes se sont battues pour
faire inscrire dans la constitution et qui a été adopté à l’unanimité
par la Chambre en avril-à une clause de dérogation
permettant au Parlement du Canada ou à une assemblée
législative provinciale de nier les droits et les libertés qui, dans
la charte, garantissaient l’égalité des sexes, et prétexter qu’il
s’agit d’une négligence que le gouvernement n’avait pas pensé
ce faisant à l’article 28-auquel le Parlement, lui avait beaucoup
réfléchi-c’est vraiment le bouquet.
La Constitution
* (1730)
Les députés se rappelleront que, le lendemain même de la
signature de l’accord, j’ai demandé au premier ministre (M.
Trudeau) si l’article 28, qui garantit l’égalité des femmes avec
les hommes, y figurait. Je vous rappelle, monsieur l’Orateur,
que le premier ministre a dit:
… peux seulement répondre qu’à mon avis, cet article conservera sa primauté.
Je n’ai pas participé aux travaux des représentants provinciaux et fédéraux qui
ont ébauché les nouvelles dispositions hier après-midi et cette nuit aussi, je crois.
Il a ajouté:
Ils proposaient certaines suppressions dont l’une visait les droits des autochtones.
L’autre article dont vous parlez en faisait peut-être également partie. Je n’en
suis pas certain. Je vais vérifier et c’est pourquoi je dis que je vais voir ce qu’est
devenue l’ébauche au cours de la nuit.
Quelques jours plus tard, un journaliste de La Presse a écrit:
[Français]
Interrogé à ce sujet au lendemain de la conférence constitutionnelle par le
député Pauline Jewett du NPD, M. Trudeau a avoué son indifférence.
Les droits des autochtones, M. Trudeau se souvenait de les avoir bradés. Mais
les droits des femmes, c’était flou dans sa mémoire. Les femmes, on sait bien,
c’est si peu important. Un groupuscule, vous dis-je …
[Traduction]
Le fait d’avoir supprimé l’article 34, dans lequel on affirmait
les droits des autochtones, des peuples aborigènes du Canada,
est, bien sûr, une tragédie. Mais au moins on a songé à eux
suffisamment pour décider de rayer l’article. Les femmes,
elles, on n’y a même pas songé.
Voyons maintenant ce que disent les premiers ministres
provinciaux depuis quelques semaines pour tenter de s’expliquer.
D’un côté, le premier ministre du Nouveau-Brunswick
déclare que l’article 28 n’a pas été discuté du tout, qu’il pensait
que l’article 28 demeurerait intact, sans clause dérogatoire, et
constituerait une déclaration de l’égalité des droits de la
femme. D’un autre côté, le premier ministre de l’Alberta nous
dit d’abord ne pas savoir si l’article 28 avait fait l’objet de
discussions; ensuite, il ajoute que pour sa part il n’avait pas
l’intention de l’assujettir à ce que nous avons appelé une
disposition dérogatoire qui l’émasculerait. De leur côté, les
premiers ministres Bennett et Davis soutiennent n’avoir eu
aucune intention de rayer l’article. Enfin, les fonctionnaires
prétendent qu’il s’agit d’une erreur de rédaction.
Je pense qu’il faudrait presque conclure que personne n’a
l’air de savoir s’il a parlé de cet article, quoiqu’il soit fort
probable que les premiers ministres n’en aient pas parlé. Même
s’ils en ont discuté, l’impression qu’ils donnent, le plus souvent,
c’est d’avoir voulu que l’esprit et la lettre de l’article 28
demeurent intacts. Personne ne s’est prononcé publiquement
pour dire que l’article devait être rendu inopérant, comme on a
procédé avec l’article 15.
Je pense, monsieur l’Orateur et honorables collègues, que vu
cette confusion incroyable, la Chambre pourrait très bien
adopter l’article dans sa forme originale, tel qu’il était au mois
d’avril. Si j’ai bien compris et vu ce que tous les premiers
ministres ont dit à ce sujet, il n’y a rien dans l’accord qui
prévoit que l’article soit rendu inopérant.
23 novembre 1981 13129
La Constitution
Par contre, qu’est-ce que cela nous révèle à propos de la
position de la femme canadienne dans notre société? Sommesnous
simplement un détail, une erreur de rédaction? J’ai
remarqué l’autre jour, à la page de la rédaction du Citizen
d’Ottawa, un article intitulé «Laissez les détails à plus tard»,
bien dans l’esprit de l’homme des cavernes. Je cite l’article:
Les plaintes formulées par divers organismes de femmes et d’autochtones au
sujet de la résolution constitutionnelle dont le Parlement est saisi ne sont pas
suffisamment convaincantes …
J’aimerais insister sur les mots «les plaintes». Il s’agit de nos
droits fondamentaux d’êtres humains. Dans le cas des femmes,
il s’agit de leurs droits à l’égalité et, dans le cas des autochtones
du Canada, de leurs droits en tant que premier peuple de
ce pays. Cet éditorial parle de plaintes. C’est pourquoi bon
nombre d’entre nous sont désespérés à l’idée que l’article 28
soit entièrement vidé de sa substance. Pas un seul député, à
l’exception du premier ministre et du ministre de la Justice
(M. Chrétien) qui ont mené les négociations, ne devrait
appuyer l’article 28 si cette disposition dérogatoire reste en
vigueur.
Des voix: Bravo!
Mlle Jewett: Pas un seul député ne devrait l’appuyer. Si
certains l’appuient, savez-vous ce qui se produira, monsieur
l’Orateur? Cela représenterait un important pas en arrière, car
nous refuserions le principe de l’égalité des sexes. Nous ne
maintiendrions même pas le statu quo; nous ne ferions que
régresser.
J’espère que le ministre responsable de la condition féminine
est d’accord avec moi. Je le pense et je l’espère. Elle n’a pas
participé aux négociations. Je ne sais pas si elle a posé la
question, mais elle ne savait certainement pas ce qu’était
devenu l’article 28. J’espère que ni le ministre responsable de
la condition féminine, ni une autre femme, ni un seul député
n’appuiera cet article tant que le gouvernement ne proposera
pas lui-même la version modifiée dont nous discutons aujourd’hui
en invoquant le fait que cette atrophie de l’article 28
n’était pas prévu dans l’Accord.
Quant à ceux qui prétendront qu’ils ne peuvent accepter
l’égalité de la femme que sous conditions, cela revient à dire
qu’ils ne croient pas au principe fondamental de l’égalité des
sexes. Comme je le disais il y a un instant, ils refusent aux
femmes le droit à l’égalité. C’est pourtant une chose à réaliser
parce que nous ne l’avons pas encore; c’est un objectif à
atteindre en soi. Voilà ce que bon nombre d’entre nous voient
dans l’article 28 initial. Nous y voyons symboliquement l’expression
de l’égalité des hommes et des femmes, de leur droit à
jouir également des droits et des libertés prévus dans la charte.
Nous y voyons donc un symbole. Dans sa formulation originale,
nous y voyons également une substance importante, car
nous n’avons pas en fait l’égalité et quand je dis «nous», je veux
dire les femmes. En fait nous n’avons pas l’égalité aujourd’hui.
Voilà pourquoi l’article 28 reste un objectif à atteindre.
g (1740)
A ceux qui craignent que l’existence des programmes de
promotion sociale soit menacée par l’article 28, je dirai que
tant qu’un tel programme vise à atteindre les objectifs de
l’article 28, il n’y a aucun conflit, il n’y a aucune contradiction
entre l’article 15(2) et l’article 28.
De même, si quelqu’un commettait un acte discriminatoire
contraire à l’article 15(1), et celui-ci est une disposition positive
favorisant l’égalité pour tous ceux qui ne la possèdent pas
déjà, l’acte en question serait également contraire à la large
notion d’égalité décrite à l’article 28.
Il me semble donc que les craintes en question, si on a raison
de les ressentir, ne sont pas légitimement fondées. Comme l’a
dit un orateur précédent, personne n’a le droit de se vanter:
tous les groupes féministes ont largement contribué à obtenir
cette clause fantastique comme je l’appelle, l’article 28, inséré
en avril. Personnellement, j’estime que l’ancien ministre responsable
de la condition de la femme a largement contribué à
faire adopter cette disposition.
Mlle MacDonald: Exact.
Une voix: Certainement.
Mlle Jewett: Chaque fois qu’il prenait la parole il gagnait
un million de féministes chez les Canadiennes.
Une voix: Les voies de Dieu sont insondables.
Mlle Jewett: Si je me refuse à désigner qui que ce soit, à
l’exception de ce dernier dont la participation a été si notable
pour toute la question de l’égalité des sexes, je dois dire avec
regret qu’à l’exception de l’actuel ministre responsable de la
condition de la femme et, j’en suis certaine, mais j’en ignore la
mesure, de l’actuel ministre de la Santé nationale et du
Bien-être social (M »e Bégin), aucune autre représentante du
parti libéral n’a participé à cette bataille. Elles n’ont pas
participé au fameux congrès de février. Elles n’ont pas pris
part aux manifestations des deux dernières semaines organisées
pour tenter d’obtenir le rétablissement intégral de ces
dispositions et elles n’étaient même pas là aujourd’hui, sauf
quand le ministre chargé de la condition féminine a pris la
parole. Et à l’extérieur de la Chambre les autres femmes du
parti ont-elles fait des discours et tenu des rassemblements, se
sont-elles organisées? A mon grand regret, je dois dire que
non. Apparemment, elles se sont fait bâillonner. Même au
Québec …
[Français]
Il y a trois jours un article paraissait dans le journal La
Presse:
Une Yvette Docile. L’organisatrice du mouvement des Yvettes, Madame
Louise Robic, a inquiété un peu les libéraux en réclamant des comptes du
gouvernement sur le retrait de la protection des droits de la femme. Les femmes
du Canada veulent savoir ce qui est arrivé de leurs droits et libertés … vous allez
avoir un paquet de femmes avec des ulcères, a-t-elle lancé.
Ce qui aurait pu être un règlement de compte n’a pas duré bien longtemps
toutefois, et M » Robic a accepté loyalement, en bonne libérale, les explications
du ministre Chrétien. Et elle a dit: C’est bien, il faudra aller se battre auprès des
provinces, a-t-elle conclu … pas auprès des femmes du Québec et du Canada.
[Traduction]
Que pouvons-nous faire? J’ai dit tout à l’heure que l’accord
constitutionnel avait été concocté dans une cuisine, du moins
en bonne partie, par les procureurs généraux de la Saskatchewan
et de l’Ontario et le ministre fédéral de la Justice. Pour
cette fois, les femmes auraient bien dû être à la cuisine!
13130 DÉBATS DES COMMUNES 23 novernbre 1981
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13131
Des voix: Bravo!
Mlle Jewett: Il a été élaboré en grande partie et même en
totalité sans qu’on tienne compte des besoins et des droits des
autochtones, des handicapés et des femmes et cela prouve une
fois de plus que, même si bien d’autres hommes-et Dieu sait
s’il y en a-prennent fait et cause pour ces catégories de
citoyens, lorsqu’il s’agit de négocier nos dirigeants oublient
l’autre moitié de la population qui n’est pas représentée, ils
oublient les défavorisés. Ils ne leur attachent pas une grande
importance.
Par conséquent, nous devons, nous les femmes, demander
une fois de plus à notre parti d’élaborer immédiatement des
programmes de promotion sociale, et les dirigeants du parti à
tous les niveaux ainsi que les comités de toutes les circonscriptions
doivent faire en sorte que la moitié de leurs candidats
soient du sexe féminin.
Des voix: Bravo!
Mlle Jewett: Voilà ce qu’il faut faire, et pas seulement dans
les circonscriptions faibles. Comme la constitution ainsi «cuisinée
» a été énormément influencée par les fonctionnaires, fédéraux
et provinciaux, dont seulement deux à ma connaissance
sont des femmes, ce dont nous avons manifestement besoin
maintenant c’est d’un programme d’action positive dans la
Fonction publique fédérale du Canada-où les femmes brillantes
sont nombreuses-dans le cadre duquel on irait les chercher
pour leur confier des postes de confiance et d’autorité. Le
gouvernement fédéral l’a déjà fait, et avec raison, quand il a
découvert que les francophones représentaient seulement de 7
à 8 p. 100 des hauts fonctionnaires. Le gouvernement fédéral
l’a fait en déclarant tout simplement que la situation était
intolérable. Sauf erreur, il n’a même pas publié d’édit; le
premier ministre n’a eu qu’à signifier sa désapprobation. Voilà
le genre d’initiative que les hommes du parti libéral et du
gouvernement n’ont pas su prendre pour les Canadiennes. Il
faut prendre des mesures concrètes à ce niveau. De toute
évidence, ce sont les dirigeants politiques et les mandarins qui
en détiennent le pouvoir.
0 (1750)
Malgré l’éviscération de ce document, la Cour suprême du
Canada aura toujours un rôle à jouer et il faut également y
changer certaines choses. Des femmes doivent en faire partie,
comme on l’a déjà fait valoir. C’est sur ce front qu’il faudra
mener le prochain combat.
Les avocats qui interpréteront la constitution vont certainement
mieux représenter les deux sexes, car les femmes sont de
plus plus nombreuses dans les facultés de droit. Je le répète,
c’est là un des faits les plus encourageants de ces dernières
années.
J’ai lu aujourd’hui dans le Toronto Star un article de
Michele Landsberg intitulé «Help wage war for women’s equality
». C’est un excellent article dont je recommande la lecture à
tous les députés. Elle dit qu’il faudrait avoir à Ottawa un
organisme chargé de protéger les droits des femmes. Pour le
moment, notre meilleur chien de garde est le comité spécial.
J’approuve cette suggestion. A mon avis, tant que nous n’au-
La Constitution
rons pas une représentation forte, sinon égale ou peut-être
même pendant quelque temps supérieure, à la Chambre des
communes et dans les assemblées législatives des provinces,
comme au Manitoba où 12 p. 100 des députés sont des
femmes, ainsi que dans l’administration fédérale et provinciale,
nous ne pourrons rien faire pour remédier pour de bon à
l’indifférence et au mépris manifestés à l’égard du principe
fondamental -de l’égalité des femmes. Je le répète, comme
d’après la plupart des premiers ministres provinciaux l’étiolement
de l’article 28 ne faisait pas partie de l’Accord, le
gouvernement comprendra, je l’espère, qu’ils sont libres d’agir
et que nous pouvons en faire autant au Parlement.
Ce résultat est sans doute dû à la négligence et à l’indifférence,
mais nous avons la possibilité d’en profiter. Comme le
député de Provencher (M. Epp) l’a dit tout à l’heure, n’oublions
pas que si dans un système fédéral nous avons deux
paliers de gouvernement, il existe un troisième palier tout aussi
important. Il s’agit du peuple représenté par les divers groupes
et organismes. Depuis un an, nous avons certes pu voir ce
troisième ordre à l’oeuvre en ce qui concerne la population
féminine du Canada. Je me demande si les premiers ministres
provinciaux ont déjà lu les excellents mémoires que des groupes
féminins et d’autres organismes de diverses régions du
Canada ont rédigés à l’intention du comité mixte de la constitution.
