Procès-verbaux et témoignages du Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur la Constitution du Canada, 32e parl, 1re sess, nº 8 (19 novembre 1980).
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Date: 1980-11-19
Par: Canada (Parlement)
Citation: Canada, Parlement, Procès-verbaux et témoignages du Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur la Constitution du Canada, 32e parl, 1re sess, nº 8 (19 novembre 1980).
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SÉNAT
CHAMBRE DES COMMUNES
Fascicule n° 8
Le mercredi 19 novembre 1980
Coprésidents:
Sénateur Harry Hays
Serge Joyal, député
Procès-verbaux et témoignages
du Comité mixte spécial
du Sénat et de
la Chambre des communes sur la
Constitution
du Canada
CONCERNANT:
Le document intitulé «Projet de résolution portant
adresse commune à Sa Majesté la Reine
concernant la Constitution du Canada», publié par
le gouvernement le 2 octobre 1980
TÉMOINS:
(Voir à l’endos)
Première session de la
trente-deuxième législature, 1980
COMITÉ MIXTE SPÉCIAL DU SÉNAT
ET DE LA CHAMBRE DES COMMUNES
SUR LA CONSTITUTION DU CANADA
Coprésidents:
Sénateur Harry Hays
Serge Joyal, député
Représentant Ie Sénat:
Les sénateurs:
Asselin
Austin
Connolly
Goldengerg
Lapointe
Molgat
Petten
Roblin
Tremblay—(10)
Représentant la Chambre des communes:
Messieurs
Beatty
Bockstael
Campbell (Miss)
(South West Nova)
Corbin
Crombie
de Jong
Fraser
Henderson
Irwin
Lapierre
La Salle
Mackasey
McGrath
Nystrom—(15)
(Quorum 12)
Les cogreffiers du Comité
Richard Prégent
Paul Bélisle
Conformément a l’article 65(4)b) du Règlement de la Cham-
bre des communes:
Le mercredi 19 novembre 1980:
M. de Jong remplace M. Robinson;
M. La Salle remplace M. Epp;
M. Lapierre remplace M. Tobin.
Conformément à un ordre du Sénat adopté le 5 novembre
1980:
Le mercredi 19 novembre 1980:
Le sénateur Duff Roblin remplace le sénateur Ike Smith.
PROCÈS-VERBAL
LE MERCREDI 19 NOVEMBRE 1980
(16)
[Traduction]
Le Comité mixte spécial sur la Constitution du Canada se
réunit aujourd’hui à 15 h 35 sous la présidence du sénateur
Hays (coprésident).
Membres du Comité présents:
Représentant le Sénat: Les honorables sénateurs Asselin,
Austin, Connolly, Goldenberg, Hays, Lapointe, Molgat,
Petten, Roblin et Tremblay.
Autre sénateur présent: L’honorable sénateur Haidasz.
Représentant Ia Chambre des communes: MM. Beatty,
Bockstael, Miss Campbell (South West Nova), MM. Corbin,
Crombie, de Jong, Epp, Fraser, Henderson, Irwin, Joyal,
Lapierre, La Salle, Mackasey, McGrath et Nystrom.
Autres députés présents: MM. Allmand, Duclos et
Lachance.
Aussi présents: Du Centre parlementaire: M. Pater Dobell,
directeur. Du Service de recherches de la Bibliothèque du
Parlement: MM. Paul Martin et John McDonough, recher-
chistes.
Témoins: De la Chambre de commerce du Canada: M.
William F. Dunn, président du Comité exécutif; M. Sam
Hughes, président; M. Graeme T. Haig, c.r., président du
Comité sur la réforme de la Constitution et M. André Bou-
chard, membre du Comité sur la réforme de la Constitution.
Du Conseil des minorités du Québec: M. Eric Maldoff, prési-
dent; M. Casper Bloom et M, James Leavy. De l’Association
canadienne-française de l ‘Ontario (ACFO): M. Yves St-Denis
président; et M. Gérard Lévesque, secrétaire général.
Le Comité reprend l’étude de son ordre de renvoi du Sénat
du 3 novembre 1980 et de son ordre de renvoi de la Chambre
des communes du 23 octobre 1980, tous deux portant sur le
document intitulé «Projet de résolution portant adresse com-
mune à Sa Majesté la Reine concernant la Constitution du
Canada», publié par le gouvernement le 2 octobre 1980. (Voir
procès-verbal du jeudi 6 novembre I 980, Fascicule n° 1.)
MM. Dunn, Hughes, Haig et Bouchard font des déclara-
tions et répondent aux questions.
M. Joyal assume la présidence.
MM. Maldoff et St-Denis font des déclarations puis, avec
les témoins, répondent aux questions,
A 17 h 35, le Comité suspend ses travaux.
A 18 h 18, le Comité poursuit ses travaux.
L’interrogation se poursuit.
A 19 h07, le Comité suspend ses travaux jusqu’à nouvelle
convocation du président.
Les cogreffiers du Comité
Richard Prégent
Paul Bélisle
TÉMOIGNAGES
(Enregistrement électronique)
Le mercredi 19 novembre 1980
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): A l’ordre, s’il vous plaît.
Je demanderais aux membres de ce Comité de bien vouloir
prendre leur siège autour de la table et aux représentants des
media qui disposent d’équipement d’enregistrement du son ou
de l’image de bien vouloir quitter les lieux de manière à ce que
les honorables membres de ce Comité puissent reprendre leur
travail.
[Traduction]
Cet après-midi, j’ai le plaisir, au nom du Comité, de souhai-
ter la bienvenue aux représentants de la Chambre de com-
merce du Canada.
Les membres du Comité ont déjà reçu une copie de votre
mémoire. Je vous invite donc à faire une déclaration d’ouver-
ture, après quoi nous passerons aux questions des membres du
Comité ou aux débats, selon le cas; je suis sûr que vous êtes
d’accord avec cette façon de procéder.
[Texte]
Je voudrais donc souhaiter particulièrement la bienvenue à
monsieur William Gunn [Traduction] président
du conseil d’administration. Je lui demanderai de nous présen-
ter ses collègues.
M. William F. Gunn (président du comité de direction,
Chambre de commerce du Canada): Sénateur Hays, monsieur
loyal, membres du Comité, messieurs, bonjour. Je m’appelle
William Gunn et je suis heureux de comparaître devant vous
aujourd’hui en ma qualité de président du comité de direction
de la Chambre de commerce du Canada, Je travaille pour la
H.J. Heinz Company of Canada Limited et j’habite Toronto.
Vous avez certainement reconnu celui qui est assis à ma
gauche, il s’agit de Sam Hughes, président et porte-parole
permanent de la Chambre de commerce du Canada. A l’ex-
trême droite se trouvent M. Graeme T. Haig. C.R., et M.
André Bouchard, respectivement président et membre de notre
comité sur la réforme constitutionnelle. Ce sont eux qui ont
effectué une bonne partie du travail de base qui a permis à la
Chambre de commerce de formuler sa position sur certaines
questions constitutionnelles.
M, Haig est un avocat connu de Winnipeg et M, André
Bouchard, qui demeure dans la ville de Québec, est directeur
des Affaires publiques pour Alcan Smelterr and Chemicals
Limited.
Aujourd’hui, nous comparaissons devant vous pour le
compte de la Chambre de commerce du Canada qui est,
comme vous le savez, la plus grande association d’hommes
d’affaires au pays, Nous vous sommes reconnaissants de nous
avoir fourni cette occasion de commenter les aspects économi-
ques des résolutions proposées à l’égard de la constitution du
Canada. Toutefois, nous aimerions souligner que le mémoire
que vous avez reçu n’a pas été préparé à la hâte en réponse aux
résolutions proposées; il s’agit plutôt d’un document basé sur la
contribution de nos membres partout au Canada au cours de
l’été dernier.
J’ajouterai que la Chambre de commerce du Canada s’inté-
resse depuis toujours à la question de l’unité nationale et de la
réforme constitutionnelle, et a toujours été active dans ces
domaines. Par exemple, en mars 1978, nous avons fait une
contribution positive lors des audiences du Groupe de travail
sur l’unité canadienne. De plus, le rôle de premier plan joué
par la Chambre de commerce lors du débat sur l’unité cana-
dienne dans les années 70 a été reconnu en 1979 lors d’une
présentation spéciale du Conseil sur l’unité canadienne.
Je vais maintenant céder la parole à mes trois collègues qui
vont passer en revue nos propositions et répondre à toute
question que vous pourrez avoir sur l’exposé que vous avez en
main.
Le coprésident (M. Joyal): Merci. Monsieur Haig.
M. Graeme T. Haig, C.R. (président du Comité sur la
réforme de la Constitution): Monsieur le président, mædames
et messieurs.
M. Gunn vous a brossé l’historique de l’exposé que vous avez
devant vous et que vous avez eu l’occasion d’étudier je pense.
Je vais compléter un tant soit peu les commentaires qu’il a fait
visant la préparation de ce document. Ce dernier a été rédigé
pour le compte de la Chambre de commerce du Canada à
l’issue de nombreux voyages effectués partout au Canada pour
interviewer les membres des chambres provinciales et les mem-
bres de la Chambre de commerce du Canada. Ensuite, un
comité dont j’ai partagé la présidence, a été chargé de réunir et
d’étudier tout ce matériel au nom de la Chambre de commerce
et de le présenter lors de notre assemblée annuelle; le docu-
ment a été adopté par l’ensemble des membres de la Chambre
de commerce du Canada à cette occasion.
Monsieur le président, la Chambre de commerce s’intéresse
à plusieurs aspects relevant de son domaine spécial d’intérêt, à
savoir le domaine des affaires et de l’économie au Canada. Au
nom de la Chambre, je voudrais aborder le premier aspect, la
question de la démarche de la réforme constitutionnelle.
La Chambre est d’avis qu’à une époque où l’économie
modiale est en proie à des problèmes de croissance et de
structure, c’est une entreprise délicate que de réouvrir le débat
sur les compromis qui ont fait la prospérité de ce pays pendant
plus d’un siècle. Les incertitudes que suscite toujours un tel
débat peuvent être très nuisibles à notre économie, surtout si le
débat se prolonge pendant plusieurs années; la Chambre de
commerce pense que le dialogue a déjà duré trop longtemps.
Conséquemment, dans l’intérêt des Canadiens, dans l’immé-
diat et à long terme, il est essentiel que le processus de révision
soit organisé et exécuté le plus efficacement et le plus rapide-
ment possible.
Donc, monsieur le président, la Chambre de commerce du
Canada recommande qu’avant d’amender une constitution, qui
dans l’ensemble a très bien servi les intérêts des Canadiens, les
assemblées législatives canadiennes fassent de leur mieux pour
s’assurer que les questions soient clairement identifiées par des
discussions rapides et efficaces. Toutefois, monsieur le prési-
dent, j’insiste sur le fait qu’il faut que l’étude soit globale et
exécutée sans hâte même si l’entreprise doit être dynamique et
menée avec célérité.
Monsieur le président, si vous le désirez, nous pouvons nous
arrêter après chaque sujet afin de répondre aux questions des
membres du Comité, ou nous pouvons continuer.
Le coprésident (M. Joyal): Si les honorables membres du
Comité sont d’accord, je suggère que vous terminiez votre
exposé après quoi les députés poseront des questions sur les
points qui les intéressent. Si vous êtes d’accord, je suis sûr que
les membres du Comité le sont.
M. Haig: Merci, Mr. Chairman. M. Hughes vous exposera
le prochain point.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Hughes.
M. Sam Hughes (président, Chambre de commerce du
Canada): Monsieur le président, mesdames et messieurs.
Je tiens à vous faire part de la préoccupation du monde des
affaires du pays concernant ce que l’on appelle l’union écono-
mique, c’est-à-dire la libre circulation entre les provinces des
biens, des services, des capitaux et de la main-d’œuvre. Nous
savons que le projet d’article 6 reconnaît la liberté de circula-
tion et d’établissement des citoyens. Mais, ce que je me
demande, c’est si le préalable à cette liberté de circulation
d’établissement partout au pays devrait être la citoyenneté. Je
vous signale également qu’à leur dernière assemblée annuelle
tenue à Québec, les membres de la Chambre de commerce du
Canada ont adopté une résolution concernant lcs entraves à la
liberté de circulation des biens, des services, des capitaux et de
la main-d’oeuvre. Cette résolution a d’ailleurs reçu l’approba-
tion unanime des hommes d’affaires de tout le pays.
Nous sommes préoccupés par le fait qu’il y a des obstacles
entre les juridictions provinciales et que ces obstacles créent
des difficultés économiques, non seulement au sein des juridic-
tions, mais au Canada dans son ensemble pour ce qui est de
l’expansion des marchés d’exportation. Nous serions très heu-
roux de discuter avec vous davantage des raisons pour lesquel-
les il faudrait réduire les obstacles à la libre circulation dans
ces quatre domaines. Pour l’instant, je vais me contenter de
dire que nous aimerions que cela se fasse et que cela se fasse
dans la constitution.
M. Haig: Monsieur le président, M. André Bouchard vous
parlera de l’union politique et économique.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Bouchard.
[Texte]
M. André Bouchard (représentant la Chambre de commerce
du Canada): Monsieur le président, madame et messieurs. La
Chambre de Commerce du Canada est d’avis que la révision
constitutionnelle devrait renforcer l’union économique et poli-
tique au Canada tout en permettant à chaque province de
veiller à son développement culturel et social et à sa croissance
économique. Ce qui exige une autorité nationale détenant les
pouvoirs et responsabilités voulus pour maintenir une telle
union. C’est pourquoi la Chambre de Commerce est convain-
cue que la répartition des pouvoirs et la nature de nos institu-
tions doivent refléter l’objectif des divers gouvernements, c’est-
à-dire la création d’une union économique et politique forte et
parfaitement intégrée.
[Traduction]
M. Haig: Monsieur le président, sur cette dernière question,
la Chambre de commerce est d’avis que pour atteindre les
objectifs que nous croyons valables, les provinces et le gouver-
nement fédéral doivent consentir ne pas rester sur leurs
positions.
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Hughes.
M. Hughes: Monsieur le président, nous avons mentionné la
question de la coordination des efforts internationaux, car le
manque de coordination dans ce domaine embarrasse le
Canada à l’étranger, Sans croire qu’il est nécessaire de l’in-
clure dans la constitution du pays, nous la considérons suffi-
samment importante pour la soumettre à votre attention.
ll n’y a pas que le gouvernement fédéral qui représente le
Canada dans les centres politiques et économiques partout
dans le monde, il y est aussi représenté par un certain nombre
de provinces et cette représentation est loin d’être uniforme; en
fait, de temps en temps, les conflits sont évidents. Nous
considérons que c’est mauvais pour le monde des affaires et
nous encourageons les deux niveaux de gouvernements à s’en-
tendre afin que les deux puissent nous représenter de façon
efficace.
[Texte]
M. Bouchard: La Chambre, en ce qui concerne les objectifs
économiques nationaux, reconnaît que l’autorité fédérale a la
primauté pour la formulation de la politique économique du
pays. Elle pense, cependant, que les objectifs économiques du
Canada devraient étre le résultat de consultations permanentes
faisant ressortir à la fois les perspectives des Provinces et de
l’administration fédérale.
La Chambre de Commerce du Canada est donc en faveur
d’un pouvoir fédéral fort permettant d’identifier et de pour-
suivre des objectifs économiques nationaux suite aux consulta-
tions officielles permanentes avec les Provinces.
Je dois ajouter, monsieur le président, qu’à cet effet, quel
que soit, par contre, ce que les Provinces doivent faire à
l’intérieur de leur développement économique, ces politiques de
développement devraient être consistantes avec les politiques
nationales.
[Traduction]
M. Haig: Monsieur le président, pendant très longtemps, les
paiements de transfert ont constitué un élément important de
la vie politique et économique canadienne, et la Chambre de
commerce pense que ces paiements continueront de faire partie
de notre mode de vie financière au Canada dans les années à
venir,
La répartition des bienfaits économiques entre les diverses
parties du pays par les paiements fédéraux ou les crédits
d’impôt a été une source de conflits et de difficultés entre le
gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Les
membres de la Chambre de commerce ont toujours été préoc-
cupés par les répercussions de ce conflit.
Nous aimerions attirer votre attention sur trois domaines en
particulier. D’abord, il y a les subventions additionnelles du
fédéral aux provinces. De la façon dont le fédéralisme est
pratiqué à l’heure actuelle, elles sont insatisfaisantes et ne font
rien pour réduire les disparités économiques comme le souhai-
tent invariablement les responsables.
Ainsi, les programmes à frais partagés et ces octrois condi-
tionnels sont un domaine où il y a intrusion, ou du moins
chevauchement des activités des deux plus importants niveaux
de gouvernement au pays et, je le répète, c’est l’une des
principales sources de conflit jusqu’ici.
Il ne faut pas oublier qu’cn plus de ces deux paliers de
gouvernement, il y en a un autre, au niveau municipal, qui est
lui aussi touché par la mise sur pied, l’imposition et, bien sûr,
[annulation de ce genre de programmes.
La Chambre de commerce est d’avis qu’il faut maintenir le
système des paiements de transfert, mais qu’il faudrait que sa
matière lui permettre d’assurer la prestation de services essen-
tiels dans toutes les régions afin que les services offerts aux
Canadiens répondent à une norme fondamentale déterminée à
l’échelle nationale; toutefois, ces paiements de transfert ne
devraient pas, lorsqu’ils sont effectués, créer des structures
économiques artificielles, ni dissuader, pour des raisons écono-
miques, la circulation de la main-d’oeuvre ou des capitaux.
C’est uniquement après consultation et entente entre le
gouvernement fédéral et les provinces bénéficiaires, et sur la
base de grands obectifs généraux, que les paiements de trans-
fert devraient être effectués.
[Texte]
M. Bouchard: Comme nous venons de le mentionner, mon-
sieur le président, certains services essentiels doivent être
fournis partout à travers le Canada.
Bien que l’accès à ces services puisse varier en fonction de la
situation géographique, de la densité de la population, et
caetera, les Gouvernements fédéral et provinciaux doivent,
après consultation, fixer des normes minimales et voir à ce
qu’elles soient respectées. Elles doivent être établies à un
niveau qui n’entrave pas outre mesure la mobilité des per-
sonnes et Naggrave pas les conséquences de leur choix ou de
leur sens des responsabilités.
C’est pourquoi la Chambre de Commerce du Canada
recommande que des normes minimales de services essentiels
soient établies après consultation entre les Gouvernements
fédéral et provinciaux, en vue de leur mise en vigueur dans les
juridictions provinciales.
Des clauses devraient prévoir une révision périodique de ces
normes pour garantir qu’elles n’empêchent pas l’exercice des
responsabilités individuelles et n’éliminent pas les consé-
quences normalement associées au choix fait.
[Traduction]
M. Hughes: Monsieur le président, au nom de la Chambre
de commerce, j’ai le plaisir d’aborder une question très délicate
en matière de juridiction entre les autorités fédérales et provin-
ciales. La Chambre a discuté longuement de cette question
avec ses membres. Nous reconnaissons qu’elle est très délicate
et nous ne voulons surtout pas laisser entendre que nous avons
trouvé la solution.
Nous proposons toutefois que plusieurs principes soient
adoptés. D’abord, que les gouvernements connaissant le mieux
les besoins des particuliers soient les premiers invités à s’occu-
per de ces personnes et de ces besoins.
Deuxièmement, lorsque la question des juridictions est abor-
dée au cours de ces discussions, on ne devrait pas volontaire-
ment permettre une double intervention.
Troisièmement, il y a la question des pouvoirs résiduels,
ceux qui ne sont pas encore bien définis; la Chambre a eu de
grandes difficultés à résoudre cette question.
Dans l’exposé que vous avez sous les yeux, la Chambre,
organisme national, estime que les pouvoirs résiduels devraient
être confiés au gouvernement fédéral. Je voudrais toutefois
exprimer une réserve ou une mise en garde, à savoir que ces
pouvoirs ne devraient pas être confiés au gouvernement fédé-
ral, s’ils sont clairement et expressément de nature provinciale.
Nous ne recommandons surtout pas que tous les pouvoirs
résiduels soient confiés au fédéral.
M. Haig: Monsieur le président, la question de la juridiction
sur les ressources naturelles est très préoccupante. L’opinion
de la Chambre à ce sujet n’a été arrêtée qu’après une longue et
mûre réflexion.
La Chambre est d’avis que la juridiction sur les ressources
naturelles devraient continuer de revenir aux provinces; que les
provinces devraient assurer le contrôle de leurs ressources à
l’avantage du Canada dans son ensemble; et que les circons-
tances et conditions d’exportation de ces ressources naturelles,
quelles qu’elles soient, soient soumises au contrôle et à l’exa-
men d’une agence nationale, présumément le gouvernement du
Canada.
En plus de jouer un certain rôle relativement à l’exportation
de ces ressources naturelles, le gouvernement fédéral devrait
également être l’ultime autorité dans les cas d’urgence natio-
nale; il devrait avoir le droit d’exercer des pouvoirs temporaires
sur toutes les ressources, lorsque l’intérêt national l’exige.
Évidemment, les provinces concernées devraient participer à la
définition de ce qu’est une urgence nationale, et accepter cette
définition.
Essentiellement, la position de la Chambre de commerce est
compréhensible: la loi de l’offre et de la demande, non pas au
niveau du marché local mais bien au niveau du marché
mondial, devrait être la principale considération lorsqu’il s’agit
de décider du prix et de la distribution de toutes ressources
naturelles ou matières premières.
Conséquemment, la Chambre est d’avis que la juridiction
sur les ressources naturelles devrait continuer d’être confiée
aux provinces qui ont la responsabilité de les conserver et d’en
établir le prix; les conditions d’exportation de ressources natu-
relles vitales devraient être soumises au contrôle d’une agence
nationale.
Monsieur le président, comme nous devrions toujours le
faire, nous nous demandons maintenant qui doit assumer les
coûts d’une politique gouvernementale dans une situation de
crise. Les provinces, le producteur ou la nation dans son
ensemble? A titre d’organisme national, la Chambre de com-
merce est d’avis que lorsqu’une décision nationale est prise, les
conséquences de cette décision devraient être assumées par
l’ensemble du pays.
Monsieur le président, la prochaine question est celle de
l’attribution des pouvoirs de taxation. L’un des avantages de la
structure politique canadienne actuelle, c’est qu’aux termes de
l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, certains pouvoirs
de taxation ont été bien définis. Certaines attributions ne sont
pas aussi précises que nous l’aurions voulu, mais dans le cadre
d’une révision des responsabilités confiées aux divers gouverne-
ments, fédéral et provinciaux, il est important qu’on revise les
champs de taxation attribués a chaque gouvernement.
La Chambre de commerce du Canada est d’avis que dans la
mise en oeuvre ou la création d’une nouvelle autorité constitu-
tionnelle, dans la redistribution ou la révision des domaines de
responsabilités confiés au gouvernement fédéral et aux gouver-
nements provinciaux, il est très important que le financement
de telles responsabilités et activités soit assuré par l’aménage-
ment du système fiscal.
Une dernière observation, mais non la moindre monsieur le
président. Les membres de la Chambre désirent que soient
entreprises dans les meilleurs délais les démarches permettant
de rapatrier au Canada la constitution nationale, il est souhai-
table que cet instrument qu’est notre constitution nous soit
rendu le plus tôt possible.
La Chambre est également d’avis que la procédure d’amen-
dement devrait être entamée et menée à bonne fin avec
sagesse, prudence et célérité si les circonstances le permettent.
Monsieur le président, l’opinion mûrement réfléchie de la
Chambre est qu’il n’est pas nécessaire de créer une nouvelle
constitution, puisqu’à l’heure actuelle, l’Acte de l’Amérique du
Nord britannique et les législations subséquentes de nature
constitutionnelle représentent pour le Canada une constitution
acceptable qui doit être rafraîchie et actualisée pour tenir
compte des besoins des provinces et d’une nation moderne.
Conséquemment monsieur le président, nous recommandons
que la constitution actuelle serve de base à un renouvellement
de la constitution du Canada, renouvellement qui tiendra
compte des amendements nécessaires à la réalisation des objec-
tifs que nous avons évoqués.
Monsieur le président, ce sont les préoccupations qui ont été
exprimées par les organisations membres de la Chambre de
commerce du Canada, préoccupations dont nous vous faisons
part pour étude.
Le coprésident (sénateur Hays): Merci beaucoup. M. Epp?
M. Epp: Merci, monsieur le président. Je désire remercier
les représentants de la Chambre de commerce du Canada qui
ont bien voulu comparaître devant le présent Comité et qui,
non seulement nous font part de leurs opinions, mais nous
donnent également la possibilité de leur poser des questions sur
certains aspects de leur exposé.
Messieurs, pour commencer, je crois que la plupart des
membres du Comité acceptent l’orientation générale de vos
propositions, désirent un renforcement de l’union économique
et comprennent l’importance qu’accorde votre Association à ce
queÿappellerai un fédéralisme coopératif.
Je ne voudrais pas vous donner l’impression de me désinté-
resser de votre mémoire, mais comme votre exposé a été
préparé en septembre de cette année, ÿaimerais savoir ce que
vous pensez des événements des deux derniers mois, depuis que
notre Comité et la Chambre discutent du projet de résolution.
A votre avis, les mesures unilatérales auxquelles nous faisons
maintenant face ont-elles modifié d’une façon ou d’une autre le
climat des affaires? Ont-elles créé une incertitude? A votre
avis, le débat constitutionnel comme tel a-t-il suscité de l’incer-
titude? Vous avez bien précisé votre désir d’un débat constitu-
tionnel complet, quoique le plus rapide possible; vous voudriez
un jugement pondéré, ce qui correspond à la description que
certains membres de ce Comité font de leur travail.
Au cours des deux mois qui se sont écoulés depuis la
rédaction de votre exposé, le climat a-t-il changé?
M. Haig: Monsieur le président, je pourrais ébaucher une
réponse et M. Hughes la complétera.
En réponse à M. Epp, je préciserai que la Chambre n’a pas
préparé ce document et ne comparaît pas ici aujourd’hui en
raison de la résolution soumise au Comité mixte de la Cham-
bre, résolution qui doit ultimement faire l’objet de discussions
dans les deux Chambres du Parlement.
La Chambre a préparé ce document en réponse à une
question générale adressée à nos membres. On nous a demandé
si nous voulions que la constitution du Canada soit au Canada,
si nous voulions qu’elle soit modifiée, et dans l’affirmative,
dans quels domaines précisément.
Je crois pouvoir dire au nom de la Chambre que les positions
que nous avons adoptées n’ont aucunement été modifiées par
l’évolution de la situation depuis lors. Dans notre exposé, il est
évident que la Chambre croit fortement au processus de
consultation entre le gouvernement fédéral et les provinces
dans les domaines d’intérêt mutuel ou de double responsabilité.
Nous croyons toujours que la force de la Fédération cana-
dienne tient au fait que le processus de consultation est
vraiment efficace, même s’il demande un peu plus de temps;
nous vous avons invités instamment à donner une nouvelle
constitution au Canada, dans les meilleurs délais, et à adopter
rapidement tous les amendements nécessaires à un rajeunisse-
ment de cette constitution; toutefois, nous croyons qu’il fau-
drait y arriver en respectant le cadre canadien et en consultant
tous les paliers de gouvernement qui seront touchés par les
changements constitutionnels proposés.
M. Epp: Monsieur Haig, voulez-vous dire par là que de
nouvelles conférences fédérales-provinciales devraient être con-
voquées avant le rapatriement?
M. Haig: Monsieur le président, je crois ne pas pouvoir
répondre à cette question au nom des membres de la Chambre
de commerce, puisqu’elle ne leur a pas été posée. Essentielle-
ment, les membres de la Chambre nous ont dit qu’ils croient
que le rapatriement devrait être entrepris. Ils n’ont pas eu
l’occasion de se demander si le rapatriement et la procédure
d’amendement devraient être entrepris simultanément, et â
l’initiative d’une seule des instances gouvernementales au
Canada, cette question ne nous a pas été soumise, je ne saurais
donc vous répondre.