Je me demande s’ils connaissent l’existence de ce
troisième ordre, qui est le peuple lui-même, représenté par ces
divers groupes.
Enfin, je crains que si nous ne rétablissons pas l’article 28-
et tout ce que j’ai dit s’applique également à l’article 34 sur les
droits des autochtones-nous ne nous souvenions de ce jour
non pas comme d’un jour important dans l’histoire du Canada
mais comme d’un jour de honte. Je ne crois pas que le mot soit
trop fort.
J’espère, et je suis même convaincue, que lorsque 95 p. 100
des députés, et non 5 p. 100, seront des femmes, que tous les
premiers ministres seront des femmes, au lieu qu’il n’y en ait
aucun, et que si nous élaborons un nouvel accord constitutionnel,
nous n’accorderons pas à l’autre moitié de la population le
même traitement d’indifférence, d’injustice et de complaisance
qu’un si grand nombre de ses représentants nous ont infligé.
Ça, je le promets.
[Français]
M. Marcel Dionne (Chicoutimi): Monsieur le président,
voulant prononcer mon discours tout d’un trait, pourrais-je
signaler qu’il est 6 heures et, par conséquent, obtenir la parole
dès la reprise des travaux à 8 heures?
L’Orateur suppléant (M. Ethier): La Chambre est-elle
d’accord?
Des voix: D’accord.
L’Orateur suppléant (M. Ethier): Comme il est 6 heures du
soir, je quitte maintenant le fauteuil pour le reprendre à 8
heures.
(La séance est suspendue à 5 h 56.)
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13131
13132 DBT E O MNS2 oebe18
La Constitution
REPRISE DE LA SEANCE
La séance reprend à 8 heures.
M. l’Orateur adjoint: Lorsque la Chambre a suspendu sa
séance à 6 heures, l’honorable député de Chicoutimi (M.
Dionne) avait la parole.
M. Dionne (Chicoutimi): Monsieur le président, le moins
que l’on puisse dire c’est que ce débat sur le rapatriement de
notre Constitution canadienne revêt une importante dimension.
Je voudrais au préalable rendre un vibrant hommage au
premier ministre (M. Trudeau) qui a fait preuve de détermination
mais également de souplesse pour obtenir l’accord de neuf
premiers ministres provinciaux autour de son projet de rapatriement
de notre Constitution. C’est avec fierté que je rappelle
à cette Chambre que c’est un premier ministre libéral, M.
Pearson, qui a mené une lutte courageuse qui a abouti à
l’adoption d’un drapeau distinctif pour notre pays. C’est son
successeur, un autre chef libéral qui nous permet de réaliser ce
rêve caressé par tant de Canadiens à voir le rapatriement de
notre propre Constitution.
Je suis persuadé que l’histoire se chargera de rappeler ce
geste qui restera pour des générations à venir dans la mémoire
des Canadiens. Je reconnais qu’à ce stade il reste une ombre
au tableau. Je suis Québécois et le gouvernement de ma
province refuse de donner son accord au projet de rapatriement
de notre Constitution. Je suis déçu parce qu’au cours des
trois jours durant lesquels le premier ministre du Canada et les
10 premiers ministres provinciaux se sont rencontrés, on a cru
pour quelques instants que cette bataille, qui dure depuis 54
ans, que cette chicane qui a pris des proportions démesurées
depuis un an, allait enfin être terminée.
Comme tous les observateurs et surtout comme député du
Québec au Parlement du Canada, j’ai été heureux d’apprendre
la nouvelle annoncée le mercredi midi à la conférence qu’il y
avait enfin une entente entre le Québec et le gouvernement du
Canada, chose que l’on espérait depuis dix ans. Mais j’ai été
déçu, comme tous les gens qui suivaient les travaux de la
conférence, d’apprendre quelques heures plus tard que cet
accord était rompu. On a su par la suite qu’il y avait eu un
déluge d’appels téléphoniques au bureau du premier ministre
Lévesque à Québec. Selon les nouvelles, il s’agissait d’éléments
anti-canadiens qui ne peuvent concevoir autre chose qu’un
Québec séparé du reste du Canada. Que voulez-vous, monsieur
le président, quand une population a été soumise pendant six
mois à une propagande malhonnête dont le thème est «Il ne
faut pas se faire avoir», on a l’impression que, dans un accord
éventuel entre le Québec et le gouvernement canadien, le
Québec va se faire avoir. En tout cas s’il y a des gens qui se
sont fait avoir ce sont bien ceux qui croient en cette publicité
mensongère.
Il convient de rappeler que les Québécois envoient 74 députés
libéraux défendre leurs intérêts à Ottawa. Les Québécois
ont 13 ministres qui les représentent au Cabinet. Le Québec
exerce une influence dans les affaires du Canada comme
jamais auparavant. C’est pourquoi nous, les 74 députés du
caucus du Québec, nous avons demandé au premier ministre
d’étudier les objections formulées par la délégation de la
province de Québec. A titre de Québécois et de Canadien, j’ai
apprécié la position prise par le parti libéral du Québec à
l’Assemblée nationale. En effet, cela démontre qu’il existe à
l’Assemblée nationale de Québec des représentants de la population
qui vont rappeler aux péquistes que, contrairement à ce
qu’ils veulent faire croire aux Québécois, le gouvernement
canadien cherche à sortir le Québec de son isolement.
Enfin, le premier ministre a démontré dans un discours qu’il
prononçait à Québec le 14 novembre dernier qu’il était prêt à
tenir compte de chacune des objections formulées par le
premier ministre, M. Lévesque. C’est nous les députés de son
caucus qui lui avons demandé de revoir encore la question.
D’ailleurs, après coup, on n’arrive pas à comprendre comment
les délégués du Québec, à la conférence d’Ottawa, en sont
arrivés à s’isoler dans leur coin. Enfin, prétendant défendre les
intérêts du Québec, le premier ministre Lévesque s’était allié
avec les premiers ministres des sept autres provinces. Par
conséquent, si ces huit provinces s’entendaient sur un certain
nombre de points pour s’opposer au gouvernement fédéral, il
est normal que si les points en litige disparaissaient les huit
provinces en bloc acceptaient le projet de rapatriement. J’étais
présent au Centre des conférences à Ottawa, le jeudi, lorsque
le premier ministre et les premiers ministres des neuf provinces
ont expliqué qu’ils étaient parvenus à un accord. Comme
témoin à ce moment historique, j’ai eu du mal à cacher ma
déception lorsque le premier ministre, M. Lévesque, a annoncé
qu’il refusait de signer cette entente. Il a expliqué qu’il avait
trois objections majeures qui l’empêchaient d’adhérer à cet
accord.
Si on me le permet, monsieur le président, il serait peut-être
utile de revoir une à une les objections formulées par M.
Lévesque. La première portait sur le retrait de la clause
compensatoire. Or, dès le lendemain, les québécois avaient
l’assurance que le Québec pourrait bénéficier de la clause
compensatoire dans certains cas. Les députés du Québec ont
demandé au premier ministre de faire preuve de souplesse et il
l’a fait. En effet, le très honorable premier ministre a clairement
indiqué le 14 novembre dernier qu’il accepterait que le
Québec reçoive une compensation financière s’il refusait d’adhérer
à un programme fédéral, parce que cela touchait à la
langue ou à la culture française au Québec. Le premier
ministre du Canada a accepté l’hypothèse que si les neuf
provinces anglophones décidaient de renoncer à leur compétence
en matière d’enseignement universitaire, il serait normal
que le Québec refuse d’adhérer à cette mesure et qu’il reçoive
une compensation financière. M. Lévesque peut-il être contre
cela? En revanche, si le gouvernement fédéral décide d’établir
un programme qui bénéficierait à tous les Canadiens et si ce
programme était financé par les provinces riches, les provinces
riches n’auraient pas le droit de refinancer. Actuellement le
Québec est loin d’être une province riche, et si l’on établissait
un programme de transfert de pensions dans tout le Canada,
par exemple, je crois qu’il irait de l’intérêt des Québécois que
les provinces riches ne puissent refuser de participer à ce
programme. Puisque les Québécois bénéficieraient de ce programme,
comment pourrait-il être contre?
DEBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
13132
DÉBATS DES COMMUNES
0 (2010)
La seconde objection formulée par M. Lévesque porte sur la
clause de mobilité. En effet, la Charte des droits et des libertés
va affirmer le principe de la libre circulation des biens et des
personnes sur le territoire canadien. Il s’agit du fondement de
ce que l’on peut appeler le marché commun canadien. Ce
principe est essentiel au développement économique du Québec
et des autres provinces. Certains ont fait valoir que des travailleurs
venant des autres provinces pourraient venir travailler au
Québec, mais des milliers de travailleurs du Québec, de l’Ontario,
des provinces Maritimes ne vont-ils pas chercher du
travail en Alberta? L’expérience démontre que lorsqu’une
province élève des barrières de protection pour ses travailleurs,
son commerce, son industrie, les autres provinces répliquent
par des représailles.
On se souvient du conflit entre l’Ontario et le Québec dans
le domaine de la construction. Cependant, le premier ministre
affirmait à Québec qu’il était prêt à rechercher d’autres formules
pour accommoder les inquiétudes justifiées d’une province.
Il a reconnu que Terre-Neuve pourra prendre des
dispositions particulières à l’égard de ce principe dans la
mesure où le taux de chômage serait plus élevé dans cette
province que dans le reste du pays. Lançant la balle à M.
Lévesque, le premier ministre du Canada a indiqué que le
Québec pourrait prendre des dispositions au cas où il serait
littéralement envahi par des travailleurs anglophones des
autres provinces. Le premier ministre du Québec peut-il refuser
cette proposition? Au cas où il y aurait un doute dans son
esprit, je pose cette question au premier ministre du Québec. Il
veut remplacer le fédéralisme canadien par une sorte de
marché commun. Or, M. Lévesque devrait savoir que des
mesures visant à restreindre la libre circulation des biens et des
personnes sont interdites dans le marché européen. Il n’y a pas
d’assouplissement ni de régime spécial pour personne. Tout le
monde est égal. Donc notre Charte canadienne à laquelle M.
Lévesque trouve tant d’objections est finalement plus souple
dans son application que le traité de Rome qui lui sert
d’exemple. On aura remarqué qu’il se sert moins de cet
exemple de ce temps-ci.
J’aimerais bien savoir ce qu’il va répondre aux travailleurs
du Québec qui pourraient obtenir un emploi en Alberta, mais
qui ne le peuvent pas, parce qu’il y a des barrières provinciales.
Comme me le disait un travailleur de ville de La Baie, le
gouvernement du Québec nous tient en otages, mais je lui
répondis que si on adoptait notre projet de Charte, il pourrait
invoquer cette clause qui garantit le droit à la mobilité des
travailleurs.
Monsieur le président, à partir du moment où on refuse
d’admettre le principe de la libre circulation des biens et des
personnes dans un pays, ce n’est plus un pays. Enfin, la
dernière objection soulevée par le premier ministre Lévesque
porte sur la clause de l’instruction dans la langue de la
minorité. Monsieur le président, la Charte va mettre fin aux
injustices commises à l’égard des francophones qui habitent les
autres provinces. A cause du ralentissement de l’activité économique
au Québec, et ces difficultés sont actuellement la responsabilité
du gouvernement du Québec, des milliers de Québécois
ont dû quitter le Québec pour aller travailler par
exemple en Alberta, ainsi que dans d’autres provinces plus
riches et plus prospères.
La Constitution
Ce Québécois va avoir le droit garanti dans la Constitution
d’envoyer ses enfants dans des écoles françaises. Les francophones
du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Ecosse, de
l’Île-du-Prince-Édouard, de l’Ontario, du Manitoba, de la
Saskatchewan et de l’Alberta vont enfin avoir le droit d’envoyer
leurs enfants à l’école française. Le premier ministre du
Québec est-il contre cela? Est-ce que nous, les Québécois, nous
ne nous sommes pas assez battus pour obtenir cela pour les
francophones qui habitent des provinces anglophones? Je
reconnais que le Québec n’a pas de leçon à recevoir sur la
façon dont il a traité ses minorités linguistiques. Néanmoins, le
très honorable premier ministre estime que le Québec pourrait
appliquer la clause Canada, afin que l’école ne devienne pas un
foyer d’anglicisation au Québec. Monsieur le président, je
profite de l’occasion, principalement pour les gens de ma
région, pour lire exactement la clause Canada, c’est-à-dire
celle qui donne droit à l’instruction dans la langue de la
minorité. Je la lirai exactement pour que les gens comprennent
bien ce qu’il y a dans cette clause.
Langue d’instruction, article 23, dont souvent on dit qu’il ne
rend pas justice aux Québécois:
23. (1) Les citoyens canadiens:
a) dont la première langue apprise et encore comprise est celle de la minorité
francophone ou anglophone de la province où ils résident,
b) qui ont reçu leur instruction, au niveau primaire, en français ou en anglais
au Canada et qui résident dans une province où la langue dans laquelle ils ont
reçu cette instruction est celle de la minorité francophone ou anglophone de la
province,
ont, dans l’un ou l’autre cas, le droit d’y faire instruire leurs enfants, aux niveaux
primaire et secondaire, dans cette langue.
(2) Les citoyens canadiens dont un enfant a reçu ou reçoit son instruction, au
niveau primaire ou secondaire, en français ou en anglais au Canada ont le droit
de faire instruire tous leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans la
langue de cette instruction.
(3) Le droit reconnu aux citoyens canadiens par les paragraphes (1) et (2) de
faire instruire leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans la langue
de la minorité francophone ou anglophone d’une province:
a) s’exerce partout dans la province où le nombre des enfants des citoyens qui
ont ce droit est suffisant pour justifier à leur endroit la prestation, sur les fonds
publics, de l’instruction dans la langue de la minorité,
b) comprend, lorsque le nombre de ces enfants le justifie, le droit de les faire
instruire dans des établissements d’enseignement de la minorité linguistique
financés sur les fonds publics.
Voilà, monsieur le président, ce que comprend l’article 23
tant discuté dans des régions comme la mienne. Monsieur le
président, M. René Lévesque peut-il être contre une telle
proposition? Eh bien, comme on peut le constater, nos efforts
comme députés du Québec, auprès du premier ministre Trudeau
pour qu’il tienne compte des objectifs du Québec ont
porté fruit. Le premier ministre a accommodé le gouvernement
péquiste, il leur a donné raison sur toute la ligne. Enfin là, on
s’est dit: le gouvernement péquiste ne peut plus refuser de
donner son accord, puisque tous les obstacles sont balayés.
Comme réponse, le premier ministre Lévesque a présenté de
nouvelles exigences sous forme d’ultimatum. Je crois que le
chef du Parti québécois va enfin dévoiler ses vraies couleurs à
la population. Il se disait partisan de la souveraineté-association;
on a appris cette semaine qu’il laisserait tomber le <trait
d’union association». En d’autres mots, c’est un séparatiste. La
seule chose qui surprend, c’est que le premier ministre Lévesque
ait mis tant de temps à l’admettre lui-même.
23 novembre 1981 13133
La Constitution
Monsieur le président, je voudrais également poser d’autres
questions, je voudrais également souligner le fait que le
Québec s’est isolé lui-même à la conférence de Québec en
proposant la formule Vancouver au lieu de la formule Victoria.