M. Hughesz Si vous me le permettez monsieur le président,
j’aimerais ajouter quelques observations à la réponse faite à la
question de M. Epp, comme M. Haig m’a invité à le faire. J’ai
voyagé partout au pays après nos réunions de l’été, et d’après
moi, l’attitude, dans le milieu des affaires, est pour le moins
diversifiée. Pour une bonne part, cela dépend de la région où
vous vivez. 1l est vrai que la question de la réforme constitu-
tionnelle est perçue sous un angle différent depuis l’été. Depuis
la présentation du budget de M. MacEachen le 28 octobre, les
hommes d’affaires sont devenus plus conscients des questions
de juridiction, particulièrement dans le domaine de l’énergie.
D’une région à l’autre, il n’y a pas chez les hommes d’affaires
de différences fondamentales d’opinions qui pourraient empê-
cher le rapatriement de la constitution, mais il est vrai que les
opinions différent selon les régions du pays.
M. Epp: Messieurs, j’aimerais consacrer quelque temps aux
dispositions de l’article 6, portant sur ce qu’on appelle la
liberté de circulation et d’établissement. Je dois d’abord dire
que, comme tous les Canadiens, je serais très inquiet si des lois
fédérales ou provinciales étaient adoptées qui feraient du
Canada une simple union économique balkanisée. Je crois que
c’est également votre position.
Si tel est le cas, quelle est l’opinion de la Chambre de
commerce quant aux lois provinciales établissant des régimes
préférentiels soit pour les contrats, les achats de services ou de
biens, les entrepreneurs provinciaux, ou les pratiques d’embau-
che préférentielles? Je crois qu’au cours de cette discussion, la
plupart ont constaté que les provinces adoptent de telles lois.
Par ailleurs, au nord du soixantième parallèle, le gouverne-
ment fédéral se trouve dans sa propre juridiction et il a adopté
des lois de portée à peu près semblable, comme la loi sur
l’administration du pipe-line du Nord. D’après vous, l’article 6
menace-t-il ces pratiques?
M. Haig; Monsieur le président, l’article 6 porte sur l’un des
quatre éléments que la Chambre considère comme très impor-
tants pour le développement économique et la création d’em-
plois au Canada. Par définition, les lois provinciales favorisant
certaines entreprises, selon qu’elles sont situées dans cette
province, sont au mieux le reflet de politiques qui manquent de
perspicacité; elles peuvent mener le gouvernement à privilégier
une entreprise au point de Yaffaiblir, celle-ci ne fonctionnant
pas dans un milieu fort, dur et concurrentiel. Nous jugeons
aberrante toute politique d’embauche préférentielle qui permet
à une province d’exclure les travailleurs d’une autre province.
C’est une pratique qui a cours dans plusieurs de nos 10
provinces, et nous la désapprouvons. Nous sommes également
très sceptiques quant aux politiques d’achat préférentiel d’une
province à l’autre. Ces politiques suscitent la balkanisation de
sociétés qui pourraient autrement conquérir les marchés mon-
diaux et permettre au Canada de faire une concurrence effi-
cace à l’échelle internationale.
Je suis désolé de ne pouvoir parler des Territoires du Nord-
Ouest et de l’effet de la loi mentionnée. J’ajouterai toutefois
une observation sur un point que vous n’avez pas abordé, à
savoir la libre circulation des capitaux. Pour nous, lorsque le
premier ministre d’une province dit: Ma province n’est pas à
vendre, ou qu’un autre premier ministre provincial bloque
l’achat par les provinces atlantiques d’une institution finan-
cière de sa province, cela est tout à fait néfaste ct dans les deux
cas, dommageable pour le Canada.
M. Epp: faimerais discuter un peu plus de cette question
avec vous, monsieur Hughes. Certains d’entre nous ont une
certaine expérience des affaires municipales. Je ne m’oppose
pas à la position que vous avez adoptée, mais appliqueriez-vous
le même principe aux administrations municipales?
M. Hughes: Monsieur Epp, un bon nombre de services
municipaux sont tels qu’ils ne peuvent être fournis uniquement
par des gens vivant au sein de la communauté. Je suis certain
que M. Crombie pourrait nous en parler longuement. Je crois
que le plus souvent, en raison de leur nature même, les services
municipaux sont fournis par les habitants de la ville en cause.
A ma connaissance, sauf pour les politiques administratives,
rien n’interdit que des service municipaux soient assurés de
l’extérieur de la communauté.
Je ne voudrais pas que des politiques soient adoptées pour
entraver les échanges commerciaux. Bien sûr, l’existence de
certaines politiques administratives en ce sens est inévitable,
même si très peu d’entre nous les approuvons.
M. Epp: Monsieur Hughes, c’est exactement ce dont ce
Comité discute; nous pensons non seulement aux politiques
comme telles mais également a la façon dont les tribunaux
interpréteront les conséquences des principes inspirant l’admi-
nistration quotidienne. Si je vous ai bien compris, vous ne vous
opposez pas totalement aux exigences d’appartenance à la
communauté au niveau municipal . . .
M. Hughes: Je ne crois pas avoir dit cela, mais c’est
possible.
M. Epp: Voyons l’affaire plus en détail. Au niveau munici-
pal, pour des raisons discutables, pour des raisons d’adminis-
tration quotidienne, ces principes pourraient être acceptables;
toutefois, une fois qu’on en est arrivé là, n’est-il pas tentant
d’appliquer les mêmes principes à l’échelle provinciale?
M. Hughes: La Chambre de commerce ne serait pas d’ac-
cord avec cet argument. Les services dont je parlais, monsieur
Epp, sont ceux de nature locale comme le nettoyage des rues,
la dotation en personnel de l’administration locale, l’entretien
et certains services de santé qui, de toute évidence ne pour-
raient être assurés par des contracteurs situés à des centaines
de milles de la, et ce, en raison de leur nature même.
Lorsque cela est possible, nous incitons les administrations
municipales à ne pas établir de restrictions quant aux contrats
de services; toutefois, ces administrations auront toujours ten-
dance à traiter avec des gens du milieu car, de fait, cela
présente un avantage économique.
M. Epp: Monsieur Hughes, je ne conteste pas les principes
que vous essayez d’expliquer, je veux simplement déterminer
les conséquences pratiques de ces principes et je voudrais
revenir à ce que vous disiez à propos de la loi sur l’administra-
tion du pipe-line du Nord. Aux termes de programmes qu’on
appelle euphémiquement ««programmes d’action sociale», il
est maintenant possible que ces services soient assurés non pas
uniquement pour les autochtones, mais également pour d’au-
tres groupes. Compte tenu du principe que vous avez énoncé, a
savoir la prestation au niveau local de certains biens et servi-
ces, ou de certains services seulement, la Chambre croit-elle
que cela justifierait l’embauche exclusive d’autochtones pour
des projets de construction situés au nord du 60e parallèle,
particulièrement des projets d’exploitation des ressources natu-
relles, puisque ce sont ceux-là qui nous occupent à l’heure
actuelle?
M. Hughes: Dans ce cas précis, nous nous préoccupons de la
libre circulation des travailleurs. Si l’embauche de travailleurs
locaux signifiait que d’autres personnes venant d’autres parties
du Canada ne pourraient postuler ces emplois et être logique-
ment embauchés au même coût économique, alors nous
aurions de bonnes raisons de critiquer une telle loi restrictive.
M. Epp: Permettez-moi d’aborder une autre question en
corollaire, celle des offices de commercialisation des produits
agricoles. Ceux d’entre nous qui sont originaires de régions
rurales ont constaté d’expérience la nécessité, dans certains
cas, de protéger ce qu’on appelle ««l’avantage régional», Il
existe évidemment un certain nombre de règlements ou de lois
qui, dans une certaine mesure, ont un effet sur cet avantage
régional.
A votre avis et de l’avis de la Chambre, le projet de
résolution que nous étudions permettrait-il la création d’offîces
de commercialisation de produits agricoles à l’échelle
nationale?
M. Hughes: finviterai M. Haig à répondre à cette question.
M. Epp: J’avais prévu cela.
M. Haig: Monsieur le président, je crois que sur une ques-
tion semblable, la position de la Chambre serait la suivante: si
cet office de commercialisation avait été mis sur pied a la
demande des producteurs et dans le but de les représenter,
alors je crois que cela serait tout à fait conforme à la résolution
que vous avez devant vous.
A mon avis, la où les offices de commercialisation ‘posent des
problèmes, c’est lorsqu’ils sont imposés aux producteurs afin
d’assurer le bien-être imaginaire d’un autre secteur de la
communauté, et ce, généralement au détriment des produc-
teurs eux-mêmes.
Monsieur le président, j’irai même un peu plus loin et je
vous exposerai les problèmes que nous voyons. Voila qui
répondra peut-être a votre question, monsieur Epp: il y a des
droits qui, s’ils sont poussés à l’extrême, peuvent entrer en
conflit avec d’autres, Vous avez bien le droit de faire ce que
vous voulez, tant que vous ne me touchez pas. Nous reconnais-
sons que tous ces droits doivent, à un moment donné, être
subordonnés à un droit supérieur; dans une localité, le besoin
d’assurer la continuité de certains services peut justifier l’im-
position de mesures protectionnistes, puisque les besoins à long
terme de la communauté l’exigent; nous reconnaissons que cela
est possible.
Toutefois, pour ce qui est des obligations et devoirs des
administrations municipales, nous sommes d’avis qu’on devrait
éliminer ou réduire au minimum toutes les restrictions et
limites imposées uniquement pour protéger les entrepreneurs
locaux.
M. Epp: Je voudrais poursuivre sur cette question, mes-
sieurs, mais je n’en ai pas le temps.
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Nystrom.
M. Nystrom: Merci beaucoup, monsieur le coprésident,
sénateur Hays. Je voudrais poser quelques questions aux repré-
sentants de la Chambre de commerce quant à certains aspects
de leur mémoire.
Je vois qu’à la page 5, vous parlez de juridiction sur les
ressources naturelles en disant qu’il devrait y avoir une cer-
taine prérogative fédérale dans ce domaine; je suis évidemment
d’accord. Toutefois, vous dites également que les conditions
d’exportation devraient être déterminées par une agence natio-
nale. Je voudrais savoir si, à votre avis, les gouvernements
provinciaux devraient jouer un rôle dans le commerce interna-
tional des ressources, la préséance étant évidemment accordée
au fédéral. Je pense ici aux exportations et aux échanges
internationaux, de même qu’au rôle que le pays dans son
ensemble pourrait jouer dans ces domaines. Selon vous, les
provinces auraient-elles un rôle à jouer et devraient-elles avoir
juridiction sur le commerce international des ressources; en
effet, un très grand nombre de nos ressources sont venduä à
l’extérieur, et je pense plus particulièrement a la potasse, â
ljuranium et au pétrole de ma province qui sont expédiés aux
États-Unis.
M. Haig: Monsieur le président, je crois que c’est là l’un des
problèmes auxquels est confronté le Canada, en raison de son
régime fédéral; la position de la Chambre de commerce à ce
sujet est essentiellement celle exposée dans la résolution: nous
croyons que l’exportation des matières premières pourrait êt.e
a juste titre soumise à un contrôle fédéral. Les hydrocarbures
sont un bon ‘exemple puisqu’ils représentent un important
atout à préserver et à protéger au profit de la nation. L’Office
national de l’énergie a déjà exercé certaines responsabilités à
cet égard.
Je crois que l’organisme national de réglementation se doit
de toujours exercer ce droit avec grand soin étant donné que la
matière première provient d’une ou de plusieurs provinces,
mais non pas de toutes les provinces; notre première préoccu-
pation doit être de nous assurer que cette ressource ne soit pas
gaspillée mais plutôt préservée le plus longtemps possible, dans
le cas des ressources renouvelables; il faut également prendre
bien soin de ne pas épuiser par caprice les ressources non
renouvelables.
M. Nystrom: A la page 6 de votre mémoire, vous dites
également que la Chambre de commerce reconnaît la juridic-
tion provinciale sur les ressources naturelles; toutefois, vous
précisez que dans des circonstances spéciales, comme une
urgence nationale, le gouvernement fédéral pourrait être auto-
risé à prendre temporairement les responsabilités provinciales
dans ce domaine.
Que demandez-vous ici? Voudriez-vous que des pouvoirs
supplémentaires soient accordés au gouvernement fédéral, en
plus de ceux qu’il détient déjà? Le gouvernement fédéral a
déjà des pouvoirs considérables et dans une situation d’ur-
gence, la constitution l’autorise présentement à invoquer les
pouvoirs déclaratoires pour maintenir la paix, l’ordre et le bon
gouvernement, Alors, monsieur le président, demandez-vous
des pouvoirs supplémentaires ou simplement le maintien du
statu quo? Qu’entendez-vous par «urgence»? Quels conseils
pourriez-vous donner au Comité quant à la façon de définir ce
qu’est une urgence nationale? Ma question a donc deux volets.
M. Hnig: Monsieur le président, en réponse à la deuxième
partie de la question, je voudrais bien que nous soyons en
mesure de vous aider à définir ce qu’est une urgence; toutefois,
il est évident qu’il appartient en définitive à un corps législatif
comme le Parlement de déterminer s’il y a véritablement
urgence, et cela est toujours une question de fait. Ce ne sera
jamais une question de définition, et la Chambre de commerce
l’a reconnu au tout début.
Nous définissons l’intérêt national comme étant l’intérêt du
Canada tant au pays qu’à l’étranger. Dans certaines circons-
tances, il sera nécessaire pour préserver cet intérêt national
d’exercer la juridiction fédérale existante afin de protéger la
nation. Monsieur le président, je ne crois pas que nous son-
gions à étendre les pouvoirs actuels; nous voudrions plutôt
mieux comprendre la nature de ces pouvoirs et lesicircons-
tances dans lesquelles ils devraient être invoqués.
M. Nystrom: A la page 4 de votre mémoire, vous parlez des
paiements de transfert en disant qu’ils sont importants et
essentiels dans toutes les régions; toutefois, si j’ai bien lu, vous
semblez avoir quelques réserves. Vous dites que ces paiements
de transfert ne doivent pas mener à la création de structures
économiques artificielles ou décourager le mouvement des
populations.
Pourriez-vous dire au Comité si la Chambre de commerce
du Canada approuve notre système de péréquation actuel, ou
si vous proposez un changement, une diminution de son
importance.
M. Haig: Non, la Chambre de commerce du Canada conti-
nue d’appuyer le système actuel de paiements de péréquation,
avec les réserves que nous avons exprimées dans notre résolu-
tion, a savoir qu’ils ne doivent pas être de nature à permettre la
création de situations artificielles dans une communauté ou
dans une province, situations ayant par exemple pour effet de
ralentir le mouvement des personnes et des capitaux.
Nous croyons à l’application des paiements de transfert pour
l’établissement de normes dans chaque communauté au
Canada, normes qui seront un minimum acceptable pour les
gens vivant dans ces régions ou communautés. Monsieur le
président, vous reconnaîtrez qu’on ne peut soutenir que ces
normes doivent être uniformes dans l’ensemble du Canada et
que tous les habitants de toutes les communautés doivent
partir du même point. Si j’habite à Pangnirtung, la qualité du
logement qui constituera pour moi un minimum acceptable ne
sera pas la même que si j’habitais à Vancouver; je crois que
tous les membres de la Chambre de commerce le reconnais-
sent, mais nous croyons que l’un des rôles importants du
gouvernement fédéral est de s’assurer que la richesse nationale
du Canada soit répartie grâce aux paiements de transfert qui
sont l’un des moyens permettant de faire en sorte que les
Canadiens seront satisfaits ét qu’ils bénéficieront de toutes ces
choses dont parlait M. Bouchard, à savoir une alimentation
adéquate, une qualité minimum d’habitation, de services de
santé et d’éducation.
M. Nystrom: Avez-vous eu l’occasion d’étudier l’article 31
du projet de résolution que nous étudions? Mon parti a
l’intention d’y proposer un amendement plus tard. Il s’agit de
l’article de la page 9 portant sur la péréquation et les inégalités
régionales.
Si vous lisez cet article, vous constaterez qu’on n’y parle pas
du tout de péréquation, sauf dans le titre qui est le suivant
«péréquation et inégalités régionales». On n’y parle pas du tout
de paiements de péréquation; de fait, selon le libellé actuel, le
gouvernement fédéral ne serait pas obligé de verser ces paie-
ments de péréquation aux gouvernements provinciaux qui les
méritent. Le gouvernement fédéral pourrait plutôt faire des
paiements directs à la population; je parle de chèques à des
particuliers dans les six provinces maintenant admissibles à la
péréquation; il pourrait également réorienter leur stratégie
industrielle et verser des subventions directes à certaines socié-
tés ou compagnies dans les provinces dites défavorisées du
pays. Je voudrais savoir si vous approuvéz ce libellé ou si vous
êtes d’accord avec nous pour dire que le gouvernement devrait
accepter un amendement par lequel nous enchâsserions le
principe des paiements de péréquation. Je vous rappelle més-
sieurs que le principe des paiements de péréquation au pays est
appuyé par neuf des dix gouvernements provinciaux; lors de la
conférence d’Ottawa en septembre, le seul gouvernement ayant
refusé d’appuyer ce principe était celui du premier ministre
Bennett de Colombie-Britannique.
Seriez-vous en faveur d’un amendement à l’article 31 où
nous constitutionnalisons le principe des paiements de péréqua-
tion; est-ce que vous voudriez que ces paiements soient vérsés
directement aux gouvernements provinciaux pour qu’ils puis-
sent dépenser l’argent comme ils le jugent bon et essayer de
porter les normes provinciales au niveau national?
M. Hughes: Monsieur le président, je vais répondre à la
moitié de la question de M. Nystrom.
Monsieur Nystrom, il y a longtemps que la Chambre se
débat avec la question de la constitutionnalisation des paie-
ments de péréquation. Si nous n’avons pas pu parvenir à une
décision affirmative, c’est parce que nous pensons qu’avec le
temps des changements risquent de se produire. Nous ne
voudrions pas imposer un système de paiement qui ne pourrait
pas être modifié facilement.
Ce qui nous inquiète dans le cas des paiements de péréqua-
tion et du financement global, c’est qu’on risque d’accuser le
gouvernement fédéral de s’ingérer dans les affaires d’une
province si ce financement était réservé à une entreprise qui ne
plaise pas aux autorités provinciales en cause. On peut imagi-
nér assez facilement que celles-ci pourraient soudain accuser le
fédéral d’empiétér sur un de leurs secteurs de juridiction.
Nous hésiterions beaucoup à constitutionnaliser les paie-
ments de péréquation avec leur structure actuelle.
M. Nystrom: Et pourquoi ne pas constitutionnaliser simple-
ment le principe des paiements de péréquation, les détails
pouvant être changés au cours des années? En effet, ce que
vous craignez pourrait fort bien se produire, avec cet article
31; le gouvernement fédéral pourrait effectuer des paiements
en passant par-dessus les gouvernements provinciaux pour des
raisonsvpolitiques, et il pourrait accorder des subventions à des
compagnies dans le cadre d’une formule de péré uation; cela
n’a pas encore été fait, mais c’est un danger. Etes-vous en
faveur de la constitutionnalisation des paiements de péréqua-
tion?
M. Haig: Monsieur le président, la Chambre est en faveur
de la péréquation et des paiements de péréquation, mais contre
la constitutionnalisation du système.
C’est un principe auquel nous croyons, nous sommes con-
vaincus du caractère positif de ses résultats, mais nous ne
voudrions pas, pas plus que pour les autres articles de ce bill,
qu’à partir de déclarations de principe assez vagues on lui
donne une interprétation étroite. En effet, comme cela a
souvent été démontré, les circonstances peuvent changer radi-
calement en très peu de temps et, pour nous, ce serait une
erreur que d’essayer d’emprisonner le principe.
M. Nystrom: Très bien. Je vais maintenant passer à autre
chose, à la page 3 de votre mémoire. Je sais que mon collègue
M. de Jong a des questions supplémentaires à vous poser à ce
sujet; il s’agit de la circulation des biens, des services, de la
main-d’oeuvre et des capitaux. Cet été, le gouvernement fédé-
ral avait rédigé un projet sur la libre circulation des biens, des
services, de la main-d’oeuvre et des capitaux, et vous semblez
être tout à fait en faveur de ce projet qui avait été rejeté. Si
vous êtes au courant des objections à l’énoncé proposé cet été
par le gouvernement fédéral, ne pensez-vous pas que cela
pourrait entrer en conflit avec certains programmes provin-
ciaux? Je pense en particulier au programme d’action positive,
à la libre circulation des services et à certains régimes d’assu-
rance provinciaux comme les régimes d’assurance-automobile
du Manitoba, de la Colombie-Britannique, du Québec, etc.
Avez-vous réfléchi à cela et qu’en pensez-vous?
M. Hughes: Monsieur Nystrom, nous avons réfléchi à cette
question. Nous savons bien que tout ce que nous demandons à
ce Comité ne peut pas nous être accordé sur le champ, qu’il y a
certaines considérations d’ordre pratique, mais nous espérons
que les principes adoptés par ce Comité seront jugés
praticables.
Nous ne pouvons pas vous dicter les dispositions mot pour
mot pour éviter des conflits avec les provinces, mais nous vous
encourageons à chercher cette solution.
M. de Jong: Merci, monsieur le président. Comme M.
Nystrom l’a dit, je m’intéresse. . .
Le coprésident (sénateur Hays): Je me permets d’attirer
votre attention sur le fait que nous avions décidé de ne pas
partager le temps accordé à chacun. Peut-être monsieur de
Jong acceptera-t-il de poser ses questions par l’intermédiaire
de monsieur Nystrom. Nous nous en remettrons à votre déci-
sion, mais c’est une chose qui avait été entendue. Oui, mon-
sieur Epp.
M. Epp: Le Comité avait convenu de ne pas partager le
temps réparti. Mais nous avions précisé qu’en cas de question
supplémentaire, le président pouvait suggérer la solution que
vous venez de suggérer.
M. Nystrom: J’invoque le Règlement. C’est exactement ce
que j’avais compris: s’il y a des questions supplémentaires, le
président peut les autoriser. Monsieur de Jong est membre du
Comité au deuxième degré et il a une ou deux questions
supplémentaires à poser au sujet de la liberté de circulation des
capitaux et des services,
Le coprésident (sénateur Hays): Je suis à votre entière
disposition. D’autres observations? Dans ce cas, nous allons
poursuivre. De toute façon, vous aviez une dernière question.
M. de Jong: Merci, monsieur le président.
Le sénateur Asselin: J’invoque le Règlement.
[Texte]
Monsieur le président, pour faire suite à ce qu’a dit mon-
sieur Epp tout à l’heure, si vous permettez des questions
supplémentaires, tel que vous le permettez actuellement à mes
amis de gauche, vous devez le permettre pour tout le monde.
J’avais tout à l’heure une question supplémentaire à deman-
der aux témoins à la suite des questions posées par monsieur
Epp et je n’ai pas voulu évidemment la demander, parce que je
savais d’avancc que vous la refuseriez.
Alors je pense que vous créez un précédent. Ça ne me fait
rien que vous accordiez la permission de poser une question
supplémentaire, mais vous créez un précédent qu’on va utiliser
également.
[Traduction]
Le coprésident (sénateur Hays): Bien, il restait une minute ou
une minute et demie à monsieur Nystrom. Sénateur Asselin,je
suis d’accord avec vous. En autorisant cette question, nous
allons provoquer beaucoup de désordre. Certains de mes amis
à droite sont d’accord.
Dans ce cas, monsieur Nystrom, vous pouvez peut-être poser
vous-même la question supplémentaire, je crois qu’elle s’adres-
sait à monsieur Haig.
M. Nystrom: Loin de moi l’idée de discuter avec la prési-
dence. Je croyais . . .
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Nystrom, le
temps passe; allez-y.
M. Nystrom: Monsieur le président, messieurs, il y a un
problème en Saskatchewan posé par les programmes d’action
positive destinés aux autochtones du nord de la province. La
proposition du gouvernement fédéral cet été aurait porté
atteinte à certains de ces programmes qui sont excessivement
importants pour la population autochtone.
Nous avons d’autres programmes dans la province, par
exemple, la Saskatchewan Mining Development Corporation
qui peut acquérir jusqu’à 50 p. 100 des actions de toute
nouvelle exploitation dans le nord de la province, et la encore,
avec un contrôle provincial sur les ressources, cette entreprise
aurait été très atteinte.
D’autre part, la position de la Saskatchewan est assez
unique car elle a souvent servi de laboratoire social à des
programmes comme l’assurance-santé, un grand nombre de
sociétés de la Couronne comme Sass Potash, Carbon Insu-
rance, etc. Tous ces programmes auraient été mis en danger.
Quand j’ai lu votre mémoire, je me suis demandé si vous
aviez été motivés par cette circonstance, si vous accepteriez de
risquer que certains de ces programmes de nature progressiste
et de tendance social-démocrate soient mis en danger. Est-ce
cela que vous recherchez, est-ce la position adoptée par l’entre-
prise privée face à la constitution?
M. Hughes: Non, monsieur Nystrom, absolument pas. Les
objectifs de ces programmes, comme le programme d’action
positive, ont toutes nos sympathies. Par contre, nous avons
certaines réserves quant à leur application dans certaines
régions. Nous ne voudrions pas priver les provinces de leurs
droits relativement légitimes de faire des investissements dans
des entreprises qui relèvent de leur juridiction. Absolument
pas. Par contre, nous voudrions bien nous débarrasser des
entraves à l’entreprise privée dans certaines provinces, entraves
qui sont imposées de l’extérieur.
Nous sommes tout à fait en faveur d’un grand nombre de
programmes, de programmes sociaux, comme les programmes
d’action positive, et nous ne voudrions pas empêcher les provin-
ces qui exercent légitimement leurs pouvoirs de faire des
investissements à l’intérieur de leurs frontières.
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Mackasey.
M. Maekasey: Merci, monsieur le président.
Monsieur Hughes, monsieur Haig, j’ai le sentiment d’avoir
déjà souvent discuté de cette question.
Pour commencer, je tiens à dire à quel point je suis heureux
de vous voir ici, de constater que la Chambre a réussi à
survivre pendant de si longues années, à rester une institution
nationale. Je pense à l’esprit d’adaptation dont elle a fait
preuve, à la rapidité avec laquelle elle a su s’ajuster aux
exigences des deux langues officielles, comme nous pouvons le
constater encore une fois aujourd’hui.
Je vous ai écoutés avec beaucoup d’attention, messieurs, et
j’ai également écouté les observations particulièrement intéres-
santes de M. Nystrom et j’espère que je ne répéterai pas ce qui
a déjà été dit. Je ne voudrais pas profiter de votre présence
pour exposer mon point de vue personnel, au contraire, je tiens
à entendre le vôtre. Nous pourrions passer toute la journée à
parler des principes et des amendements que M. Nystrom a
l’intention de proposer dans une, deux, trois ou quatre
semaines.
M. Nystrom: Ou cinq.
M. Mackasey: En dépit de l’intérêt que cela peut présenter,
je ne crois pas que nous puissions demander a la Chambre de
prendre position au sujet des programmes d’action positive; ce
serait un peu injuste.
Pourtant, monsieur Haig, il y a un élément qui m’a beau-
coup impressionné, moi qui ai toujours essayé de voir les
délibérations de ce Comité objectivement; c’est une préoccupa-
tion que nous partageons tous, toutes les frictions qui se
produisent dans ce pays depuis quelques années.
D’après ce que vous disent vos membres dans tout le pays,
peut-on dire que ces frictions sont dues, du moins en partie, à
la constitution?
M. Haig: Je crois que je vais laisser M. Hughes commencer.
M. Hughes: Effectivement, monsieur Mackasey, comme
vous l’avez remarqué, il existe certaines frictions. D’où vien-
ment-elles? Je n’en suis pas certain, mais le fait que le gouver-
nement fédéral se soit ingéré dans des juridictions qui étaient
autrefois provinciales y est certainement pour quelque chose.
On a parlé des frictions provoquées par le différend sur la
politique nationale de l’énergie qui a été annoncée le 28
octobre; on a parlé également des frictions provoquées par la
question de la réforme constitutionnelle. Effectivement, des
problèmes nationaux de cette portée, qui mettent en question
le principe même du pouvoir politique, ont forcément des
répercussions sur le monde des affaires et ne peuvent qu’aug-
menter les frictions inhérentes à certaines régions de ce pays.
M. Mackasey: Voilà une bonne évaluation de la situation. Si
je vous ai posé cette question, c’est qu’à mon sens ces observa-
tions portent plus sur la Constitution actuelle que sur celle que
nous préparons. Dans les documents que vous nous avez
soumis, vous nous demandez, avec fermeté et politesse, de
renforcer l’intégration économique du pays.