Je dirai également, monsieur le président, que c’est M. Morin,
au nom des huit premiers ministres canadiens, qui a proposé
cette formule, et c’est évidemment cette formule qui aujourd’hui
a privé le Québec d’un droit de veto qui avait toujours été
reconnu, et comme député représentant le Québec, je suis
profondément déçu de cette attitude puisque le Québec a
toujours cherché à s’isoler de plus en plus des autres provinces
et refuse systématiquement de négocier avec le gouvernement
central. D’autre part, les Québécois ne manqueront pas de se
rendre compte que le très honorable premier ministre a fait
preuve d’une ouverture d’esprit et d’une grande souplesse. On
ne peut malheureusement pas en dire autant du premier
ministre de la province de Québec. Je crois que ce qui se
produit, c’est que le Parti québécois a été pris en main par son
élément séparatiste. Cet élément séparatiste veut séparer le
Québec du reste du Canada. Donc, les péquistes vont chercher
à dire qu’il y a eu des manoeuvres, des complots de la part des
autres alors qu’ils sont les artisans de l’isolement du Québec et
que cela fait leur affaire.
C’est ici qu’on découvre la première erreur de tactique des
péquistes. Ils étaient tellement persuadés que la conférence
d’Ottawa allait finir en queue de poisson, ils ont tellement
sous-estimé le poids de l’opinion publique sur les sept premiers
ministres provinciaux pour que les provinces en arrivent à une
entente avec le gouvernement canadien qu’ils se sont alliés au
départ avec quiconque s’opposait au projet. Vu d’Ottawa, on
avait envie de rire à voir le premier ministre Lévesque s’acoquiner
avec M. Lyon, l’ancien premier ministre du Manitoba
qui n’a jamais pu voir un Canadien français, pas même en
peinture. S’ils en avaient eu la chance, je crois que les péquistes
se seraient joints à Leonard Jones, l’ancien maire de
Moncton. Pourtant, si la question de la culture et de la langue
françaises leur tenait tant à coeur, les péquistes auraient dû se
rapprocher de M. Trudeau, de M. De Bané, de M. Joyal, de
M. Chrétien et des 74 députés du Québec. La position de notre
parti est claire sur la question de la défense des droits des
francophones dans toutes les provinces. Les électeurs québécois
l’ont compris et c’est pourquoi ils nous élisent en bloc depuis
1968.
Non, les stratèges péquistes ont préféré se rallier aux éléments
qui manifestaient la plus grande tiédeur à l’égard des
droits des francophones dans leur propre province. D’ailleurs,
on se demande si cela ne faisait pas leur affaire. En effet, à
propos de la charte des droits et des libertés, le premier
ministre Lévesque n’a jamais fait de proposition visant à
l’améliorer. Est-ce que le premier ministre du Québec a cherché
à améliorer le sort des francophones hors Québec. Du
moins, les francophones qui habitaient les provinces de ses 7
anciens alliés. Il me semble que le premier ministre Lévesque
aurait dû exiger de M. Lyon, de M. Peckford, de M. Lougheed,
le premier ministre de l’Alberta où se dirigent tant de
Québécois, qu’ils acceptent d’accorder plus de droits aux francophones
de leurs provinces. Le premier ministre Lévesque
a-t-il exigé que l’Ontario accepte l’article 133 afin que cette
province reconnaisse le droit des francophones? Non, il n’y
était même pas intéressé. Pour la première fois de notre
histoire, le gouvernement du Québec, celui qui se dit le plus
nationaliste, a complètement négligé les minorités francophones
à l’extérieur du Québec. Les Arabes, les Musulmans et les
Juifs défendent également leurs minorités. Les péquistes ne le
font pas, mais le gouvernement canadien va le faire.
En plus de cela, nous allons défendre les intérêts des Québécois.
Là il se trouve des nationalistes qui se demandent comment
et de quel droit les 74 députés du Québec peuvent
défendre les intérêts du Québec. Ils ne se demandent pas de
quel droit les péquistes peuvent rester à bouder dans leur coin.
Ils ne se demandent pas de quel droit le ministre de la Culture
refuse de participer à une conférence de ses homologues
provinciaux. Les péquistes ont décidé qu’ils assisteraient uniquement
à des conférences des ministres des Finances. Jusqu’à
nouvel ordre, les péquistes refusent de participer aux négociations
qui visent à améliorer le projet de rapatriement de la
Constitution ou à bonifier le projet de charte des droits et des
libertés. Eh bien nous, les 74 députés du Québec, monsieur le
président, avec un chef comme l’honorable Pierre Elliot Trudeau,
nous avons décidé justement de continuer à relever et à
défendre les intérêts des Québécois. Les péquistes refusent de
défendre les droits du Québec. En revanche, on l’a vu, le chef
de l’opposition et son parti à l’Assemblée nationale sont prêts à
le faire. Les éditorialistes du journal Le Devoir ainsi que de La
Presse ont exhorté le premier ministre Lévesque à défendre les
intérêts de sa province et ils lui ont indiqué qu’il n’a pas le
choix. Enfin, nous, les 74 députés du Québec, nous avons joué
notre rôle dans notre caucus. Nous continuons à défendre les
intérêts du Québec tant dans la formulation de la position du
Canada à l’égard des 10 autres provinces, qu’à ce state du
débat.
Je m’élève contre la prétention des péquistes qui cherchent à
faire croire qu’ils détiennent un monopole de droit divin pour
défendre les intérêts des Québécois. La population commence
à se rendre compte depuis le début de la série de petits
scandales, que parce que cela vient du Parti québécois, cela ne
veut pas nécessairement dire que cela vient du petit Jésus.
L’électorat commence à se rendre compte que les péquistes les
ont mal défendus dans le dossier constitutionnel, et que c’est de
leur propre faute. N’oublions jamais que c’est le premier
ministre Lévesque, le chef du parti québécois, qui a renoncé,
au nom du peuple québécois, au droit de veto que détenait le
Québec depuis des générations. Ce n’est pas le premier ministre
Trudeau, encore moins les 74 députés libéraux du Québec,
qui ont enlevé son droit de veto au Québec. Non, ce sont les
péquistes qui ont fait cela le plus joyeusement et le plus
naturellement du monde, pour faire plaisir à MM. Lyon,
Bennett et Lougheed. Ils ont renoncé au droit de veto du
Québec pour faire partie de la «gang».
L’idée qu’on se faisait du Québec comme une province
importante, comme une province aînée, c’est devenu malheureusement,
à cause des péquistes, une chose du passé.
Devant ces faits, on peut se demander si les péquistes sont en
train de bouder. Je crois qu’ils ont tellement honte de leurs
stupidités qu’ils n’osent pas se montrer la face sur la place
publique.
13134 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981l
DÉBATS DES COMMUNES
Entre-temps, la population du Québec commence à souffrir
de la mauvaise administration du Parti québécois. Les taxes
sont trop élevées au Québec, et c’est la faute du gouvernement
provincial. Le gouvernement séparatiste a chassé d’abord les
compagnies, donc du personnel, donc de gros contribuables. Il
y a de moins en moins d’entreprises qui veulent s’établir au
Québec, et n’ayons pas peur de le dire, si ce n’était de la
présence des députés et de ministres du Québec au Parlement
du Canada, cela irait encore plus mal.
Pour terminer, monsieur le président, je dirai qu’à mon sens
les Québécois vont se rendre compte que le gouvernement
séparatiste n’a pas de raison valable de s’opposer au projet de
rapatriement de notre Constitution. Si les séparatistes trouvent
que l’accord est inacceptable pour eux, ils devront en faire la
preuve. Ils vont découvrir que la population du Québec n’est
pas disposée à se séparer du Canada. Ils vont découvrir
également que le Canada est plus important que le parti
séparatiste.
* (2020)
Traduction]
M. Bill Wright (Calgary-Nord): Je suis fier de pouvoir
participer à ce débat historique, non seulement parce que la
constitution est la loi par excellence de notre pays, mais aussi
parce que chacun d’entre nous devrait, aux fins du compte
rendu, dire vraiment ce qu’il pense de cette résolution. Je
voudrais d’abord féliciter tous les membres du comité constitutionnel
mixte, tant pour leur travail que pour les sacrifices
personnels qu’ils ont consentis. Le comité a siégé pendant plus
de 300 heures, au cours desquelles il a tenu 106 séances et a
attendu 314 témoins, sans compter les innombrables heures de
lecture auxquelles chaque membre du comité a dû s’astreindre.
Je tiens aussi à remercier tout spécialement nos membres au
sein du comité qui, sous la direction du député de Provencher
(M. Epp), ont exposé notre point de vue avec diligence.
Si vous le permettez, je passerai en revue quelques-uns des
points qui nous ont conduits à la situation actuelle. Au
Canada, la constitution se compose de l’Acte de l’Amérique du
Nord britannique, du Statut de Westminster de 1931, de
nombreuses autres lois, conventions , coutumes et traditions,
de même que de jugements de la Cour suprême du Canada.
L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867 établit,
entre autres choses, la répartition des pouvoirs entre les provinces
et le gouvernement fédéral. Lors des réunions précédentes
au cours desquelles cette loi avait été élaborée, on a vu se
dessiner différentes solutions auxquelles les pères de la Confédération
se sont trouvés confrontés quand ils ont essayé de
rédiger une loi visant à créer une nation nouvelle. Ils avaient le
choix entre ériger une nation de type législatif de par sa forme
ou de type fédéral. Par nation «de type législatif», j’entends une
nation qui est dirigée par un gouvernement central unique dont
relèvent tous les organes élus. L’autre solution, c’est le régime
fédéral où le pouvoir est divisé entre les provinces et le
gouvernement fédéral. C’est ce régime fédéral que les pères de
la Confédération ont choisi. Cette union reconnaît l’égalité de
toutes les provinces, quelles que soient leur population et leur
superficie. Lors des réunions portant sur l’élaboration du rapport
devant être présenté au Parlement britannique, les provinces
fondatrices soit l’Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse et
le Nouveau-Brunswick, avaient chacune une voix. Il est égale-
La Constitution
ment significatif que l’Acte de l’Amérique du Nord britannique,
tel que l’a promulgué le Parlement britannique, sous la
direction des provinces canadiennes, ne conférait pas au gouvernement
fédéral le pouvoir de modifier la constitution du
Canada, alors que chaque province pouvait modifier sa propre
constitution dans sa sphère de compétence, sauf en ce qui
concerne le poste du lieutenant-gouverneur.
* (2030)
Au fil des années, de nombreux changements ont été apportés
à l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. A aucun
moment, le gouvernement britannique n’a rejeté une demande
du Parlement canadien en vue de modifier la constitution, bien
que le Parlement britannique ait à l’occasion apporté de petits
changements dans la présentation. Le gouvernement fédéral a
fait savoir que le Parlement britannique n’avait jamais adopté
de loi présentée par une ou plusieurs provinces, et que d’autre
part, aucune province n’avait jamais proposé au gouvernement
britannique des changements à l’Acte de l’Amérique du Nord
britannique. Le gouvernement canadien prétend également
qu’il n’a pas à consulter les provinces pour présenter une
résolution au Parlement britannique, mais en fait le gouvernement
canadien n’a jamais présenté de résolution au gouvernement
britannique sans l’agrément des provinces concernées et
l’histoire nous prouve qu’à de nombreuses occasions les provinces
sont intervenues pour changer ou retirer des projets de
résolution.
Le Parlement britannique est non seulement tenu d’étudier
la résolution, mais de déterminer si cette dernière a été établie
en bonne et due forme. Il n’a pas l’intention de s’occuper de la
signification de cette résolution ni du message qu’elle aurait
pour les Canadiens. Toutefois, il lui appartient de voir s’il peut
ou non dûment accepter cette résolution. En outre, le Parlement
britannique est en mesure de rejeter la résolution lorsque
celle-ci l’invite à adopter une loi de son propre chef, dans un
domaine où il est le seul habilité à prendre une décision. Il n’y
a aucune équivoque: seul le Parlement britannique peut décider
d’adopter ou non un projet de loi qui modifie ses relations
avec un autre pays souverain.
Qu’on me permette de rappeler brièvement les événements
qui ont abouti à la situation actuelle. Autrement dit, peut-on
modifier notre constitution et, dans la négative, pourquoi pas?
Il est clair que le Canada est un pays souverain, capable de
légiférer pour son propre compte et de traiter de questions tant
nationales qu’internationales. Toutefois, l’Acte de l’Amérique
du Nord britannique ne permet aux législateurs de le modifier
que s’ils soumettent tout amendement éventuel au Parlement
britannique qui, après les avoir examinés, tant à la Chambre
des communes qu’à la Chambre des Lords, tranche la question.
Le gouvernement du Royaume-Uni avait adopté le Statut
de Westminster en 1931 pour supprimer les derniers vestiges
du colonialisme. Le Parlement du Royaume-Uni avait adopté
cette loi après avoir reconnu la souveraineté et l’égalité constitutionnelle
du Royaume-Uni, du Canada, de l’Union de l’Afrique
du Sud, de l’État libre d’Irlande, de Terre-Neuve, de
l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. D’après l’article 2 de
cette loi, aucune mesure législative présentée ultérieurement
par le gouvernement du Royaume-Uni n’entrerait en vigueur si
l’un des pays nommés n’en faisait la requête expresse et n’y
donnait son consentement. En réalité, toutefois, le principal
80107-8
23 novembre 1981 13135
13136 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
objectif du Statut de Westminster était de rendre nul le
Colonial Law Validity Act de 1865 qui interdisait à tout
dominion d’apporter des modifications à sa constitution d’une
façon qui fasse double emploi avec les mesures du Parlement
du Royaume-Uni.
Il est intéressant de revoir les événements qui ont abouti à
cette loi. La première étape remonte à la conférence impériale
de 1926, où l’on avait examiné spécialement diverses mesures
législatives des dominions. Un certain nombre de principes
généraux avaient été établis et il avait été convenu d’établir un
comité du Commonwealth pour examiner à fond cette question
et faire des recommandations lors d’une conférence ultérieure
des nations du Commonwealth. A l’automne 1929, le comité
proposé se réunissait pour discuter du Colonial Laws Validity
Act, de diverses mesures législatives du dominion, des lois sur
la marine marchande et d’autres questions de moindre intérêt.
Un rapport fut rédigé, rapport qui devait plus tard inspirer de
nombreux articles du Statut de Westminster. Les participants
à cette réunion avaient alors rappelé que le Canada était le
seul pays à ne pas disposer du pouvoir d’amender sa propre
constitution sans l’intervention du Parlement du Royaume-
Uni. Par la suite, le rapport fut longuement étudié dans de
nombreux pays du Commonwealth. A Ottawa, un débat eut
lieu en mai 1930, le gouvernement fédéral ayant demandé à la
Chambre des communes d’approuver le rapport. Ce dernier fit
l’objet d’un examen attentif et l’opposition conservatrice s’opposa
à son adoption parce qu’il fallait le consentement formel
des provinces.