Pensez-vous que pour renforcer l’intégration économique du
pays une présence fédérale très ferme est indispensable?
M. Hughes: Absolument.
M. Mackasey: Dans ce cas, pouvez-vous nous dire comment
vous envisagez le rôle d’un gouvernement central fort dans
notre fédération?
M. Hughes: Je vais essayer de commencer, monsieur Mac-
kasey, mais cela risque d’étre très long, parce qu’il s’agit des
réactions économiques qui découlent de toute mesure politique.
Ce rôle existe sans le moindre doute.
A notre avis, le gouvernement fédéral devrait annoncer la
couleur du développement économique pour tout le pays. Il
devrait être obligé, je ne sais pas si c’est le mot juste, de
consulter les autorités provinciales pour s’assurer que, globale-
ment, sa politique est conforme a l’orientation que chaque
province souhaite prendre.
Chaque province, en adoptant une orientation économique,
devrait être obligée, je ne sais toujours pas si c’est le mot exact,
de consulter les autorités fédérales pour s’assurer que les
programmes qu’elle applique cadrent bien dans l’ensemble, ll
ne s’agit pas vraiment de cadrer avec le reste. mais de s’assurer
que l’orientation d’une province n’est pas contraire à celle dc
l’ensemble du pays.
Mais de toute façon, effectivement, c’est le gouvernement
fédéral qui devrait décider de la stratégie économique globale
de l’ensemble du pays et, à l’intérieur de ce cadre les provinces
pourraient fonctionner.
M. Mackasey: Vous voulez dire, je pense, que lorsque les
différents paliers de gouvernement ne sont honnêtement pas
d’accord, ce qui est d’ailleurs assez rare, je pense en particulier
aux revenus des ressources naturelles, principal sujet de dis-
corde à l’heure actuelle, dans ce cas, comme vous le dites à la
page 5 de votre mémoire, il incomberait au gouvernement
fédéral de trancher. De trancher quoi?
M. Haig: De prendre la décision pour s’assurer que les
ressources sont utilisées dans l’intérêt de l’ensemble de la
nation. C’est du moins la position de la Chambre: une res-
source peut être située dans une région donnée, mais c’est une
ressource canadienne autant que provinciale, et tous les Cana-
diens, de par leur appartenance à la nation, devraient pouvoir
profiter de ces ressources qui ne doivent pas être considérées
comme le privilège exclusif d’une province ou d’une région
donnée. Ceci est diamétralement opposé à la position de
certaines provinces mais, pour nous, le Canada est encore une
entité nationale et c’est la seule position qu’il soit possible
d’adopter.
M. Mackasey: Pour vous, donc, les ressources sont cana-
diennes avant tout et appartiennent à l’ensemble du pays.
M. Haig: Nous avons dit très clairement dans notre
mémoire que la responsabilité de l’exploitation, de l’adminis-
tration et du transport de ces ressources au Canada incombait
aux provinces. C’est ainsi que les choses se passent depuis
plusieurs années et, dans l’ensemble, elles ne se passent pas si
mal. C’est seulement dans des circonstances que je qualifierais
d’extrêmes que nous nous sommes écartés de cette position,
mais c’est l’exception.
Le public s’inquiète de l’absence d’une politique logique à ce
sujet; il constate qu’on a plutôt tendance à faire les choses au
petit bonheur.
M. Mackasey: C’est une préoccupation que je partage,
messieurs, et, je suis d’accord sur l’importance d’une politique
canadienne et sur le rôle qui doit revenir à un gouvernement
national. Mais nous devons nous garder de toute discrimina-
tion. Les avantages et les inconvénients doivent être répartis
équitablement dans tout le pays. Je suis d’accord avec vous.
Ceci étant dit, vous prétendez qu’en dernier ressort, qu’en
fin de compte, il doit y avoir quelqu’un pour assumer la
responsabilité. Pour vous, c’est le rôle du gouvernement fédé-
ral. Je ne vous demande pas de répondre.
Mais si je ne me trom e pas, pour vous le Canada n’est pas
un regroupement de dix tats, ou une communauté de commu-
nautés, mais bel et bien un pays. C’est bien la position de la
Chambre?
M. Haig: Pour nous, c’est un pays, c’est également une
union économique et politique, qui regroupe des régions écono-
miques dont les forces et les faiblesses varient et, pour revenir
à ce que nous disions tout à l’heure des paiements de transfert,
nous avons essayé d’assurer aux Canadiens, où qu’ils vivent, un
mode de vie fondamental et certaines normes. Enfin, s’ils sont
disposés à aller s’installer dans les Territoires du Nord-Ouest,
ou dans un endroit tout aussi triste, comme le nord de la
Saskatchewan, il faudrait les récompenser de leur bonne
volonté. Pour nous, c’est un fait acquis.
M. Mackasey: Messieurs, tous vos membres sont d’accord,
dans l’Est et dans l’Ouest; tous souhaitent une présence fédé-
rale forte?
M. Haig: Monsieur le président, la position que nous
sommes venus défendre devant vous aujourd’hui est partagée
par les Canadiens de toutes les provinces et des deux territoires
du Canada.
Nous avons posé ces questions dans toutes les provinces. Un
comité auquel j’ai participé avait préparé un document qui a
été envoyé dans toutes les régions du pays pour approbation et
observations, le cas échéant.
Je suis heureux de pouvoir vous dire que toutes les régions
du Canada nous ont fait part de leur approbation en ce qui
concerne cette position que nous sommes venus défendre
devant vous aujourd’hui.
M. Mackasey: Donc, le respect des provinces, mais une
présence fédérale forte, un gouvernement fédéral fort qui, en
cas d’impasse, est autorisé à agir au nom de tous les
Canadiens?
M. Haig: Pour les questions d’intérêt national.
M. Mackasey: Bien sûr.
Je précise, monsieur Haig, que les changements que nous
envisageons d’apporter a la Constitution ne modifient en rien
l’équilibre des pouvoirs.
Le sénateur Goldenberg a réussi à me faire comprendre que
nous ne touchions absolument pas cet équilibre.
S’il est possible de parvenir à cet équilibre, il faut espérer
que nous le ferons lorsque nous modifierons notre propre
constitution, ici même.
Monsieur Haig, monsieur Hughes, vous avez dit que vous
étiez en faveur du rapatriement.
M. Haig: Oui.
M. Mackasey: Apparemment, et c’est une heureuse sur-
prise, la plupart des gens semblent penser comme nous. Il n’y a
pas encore eu un seul témoin qui ne nous ait pas dit: «Nous
voulons que la constitution soit rapatriée». Et tous ceux qui
avaient une formation juridique ont même ajouté: «Nous vou-
lons également que les droits et libertés individuels soient
inscrits dans cette constitution rapatriée».
Cela dit, certains parlent du libellé. de certaines lacunes; je
suis sûr que le ministre acceptera des amendements d’ici
quelques semaines pour tenir compte de l’opinion de nos
témoins.
A mon avis, on s’est trop hâté de condamner nos actes, et
c’est un plaisir pour nous de vous recevoir et de vous entendre.
Le coprésident (sénateur Hays): C’est votre dernière
question?
M. Mackasey: Je commence à peine. J’allais dire, puisqu’il
me reste une minute ou deux . . . mais je ne veux pas perdre de
temps à discuter. J’ai probablement touché un point sensible
quand j’ai dit combien de gens nous approuvaient.
M. Nystrom a parlé des paiements de transfert. Je suis
heureux de constater que vous êtes en faveur de ces paiements.
Peu importe que nous inscrivions ou pas dans la constitution la
méthode de transfert. C’est le principe des paiements de
péréquation qui est important, c’est à cela que l’on voit la
différence entre le Canada et les États-Unis. Dans cette consti-
tution, nous devons promettre à tous les Canadiens une égalité
des chances, et cette égalité n’existe pas si vous vivez dans une
région où, pour des raisons géographiques, il n’y a pas d’école,
pas de route ou de service de santé, rien de tout cela, qui
devient par contre possible grâce aux paiements de péréqua-
tion. Tout comme vous, je pense que la méthode de transfert
importe peu et que ce sont les principes qui doivent figurer
dans la constitution.
Le coprésident (sénateur Hays): Merci, monsieur Macka-
sey. Monsieur Gunn, monsieur Hughes, monsieur Haig et
monsieur Bouchard, nous sommes heureux que vous ayez pu
venir. Nous vous remercions d’être venus témoigner devant le
Comité et nous espérons que vous pourrez revenir si votre
présence s’avérait souhaitable.
Le sénateur Roblin: Monsieur le président, ne pourrait-on
pas maintenant revenir au problème du temps consacrévaux
questions? Mes questions n’auraient probablement pas résolu
tous les problèmes de la nation, mais il y en avait une ou deux
que je tenais à poser à nos invités.
Si je me permets cette observation, c’est que ces messieurs
sont des témoins particulièrement importants. Tous nos
témoins sont importants, mais ceux-ci le sont particulièrement
à cause des gens qu’ils représentent, parce qu’ils représentent
des Canadiens de tout le pays. Bref, c’est terriblement
ennuyeux de les quitter si rapidement.
Le coprésident (sénateur Hays): Sénateur Roblin, je com-
prend bien votre point de vue et je partage l’opinion que vous
avez de nos témoins, mais nous avons un horaire à respecter.
Les représentants de la Chambre de commerce savaient avant
de venir combien de temps leur serait consacré, et nous avons
un autre groupe qui attend de comparaître. J’imagine que ces
messieurs accepteront de revenir si nous le souhaitons, n’est-ce
pas?
M. Roblin: J’imagine qu’ils accepteraient de répondre a une
question ou deux avant de nous quitter.
Le coprésident (sénateur Hays): Certainement, c’est à vousde
décider. Nous avons un horaire à respecter, mais si les mem-
bres du Comité souhaitent poser d’autres questions, ils sont
libres de le faire. Monsieur Epp.
M. Epp: Monsieur le président, vous savez que j’ai déjà dit
cela à plusieurs reprises et je le dirai encore parce que la
situation n’est pas très satisfaisante. Les membres du Comité
n’ont pas le temps de poser des questions, de faire des observa-
tions et, de plus, on ne cesse de nous dire que les témoins
pourront revenir le cas échéant, Pour commencer, nous ne
savons pas du tout si cela sera possible et eux aussi doivent
avoir des engagements à respecter. Ensuite, et c’est encore plus
important, ce n’est vraiment pas très logique de convoquer des
témoins qui viennent parfois d’assez loin, puis de les congédier
au bout d’une heure ou d’une heure et demie en invoquant
notre horaire et en leur disant qu’ils pourront peut-être revenir
plus tard.
Cet horaire, c’est le Comité qui l’a adopté, c’est le Parti
libéral qui l’a imposé pour pouvoir entendre le plus de témoins
possible le plus rapidement possible, et je répète ce que j’ai dit
hier, il est insensé de demander à des groupes nationaux de
venir faire un exposé et de répondre à des questions pendant 40
minutes. La moindre des choses serait de consacrer à chaque
témoin qui représente un groupe d’intérêt national, comme la
Chambre de commerce, une période complète, c’est-à-dire une
séance de comité comme nous le faisons d’ordinaire.
C’est tout ce que j’avais à dire, monsieur le président;
maintenant, c’est à vous de juger et vous pouvez passer au
témoin suivant si vous décidez de ne pas tenir compte de
l’opinion du Comité. En attendant, nous ne faisons pas notre
travail.
Le coprésident (sénateur Hays): Mademoiselle Campbell?
Mlle Campbell: A ce sujet, monsieur le président, puisque
nous en sommes à l’ordre du jour, il serait peut-être bon de
reparler de la possibilité de former un sous-comité pour per-
mettre à tous ceux qui ont encore des questions à poser aux
témoins de le faire en séance de sous-comité.
Nous pourrions toujours consulter le compte rendu et la
traduction. D’ailleurs. le mandat de ce Comité prévoit la
possibilité de créer un sous-comité. Tout comme le sénateur
Roblin, j’estime que ceux qui n’ont pas eu le temps de poser
des questions aux témoins pourraient fort bien le faire en
sous-comité; c’est une question qui mérite d’être étudiée par le
comité directeur. En tout cas, nous nous sommes fixés un ordre
du jour, et je crois que nous devons le respecter.
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Beatty?
M. Beatty: Monsieur le président, je dois être moi aussi sur
la liste de ceux qui voulaient poser des questions aux représen-
tants de la Chambre de commerce. L’exposé de la Chambre de
commerce est particulièrement important, il contient des ques-
tions qui intéressent au plus haut point tous les Canadiens.
C’est un groupe qui représente un intérêt national, qui repré-
sente les éléments les plus distingués du monde des affaires au
Canada. Personnellement, je serais absolument désolé de les
voir partir sans avoir pu leur poser des questions qui ont été
effleurées jusqu’à maintenant et qui sont particulièrement
importantes pour tous les Canadiens.
Mlle Campbell était peut-être absente hier lorsque nous
avons parlé des sous-comités.
Mlle Campbell: Monsieur Beatty, j’étais là.
M. Beatty: Ah, parfait.
Mlle Campbell: Vos représentants au comité directeur ont
exprimé leur opinion, mais pas les nôtres, et je pense qu’il
faudrait renvoyer tout cela au comité directeur. Les représen-
tants de la Chambre de commerce ont accepté de revenir.
M. Beatty: Très bien. Quant aux sous-comités, cela vaut
peut-être la peine d’être redit, apparamment tout le monde n’a
pas compris hier: nous estimons que ce serait manquer de
courtoisie envers les groupes qui représentent des intérêts
nationaux et qui viennent témoigner devant ce Comité à
grands frais après de considérables difficultés de préparation,
de leur dire que nous les entasserons quelque part au sous-sol,
pour être entendus par un petit sous-comité du comité plénier.
Deuxièmement, qu’en tant que parlementaires, membres de
ce Comité, ce serait assumer nos responsabilités avec légèreté
que d’accepter qu’un organisme ayant fait tout ces préparatifs
puisse n’être entendu que par quelques-uns d’entre nous plutôt
que par tous.
Il nous est utile, à tous, d’entendre le témoignage de ces
organismes nationaux. S’ils n’ont rien à dire, ils n’auraient pas
dû être invités, pour commencer. Néanmoins, ils ont fait un
travail considérable et les entendre ne peut être que tout
bénéfice pour le Comité. Monsieur le président, il serait peut-
être bon d’en profiter pour déterminer si oui ou non les divers
organismes et particuliers ayant demandé à venir témoigner
devraient être restreints à un temps de parole artificiellement
limité. Je pense opportun de vous signaler qu’aujourd’hui, ä la
Chambre des communes, au cours d’un échange avec les
députés de l’opposition, M. Pinard, le leader en Chambre du
gouvernement, a indiqué que le gouvernement ne s’est pas
imposé de date limite et qu’il était disposé a faire preuve de
souplesse pour ce qui était des travaux du Comité, dans la
mesure où la présentation d’une adresse commune a la
Grande-Bretagne ne fait pas l’objet d’un calendrier prédéter-
mine.
C’est avec grand plaisir que j’ai entendu M. Pinard tenir ces
propos fort différents de ce que nous étions portés à croire
jusqu’à cet après-midi.
Hier, monsieur le président, nous avions décidé que le
comité directeur étudierait toute cette question de l’éventualité
d’un rapport aux deux Chambres demandant que cette date
limite du 9 décembre soit supprimée et que la période d’au-
diences du Comité soit prolongée. J’aimerais savoir si une
réunion du comité directeur devant traiter de cette question a
été fixée, si elle a déjà eu lieu et si un rapport est prêt.
Quoi qu’il en soit, monsieur le président, j’estime que tant
que les membres de ce Comité n’auront pas eu la possibilité
d’étudier plus en profondeur les graves questions soulevées par
la Chambre de commerce, passer simplement à d’autres
témoins avec la vague promesse qu’on les invitera peut-être de
nouveau est inadmissible.
Le coprésident (sénateur Hays): Sénateur Asselin.
[Texte]
Le sénateur Asselin: Je voudrais simplement, monsieur le
président, répéter ce que vient de dire monsieur Beatty. Je
voudrais reformuler peut-être ces observations d’une autre
façon.
Moi je n’accepte pas la proposition faite par mademoiselle
Campbell, qui voudrait créer deux genres de témoins ici en
discriminant, je pense, un groupe de témoins vis-à-vis l’autre.
Lorsque des gens comme la Chambre de Commerce du
Canada se déplacent à travers tout le Canada pour venir nous
entendre, nous allons les entendre dans le sous-sol un groupe et
l’autre groupe on va les entendre ici en haut, je pense que dans
le projet de résolution que nous avons, nous sommes contre la
discrimination. On ne commencera toujours bien pas à discri-
miner les témoins qui viennent devant nous.
Je pense qu’on devrait prendre le temps d’entendre les
témoins devant le Comité qui a été institué par la Chambre et
le Sénat, je suis contre la discrimination des groupes de
témoins qui viennent comparaître ici devant nous.
The Joint Chairman (Senator Hays): Mr. Bockstael.
[Traduction]
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Bockstael.
M. Bockstael: Monsieur le président, une fois de plus,
l’opposition nous attire dans une discussion tangentielle nous
faisant perdre un temps précieux dans l’audition des témoins.
Je suis tout à fait prêt à entendre cette délégation jusqu’à 18
heures si l’opposition veut bien revenir à 20 heures pour
entendre cet autre groupe, qui a également fait tout ce chemin
pour’ venir et qui a le droit d’être entendu.
Cependant, en toute décence, je vous demande si, lorsque
nous fixons un rendez-vous et qu’un autre groupe attend
depuis 16 h 30 que son droit à être entendu soit respecté, nous
ne devrions pas honorer nos promesses? Nous ne pouvons
commencer à modifier ces auditionsà notre guise, ou à la guise
de certains, car j’aimerais également, ainsi que d’autres certai-
nement, poser des questions à cette délégation. Il s’agit de
témoins très favorables, qui ont manifesté leur accord avec
l’initiative du gouvernement. Merci.
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Nystrom?
M. Nystrom: Certains des arguments de M. Bockstael sont
excellents, et ne voulant pas me lancer dans un débat de
procédure, j’ai avisé la présidence, il y a environ une heure,
d’une proposition de motion que je souhaite débattre demain.
Si vous consultez notre programme, demain, nous n’avons
rien à Il h 30, et nous pourrons peut-être alors discuter de
certaines de ces questions.
Je vais vous lire l’avis de motion que j’ai fait parvenir à la
présidence.
Que ce Comité demande a la Chambre des communes et
au Sénat un report de sa date de rapport au 10 février
1981.
Je ne veux pas ouvrir le débat pour le moment, nous
pourrons le faire demain, ne serait-ce que par courtoisie envers
les témoins ici présents.
Au sujet de ceci, monsieur le président, j’estime une fois de
plus qu’il est très injuste qu’un organisme national venant
témoigner ne puisse être interrogé que par trois ou quatre
membres. C’est très injuste. Nous diviser en plusieurs sous-
comités ne me paraît pas être une bonne solution, car, d’une
part, la politesse veut que les témoins puissent s’adresser à
nous tous et, d’autre part, les membres de ce Comité veulent
entendre les conseils qu’ils ont à nous prodiguer, tous les
membres du Comité, et non pas simplement les membres d’un
sous-comité.
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur Mackasey?
M. Mackasey: Monsieur le président, avec votre permission,
j’aimerais appeler un chat un chat. Il est légitime que ce
calendrier comprimé nous donne des inquiétudes; il est légi-
time que nous puissions poser des questions à ce groupes
national ici présent. Pourrtant, tout ce que nous faisons, c’est
démontrer à la population canadienne notre incapacité à trou-
ver une méthode de procédure appropriée, méthode qui devrait
être discutée et qui a certainement déjà été discutée en comité
directeur, c’est-à-dire en privé et non pas en public.
Il me semble que la procédure, les témoins, le temps alloué,
aujourd’hui, ont dû être acceptés par tous les partis en comité
directeur, ou auraient dû l’être. Néanmoins, cela semble deve-
nir un peu plus qu’une simple coïncidence. C’est la troisième
fois que M. Beatty invoque cette question à un moment précis
des audiences.
M. Nystrom n’est pas non plus toute innocence, même s’il
renvoie la balle à M. Beatty, Il accuse M. Beatty de commet-
tre des abus, tout en lisant au monde entier les propositions
d’amendements, qu’il a l’intention de présenter demain.
S’il estime vraiment que les témoins, et il le devrait, atten-
dent sans comprendre ce qui se passe, il aurait très bien pu
notifier le monde entier de son intention de présenter sa motion
à 18 heures, ou, encore mieux, à la presse après 18 heures.
Nous nous occuperons de la motion de M. Nystrom après
l’avoir reçue, pas avant.
M. Nystrom devrait dont être le dernier à lancer la pierre à
M. Beatty. Néanmoins, nous devrions tous nous pencher de
nouveau sur notre procédure, en privé, en comité directeur, et
une fois que nous nous serons mis d’accord, avoir la politesse
de n’y revenir qu’au cours de la prochaine réunion en comité
directeur, pour la modifier le cas échéant. Je demanderais au
deux présidents de ne pas accepter ce genre d’intervention et
de poursuivre l’audition des témoins.
Le coprésident (sénateur Hays): Monsieur McGrath?
M. McGrath: Monsieur le président, c’est une illustration
supplémentaire de notre dilemme, de notre dilemme croissant
et de nos frustrations, dans la mesure où des organismes
nationaux viennent témoigner et que nombre d’entre nous se
voient refuser la possibilité de leur poser des questions et de les
contre-interroger.
Monsieur le président, je vous rappellerai qu’hier, mon
collègue, Jake Epp, a déposé un avis de motion demandant la
prolongation de nos travaux. Depuis lors, comme l’a indiqué
M. Beatty, au cours d’un échange à la Chambre, le gouverne-
ment s’est dit prét à envisager une prolongation raisonnable de
la durée des travaux de ce Comité. Or, il ne nous reste plus que
18 réunions, et selon les derniers chiffres, quelque 100 témoins
veulent comparaître. Derniers chiffres, avant la campagne de
publicité dont les résultats n’ont pu encore se faire sentir.
Monsieur le président, il serait peut-être opportun de proposer
la motion de M, Epp, compte tenu de l’échange qui a eu lieu la
Chambre aujourd’hui, compte tenu des dispositions favorables
du gouvernement quant à une prolongation raisonnable. Dans
sa motion. M. Epp demande que la Chambre modifie notre
mandat, pour que nos audiences puissent aller jusqu’au 31
décembre. Si vous êtes d’accord, monsieur le président, je vous
suggérerais d’entendre cette motion maintenant.
M. Epp: Monsieur le président, j’aimerais entendre les
autres témoins. Comme je l’ai fait pour d’autres témoins,
j’aimerais simplement que le sous-comité étudie la possibilité
d’une nouvelle audition de la Chambre de commerce. Je
n’aime pas le faire, mais comme c’est notre seule option, je le
fais de nouveau. Je crois que c’est le troisième groupe pour
lequel nous faisons cette demande de cette manière.
Deuxièmement, monsieur le président, comme vous le savez,
je vous ai fait parvenir un avis de motion, hier, Nous n’avons
pas de témoin demain matin, et étant donné que vous avez reçu
mon avis de motion hier, j’ai l’intention de la proposer demain,
au cours de cette séance.
Le président (sénateur Hays): Êtes-vous d’accord avec M.
Epp?
Mlle Campbell: Monsieur le président, j’ai demandé à avoir
de nouveau la parole. Je veux que tout le monde sache, que le
public sache, que tous les comités, à l’exception de ce Comité,
font l’objet de comptes rendus publics, et il est malheureux que
certains des membres semblent dénigrer les autres comités. Ils
sont tous publics, dans la mesure où ils font l’objet d’un
compte rendu écrit, et comparaître devant un sous-comité n’a
rien d’humiliant.
Le coprésident (sénateur Hays): Êtes-vous tous d’accord?
Une fois de plus, messieurs Haig, Hughes, Dunn et Bou-
chard, nous vous remercions infiniment. Nous appelons main-
tenant les témoins suivants, et je cède la présidence à M. Joyal.
M. Hughes: Monsieur le président, je voudrais dire, au nom
de la Chambre, que comparaître devant votre Comité a été un
véritable privilège. C’est une responsabilité que nous n’avons
pas prise à la légère, et étant donné certaines contraintes, si
vous le souhaitez, nous reviendrons quand vous le voudrez.
Le coprésident (sénateur Hays): Merci beaucoup.
Monsieur Joyal?
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Merci, monsieur Hays.
Puisqu’il semble être l’avis et le consentement des honor-
ables membres dc ce Comité que nous poursuivions nos débats
avec les représentants du Council ol Quebec Minorities et
l’Association canadienne-française française de l’Ontario,
est-ce que je pourrais demander aux représentants de ces deux
associations qui se trouvent dans la salle, en particulier mon-
sieur Eric Maldoff qui est le président du Council of Quebec
Minorities et monsieur Yves St-Denis qui est le président de
l’Association canadienne-française de l’Ontario, l’ACFO, de
bien vouloir venir prendre place à la table des témoins, s’il vous
plaît.
Alors, messieurs les représentants du Council of Quebec
Minorities et de l’Association canadienne-française de l’Onta-
rio, il me fait plaisir, au nom des honorables membres de ce
Comité, de vous souhaiter la bienvenue. cet après-midi.
Je crois comprendre, des discussions préliminaires, qu’il n’y
a qu’un seul mémoire qui soit présenté au nom de vos deux
organismes.
Par conséquent, j’inviterais l’un ou l’autre des représentants,
soit monsieur Maldoff ou monsieur St-Denis, à nous en faire la
présentation, soit conjointe, soit successive.
Alors, monsieur Maldoff peut-être ou monsieur St-Denis?
M. Eric Maldoff (président, Conseil des minorités du
Québec): Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Au nom des deux organismes ici présents aujourd’hui, nous
aimerions remercier le Comité de sa gracieuse invitation à
témoigner au sujet d’une question que nous considérons
comme revêtant un intérêt vital pour nos deux groupes et pour
l’ensemble de la population canadienne. J’aimerais vous pré-
senter les principaux orateurs qui prendront la parole
aujourd’hui.
Immédiatement à ma gauche, M. Yves St-Denis, président
de l’Association canadienne-française de l’Ontario. A ma
droite, M. James Leavy, membre du conseil d’administration
du Council, professeur de droit à l’Université de Montréal et
consultant de la Fondation canadienne pour les droits de la
personne.
Je m’appelle Éric Maldoff, je suis président du Council af
Quebec Minorities. J’aimerais vous dire quelques mots de nos
deux organismes. L’Association canadienne-française de l’On-
tario a été fondée en 1919. Il s’agit d’un organisme regroupant
les Franco-Ontariens et constitué de 18 conseils régionaux et
de 17 organismes affiliés.
Le Council of Quebec Minorities a été fondé en 1978. Il
s’agit d’un organisme réunissant 42 groupes au Québec, grou-
pes qui s’intéressent aux questions des minorités au Québec.
Un grand nombre de ces questions portent sur la langue.
Nous pensons qu’il est historique pour le Canada que des
membres des communautés anglaise et française de ce pays se
réunissent pour vous présenter en commun un mémoire trai-
tant de questions que nous considérons comme vitales pour
l’avenir de ce pays et certainement vitales pour l’avenir de nos
communautés. Nous sommes venus ensemble, car nous
croyons, nous les Canadiens anglophones et les Canadiens
francophones, que le Canada est notre pays, nous croyons que
les Canadiens anglophones et francophones peuvent vivre et
travailler ensemble, que l’avenir peut être construit de concert
par ces deux groupes linguistiques, Notre présence ici aujour-
d’hui est la preuve que nous y croyons et que cela peut être
fait.
Nous voulonsque les Canadiens français et les Canadiens
anglais se sentent chez-eux partout dans ce pays. L’anglais et
le français doivent être considérés comme des langues
canadiennes.
Nous sommes ici pour vous communiquer certaines recom-
mandations fondées sur ce que nous vivons dans nos provinces
respectives, Nous ne prétendons pas que nos expériences et
notre situation sont ou ont jamais été identiques. Cependant,
au cours de discussions et d’entretiens, de conférences conjoin-
tes tenues à Toronto et à Ottawa en septembre et en avril de
cette année, nous avons appris que nous avions beaucoup de
problèmes en commun. Par exemple, nous voulons que nos
jeunes puissent grandir et se sentir chez eux dans leur pro-
vince, se sentir en sécurité et sentir qu’ils ont un avenir dans les
provinces dans lesquelles ils ont grandi.