Sur certains points, le rapport laissait à désirer. Ainsi, il
proposait de soumettre, comme par le passé, les lois provinciales
à la Colonial Laws Validity Act ainsi qu’à l’autorité
législative du Parlement du Royaume-Uni, tandis que les lois
fédérales n’y seraient pas assujetties. En septembre de la même
année, peu avant l’ouverture de la conférence impériale qui
devait étudier le rapport de 1929, Howard Ferguson, premier
ministre de l’Ontario, adressait au premier ministre du Canada
une lettre accompagnée d’un long mémoire. Pour les fins du
compte rendu, je voudrais lire cette lettre et je renvoie les
intéressés au mémoire lui-même qui traite des pouvoirs des
provinces vis-à-vis du gouvernement fédéral. Dans l’intervalle,
un gouvernement conservateur avait été élu, de sorte que la
lettre et le mémoire furent adressés au premier ministre R. B.
Bennett. En voici la teneur:
Monsieur le premier ministre,
Vous vous souviendrez qu’à l’occasion d’entretiens au sujet du rapport de la
conférence impériale et notamment des recommandations du rapport de 1929,
j’ai tenté de vous expliquer l’attitude de la province d’Ontario.
La conférence semble avoir oublié que la Confédération des provinces du
Canada a vu le jour à l’instigation des provinces. Notre constitution est en fait
l’expression concrète, sanctionnée par une loi impériale, d’une entente intervenue
entre les provinces à la suite de longs pourparlers. La province d’Ontario reste
convaincue que cette entente ne peut être modifiée sans le consentement des
parties.
Au nom de ma province, je m’oppose fermement à toute mesure prise par le
gouvernement fédéral ou la conférence impériale, pour modifier le traité provincial
avant que la question ne soit soumise aux provinces et que celles-ci aient eu
largement le temps de l’étudier.
Donner suite aux orientations proposées dans le rapport de 1929 aura pour
effet non seulement de perturber l’application de la constitution mais aussi
d’ébranler sérieusement toute la structure de notre confédération. La situation
inquiète vraiment l’Ontario, et je vous prie instamment, en tant que représentant
du dominion, de convaincre la conférence impériale de laisser l’affaire en
suspens en attendant qu’elle soit traitée comme il se doit et à la satisfaction des
parties au pacte original.
Je vous transmets en même temps que la présente un mémoire relatant
l’historique de la Confédération de même que les vues d’un certain nombre
d’hommes publics qui défendent ce point de vue; l’interprétation des tribunaux
du statut d’une province et enfin, la position récente des experts en la matière.
((2 040)
Avec cette histoire en toile de fond, un examen attentif des rapports des deux
dernières conférences vous persuadera que les provinces ont tout lieu de
s’alarmer.
Recevez, Monsieur le premier ministre, l’assurance de mes sentiments les
meilleurs.
Le premier ministre de l’Ontario,
G. H. Ferguson
Les écoliers auraient intérêt à lire cette lettre, monsieur
l’Orateur, pour pouvoir comprendre ce que le premier ministre
(M. Trudeau) cherche à faire depuis huit ou dix mois-en fait,
depuis l’année dernière.
Peu après que le premier ministre de l’Ontario eut envoyé
cette lettre, le Québec et quelques autres provinces ont prié le
gouvernement fédéral de s’abstenir de modifier la constitution
sans les consulter. Lors d’une conférence fédérale-provinciale,
en avril 1931, les participants adoptaient à l’unanimité un
projet de Statut de Westminster et souscrivaient à une clause
canadienne spéciale qui allait devenir l’article 7 du statut.
L’article comprend les trois paragraphes suivants:
1. Rien dans la loi n’est réputé s’appliquer à l’abrogation, à l’amendement ou à
la modification des Actes de l’Amérique du Nord britannique de 1867 à 1930, ou
à tout décret, règlement ou règle connexes.
2. Les dispositions de l’article 2 de la loi s’appliqueront aux lois adoptées par
toutes les provinces du Canada et aux pouvoirs des assemblées législatives de ces
provinces.
3. Les pouvoirs que confère cette loi au Parlement du Canada ou aux
assemblées législatives provinciales seront limités à l’adoption de lois dans les
domaines relevant de la compétence respective du Parlement du Canada ou de
toute assemblée législative provinciale.
Plus tard, le premier ministre, M. Bennett, a expliqué en ces
termes à la Chambre des communes l’objet de cette
conférence:
Il n’est pas nécessaire, à ce stade-ci, de rapporter en détail la position des
gouvernements provinciaux; mais ils ont convenu que face à la possibilité, selon
eux, que leurs droits constitutionnels, tels que définis dans la loi originale, soient
modifiés par un vote majoritaire du Parlement, ils devraient avoir l’occasion de
faire valoir leurs vues et de faire connaître leurs décisions avant qu’aucune
mesure ne soit prise.
Autrement dit, si les gouvernements provinciaux estimaient
qu’une mesure pouvait porter atteinte à leurs droits, le gouvernement
fédéral de l’époque jugeait ce motif suffisant pour
organiser des consultations fédérales-provinciales.
En juin 1931, le premier ministre Bennett a présenté une
adresse commune au gouvernement du Royaume-Uni. Il est
intéressant de noter qu’à cette époque l’opposition libérale
avait présenté un amendement voulant que les paragraphes 2
et 3 de l’article 7 mais que le premier ministre avait rejetésstipulent
qu’étant donné que les représentants des provinces
avaient paraphé les divers articles, le gouvernement fédéral
s’engageait sur l’honneur à ne pas en changer un iota.
13136 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
Pour fonder encore ce que j’avance, je me reporte à la loi de
1935 constituant une commission de placement et d’assurances
sociales. Le premier changement à la constitution, en ce qui
concerne la répartition des pouvoirs, a été apporté en 1935,
lorsque le gouvernement conservateur de l’époque a adopté la
loi constituant une commission de placement et d’assurances
sociales. L’opposition libérale avait combattu ce projet parce
qu’à son avis, le gouvernement aurait dû procéder par le biais
d’une modification de la constitution et après avoir consulté les
provinces.
Peu après l’adoption de la nouvelle loi, des élections générales
ont eu lieu et le parti libéral était porté au pouvoir. L’un de
ses premiers gestes, à l’automne de 1935, fut de solliciter l’avis
juridique de la Cour suprême du Canada relativement à ce
projet. Celle-ci, dans un jugement rendu le 17 juin 1936,
déclarait le bill anticonstitutionnel. Dans le discours du trône
prononcé à l’ouverture de la session de 1938, le gouvernement
annonçait son intention de consulter les provinces afin que la
loi constituant une commission de placement et d’assurances
sociales constitue une modification de l’Acte de l’Amérique du
Nord britannique.
Le 25 juin 1940, le premier ministre Mackenzie King
annonçait à la Chambre que les neuf gouvernements provinciaux
de l’époque avaient tous donné leur assentiment au
projet d’amendement constitutionnel. Au sujet de la résolution,
le premier ministre Mackenzie King avait alors dit, comme on
peut le lire à la page 1153 du hansard de 1940:
La tâche la plus difficile, mais aussi la plus importante était d’obtenir
l’assentiment des diverses provinces. Ce ne fut pas facile.
Il avait ajouté:
… nous avons évité, en outre, une question d’ordre constitutionnel très grave,
celle de savoir si, en modifiant l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, il est
nécessaire d’obtenir l’assentiment de toutes les provinces, ou si le consentement
d’un certain nombre d’entre elles aurait pu suffire.
D’autres modifications ont été apportées à l’AANB; il
s’agissait de transformer le Régime de pensions du Canada, ce
qui a pu se faire grâce à la collaboration des gouvernements
fédéral et provinciaux. Le Québec a eu la possibilité de ne pas
adhérer au régime. Ces modifications s’appliquent encore aujourd’hui,
monsieur l’Orateur. Le projet de résolution à l’étude
a été initialement présenté le 2 octobre 1980. Le rôle de
l’opposition officielle s’est depuis ce moment-là clairement
défini.
Il a tout d’abord consisté à faire en sorte que la Chambre
des Communes tienne un débat complet et objectif sur la
question. Nous avons tâché de tenir ce débat complet jusqu’à
ce que le gouvernement impose la clôture.
Deuxièmement, nous avons veillé à ce que tous les Canadiens
soient au courant de l’événement en le faisant télédiffuser.
Les députés se rappelleront jusqu’à quel point les libéraux
ont tenté d’empêcher cela.
Troisièmement, nous avons veillé à ce que les citoyens
intéressés puissent être entendus devant le comité mixte sur la
constitution. Les séances du comité ont duré trois mois, et les
députés savent combien d’organismes n’ont pas pu témoigner
parce qu’ils en ont été empêchés par les membres libéraux du
comité qui avaient peur de certaines des choses qui y étaient
révélées. Ils ont voulu mettre fin au débat, aussi ont-ils empêché
ces organismes de comparaître devant le comité mixte.
Quatrièmement, nous avons tâché de faire en sorte que les
provinces soient consultées au sujet de la résolution. Tout le
monde à la Chambre se rappelle comme le premier ministre a
essayé de faire adopter la résolution par le Parlement dès
décembre 1980 parce qu’il ne voulait pas que les provinces
soient consultées.
Cinquièmement, c’est le parti conservateur qui a veillé à ce
que la Cour suprême du Canada puisse trancher la question.
Ce n’est pas grâce à une intervention du parti libéral ni des
experts libéraux en matière constitutionnelle qui sont en face;
ils savaient ce qu’il fallait faire, mais ils étaient disposés à ne
pas bouger. Ils n’ont rien fait. Ils s’en fichaient.
Sixièmement, l’opposition officielle a veillé à ce que le
gouvernement fédéral conclue une entente avec les provinces
avant de ramener la nouvelle résolution au Parlement. Nous
nous souvenons tous que les libéraux ont essayé de s’esquiver.
L’attitude des députés libéraux pendant cet événement important
est révoltante.
Nous qui sommes de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes
prêts à voter pour la résolution, monsieur l’Orateur, mais je
voulais seulement signaler un ou deux problèmes.
Une voix: Quelle honte!
Mme Mitchell: Et les femmes?
M. Wright: Le NPD se manifeste bruyamment. Les Canadiens
oublieront-ils le budget qui a été présenté grâce au NPD,
indirectement du moins?
Pour le moment, si le gouvernement veut limiter nos droits,
il doit le faire par la voie législative. Voici ce que dit l’article
24 de la résolution:
Toute personne, victime de violation ou de négation des droits ou libertés qui
lui sont garantis par la présente charte, peut s’adresser à un tribunal compétent
pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste eu égard
aux circonstances.
J’ai toujours cru que nos droits étaient garantis, monsieur
l’Orateur mais il semble que l’on confie cette tâche à un
tribunal. Le gouvernement nous accorde ces droits et seul le
tribunal peut les interpréter. Autrement dit, si le gouvernement
nous prive de ces droits, les tribunaux doivent interpréter
cette disposition au lieu de garantir les droits.
0 (2050)
Mon deuxième point a trait aux droits à la propriété. Nous
savons tous, ici à la Chambre, que pour s’attirer l’appui du
Nouveau parti démocratique le parti libéral a voté contre les
droits à la propriété. J’ai hâte de voir comment les députés
néo-démocrates vont répondre de cela à leurs commettants lors
des prochaines élections car nous verrons bien à le leur rappeler,
à chacun d’entre eux. Nous pouvons remonter à 1933
quand le NPD, alors le parti CCF, faisait abstraction des
droits à la propriété dans le Manifeste de Regina. Les libéraux
aussi le paieront cher aux prochaines élections.
L’article 46 me préoccupe. Nous savons tout l’ergotage qui
s’est fait à l’autre endroit. Je ne parviens pas à comprendre
comment les sénateurs peuvent s’accommoder de cet article, le
Sénat ayant été créé précisément pour protéger les droits des
provinces. Les personnes nommées au Sénat sont censées
représenter les provinces. Nous avons là un autre exemple qui
nous montre que les personnes nommées à l’autre endroit ne
sont rien de plus que les laquais du gouvernement libéral. Le
gouvernement libéral ne nomme à cet endroit que des nègres
politiques. En réalité, les membres de l’autre endroit devraient
représenter leur région respective. C’est encore un échec du
gouvernement libéral.
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13137
13138 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
La majorité des Canadiens doivent être soulagés de voir que
le premier ministre (M. Trudeau) a enfin cessé de leur rebattre
les oreilles avec son projet de renouvellement de la Constitution.
Nous, députés de l’opposition officielle, sommes d’accord
avec le rapatriement. Notre position n’a jamais changé à ce
sujet. Nous n’avons pas continuellement changé d’idée comme
l’ont fait le Nouveau parti démocratique et le parti libéral.
Nous avons toujours dit que la formule de Vancouver, qui a
été proposée par des représentants du gouvernement de l’Alberta,
était la meilleure formule. Nous n’avons pas dit qu’elle
était gravée dans le marbre. Mais en comparaison de la
formule de Victoria, celle de Vancouver était la meilleure que
l’on ait pu trouver, et nous l’avons appuyée.
Nous souscrivons à la charte des droits et libertés, avec
certaines réserves. En effet, le gouvernement doit parfois interpréter
des termes tels que «sans délai» ou «raisonnable» pour
savoir s’il doit ou non emprisonner ou libérer des personnes.
Qui décidera quand un gouvernement agit sans délai ou de
façon raisonnable? Nous n’avons plus de droits. C’est le gouvernement
qui a tous les droits.
Tous les Canadiens, de quelque province qu’ils soient, souscrivent
au principe de la répartition égalitaire, du partage.
Nous n’avons jamais eu besoin de nous le faire dire.
Nous souscrivons à la propriété provinciale des ressources.
Dieu seul sait ce que ferait le gouvernement libéral actuel s’il
réussissait à s’emparer des ressources du pays. Il suffit de voir
ce qui se passe aux postes pour constater l’incurie du
gouvernement.
Pour notre parti, cette résolution a été présentée au mauvais
moment. A l’instar de la plupart des Canadiens, nous aurions
préféré nous occuper du chômage, de l’inflation, de la hausse
des taux d’intérêt, de l’amélioration du logement et d’autres
problèmes économiques qui affligent actuellement le pays.
Toutefois, puisqu’il faut se prononcer sur cette résolution,
notre parti est déterminé à protéger le régime fédéral canadien.
Nous sommes conscients de nos responsabilités envers les
Canadiens et nous les avons assumées.
M. Robert Daudlin (Essex-Kent): Monsieur l’Orateur, j’interviens
dans le débat avec un sentiment d’humilité devant
l’importance et l’ampleur du projet que nous entreprenons,
mais tout à la joie de prendre part à l’acte final par lequel le
Canada accède à la majorité et l’autonomie et se dote d’une loi
qui va nous permettre de modifier notre document constitutionnel
ici même.
J’aurais aimé que l’opposition officielle se préoccupe davantage
de la substance que du procédé aux étapes antérieures, ce
qui, à mon avis, aurait placé le gouvernement fédéral dans une
meilleure position de force pour négocier au nom de tous les
Canadiens et qui aurait finalement produit un résultat plus
positif en ce qui concerne les inquiétudes généralement
exprimées sur certaines omissions de la résolution.
Ce soir encore, mon ami le député de Calgary-Nord (M.