Notre mémoire contient plusieurs points. Au cours de cette
présentation, nous avons l’intention d’en faire ressortir cer-
tains. Nous pensons que le temps est venu pour les Canadiens
de se déclarer sur les principes qui régiront ce pays dans les
années à venir, et il faut que ces principes soient garantis et
protégés par tous les Canadiens par notre constitution.
Si l’anglais et le français sont véritablement des langues
canadiennes, les Canadiens doivent pouvoir les utiliser au
Parlement du Canada et dans les assemblées législatives de
toutes les provinces. Notre expérience au Québec démontre
que c’est relativement facile à réaliser et à peu de frais.
Nous aimerions ensuite attirer votre attention sur la ques-
tion de l’article 133 de l’AANB. Cette question est vitale.
Nous croyons que l’article 133, qui garantit le droit d’utilisa-
tion de l’anglais et du français dans les assemblées législatives
et les tribunaux de la province du Québec et de la province du
Manitoba, devraient être étendu au moins à celles du Nou-
veau-Brunswick et de l’Ontario.
Notre expérience québécoise démontre que c’est possible,
que la population n’en souffre pas et que c’est une recomman-
dation sans problème. Le Council of Quebec Minorities a
plaidé à de nombreuses reprises auprès de M. Bill Davis,
premier ministre de l’Ontario, pour qu’il accepte d’appliquer
l’article 133 à la province de l’Ontario. Encore tout récem-
ment, le 11 novembre, nous avons envoyé un télégramme au
premier ministre de l’Ontario pour qu’il prenne cette mesure.
A la lumière des derniers événements que nous avons vécus,
au Canada et au Québec, nous savons qu’il est vital qu’un
geste de cette nature soit fait. C’est un important pas en avant,
c’est une affirmation importante de la reconnaissance de l’an-
glais et du français comme langues canadiennes.
Nous constatons avec grand plaisir que le sénateur Roblin et
MM. Crombie et Nystrom ont en fait manifesté leur appui à
cette proposition.
Nous estimons ensuite que le droit d’utiliser l’anglais et le
français dans les procédures juridiques instituées par la Cou-
ronne, où la liberté des particuliers est en jeu, doit être garanti.
Rien n’est plus fondamental que le droit à la liberté de la
personne, et cette protection doit être assurée à tous les
citoyens canadiens.
Nous estimons ensuite que le gouvernement, à tous les
niveaux, devrait jouer à partir de maintenant un rôle croissant
dans la vie des citoyens de ce pays. Compte tenu du rôle.
toutjours croissant, que joue le gouvernement, les Canadiens
doivent pouvoir communiquer avec l’administration, fédérale
ou provinciale, dans les deux langues officielles.
Monsieur le président, j’aimerais maintenant inviter M.
St-Denis à vous faire quelques commentaires sur d’autres
points contenus dans notre mémoire.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Denis.
M. Yves St-Denis (président de l’Association canadienne-
française de l’ontario): Monsieur le président, mesdames et
messieurs. Depuis 70 ans l’ACFO s’est surtout occupée d’édu-
cation et nous croyons tout comme le Conseil des minorités du
Québec au droit inaliénable des parents, au droit inaliénable à
l’instruction dans la langue de la minorité.
Le droit des parents à faire instruire leurs enfants dans la
langue officielle est certes le plus indispensable à la survie des
minorités linguistiques et à la reconnaissance du français et de
l’anglais comme langues officielles au Canada.
Nous proposons donc l’enchâssement de ce droit dans la
Constitution.
En effet, quand une minorité se sent faible dans sa province,
elle demande protection à son pays.
L’histoire des minorités hors Québec et principalement la
minorité franco-ontarienne nous apprend qu’on ne peut pas
toujours se fier aux gouvernements provinciaux, Nous désirons
toutefois des modifications au projet gouvernemental, nous
exprimons aussi des réserves.
Par exemple nous ne limiterons pas un tel droit aux citoyens
canadiens. De même la clause voulant que des établissements
scolaires ne soient ni à la disposition des minorités linguis-
tiques que lorsque le nombre des enfants de ces citoyens le
justifient ne fait que porter atteinte à un principe fondamental.
Nous volons aussi au-delà des niveaux élémentaires et secon-
daires atteindre le niveau collégial.
En conséquence, nous proposons que l’article 23 du projet de
Résolution soit modifié comme suit:
Tout citoyen ou résident permanent du Canada dont la
première langue apprise et encore comprise est celle de la
minorité linguistique de sa province a le droit de faire
instruire ses enfants dans cette langue, au niveau élémen-
taire, secondaire ou collégial.
Également:
Les citoyens canadiens et les résidents permanents du
Canada qui changent de province ont le droit, dans leur
nouvelle province, de faire instruire leurs enfants, au
niveau élémentaire, secondaire et collégial, dans la langue
anglaise ou française dans laquelle un de leurs enfants a
reçu un enseignement dans leur ancienne province de
résidence.
Maintenant, voilà peut-être pour les droits d’instruction. Ce
sur quoi je voudrais également insister c’est l’administration
scolaire.
Les minorités anglophones et francophones doivent avoir le
droit d’administrer leurs propres institutions scolaires.
L’historique de l’enseignement en français en Ontario
atteste de la nécessité de doter les minorités de leurs propres
conseils scolaires, administrés par des membres élus au sein de
la minorité. Au Québec, le réseau scolaire anglophone a été en
grande partie administré par la communauté à laquelle il était
destiné.
Les Franco-ontariens, eux, ne sont pas maîtres de leur destin
en ce qui concerne l’éducation. Sous ce rapport ils sont tenus
pour des pupilles, comme des orphelins mineurs sous la direc-
tion de tuteurs anglophones. Tout au plus peuvent-ils, à ce
titre, être élus membres d’un comité consultatif de langue
française au sein duquel ils n’ont aucun pouvoir décisionnel. Le
redressement de cette situation s’impose.
Nous voulons aussi que tout citoyen ou résident permanent
du Canada, qui est admissible à l’université ait droit à un
enseignement dans la langue officielle de son choix.
En somme, nous demandons la possibilité d’étudier en fran-
çais de la maternelle à l’université pour les Franco-ontariens
ainsi que la gérance de nos institutions scolaires.
Dans le domaine de la radio et de la télédiffusion mainte-
nant: les réseaux français et anglais doivent atteindre toutes les
régions du pays.
La participation à part entière au Canada est tributaire de
l’accès aux institutions canadiennes sur lesquelles reposent la
vie culturelle, l’information et la communication de masse.
Tous les Canadiens doivent bénéficier de services essentiels de
communication dans leur langue officielle. La technologie
moderne permet incontestablement d’atteindre ce but.
Il en va ainsi des services médicaux et sociaux. Les Anglo-
phones et les Francophones doivent recevoir des services médi-
caux et sociaux dans leur langue. Également les minorités
Anglophones et Francophones doivent avoir le droit d’adminis-
trer leurs institutions sociales et de santé dans de nombreux
milieux où ils forment une partie importante de la population.
Alors voilà, notre position me semble simple. faimerais
maintenant que l’on puisse poursuivre avec mon collègue.
[Traduction]
M. Maldoff: M. lames Leavy parlera des droits et libertés
fondamentaux.
[Texte]
M. James Leavy (président du Conseil des minorités du
Québec): Merci, monsieur le président. Le Conseil des Minor-
ités du Québec et l’Association canadienne-française de l’On-
tario sont particulièrement conscients des problèmes linguis-
tiques mais sont aussi conscients des autres articles de la
Charte proposée des droits de la personne et j’aimerais bien
vous entretenir très brièvement de ces autres articles. Aux
pages 15 à 22 de notre mémoire, il y a des observations assez
pertinentes, assez techniques, à propos d’à peu près chaque
article de la Charte proposée des droits de la personne.
Si vous avez des questions là-dessus, je serai tout à fait
disposé à répondre plus tard à vos questions mais j’aimerais
bien à ce stade-ci simplement souligner quelques points fon-
damentaux, quelques points de principe.
D’abord, l’importance aussi bien du contenu que de la forme
de la charte car, une fois enchâssé, l’amendement a cette
charte-là serait très, très difficile. Donc, il faut maintenant, et
avant l’adoption de la charte, s’assurer que son contenu et sa
forme seront de nature à protéger les droits fondamentaux.
A cet égard, l’ACFO et le CMQ tiennent à exprimer des
réserves à propos aussi bien du contenu que de la forme de la
charte, à la lumière des grands documents internationaux et
canadiens sur les droits fondamentaux.
Pour ce qui est du contenu, nous soulignons deux choses.
D’abord, l’absence complète de toutes références aux pouvoirs
d’urgence sur la charte, sauf pour l’article 4.2; c’est une
référence tout a fait oblique. Il faut absolument que la charte
parle de ces pouvoirs d’urgence et plus particulièrement des
moyens de contrôle de ces pouvoirs d’urgence.
Deuxièmement, dans la charte il n’y a aucune référence au
droit a l’intimité, au droit de’ propriété et au droit relatif au
mariage.
Ces droits-là sont reconnus dans tous les grands documents
internationaux que le Canada a signés et par lesquels le
Canada est lié en tant que membre des Nations Unies, y
compris la déclaration universelle des Droits de l’Homme. Il
est donc incompréhensible que dans une charte canadienne
applicable à tous les niveaux de Gouvernement il n’y ait
aucune mention de ces droits si fondamentaux.
Pour ce qui est de la forme de la charte, nous soulignons
quatre choses. D’abord, l’article 1—monsieur Fairweather
vous en a parlé, je pense que monsieur Tarnopolsky aussi a
parlé de cet article—j’aimerais tout simplement abonder peut-
être dans le même sens que monsieur Fairweather. Il faut
serrer les limites que l’on propose de mettre à la reconnais-
sance des droits fondamentaux, des droits reconnus. Il faut que
ces limites soient mieux précisées, mais déclarées. Il y a des
suggestions assez précises dans notre mémoire, là-dessus.
Deuxièmement, pour ce qui est des autres articles de la
charte, et je parle en particulier des articles concernant les
droits légaux, les droits dits judiciaires, ces articles, à l’heure
actuelle, sont assez vagues, assez flous. Il faut que ces articles
soient assez particuliers, assez précis, et on a des suggestions
là-dessus aussi.
Troisièmement, l’article 15 sur le principe de non-discrimi-
nation et d’égalité devant la loi. Voilà un article qui est
beaucoup moins généreux à l’égard des Canadiens que ne l’est
la déclaration universelle à l’égard de tous les peuples de la
terre. Et on a de la misère, nous, à croire que le Gouvernement
du Canada, que le Parlement du Canada veuille être moins
généreux pour ce qui est du principe de l’égalité devant la loi et
du principe de nondiscrimination. On a de la misère à croire
que le Gouvernement du Canada veuille être moins généreux
que les Nations Unies, que Ie Conseil de l’Europe, que les
grandes instances internationales.
Quatrièmement, l’article 25, l’article-clé de la charte parce
que c’est la l’article de contrôle. Je ne sais pas si vous vous en
êtes rendus compte mais il y a une grosse différence entre les
textes anglais et français de cet article. Le texte français parle
simplement dînopérabilité tandis que le texte anglais précise
qu’une loi inopérante shall have forceful effect, le texte fran-
çais est muet sur ce point-là; le texte anglais parle de «any
law», le texte français parle tout simplement d’une règle de
droit et ces deux expressions ne sont pas synonymes. Alors, il
me semble en tout cas que voilà un article qui mérite d’être
réétudié, auquel il faut absolument apporter des corrections.
Alors, voilà ce que je propose.
Pour ce qui est des remarques générales, je suis disposé à
répondre à vos questions et j’invite monsieur St-Denis, au nom
de tous les trois, à conclure cette partie de notre présentation.
M. St-Denis: Oui. Voilà, monsieur le président.
Nous avons voulu soulever quelques-uns des nombreux
points que nous présentons dans notre mémoire. Vous pourrez
y trouver notre position qui y est explicitée.
Les citoyens représentés par l’ACFO et le Conseil des
Minorités du Québec forment les trois-quarts, tout au moins,
des minorités canadiennes des langues officielles et c’est après
avoir consulté et réfléchi que nous présentons aujourd’hui ce
mémoire.
En tant que citoyens de ce pays, nous voulons qu’il y ait une
vision globale du Canada. Les groupes minoritaires de langues
officielles veulent que tous les membres de leur communauté
soient considérés comme des citoyens à part entière. Le Parle-
ment canadien a établi deux langues officielles dans notre
pays. La logique demande donc que les droits des groupes
minoritaires de langues officielles soient pleinement garantis et
protégés par la Constitution. Il faut que disparaisse ce que
d’aucuns considèrent comme une situation de deux poids, deux
mesures. Merci.
Le coprésident (M. loyal): Merci, messieurs St-Denis, Mal-
doff et Leavy.
J’inviterais maintenant l’honorable Roch La Salle à bien
vouloir entamer la discussion avec nos témoins de cet
après-midi.
Monsieur La Salle.
M. La Salle: Merci, monsieur le président.
J’aimerais, comme première question sur ce rapport qui
nous est présenté, sur les recommandations qui nous sont faites
aujourd’hui, inviter les témoins à saisir le Comité de l’impor-
tance ou de la non-importance qu’ils accordent aux Provinces.
Vous êtes les témoins sûrement au courant que le geste posé
par le Gouverneme fédéral, qu’on appelle geste unilatéral—des
plus méchants que moi appelleront cela un coup de force—je
ne sais pas dans quelle perspective vous acceptez, d’abord,
cette décision prise par le Gouvernement fédéral à la suite d’un
échec sur la Conférence fédérale-provinciale, bien sûr, un
échec n’enlève pas la possibilité d’avoir d’autres conférences
fédérales-provinciales, a mon avis, mais jusqu’où, compte tenu
de ces recommandations, vous allez être d’accord avec moi, qui
se relient directement avec les intérêts de chaque Province,
jusqu’où vous acceptez que ce geste soit posé même si ça ne
plaît pas à la très grande majorité des Provinces?