Wright) est retombé dans cette vieille habitude de discuter du
procédé. Il accuse le premier ministre (M. Trudeau) d’avoir
imposé de force sa vision du Canada aux Canadiens et trouve
le moyen d’échapper à la logique qui l’obligerait à dire que le
chef de l’opposition (M. Clark) au cours de son mandat a dû
de toute évidence essayer de faire la même chose au sujet de sa
propre vision du pays.
Au lieu de nous montrer du doigt les uns les autres ce soir,
nous ferions progresser ce débat en affirmant que ces positions
ont été bien défendues des deux bords de la Chambre, positions
qui, je l’espère, produiront au fur et à mesure que le
débat tire à sa fin une résolution qui ne fera que profiter au
Canada et aux Canadiens.
En dépit du passé, je voudrais dire combien je suis heureux
de voir l’assentiment que recueillent les dispositions dont sont
convenus le premier ministre et les premiers ministres provinciaux,
dispositions qui à certaines réserves près, jouissent d’un
appui presque universel.
A l’instar de nombreux autres, j’avais mes préférences;
j’aurais préféré une charte des droits et des libertés sans la
clause dérogatoire, sans la « soupape de sécurité » comme on l’a
appelée. Quoi qu’il en soit, je puis souscrire à la position du
ministre de la Justice (M. Chrétien) selon qui la clause
dérogatoire est une soupape de sécurité, dont on a besoin pour
prévenir les absurdités et qui sera sans doute rarement
employée. Mais je dois au moins rappeler aux honorables
représentants que cette clause dérogatoire a pour effet de
laisser les droits de nos minorités au bon vouloir et à la bonne
volonté des Parlements et assemblées législatives élus à la
majorité qui ont, malheureusement, manqué par le passé de la
compassion et de la sensibilité nécessaire pour traiter nos
minorités de façon juste et équitable.
Toutefois, du fait du compromis canadien dont nous sommes
saisis et sur lequel l’opposition loyale a insisté, nous avons
maintenant une clause dérogatoire. Je pense que nous pouvons
compter sur nous-mêmes et sur les futurs parlementaires pour
sauvegarder les droits des minorités et pour être bien sûrs que
ces clauses seront si rarement employées que les amendements
futurs-et je suis sûr qu’il y en aura quelques-uns-prévoiront
de supprimer les clauses de nonobstant ou les soupapes de
sécurité comme on les a appelées.
Pour éviter que mes remarques aient un air trop négatif,
permettez-moi de dire encore une fois que je suis heureux,
personnellement ainsi qu’au nom de mes électeurs de constater
que cette trente-deuxième législature s’attaque aux derniers
vestiges du colonialisme et modernise le Canada.
Permettez-moi également de dire que je suis non seulement
content de cet événement mais que je suis en extase devant son
contenu et sa teneur. Il serait exact de dire que je suis très fier
du Canada ce soir. Je puis me lever fièrement ici et dire que je
suis un Canadien devenu adulte, que je suis un citoyen d’un
pays qui a suffisamment confiance en lui, en son système
politique et en ses institutions pour qu’il exige d’avoir le droit
et l’obligation de modifier en son sol les textes de loi qui le
régissent. En outre, le rapatriement s’est fait en même temps
que la création d’une charte des droits et des libertés conçue
par mes collègues et le gouvernement, perfectionnée et mise au
point par le comité parlementaire envers lequel nous sommes
tous profondément reconnaissants, et maintenue malgré
d’âpres critiques grâce à la persévérance, la perspicacité et la
conviction partagée que ce qui est bon doit être conservé,
autant de qualités dont ont fait preuve mes collègues de ce
côté-ci de la Chambre. L’histoire prouvera, j’en suis convaincu,
que lorsque les autres avaient renoncé au principe pour hâter
les choses, notre parti a fait preuve de détermination et
d’obstination pour prévoir une charte des droits et libertés dont
13138 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
DÉBATS DES COMMUNES
tous les Canadiens d’aujourd’hui et de demain pourront
bénéficier.
* (2100)
Une voix: Et ils l’ont modifiée.
M. Daudlin: L’histoire prouvera que malgré la dissension, la
discorde et l’échec prévus par certains, notre parti et ceux qui
l’appuient se sont accrochés fidèlement au principe que les
gens eux-mêmes exprimaient depuis le début, à savoir qu’ils
désiraient rapatrier la Constitution en vertu d’une formule
d’amendement accompagnée d’une Charte des droits et des
libertés.
Vous vous rappelez que de nombreux députés étaient disposés
à laisser tomber complètement cette Charte des droits et
libertés pour ne plus penser qu’au rapatriement, au fur et à
mesure où le débat se déroulait et, au besoin, à prévoir une
formule d’amendement, mais que si cela se révélait impossible,
à ne se préoccuper que du rapatriement même sans formule
d’amendement. Pendant tout le débat, nous avons régulièrement
dit non, il faut une formule d’amendement en même
temps que le rapatriement et il faut une charte des droits. Je
partage l’opinion de mon honorable ami qui dit que nous
l’avons modifiée, mais je lui demande très sincèrement: à la
demande de qui?
M. Gamble: De tout le monde.
M. Daudlin: Il prétend parler au nom de tout le monde.
M. Gamble: Je n’ai pas dit cela.
M. Daudlin: Je pense parler au nom des gens qui m’ont
envoyé ici et je tiens à vous dire qu’il n’exprime pas l’opinion
des électeurs d’Essex-Kent.
Je n’ai pas besoin d’énumérer le contenu et les dispositions
de la charte des droits et libertés car d’autres s’en sont déjà
chargés, mais il suffit de dire que nous avons pris des mesures
entièrement nouvelles, reculé nos limites et changé le cours de
l’histoire.
Si vous me permettez de prêcher pour ma paroisse, je dirai
que la région d’Essex-Kent peut, plus que n’importe quelle
autre, prétendre être multiculturelle au véritable sens du
terme. Un mélange d’Anglais, d’Écossais et d’Irlandais auxquels
se sont ajoutés des Français et par la suite des Allemands,
des Russes des Ukrainiens, des Portugais, des Libanais,
des Japonais, des Hollandais et dernièrement des Vietnamiens
et Laotiens ont formé une communauté qui demandait qu’on
élargisse le concept des deux races fondatrices. Je me réjouis
vivement au nom de mes électeurs qui, pendant de nombreuses
années, ont illustré le principe maintenant reconnu dans les
mots exprimant le caractère multiculturel de notre société et
j’en remercie les rédacteurs de la résolution.
Comme tous les députés je suis déçu, car ils le sont tous, j’en
suis sûr, que nous n’ayons pas encore réglé la question de
l’égalité des sexes que j’espérais voir également inscrite dans la
charte. On ne le répètera jamais assez, le gouvernement actuel
ne s’est jamais opposé à un accord sur cette question et je me
La Constitution
joins à tous ceux qui demandent au premier ministre dissident
de se joindre à ses collègues pour rétablir ces dispositions qui
ont malheureusement été supprimées de la charte.
Une voix: Comment allez-vous voter?
M. Daudlin: Monsieur l’Orateur, le député demande comment
je vais voter. Je lui dirai que cette résolution contient
trop d’éléments positifs pour qu’on la rejette faute d’une
entente sur certains de ces éléments. Je conviens avec lui que
ces dispositions devraient être incluses, mais je ne pense pas
qu’il faille rejeter le tout à cause de leur absence. Je ne pense
pas non plus que les citoyens soient de cet avis.
Je souhaite qu’on règle la question des droits des autochtones
et celle de l’absence du Québec du nombre des signataires
de l’accord. Tous les députés sont sans aucun doute de
cet avis. Mais, là encore, mon raisonnement s’applique. Le
problème est le suivant: ayant obtenu jusqu’ici des résultats
aussi prometteurs, sommes-nous en droit de prétendre que,
pour avoir échoué à certains égards, l’entreprise dans son
ensemble est, elle aussi, vouée à l’échec, qu’il y a lieu d’abandonner
le tout? Je comprends difficilement que sous le prétexte
qu’il y a certaines lacunes, on souhaite tout laisser tomber.
Pareille attitude équivaut à celle de l’enfant qui, désireux de
jouer au football mais loin d’en apprécier les règles, veut
reprendre son ballon pour rentrer chez lui et mettre ainsi un
terme au jeu. Ce n’est pas une raison pour tout abandonner.
Nous avons accompli des progrès et il nous reste du chemin à
faire, c’est incontestable. Mais nos efforts ont sans aucun
doute abouti à un mécanisme permettant de réaliser de nouveaux
progrès tant dans l’immédiat que dans un proche avenir
et à long terme. Certes, la perfection est souhaitable, mais si
nous y parvenions ce soir, rien ne dit que dans un, cinq ou dix
ans, on verrait les choses du même oeil.
Ainsi, il serait des plus ridicules que moi-même et d’autres
prétendions ne point voter en faveur de la résolution dans son
libellé actuel ou telle que modifiée dans les prochains jours ou
dans les prochaines heures au fil de la discussion, et cela
équivaudrait à adopter l’attitude de l’autruche qui s’enfouit la
tête dans le sable. Là n’est pas notre rôle. En fait, nous nous
devons d’agir en tant qu’hommes politiques à l’esprit pratique;
nous nous devons de faire de notre mieux pour le moment et
pour l’avenir, tout en nous assurant que les mécanismes mis
sur pied soient d’une souplesse suffisante pour nous permettre
d’aller plus loin le moment venu.
Mes électeurs sont prêts à accepter les offres faites au
Québec, dans l’espoir d’inciter le gouvernement de cette province
à se détourner de ses objectifs séparatistes avoués et à
nous aider à l’édification d’un Canada nouveau. En passant,
j’avoue ma fierté devant la garantie des droits à l’enseignement
des minorités canadiennes, étant donné qu’étant moi-même
membre d’une minorité linguistique dans ma province, je
connais les pressions qui ont été exercées, et je sais qu’à défaut
de cette garantie, ces pressions auraient abouti à la disparition
de la langue française hors Québec.
23 novembre 1981 13139
13140 DÉBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
La Constitution
Cet Accord mémorable constitue un grand pas vers l’égalité
des deux peuples fondateurs et j’invite instamment mes concitoyens
québécois à inscrire dans une constitution ce qu’ils ont
concédé de bon coeur depuis 100 ans. J’espère qu’en dépit de
l’heure tardive, cet Accord franchira les derniers obstacles et
que notre pays pourra aborder un autre siècle de progrès; un
nouvel Accord que nous nous efforçons de bâtir ce soir et au
cours des jours qui suivront.
Enfin, monsieur l’Orateur, permettez, libre de tout esprit
partisan mais quand même avec beaucoup de fierté, permettez
que je dise qu’en tant que libéral, j’ai toutjours été fier que ce
soit notre parti qui a été l’auteur des grands projets législatifs
tels que le Régime de pensions du Canada, les allocations
familiales, les régimes universels d’assurance-maladie, et je
suis encore plus fier en songeant que notre drapeau national ait
été l’oeuvre d’un grand premier ministre libéral.
Vous me pardonnerez, monsieur l’Orateur, si j’avoue que ce
projet de résolution nous grandit quelque peu, nos partisans et
moi-même, non seulement en tant que libéraux, mais en tant
que Canadiens fiers de notre héritage, confiants dans l’avenir
et reconnaissants envers les hommes et les femmes du gouvernement
qui, au nom de tous leurs concitoyens, ont permis
aux Canadiens d’aujourd’hui et de demain de compléter
l’oeuvre si bien commencée en 1867.
Certains sont d’avis que le document en question est incomplet.
Personnellement, je continue de souhaiter vivement que
l’on fasse quelque chose concernant les enfants à naître. Des
engagements ont été pris cependant et je me réjouis de la
neutralité du document dont il est question ce soir ainsi que du
projet de résolution. Je partage les préoccupations du député
de Provencher (M. Epp) concernant les conséquences du présent
débat ainsi que l’attitude des autres législatures et Parlements
à l’égard des enfants à naître, ceux qui sont le moins
capables de se protéger. J’ose croire que cet appui généralisé
que tous les partis à la Chambre ont acordé aux enfants non
encore nés se concrétisera en une résolution traitant d’une
autre mesure législative.
e (2110)
Une voix: Nous avions une résolution. Vous l’avez rejetée.
M. Daudlin: J’espère qu’il existera toujours un appui pour ce
que le député d’en face dit qu’il avait, tout comme j’espère que
des députés de tous les partis, et surtout du Nouveau parti
démocratique, auront la sagesse de présenter au ministre de la
Justice des recommandations visant à amender le Code criminel
de façon à nous permettre vraiment de protéger les enfants
non encore nes.
Une voix: Marché conclu!
M. Daudlin: C’est promis. Je crois que c’est là une des
choses les plus importantes, je dirai même fondamentales, que
nous ayons à faire dans ce Parlement. Ce n’est pas quelque
chose que nous pouvions faire avec cette résolution, mais c’est
quelque chose qui, à mon sens, doit être fait. A mon avis, ce
n’était pas là le document approprié pour ce faire. Il ne semble
que si la bonne volonté qui commence à se manifester dans le
débat se maintient à l’égard de cette question, nous pourrons
aussi la régler. Je me réjouis tout particulièrement des résultats
que nous avons obtenus ce soir. Ce que nous visons ce
soir …
Une voix: Parlez-nous de la résolution et du droit des
enfants à naître.
Une voix: Allez-y. Vous avez cinq minutes.
M. Daudlin: C’est toujours particulièrement satisfaisant
pour un député de voir jusqu’à quel point d’autres députés
tiennent à écouter ses propos, monsieur l’Orateur.
J’ai parcouru ma circonscription et le reste du Canada, tout
comme sans doute de nombreux autres députés ont dû le faire,
pour savoir ce que veulent les Canadiens. A mon avis, nous
sommes sur le point de leur donner ce qu’ils veulent. Je me
réjouis que la résolution, la partie surtout qui constitue la
Charte des droits et des libertés, nous offre les garanties que
les Canadiens attendaient.
Une voix: Vous vous disiez si malheureux, il y a un instant.
M. Daudlin: Le député ne semble pas comprendre qu’on
peut être à la fois malheureux et satisfait des résultats obtenus.
C’est très difficile à expliquer, mais je vais tenter de le faire.
Une voix: Parlez-nous de la résolution et du droit des
enfants à naître.
M. Daudlin: Il serait plus facile, monsieur l’Orateur, d’avoir
une période de questions et réponses si le député était à sa
place. Peut-être préfère-t-il rester anonyme!
Il a beau se moquer, un député sérieux ne peut accepter que
cette résolution soit l’aboutissement ultime et définitif de ce
que nous avons entrepris il y a un an et que nous, personnes
imparfaites, soyons parvenues à la perfection. Nous sommes
venus bien près, monsieur l’Orateur. J’ai l’impression que les
futurs historiens diront des bases que nous avons jetées que le
Parlement a accompli une oeuvre admirable et que les Canadiens
ont tout lieu d’être fiers de ce moment de notre histoire.
Des voix: Bravo!
M. Chrétien: J’invoque le Règlement, monsieur l’Orateur.
J’ai l’honneur d’annoncer à la Chambre que toutes les provinces
signataires de l’Accord ont accepté que l’article 28 sur
l’égalité des hommes et des femmes s’applique sans la clause
dérogatoire. Par ailleurs, je suis heureux d’annoncer à la
Chambre que toutes les provinces ont accepté de constitutionnaliser
les droits des autochtones.
Des voix: Bravo!
L’Orateur suppléant (M. Blaker): Pour reprendre les propos
du député d’Edmonton-Ouest (M. Lambert), je dirai que cette
intervention ne constitue pas un rappel au Règlement. Par
conséquent, les porte-parole des partis de l’opposition voudraient
peut-être faire un commentaire et par souci de justice,
je demanderai à la Chambre si elle consent à l’unanimité à
permettre au représentant de chaque parti de prendre la
parole. Y a-t-il consentement unanime?
13140 DEBATS DES COMMUNES 23 novembre 1981
DÉBATS DES COMMUNES
Des voix: D’accord.
M. Epp: Monsieur l’Orateur, je tiens à remercier le ministre
de la Justice (M. Chrétien) de nous avoir annoncé la nouvelle.
J’ajouterai, au nom de mon parti, que nous sommes heureux
que l’amendement à l’étude, qui tend à reprendre l’article 28
tel que nous l’avions mis au point au comité constitutionnel,
soit maintenant accepté par les neuf provinces signataires de
l’Accord. Sauf erreur, c’est bien de ces neuf provinces que le
ministre vient de parler. Quant aux droits des autochtones, si
je comprends bien, les provinces viennent d’accepter ce que
nous en sommes venus à appeler l’article 34. Voilà ce que j’ai
retenu des observations du ministre.
Au nom du Parti progressiste conservateur, je me félicite
que ce soit maintenant chose faite. Nous avons toujours été
d’avis que ces deux dispositions devaient figurer dans la constitution.
Il va de soi que certaines modifications à caractère
technique devront être apportées à la résolution. Nous devrions
pouvoir nous entendre là-dessus, et les deux amendements
devraient accélérer l’adoption de la résolution.
Des voix: Bravo!
M. Deans: Monsieur l’Orateur, comme la plupart des députés,
je suis toujours heureux d’apprendre de bonnes nouvelles.
Espérons que celles que nous venons d’apprendre en sont
réellement. Je voudrais bien que les amendements mineurs que
le ministre m’a indiqués soient apportés à un des deux articles
en question. Nous accepterions sans doute un tel amendement.
J’attendrai cependant d’avoir lu le texte de l’amendement
avant de me prononcer de façon définitive.
L’Orateur suppléant (M. Blaker): La présidence devrait
normalement redonner la parole aux députés qui veulent poursuivre
le débat.
M. Ittinuar: Monsieur l’Orateur, tout comme mon collègue
de Hamilton Mountain (M. Deans), je préfère attendre d’avoir
vu l’amendement pour me prononcer. Je tiens cependant à
féliciter l’honorable ministre de la Justice (M. Chrétien) de
tout le travail qu’il a fait au nom des habitants du Nord. Je
suis aussi reconnaissant envers le ministre des Affaires indiennes
et du Nord canadien (M. Munro) et le chef de mon parti
et je tiens certes à remercier l’honorable chef de l’opposition
officielle (M. Clark) de ses aimables paroles l’autre jour.
J’espère que le texte rédigé par le ministre de la Justice
rendra justice aux efforts déployés par tous les partis à la
Chambre et par bon nombre de Canadiens, et je ne veux pas
parler uniquement des dispositions relatives aux droits des
autochtones, mais aussi de l’article sur l’égalité des femmes. Si
j’ai bien compris, le texte est tout à fait nouveau, mais la
portée des dispositions originales a en grande partie été maintenue
et j’en félicite le ministre de la Justice.
Des voix: Bravo!
M. John McDermid (Brampton-Georgetown): Monsieur
l’Orateur, quand j’ai vu le ministre de la Justice (M. Chrétien)
La Constitution
arriver à la Chambre ce soir, je pensais qu’il venait écouter
mon discours, mais mes propos risquent d’être un peu décevants
après la bonne nouvelle qu’il vient de nous apprendre. Je
tiens à féliciter le ministre et à féliciter en même temps mon
bon ami de Nunatsiaq (M. Ittinuar) du travail que lui et
d’autres députés de mon parti, qui ont participé activement
aux discussions à ce sujet, ont accompli. C’est certainement
une excellente nouvelle. Je suis heureux d’avoir l’occasion, ce
soir, de participer à cet important débat historique.
e (2120)
Nous assumons notre charge de députés à une époque
passionnante et difficile et je considère comme un privilège
d’être ici à l’heure actuelle. En tant que représentant d’une
circonscription de l’Ontario, Brampton-Georgetown, je dois
admettre que la constitution est pour moi un sujet délicat à
traiter. Je représente au fédéral la circonscription que le
premier ministre de l’Ontario représente au niveau provincial.
Bon nombre de mes électeurs et moi-même avons été grandement
troublés par l’appui inconditionnel et absolu que le
premier ministre provincial a donné à la première proposition
constitutionnelle formulée par le gouvernement fédéral, pas
tant à cause de la teneur de la résolution mais plutôt de la
procédure que proposait le gouvernement; le parti progressiste
conservateur du Canada jugeait cette procédure contraire aux
intérêts du Canada, position que la Cour suprême du Canada a
d’ailleurs confirmée. Je suis très fier, toutefois, que le premier
ministre provincial ait déclenché le processus du compromis en
renonçant au droit de veto de l’Ontario. Je tiens à le remercier
personnellement d’avoir agi ainsi, car cela a permis d’en
arriver à un consensus.
J’aimerais également remercier et féliciter tous les premiers
ministres provinciaux d’avoir respecté les traditions canadiennes.
Même si l’entente générale conclue exclut l’un des partenaires
essentiels de la Confédération, la province de Québec,
bien des Canadiens sont soulagés de voir que les provinces ont
réussi à se mettre d’accord.
Le dialogue sur une nouvelle constitution n’a que trop duré,
comme nous le rappelle souvent l’honorable premier ministre
(M. Trudeau). Il voudrait nous faire croire que depuis 54 ans,
les Canadiens n’ont fait que discuter des questions constitutionnelles.
Toutes les personnes intelligentes savent que ce n’est
pas le cas. De rares tentatives ont été faites au cours de cette
période en vue de trouver une formule d’amendement acceptable
pour rapatrier la constitution. J’aimerais toutefois féliciter
le premier ministre d’avoir réalisé son rêve, semble-t-il, même
s’il s’agit d’une version légèrement modifiée de ce rêve.
Examinons pendant quelques instants les méthodes qu’il a
employées pour y parvenir. Le premier ministre était prêt à
tout, y compris à mécontenter les provinces et à prendre le
risque de la séparation, afin, dit-on, de terminer sa carrière
politique sur la déclaration officielle d’indépendance du
Canada. L’éventualité de cette mesure unilatérale était inacceptable
dans un régime de fédéralisme coopératif.
23 novembre 1981 13141
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
Quand la résolution initiale a été déposée, le chef de l’opposition
officielle (M. Clark) a vu immédiatement qu’une mesure
unilatérale pouvait présenter un danger et que la résolution
pouvait avoir des conséquences plus importantes qu’il n’y
paraissait à prime abord. Il s’est montré avisé et courageux en
admettant que les changements constitutionnels modifiaient
les relations entre le peuple et ses gouvernants et qu’à moins
d’une entente sur ces changements, les fondements même de
notre stabilité économique, sociale et culturelle se trouveraient
menacés.
En discutant avec un grand nombre de mes électeurs, j’ai pu
constater qu’à leurs yeux, comme pour la plupart des Canadiens,
le premier ministre ne devait pas restructurer notre
constitution et notre système fédéral sans l’approbation des
provinces. Dans la circonscription de Brampton-Georgetown,
83 p. 100 des électeurs interrogés estimaient qu’il fallait
obtenir le consentement des provinces-le consentement de la
majorité d’entre elles-et de toute évidence la plupart des
Canadiens partageaient cette opinion. Tous les efforts déployés
par l’opposition officielle pour faire obstacle à une mesure
unilatérale était donc parfaitement justifiés. C’est grâce à
l’opposition officielle qu’on s’est battu pour que les Canadiens
puissent se faire entendre, pour former un comité constitutionnel,
pour téléviser les délibérations et retarder l’examen de la
Chambre. Nous nous sommes longuement et durement battus
pour soulever l’opinion publique et je suis fier de ce que nous
avons accompli.
Notre chef et notre parti se sont battus pour défendre la
tradition canadienne malgré les critiques et les sarcasmes des
libéraux, mais je ne regrette pas un instant ce que nous avons
fait. Cela me rappelle ces paroles du très honorable John
Diefenbaker: «Dieu nous interdit de nous excuser de défendre
les valeurs auxquelles notre pays doit sa grandeur.» Si mes
collègues d’en face estiment que nous avons perdu notre temps,
ils feraient mieux de suivre l’exemple de certains libéraux et de
se demander pourquoi ils ont été élus-pour représenter leurs
électeurs ou pour suivre leur maître comme des moutons sans
se soucier des conséquences pour les citoyens qui leur ont fait
confiance?
Nous étions tous satisfaits, je pense, de l’entente multipartite
conclue le 8 avril à la Chambre en vue de différer le débat
final sur la résolution jusqu’à ce que la Cour suprême statue
sur les appels présentés par les cours inférieures. La Cour
suprême a eu la sagesse de confirmer, comme notre parti
n’avait cessé de le répéter, qu’on ne pouvait pas renier les
conventions, les coutumes et les habitudes qui font partie de
notre constitution.
Sans doute que ces derniers 12 mois bon nombre de Canadiens
ont écouté le débat constitutionnel avec beaucoup d’indifférence,
et je comprends leur réaction. Le chômage, l’inflation,
les taux d’intérêt élevés et d’autres problèmes plus
concrets ont eu des répercussions plus immédiates sur la vie de
tous les jours. Samedi dernier, j’ai marché avec un groupe de
citoyens inquiets de Brampton dirigés par deux femmes très
courageuses, Kathy Dinley et Marlene Grant. Ici, sur la
colline du Parlement, on nous a priés de régler la question
constitutionnelle aussi rapidement que possible pour donner
enfin la préséance aux questions économiques. Deux pleins
autobus de citoyens libres de toute affiliation à quelque groupe
que ce soit sont venus manifester à Ottawa. Ils se sont dits
heureux eux aussi de voir qu’on avait réussi à établir un
consensus et que la façon traditionnelle de procéder au Canada
l’avait emporté.
La Chambre a réussi à s’entendre pour attendre la décision
de la Cour suprême parce que les libéraux se rendaient de plus
en plus compte que les Canadiens de tout le pays commençaient
à voir plus clair dans les tentatives qui se faisaient pour
modifier la nature fondamentale du pays et n’y étaient pas
favorables. Dans l’intérêt du Canada, je me réjouis que le
premier ministre ait jugé bon de reconsidérer plus attentivement
le précédent qu’il voulait établir en fonçant avec un
projet qui n’obtenait pas l’appui de la majorité des provinces et
qui n’était pas accepté par une grande majorité des Canadiens.
Des hommes d’État éminents ont mis de côté leurs opinions
personnelles et ont réussi à s’entendre pour créer notre confédération.
Des sentiments de frustration et des opinions séparatistes
ont été exprimés tout au cours de notre histoire, mais
rien n’aurait pu diviser le Canada autant que l’absence d’un
assentiment général. Selon lord Acton: «La coexistence de
plusieurs nations dans un même Etat est une épreuve, mais elle
offre la meilleure sécurité pour ses libertés.» Quand le Canada
a adopté son régime fédéral, il a agi ainsi à bon droit. On
estimait alors, comme on le fait maintenant, que c’était le
meilleur moyen d’exprimer notre dualité nationale et d’accorder
une autonomie régionale et locale.
Je voudrais examiner la position du Québec un instant. J’ai
dit tantôt qu’une province très importante n’avait pas jugé bon
de consentir à l’accord constitutionnel. La situation au Québec
est un problème constitutionnel primordial depuis des années.
A mon avis, il demeure le principal élément des discussions
constitutionnelles qui se poursuivent depuis 1963. Nombre de
fois, on a remis en question la position constitutionnelle du
Québec, mais une fois encore le problème demeure sans solution.
La chose peut être attribuable au fait que le gouvernement
fédéral et les gouvernements provinciaux ne sont pas
disposés à négocier davantage ou que le gouvernement québécois
qui a participé aux négociations constitutionnelles s’intéresse
uniquement à la séparation. Je ne sais pas quoi en
penser, mais cela m’afflige de constater que le Québec a refusé
son assentiment. C’est une tragédie, mais j’espère que les
choses s’arrangeront.
e (2130)
Le premier ministre soutient depuis des années qu’il est
urgent d’amender la constitution. Les provinces autres que le
Québec estimaient en général que ce n’était pas vraiment
urgent; c’était important, mais pas vraiment urgent. Ce n’est
qu’à la suite du référendum tenu au Québec l’année dernière
que les Canadiens ont compris l’exaspération des Québécois et
la haute idée qu’ils se font du rôle de leur province au sein de
la Confédération. En mai 1971, Claude Ryan écrivait:
Le Canada anglais serait beaucoup mieux avisé de considérer le gouvernement
du Québec comme le véritable interprète de la volonté du Canada français . . .
A remarquer que c’était le parti libéral qui était au pouvoir
au Québec
… un gouvernement perçu non pas à travers les hésitations de Robert Bourassa,
mais à travers la ligne de pensée constante exprimée dans tous les principaux
documents constitutionnels depuis 1966. Il y trouverait les éléments essentiels,
non pas nécessairement d’une solution, mais d’une négociation réelle. Tant qu’il
n’aura pas étudié et accepté ces éléments, aucune solution n’est possible.
13142 23 novembre 1981
23 novembre 1981 DÊBATS DES COMMUNES 13143
L’opposition officielle a présenté une proposition donnant au
Québec une autre occasion de reconsidérer sa position. Si le
gouvernement actuel du Québec n’accepte pas que les provinces
désireuses de renoncer à un programme puissent obtenir
une compensation, il sera clair que les autorités actuelles de la
province sont uniquement vouées à la séparation. Il reste à voir
si le gouvernement provincial représente véritablement la
volonté politique des Québécois.
Le gouvernement du Québec a conclu en avril avec sept
autres premiers ministres provinciaux un accord qui comportait
cette disposition. Le premier ministre du Québec a-t-il
ratifié cet accord à l’époque parce qu’il pensait que c’était ce
que voulaient les Québécois ou ne l’a-t-il fait que pour embarrasser
le gouvernement fédéral, en présumant que l’accord ne
serait pas accepté? Je ne puis qu’espérer que toutes les parties
à la négociation discutent de bonne foi et continuent à agir
dans les intérêts supérieurs de l’unité canadienne. Je demande
à tous les Québécois d’examiner notre position; s’ils l’approuvent,
s’ils veulent prendre leur juste place dans la Confédération,
qu’ils le fassent savoir alors au premier ministre Lévesque
et au premier ministre du Canada, afin qu’ils agissent de
concert pour demeurer associés. Je ne puis imaginer un
Canada sans le Québec.
Je suis extrêmement déçu de voir que le projet de constitution
canadienne dont nous sommes saisis ne garantit pas le
droit à la propriété. A mon avis, c’est le droit de posséder une
propriété qui constitue la pierre angulaire de la démocratie.
L’investissement dans une propriété donne un sentiment de
sécurité, «solide comme le roc de Gibraltar», comme disait une
publicité célèbre, le sentiment de posséder une parcelle de
notre grand pays. Pourquoi ne pas protéger ce droit, droit
fondamental de toute démocratie? Le feu président des États-
Unis d’Amérique, le général Dwight D. Eisenhower, disait
ceci:
Certains disent que nous nous soucions davantage des droits à la propriété que
des droits de l’homme; je soutiens que le droit à la propriété est un des droits de
l’homme et que s’il n’est pas défendu, tous les autres disparaîtront.
Je suis parfaitement d’accord et je demande que cette
question figure parmi les plus hautes priorités lorsque les
premiers ministres discuteront la prochaine fois de modifications
à apporter à la constitution.
Je voudrais brièvement discuter d’un article de la charte qui
cause des inquiétudes à un grand nombre d’instances juridiques
et d’organismes chargés d’appliquer la loi. Il s’agit de
l’article 24(2), connu sous le nom de règle d’irrecevabilité. On
a accusé le gouvernement d’avoir tenté d’américaniser les
règles canadiennes de la preuve et de placer le Canada dans un
carcan constitutionnel qui entraverait l’évolution de notre droit
et de nos procédures criminels en intégrant à la constitution
une version de la règle américaine de l’irrecevabilité de certains
éléments de preuve.
Après en être arrivé à un compromis avec les provinces au
cours de l’été 1980, le gouvernement est revenu sur sa position,
comme il est réputé pour le faire parfois, et en janvier 1981, il
a décidé d’adopter la règle de l’irrecevabilité. A cause de cette
décision et des inquiétudes exprimées dans les milieux intéressés,
l’opposition officielle a proposé un libellé de compromis
qui a été adopté par le comité mixte.
Cependant, cet article continue à susciter des inquiétudes
qui, à mon avis, doivent être exprimées et versées au compte
rendu. Les problèmes éventuels que pourrait susciter la consti-
La Constitution
tutionnalisation de cette règle ont été portés à mon attention
par bien des gens, notamment par le chef de la police du grand
Toronto, M. Ackroyd, et le chef de la police régionale de Peel,
M. Doug Burrows.
L’article 24(2) établit des critères subjectifs pour nos tribunaux.
Le pouvoir judiciaire ne peut s’appuyer sur aucune
jurisprudence dans ce domaine. Il est intéressant de noter que
bien qu’américaine, la règle de l’irrecevabilité ne figure pas
dans la constitution américaine. Cette règle peut être modifiée
n’importe quand par les tribunaux américains ou par le Congrès.
Dans ce cas, pourquoi le Canada s’engage-t-il dans une
voie qui l’obligera à amender la constitution si un changement
devient nécessaire dans ce domaine?
Des commissions tant fédérales que provinciales sur la
réforme du droit ont recommandé qu’une règle de l’irrecevabilité
du genre de celle qui figure dans la charte soit incluse dans
les lois fédérales et provinciales portant sur la preuve. Je sais
que certains procureurs généraux et procureurs de la Couronne,
et notamment le procureur général de l’Ontario, estiment
que l’article 24(2) ne devrait pas être intégré à la
constitution, mais qu’il devrait plutôt être inclus, par voie
d’amendement, dans nos lois sur la preuve. Dans une lettre
datée du 20 mars 1981, le procureur général de l’Ontario a
écrit à tous les députés au Parlement, et je cite un passage de
sa lettre:
Je vous invite à éviter d’introduire dans notre système de justice pénale des
concepts américains qui ont considérablement nui à l’application efficace de la
loi aux États-Unis sans pour autant accroître les droits des particuliers.
Lorsque le gouvernement fédéral a fait volte-face en janvier
et a décidé d’adopter la règle de l’irrecevabilité, il n’a pas
consulté les gouvernements provinciaux. C’est un domaine qui,
selon les défenseurs des libertés civiques, devrait figurer dans
la charte, mais comme l’ont exposé l’Association canadienne
de la police et beaucoup d’autres, il faut étudier attentivement
les modifications que cette règle contribuera à apporter à notre
système pénal. Ils ont demandé à chacun d’entre nous de se
poser une série de questions. En voici quelques-unes:
Est-ce que je veux adopter une règle américaine qui est rejetée à tous coups
par les tribunaux canadiens et britanniques depuis 300 ans, qui, encore récemment,
a été sérieusement mise en doute aux États-Unis et qui a été carrément
rejetée par trois commissions royales anglaises de marque qui l’ont considérée
comme peu valable pas plus tard qu’en décembre 1980?
La règle de l’irrecevabilité permet-elle vraiment de restreindre la police et, par
conséquent, de protéger les libertés civiques? Ou est-elle inférieure à un solide
examen des faits suivi de poursuites et de discipline policière s’il y a lieu?
Les Canadiennes veulent-elles protéger leurs agresseurs au point que la
moindre erreur de la police dans le déroulement de l’enquête et dans les
procédures d’arrestation entraîne l’exclusion de la preuve et un acquittement,
même si la culpabilité est manifeste?
Un incident plutôt macabre, mais vrai, qui s’est produit en
Californie illustre de façon éclatante ce qui pourrait arriver.
Le policier d’une patrouille-radio a fait stopper une voiture et
a commencé à questionner le chauffeur. Comme il lui vint de
graves doutes, il a demandé au chauffeur d’ouvrir le coffre de
sa voiture. Celui-ci a d’abord refusé, puis, devant l’insistance
de la police, il a fait ce qu’on lui demandait. Il a fini par ouvrir
le coffre de sa voiture. Dans le coffre, le policier a trouvé le
cadavre démembré d’un parent du conducteur. Celui-ci s’est
reconnu coupable du meurtre et a été condamné par un
tribunal de première instance. Ultérieurement, un tribunal
d’appel l’a’ toutefois reconnu innocent et acquitté, parce que
l’agent de police ne disposait pas d’un mandat en bonne et due
forme lui permettant de fouiller le coffre. Tout cela à cause de
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13143
DÉBATS DES COMMUNES
La Constitution
la règle de l’irrecevabilité de la preuve en vigueur aux Etats-
Unis. Nous ne voulons pas de cela au Canada.
e (2140)
Je crois que le public doit être au courant de ces préoccupations
qu’expriment certains Canadiens. Quand la Constitution
aura été rapatriée au Canada, d’où elle ne bougera plus, il
faudra examiner attentivement ces questions.
Je voudrais faire une brève digression pour féliciter les
premiers ministres d’avoir reconnu formellement l’héritage
multiculturel du Canada, qui est une caractéristique indéniable
et permanente de notre patrimoine.
Le Canada a grandement bénéficié de la diversité de ses
habitants. Cette diversité enrichit notre nation dont les
citoyens sont résolus à vivre ensemble dans la compréhension
et l’estime mutuelles.
Au début des années 1960, le très honorable John Diefenbaker
de Prince-Albert a comparé en ces termes le Canada à un
jardin:
Un jardin . . . où l’on aurait transplanté les fleurs les plus belles et les plus
résistantes provenant de nombreux pays, toutes conservant dans leur nouvel
environnement les qualités qui les faisaient estimer dans leur pays d’origine.
Dans mes nouvelles fonctions de critique en matière d’immigration,
j’ai pris conscience ces derniers mois que notre attitude
envers les immigrants fait partie intégrante de notre
idéologie multiculturelle. Monsieur l’Orateur, j’espère que
mon expérience dans ce domaine élargira mes horizons. A cet
égard, la charte reflète la réalité canadienne.
Depuis un an et demi, je voyage énormément au Canada. Le
comité sur les perspectives d’emploi dans les années 80 m’a
donné l’occasion de voyager et de connaître le Canada. Je
connaissais très bien l’Ontario, mais le reste du Canada ne
m’était pas aussi connu. J’avais déjà eu l’occasion de voyager
dans d’autres régions du Canada, mais je n’avais jamais pris le
temps de les visiter réellement.
J’ai marché sur la plage de galets de Stephenville, à Terre-
Neuve; je me suis émerveillé devant le spectacle du port de
Saint-Jean; j’ai parcouru, en voiture et à pied, la très belle
route appelée Cabot Trail; j’ai glissé sur les rochers, à Peggy’s
Cove, en voulant prendre une photographie; j’ai visité la
fameuse assemblée législative du Nouveau-Brunswick; j’ai rencontré
les conseillers municipaux de Chicoutimi, au Québec;
j’ai côtoyé mes compatriotes canadiens-français avec lesquels
j’ai chanté, mangé et bu dans une brasserie du vieux Montréal.
Monsieur l’Orateur sourit, car il sait de quoi je parle. J’ai
sillonné l’Ontario, de Fort Frances à l’île Pelée; quelque part
entre Brandon et Winnipeg, j’ai suivi des yeux une volée d’oies
sauvages qui se dirigeaient vers le sud; en arrière plan, le
feuillage était d’un jaune d’or, un gros nuage noir s’avançait et
le soleil faisait miroiter le givre; j’ai visité de petites villes de
Saskatchewan, comme Biggar, Perdue et même Lennie, d’où
ma mère est originaire; j’ai vu les paysages grandioses de
l’Alberta et je me suis rendu jusqu’aux sables bitumineux,
dans le nord. J’ai entendu un couple autochtone me raconter
son histoire; je crois que c’était l’histoire la mieux contée qu’il
m’ait jamais été donné d’entendre. J’ai suivi les championnats
du monde de balle molle junior à Edmonton; j’ai fait le trajet
de Fort McMurray à Yellowknife en Twin Otter et j’ai
parcouru les rues de cette ville à la pleine clarté, à minuit; j’ai
fait du ski dans les Rocheuses; je me suis fait mouiller à
Vancouver, et je me suis émerveillé devant la variété du
paysage en Colombie-Britannique. D’une côte à l’autre et vers
le nord, c’est le Canada. C’est un des plus merveilleux pays du
monde grâce à sa beauté, à ses habitants, à ses ressources; et à
l’instar des millions de Canadiens, je tiens à ce qu’il le reste.
Monsieur l’Orateur, bien des Canadiens prétendaient qu’il
serait impossible de conclure cet Accord constitutionnel. Grâce
à Dieu, le Canada aura sa Constitution. Étant donné que je
suis fier d’être Canadien, j’espère bien que durant les prochaines
semaines et lorsque nous modifierons la Constitution, nous
aurons la sagesse de maintenir les libertés humaines et politiques
que nous prenons souvent pour acquises. J’adore ce pays.
Je tiens absolument à ce qu’il demeure fort sur le plan
économique et social, et à ce qu’il reste uni d’un océan à
l’autre.
M. Hal Herbert (Vaudreuil): Je prends la parole alors que
ce fameux débat constitutionnel qui a suscité bien des controverses
touche à sa fin. Il ne reste plus grand-chose à dire
maintenant que nous avons appris que les provinces se sont
mises d’accord sur les deux sujets qui étaient restés en suspens
et qui faisaient l’objet de vives polémiques. Je juge toutefois
bon de faire consigner au compte rendu une ou deux réflexions
sur l’incidence qu’aura la résolution constitutionnelle une fois
qu’elle sera adoptée; on m’a d’ailleurs déjà questionné à ce
sujet.
Monsieur l’Orateur, je tiens à dire tout d’abord que quand
j’ai débarqué au Canada il y a une quarantaine d’années, j’ai
immédiatement aimé ce pays. J’ai passé 15 mois d’entraînement
au Canada pendant la guerre. J’ai tellement aimé le pays
que j’ai voulu revenir après la guerre. Je suis effectivement
revenu avec ma famille. J’ai beaucoup voyagé au Canada,
mais j’ai aimé le Québec. C’est là que je me suis établi et que
je vis depuis lors. Je n’ai pas choisi le Québec parce que je
croyais pouvoir continuer à parler anglais; c’est tout à fait
l’inverse en réalité. Je supposais que je serais obligé de dérouiller
mon français, mais ce ne fut pas le cas. Je dirais que j’en
étais un peu déçu d’ailleurs. J’ai continué à faire marcher mon
entreprise en anglais, pendant 10 ou 15 ans, même si j’étais
dans la construction, de Trois-Rivières, dont on traduisait
autrefois le nom en anglais, jusqu’à Chicoutimi et dans toute
la province, jusque dans la capitale, ville de Québec. Les
choses devaient changer.
Je crois que le changement est venu surtout avec le bill 22.
Monsieur l’Orateur, parce que vous y avez été mêlé à l’époque,
vous savez que personnellement je n’ai jamais critiqué le bill
22 même si certaines parties de cette mesure ne me plaisaient
pas tellement. Mais dans l’ensemble, j’étais d’avis qu’une
action s’imposait pour redresser ce qui était sans contredit une
situation inacceptable dans la province de Québec.
Je n’ai pas beaucoup aimé que le bill 22 soit remplacé par le
bill 101. Même aujourd’hui, on s’est habitué au bill 101. Les
anglophones de la province de Québec n’ont vraiment pas
l’existence si misérable.
a (2150)
Je voudrais toutefois, comme je l’ai dit au début, parler des
parties de la résolution sur lesquelles on m’interroge. Je voudrais
commencer par la disposition d’annulation «nonobstant»
en ce qu’elle s’applique à la Charte des droits et libertés. Toute
la Charte des droits et libertés est inscrite dans la constitution
et aucune province ne pourra échapper à aucune de ses dispositions.
L’accord que le premier ministre a signé avec les premiers
ministres de neuf provinces n’affaiblit pas la charte. Les
13144 23 novembre 1981
23 novembre 1981DBASDSCMUE135
droits démocratiques, les libertés fondamentales, les droits à la
liberté de circulation et d’établissement, les droits juridiques,
les droits à l’égalité et les droits linguistiques sont garantis par
la constitution et s’appliquent dans tout le pays. Ce que les
premiers ministres des provinces et le premier ministre du
Canada ont accepté, c’est un dispositif de sécurité dont le
Parlement ou les assemblées législatives ne se serviront probablement
jamais, sauf dans des situations non contentieuses,
pour annuler certains articles de la charte.
La charte des droits et libertés que le Québec a adoptée en
1975 contient une disposition d’annulation qui a été utilisée à:
plusieurs reprises. L’application n’en était pas controversée
toutefois et il est instructif de voir comment l’annulation peut
s’appliquer à une charte constitutionnelle. En effet, même si la
charte du Québec garantissait l’égalité de tous devant la loi, la
loi sur les jurys stipule qu’un avocat ne peut être juré. De plus,
même si elle garantissait des procès publics, la loi sur la
protection de la jeunesse prévoit que dans certaines circonstances
un tribunal pour la jeunesse peut tenir des séances à
huis clos. Aussi, même si la charte protégeait le caractère
secret des rapports entre un médecin et son patient, la loi sur la
sécurité routière oblige un médecin à communiquer au bureau
des permis le nom de tout patient qui n’est pas apte, au point
de vue médical, à conduire un véhicule automobile. C’est à
cause de l’utilisation que l’on a faite dans le passé de la clause
dérogatoire et du fait qu’il faut avoir un mécanisme de sécurité
qui permette de corriger des situations absurdes sans avoir à
présenter une complexe modification constitutionnelle que les
principaux défenseurs des libertés civiles se sont félicités de son
inclusion dans la charte des droits et libertés.
J’aimerais faire une brève observation au sujet de l’impôt
indirect. L’Acte de l’Amérique du Nord britannique autorise
le gouvernement fédéral à percevoir des impôts par n’importe
quel moyen, y compris des impôts indirects, mais n’autorise
pas les gouvernements provinciaux à le faire. C’est l’article
92(2) de l’AANB qui précise les pouvoirs provinciaux, lesquels
sont limités à l’imposition directe. Par conséquent, en vertu de
la constitution actuelle les gouvernements provinciaux peuvent
uniquement percevoir des impôts directs pour leurs propres
fins. Pour décider si un impôt est direct ou indirect, les
tribunaux se fondent sur la définition qu’en a donnée John
Stuart Mills. Un impôt direct est celui qui est exigé du
contribuable qui le versera. L’impôt indirect est celui que paie
une personne qui, cela est entendu, s’indemnisera aux dépens
de quelqu’un d’autre. Pour décider si un impôt était direct ou
indirect, les tribunaux ont toujours jugé d’après cette définition.
La mesure proposée vise à affranchir les provinces de
l’obligation de satisfaire à cette définition de la taxe directe
lorsqu’elles perçoivent un impôt sur une ressource non
renouvelable.
En autorisant les gouvernements provinciaux à percevoir des
impôts indirects sur les ressources non renouvelables, nous les
autorisons à percevoir un impôt qui ne sera pas à la charge de
la personne que l’on impose. Cela pourrait vouloir dire que
l’impôt perçu sur une ressource non renouvelable dans une
province serait payé par les contribuables d’une autre province
si la ressource en question était exportée à cette autre province.
Toutefois, un impôt indirect sur les ressources non renouvelables
ne doit pas faire de discrimination entre la province
exportatrice et les autres régions du Canada. Cette mesure ne
La Constitution
modifie pas les pouvoirs d’imposition fédéraux puisque le
gouvernement fédéral conserverait le pouvoir de percevoir des
fonds en se servant de n’importe quel mode ou régime d’imposition
à l’égard des ressources ou de tout autre bien ou activité.
Au cours de toutes les discussions constitutionnelles tenues
depuis plusieurs années, on s’était entendu pour que, exception
faite des ressources, aucune province ne puisse prélever des
taxes indirectes qui frapperaient des contribuables à l’extérieur
de cette province. Par exemple, il ne serait pas équitable
qu’une province où l’on fabrique des automobiles impose une
taxe indirecte sur ces automobiles, taxe qui serait alors payable
non seulement par les habitants de cette province mais aussi
par ceux de toutes les provinces où les automobiles sont
expédiées. Par ailleurs, on avait aussi convenu que les ressources
non renouvelables étaient un cas particulier. En règle
générale, les provinces et le gouvernement fédéral étaient
d’accord que les gouvernements provinciaux, par un mode
quelconque d’imposition, devraient pouvoir s’assurer que les
habitants de la province qui disposerait de ses ressources en
tireraient un profit raisonnable. D’après l’entente, les provinces
auraient le droit de prélever des taxes indirectes, à condition
que leurs lois fiscales ne fassent aucune distinction entre les
ressources utilisées dans la province en cause et les ressources
exportées. Autrement dit, une taxe indirecte prélevée par la
Saskatchewan sur la potasse, par exemple, serait la même, peu
importe que la potasse soit utilisée par les habitants de Saskatchewan
ou qu’elle soit expédiée à l’extérieur de la province.
L’autre question qui revêt un intérêt considérable au Québec
pour l’instant c’est celle des écoles confessionnelles. Je voudrais
faire certaines remarques à ce propos. Pour ce qui est des
garanties religieuses dans la constitution, l’article 93 de l’Acte
de l’Amérique du Nord britannique de 1867 est la seule
disposition dans ce texte législatif faisant allusion à ces garanties.
L’article 93(1) stipule qu’aucune province ne peut porter
préjudice aux droits ou privilèges des écoles confessionnelles
qui existaient légalement dans les provinces au moment de la
Confédération. Toutefois, cet article ne fait nullement allusion
à la liberté de choix concernant la langue d’enseignement.
D’après la jurisprudence, les droits et privilèges garantis par
l’article 93(1) concernent la création d’écoles confessionnelles
et l’enseignement religieux qui y est donné. Mais l’article
n’empêche pas les provinces de réglementer de manière générale
le programme d’étude de ces écoles ou de prescrire la
langue d’enseignement. En 1916, le comité judiciaire du Conseil
privé a décidé dans le cadre de l’affaire des fidéicommissaires
des écoles séparées catholiques romaines de la ville
d’Ottawa contre MacKell que la loi ontarienne qui limitait
l’emploi du français comme langue d’enseignement dans les
écoles de la province était une loi provinciale valable par
rapport à l’enseignement et n’était pas contraire aux dispositions
de l’article 93. Toutefois, cela ne signifie pas que les
provinces peuvent empêcher la création ou l’exploitation
d’écoles confessionnelles ni l’enseignement de préceptes, doctrines
et pratiques confessionnels dans ces écoles. La charte
québécoise de la langue française, le bill 101, régit la langue
d’enseignement dans les écoles de la province, mais ne s’attaque
pas à l’ensemble de la question et en fait, elle ne pourrait
pas du point de vue constitutionnel abroger les garanties
prévues aux termes de l’article 93.
DÉBATS DES COMMUNES 13145
23 novembre
1981
DÉBATS DES COMMUNES
L’ajournement
Évidemment, j’aurais bien aimé que les dispositions linguistiques
de la résolution constitutionnelle comportent davantage
de libertés. J’estime également qu’il est bien préférable d’en
arriver à un commun accord, à un compromis. A ce sujet, je
reconnais, bon gré mal gré, que l’inclusion de la clause du
Canada est ce qu’il y a de mieux à faire dans les circonstances.
Puis-je signaler qu’il est 10 heures?
L’Orateur suppléant (M. Blaker): Je remercie le député
d’avoir signalé qu’il est 10 heures.
la Constitution qui sera donnée par les provinces avant de
séjourner dans ladite province. Les garanties juridiques de cet
individu canadien, en cas d’arrestation, par exemple, pourraient
varier lorsqu’il franchit une frontière provinciale. A la
limite, on peut s’interroger devant cette possible multitude de
droits s’appliquant ou ne s’appliquant pas si vraiment on est
toujours dans le même pays, ou dans une fédération de pays
différents.
e (2200)
MOTION D’AJOURNEMENT
[Français]
L’ajournement de la Chambre est proposé d’office, en conformité
de l’article 40 du Règlement.
LA CONSTITUTION-ON PROPOSE QUE DES REPRÉSENTANTS DES
MINORITES SOIENT CONVOQUES À UNE REUNION
M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier): Monsieur le
président, le 9 novembre dernier, je posais une question au
premier ministre (M. Trudeau) au sujet de la Constitution.
Depuis le début du débat constitutionnel à la Chambre, et
certes depuis la signature de l’entente historique convenue
entre le gouvernement fédéral et les neuf provinces consentantes,
les discussions sur le contenu de la Charte des droits
continuent d’alimenter de plus belle d’ailleurs les discussions
politiques. Sauf erreur, monsieur le président, j’ai entendu dire
ce soir que la question des droits de la femme à l’égalité et des
droits des autochtones avait été réglée du moins selon l’annonce
qui a été faite à la Chambre plus tôt.
Ces nombreuses questions laissent tout de même de côté une
question fort importante, celle de la minorité francophone hors
Québec. Je voudrais faire porter mes remarques dans le bref
débat de ce soir sur la situation dans laquelle, nous, francophones,
qui demeurons dans des provinces à majorité anglophone,
nous nous trouvons dans cette fédération qui devient pour nous
un vrai labyrinthe d’interprétations. Je veux parler de la
Charte des droits évidemment, d’une charte qui doit être
universelle dans son application mais qui dans ce cas-ci telle
que proposée abandonne son universalité aux législatures provinciales
qui sont laissées maîtres de déterminer en quelque
sorte son application. Toutes ces clauses optionnelles, «nonobstant
» notamment sur les articles sur la liberté fondamentale,
les garanties juridiques, le droit à l’égalité, font en sorte que
cette charte est probablement le seul document fédéral, qui
prendra son sens en fonction des juridictions et législations
provinciales, en d’autres termes, le gouvernement fédéral propose
et les provinces disposent.
Ceci revient à dire que le Canadien désirant voyager dans
son propre pays, avant de quitter sa province, devra vérifier
attentivement et presque quotidiennement l’interprétation de
Si l’on doit examiner plus en détail le contenu de cette
charte, on s’aperçoit que les clauses ayant trait aux droits
linguistiques, au droit à l’éducation dans la langue de la
minorité sont des clauses fermes, universelles et non soumises
au principe du retrait facultatif. Donc partout au pays, les
citoyens d’un groupe linguistique minoritaire de langues
officielles pourront faire éduquer leurs enfants aux niveaux
élémentaire et secondaire seulement dans leur langue, là où le
nombre le justifie. Au niveau des principes, et bien que plusieurs
premiers ministres provinciaux tels MM. Bennett et
Davis soutiennent le contraire, ils disent que rien ne changera
avec cette clause 23, je pense qu’il existe tout de même là des
garanties qui semblent, à première vue, suffisantes. Cependant,
si nous extrapolons un peu sur la question, on s’aperçoit
que dans les faits on en arrive à des constatations assez
bizarres. Prenons un exemple. Un groupe de parents francophones
résidant dans une des sept provinces non soumises à
l’article 133, l’article qui donne accès aux institutions juridiques
et législatives, font une demande pour obtenir une école
française dans leur localité. L’autorité scolaire locale, soit la
commission scolaire, leur répond que cela est refusé car le
nombre d’enfants ne justifie pas une école française dans ce
milieu. Les parents devront alors trouver l’argent, l’énergie et
l’appui pour s’adresser aux tribunaux et faire valoir leur droit
à leurs propres frais. Le cas sera entendu dans la Cour
suprême relevant de cette législature provinciale. On peut donc
constater l’ironie de la question et de la situation. La charte
des droits ne reconnaissant pas dans cette province canadienne
l’accès aux institutions juridiques et législatives dans la langue
de la minorité linguistique, ces parents francophones devront
se battre en anglais pour faire reconnaître leur minimum de
droits constitutionnels, qu’on leur a conférés à titre de
francophones.
C’est donc une lacune grave dans la Charte des droits qui la
rend à mon avis inacceptable et totalement incomplète. On
nous dit que la charte protège les droits des minorités linguistiques,
alors qu’elle ne le fait que de façon imparfaite. On
accorde aux minorités certains droits mais on ne leur fournit
pas les outils pour les faire valoir. Même le premier ministre de
l’Ontario reconnaît sans hésitation que la Charte des droits
n’accordera rien de plus aux francophones de sa province, et je
vous réfère à un article aussi récent qu’aujourd’hui paru dans
La Presse de Montréal, alors que M. Davis est cité d’une façon
tout à fait traumatisante pour nous les Franco-ontariens, car il
dit qu’il n’y a rien de nouveau là-dedans, cette charte ne
change pas grand-chose à la situation en Ontario.
13146 23 novembre 1981
23 novembre 1981 DÉBATS DES COMMUNES 13147
0 (2205)
En réponse à une question que je posais au premier ministre
à la Chambre le 9 novembre dernier, lui aussi reconnaissait ce
fait que les droits linguistiques s’étendaient seulement à la
question scolaire élémentaire et secondaire. Il affirmait même
qu’il serait prêt suite à ma demande de convoquer une future
conférence fédérale-provinciale pour revoir l’ensemble de cette
question après le rapatriement. Ceci est certes un effort
louable et significatif. Connaissant certains premiers ministres
provinciaux, j’exprime tout de même de fortes craintes quant
au succès d’une telle réunion, mais je suis optimiste devant la
possibilité qu’elle se tienne.
En effet, monsieur le président, mes renseignements
aujourd’hui quand j’ai vérifié indiquent que les neufs premiers
ministres provinciaux, et j’exclus M. Hatfield parce qu’il est
tout de même le seul qui a accédé à l’entière reconnaissance du
droit linguistique anglophone et francophone, mais sur les huit
autres qui restent, deux ont répondu, M. Hatfield évidemment
et M. Blakeney de la Saskatchewan qui a dit: Si les autres y
vont, j’irai moi aussi. Bill Davis évidemment n’a pas répondu
et j’aimerais simplement dire que je suis tout à fait déçu de ce
refus du premier ministre provincial. Là, en Ontario, où se
trouve la plus forte minorité, soit 500,000 Franco-ontariens,
son refus de participer à une conférence fédérale-provinciale
pourrait peut-être nous donner l’occasion d’étudier à fond, de
discuter, et de régler ce qui reste, d’après moi, dans ce pays à
régler, c’est-à-dire le sort réservé aux minorités francophones
hors Québec. Monsieur le président, je vous remercie de votre
patience.
M. Jim Peterson (secrétaire parlementaire du ministre de
la Justice et ministre d’Etat chargé du Développement social):
Monsieur le président, tous les députés de la Chambre félicitent
l’honorable député d’Ottawa-Vanier pour l’excellent travail
qu’il a fait, en travaillant pour les droits des francophones
hors Québec, et pour sa ténacité et son ardeur dans la défense
des droits des citoyens francophones dans tout le Canada.
L’honorable député a proposé une réunion fédérale-provinciale
pour que les groupes francophones hors Québec fassent
valoir leurs griefs. Il a beaucoup fait pour obtenir le consentement
des provinces à cette réunion, mais, malgré ses efforts, il
n’y en a que deux qui sont en faveur. Une conférence, comme
il le propose, ne pourrait être utile que si les provinces, en
somme, consentaient à y participer. Encore une fois, il nous
faut diriger nos efforts dans cette direction. Ceci étant dit, il
nous faut reconnaître en même temps que la nouvelle Constitution
fera beaucoup pour les francophones hors Québec.
Premièrement, elle reconnaît le bilinguisme officiel au niveau
fédéral. Deuxièmement, elle reconnaît l’égalité des deux
groupes linguistiques dans tous les domaines: exécutif, législatif
et judiciaire. Troisièmement, elle reconnaît le droit à
l’éducation aux minorités linguistiques. Je sais très bien qu’en
dépit de ces réalisations, l’honorable député, et beaucoup
d’autres députés d’ailleurs, auraient préféré une plus grande
reconnaissance des droits des francophones hors Québec. Mais
il nous faut reconnaître aussi que nous avons démontré qu’avec
la bonne volonté et la coopération entre le gouvernement
L’ajournement
fédéral et les gouvernements provinciaux, nous pouvons
accomplir beaucoup. Je cite, monsieur le président, l’accord
historique que l’honorable ministre de la Justice (M. Chrétien)
a annoncé à la Chambre il y a 45 minutes, l’accord sur le droit
des femmes et des autochtones. Nous le félicitons tous. Nous
sommes très fiers d’être Canadiens.
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