M. Gérard Lévesque (secrétaire-général de l’Association
canadienne-française de l’Ontario): Monsieur le président, je
suis Gérard Lévesque, secrétaire-général de l’Association
Canadienne française de l’Ontario.
Nos organismes n’ont pas étudié en profondeur la question
des procédures d’amendement au projet constitutionnel tout
comme la procédure de rapatriement. Puisque nos objectifs
premiers étaient la protection des droits linguistiques, nous
avons cru bon laisser aux gouvernements et aux politiciens en
général s’occuper de cette autre partie, à moins qu’il soit de
l’accod commun des différents partis de remettre aux minori-
tés de langues officielles un droit de veto, tant pour les
amendements que pour le rapatriement.
M. La Salle: Monsieur Lévesque, je comprends que la
question ne semble pas vous intéresser beaucoup mais je pense
que comme député fédéral ‘et député venant du Québec, en
tous les cas, je pense que c’est important que nous sachions que
les témoins qui viennent ici, témoins importants, que nous
connaissions leur évaluation vis-à-vis la Constitution actuelle
qui exige le respect des deux ordres de Gouvernement, si je ne
m’abuse.
Alors, dans les circonstances, vous comprendrez également
que vos recommandations sont reliées directement à des politi-
ques provinciales, à des budgets provinciaux également. Alors,
là on fait abstraction totalement dans votre mémoire des coûts
qui pourraient être nécessaires par rapport aux recommanda-
tions que vous faites.
J’aimerais quand même vous demander, pour fins d’explica-
tions, à la page 3 de votre document vous dites, toute personne
doit pouvoir s’exprimer en anglais et en français durant les
débats des Chambres du Parlement canadien et de toutes les
assemblées législatives provinciales. Et, tout de suite à la page
4, vous dites que l’article 133 de l’Acte de l’Amérique britanni-
que du Nord doit s’appliquer au moins aux provinces de
l’Ontario, duNouveau-Brunswick, du Manitoba et au Québec.
Il me semble qu’en moins de deux secondes vous réduisez
l’application ou la possibilité, en tous les cas, du français et de
l’anglais à quatre provinces et j’aimerais connaître la raison
pourquoi, ou j’ai mal compris le document.
M. Levesque: Monsieur le président, la question du 133,
comme vous le savez, touche non seulement les législatures
mais les tribunaux. Alors, c’est ce qui fait la différence entre
l’article numéro l et numéro 2. Maintenant, nous mettons au
moins quatre provinces puisqu’il y a d’autres provinces qui
pourraient venir s’ajouter à cela. Si vous vous souvenez bien,
lors des discussions qui se sont appelées la Charte de Victoria
en 1971, il y avait déjà d’autres Provinces qui avaient indiqué
leur intention d’être liées par l’une ou l’autre des parties de
l’article 133 et c’est peut-être cette question-là, monsieur le
député, qui me permet de mentionner justement pourquoi nous
voulons des droits constitutionnels. Nous avons pu voir, depuis
197i, des provinces diminuer ou changer leur position en ce
qui concernait les protections constitutionnelles des minorités
de langues officielles.
Alors, c’est un des exemples qui nous permet d’affirmer ici
que 133 doit lier au moins l’Ontario mais il y a d’autres
Provinces aussi qui devraient s’y ajouter.
M. La Salle: Monsieur Lévesque, me donneriez-vous, par
exemple, votre opinion à savoir que le Gouvernement fédéral,
mois je pense que le Gouvernement fédéral, bien sûr, doit
inciter, inviter, aider les Provinces à l’établissement d’un sys-
tème d’enseignement pour les deux langues. Est-ce que vous
seriez favorable, d’abord, à tenter de convaincre les provinces
d’enchâsser, d’enchâsser ces droits-là dans la mesure où la
Province se manifeste favorablement à offrir ce service addi-
tionnel ou si vous seriez tenté de dire que le Fédéral doit forcer
les Provinces à le faire.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Maldoff.
[Traduction]
M. Maldoff: Je m’excuse mais je n’entends rien. Pourriez-
vous reprendre votre question.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur La Salle.
M. La Salle: La question sera très claire. Est-ce que vous
pensez, par exemple, que le fédéral doit obliger les provinces a
appliquer l’article 133, particulièrement vous signifier l’On-
tario et le Nouveau-Brunswick, il y a peut-être d’autres prov-
inces où il y a quand même des communautés francophones
d’une certaine importance ou bien si le fédéral doit travailler
de façon à convaincre ces provinces.
Alors, je vous demande est-ce que vous favoriser l’obligation
ou la concertation et l’incitation plutôt avec les provinces?
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Maldoff.
M. Maldoff: Merci beaucoup, monsieur le président.
Ce n’est pas le mandat de ni l’un ou l’autre de nos groupes
de faire des représentations sur le processus employé par le
gouvernement pour établir les droits des Canadiens.
Nous sommes ici pour faire quelques représentations très
très claires et précises. Nous sommes les groupes les plus
impliqués par la question de la langue au Canada. Nous
sommes d’avis qu’il est essentiel, en ce moment, pour les
Canadiens de prendre les mesures nécessaires pour déclarer
qu’ils sont sérieux quand ils disent que le Canada est un pays
bâti sur deux langues.
Quant à la question de forcer un niveau de gouvernement ou
l’autre de faire quelque chose, n’importe quoi, c’est très diffic-
ile pour les groupes minoritaires de penser en termes de forcer
un gouvernement.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur La Salle, je dois vous
faire remarquer que même, évidemment si vous êtes toujours à
l’intérieur de la période de temps qui vous est allouée, et
j’informe les témoins en conséquence, que les cloches actuelle-
ment de la Chambre des Communes rappellent les honorables
députés, membres de ce Comité à la Chambre.
Je ne suis pas informé qu’il y aura plusieurs votes, mais
plutôt un seul, de sorte que nous pourrions vraisemblablement
être de retour autour de 6 h 00.
Je crois comprendre également qu’il s’agit de l’heure du
dîner et par conséquent que si nous devions poursuivre notre
discussion, nous avons au moins le choix de poursuivre après
l’heure du dîner.
Je fais également remarquer aux honorables députés que
pour que les témoignages soient entendus et imprimés, au
moins six membres doivent être présents pourvu que les deux
chambres du Parlement font partie de ce quorum.
Par conséquent, je suis entre les mains du Comité présente-
ment pour décider si nous poursuivrons notre échange avec le
Québec Council of Minorities et l’Association canadienne-
française de l’Ontario un peu plus tard la soirée.
Est-ce qu’il y a des opinions à ce sujet-la?
Monsieur Corbin.
Le sénateur Corbin: Monsieur le président, par courtoisie
pour ces témoins que nous avons convoqués ici cet après-midi,
je pense qu’ayant fait leur présentation, nous pourrions étendre
un tour de table à un intervenant de chacun des partis tout de
suite après le vote, et évidemment s’il y a d’autres députés qui
veulent poursuivre les questions au-delà d’un premier tour,
moi, en tout cas, pour un, je serais tout à fait d’accord qu’on le
fasse.
[Traduction]
Le coprésident (M. Joyal): Le greffier me dit que la déci-
sion revient au Comité; si un membre veut s’absenter pour un
vote, il y a toujours cette possibilité. Je m’en remets à vous. Il
serait juste envers nos témoins de leur dire si nous leur
demanderons de revenir plus tard, ou, si nous ne pouvons les
entendre aujourd’hui, de revenir demain, La simple politesse
demande à ce que nous leur fassions part de nos intentions.
C’est nous qui les avons invités. Monsieur Mackasey.
M. Mackasey: Pouvez-vous me dire combien de temps a
déjà été utilisé et combien de temps encore il nous faudra?
Dans des circonstances normales, nous aurions levé la séance à
18 h 00. N’est-ce pas?
Le coprésident (M. Joyal): Oui.
M. Mackasey: Supposons que nous revenions à 19 h 30 et
que nous siégions jusqu’à 20 h 30 ou 2l h 00 pour entendre un
point de vue, à mon avis, très réconfortant, non seulement de la
part des minorités du Québec mais de celles de l’Ontario.
Compte tenu de nos limites de temps, je pense que nous serions
disposés à revenir de 19 h 30 a 20 h 30 ou 2l h 00, sans oubier
que ceux qui travaillent dans les coulisses sont généralement
libres le mercredi soir. Si vous pouviez être très précis quant au
début et à la fin de la séance, de 19 h 30 à 21 h 00, je serais
très favorable.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Nystrom.
M. Nystrom: Pour ne pas gêner nos témoins et un certain
nombre de fonctionnaires ici présents, ainsi que nous-mêmes,
s’il ne reste qu’environ une demi-hcure, pourquoi ne pas reve-
nir après le vote afin que tout le monde puisse rentrer chez soi
à 18h30ou 19h00?
M. Mackasey: Je suis certain que les membres des deux
côtés ont pris certains autres engagements en toute bonne foi,
et je crois que nous pourrions convenir de ne pas bloquer la
procédure pendant cette période, nous pourrions compter sur
un meilleur quorum ou sur un nombre le dépassant.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): D’accord, alors je crois com-
prendre quc c’est là le consentement du Comité, par consé-
quent je demanderais aux honorables sénateurs de bien vouloir
demeurer présents dans cette salie et je demanderais égale-
ment, poliment, à nos témoins de bien vouloir accommoder les
députés et de nous attendre jusqu’à ce que nous revenions de la
Chambre des Communes.
La séance est levée.
REPRISE DE LA SÉANCE
Le coprésident (M. Joyal): A l’ordre, s’il vous plaît.
Je demanderais aux honorables membres de ce Comité de
bien vouloir prendre place autour de la table de manière à ce
que nous puissions poursuivre nos débats et terminer avec les
représentants du Québec Council of Minorities et l’Association
Canadienne-française de l’Ontario.
L’honorable Roch La Salle qui avait la parole, pour encore
quelques minutes, n’est pas encore arrivé, de sorte qu’avec
votre autorisation je poursuivrai en demandant à monsieur De
Jong de continuer le débat et quand monsieur La Salle sera de
retour, je le reconnaîtrai à ce moment-là.
Monsieur De Jong suivi par monsieur Jean Lapierre.
Monsieur De Jong, s’il vous plaît.
[Traduction]
M. de Jong: Merci beaucoup, monsieur le président. Ma
première question se rapporte à une citation du premier minis-
tre Davis qui, dans le journal d’aujourd’hui, déclare qu’étendre
l’article 133 de l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique à
l’Ontario n’apporterait pas vraiment grand chose aux minori-
tés francophones ontariennes, ne leur apporterait rien de nou-
veau. Selon lui, cela n’entraînerait qu’une duplication des
services. Qu’en pensez-vous?
M. Maldoff: Je vous demanderai de faire preuve d’indul-
gence. Comprenez, s’il vous plaît, que nous sommes deux
groupes qui faisons un exposé commun. Lorsqu’une question
nous est posée il se peut qu’il nous faille un moment pour
décider qui y répondra. Soyez assuré que cette interruption ne
nous a pas laissé sans voix. Je demanderai à M. Bloom qui a
participé à la préparation de notre mémoire de répondre â
cette question.
M. Bloom: Le commentaire de M, Davis, rapporté par Le
Droit, soulève la question politiquement très délicate que vous
venez de poser. Nous ne pouvons répondre ni au nom de M.
Davis, ni au nom du parti conservateur de l’Ontario ni au nom
d’autres qui auraient un mot à dire à ce sujet. Cependant,
j’aimerais ajouter que je ne suis pas d’accord avec M. Davis.
Dans notre mémoire, nous suggérons pour de bonnes raisons
que l’artiele 133, ou l’article 23 équivalent de la loi du
Manitoba, soit consacré dans la Constitution. Nous tenons
énormément à ce que les droits dans l’article 133 de la Loi sur
l’Amérique du nord britannique soient consacrés.
Dans notre mémoire, nous disons qu’ils devraient être éten-
dus au moins au Nouveau-Brunswick et à l’Ontario. Nous
pensons que, si une formule d’extension à d’autres provinces
pouvait être trouvée, étant donné qu’une certaine proportion de
la population peut être touchée par la minorité francophone, ce
même droit devrait être étendu automatiquement à cette pro-
vince. C’est une formule possible. Il y en a peut-être d’autres,
De toute manière. nous estimons que l’article 133 devrait être
consacré et étendu à l’Ontario et au Nouveau-Brunswick.
Lorsque M. Davis dit que cela n’apportera rien de nouveau
en ce qui concerne l’Ontario, je pense qu’iI a tout và fait tort. Il
se peut que, dans certains cas, cela n’ait qu’une simple portée
symbolique. Si, comme il le dit, la majeure partie des disposi-
tions de l’article 133 que nous demandons sont déjà appliquées
en Ontario ou sur le point de l’être alors c’est vrai: une grande
partie de l’article 133 a été appliquée en Ontario, et nous
applaudissons le premier ministre Davis et le gouvernement de
l’Ontario pour cette initiative. Cependant, si tel est le cas,
qu’ont-ils à perdre en acceptant l’anchâssement de l’article
133, même si cela signifie, peut-être, une période de transition
pour son application.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Denis.
M. St-Denis: Oui, monsieur le président. Oui, il faut égale-
ment considérer une question de symbole. Le symbole, pour
ceux de sang latin, demeure quand même important. Il y
aurait là une réaction dans la population franco-ontarienne qui
pourrait en être une de fierté, et finalement, peut-être que nous
pourrions cesser de dire que nous sommes parfois traités en
citoyens de seconde zone. Alors, je pense essentiellement à une
notion de fierté.
Je me permettrai d’ajouter aussi, monsieur le président, à la
suite de la question de monsieur La Salle, qu’il est évident que
nous préférerions la concertation aux divers paliers gouver-
nementaux plutôt qu’une obligation mais si nous ne croyons
pas actuellement que cette concertation puisse réussir ou abou-
tir, alors, à ce moment-là, moi je vous dis oui à l’obligation.
Le coprésident (M. Joyal): Merci, monsieur St-Denis.
Monsieur De Jong.
[Traduction]
M. de Jong: Merci, monsieur le président. C’est justement
ce que j’allais dire. Si le premier ministre dit que cela n’appor-
tera rien de véritablement nouveau, les objections de l’Ontario
ne seront peut-être pas si grandes, et le gouvernement accep-
tera que cela soit inclus dans la constitution.
Dans votre exposé, vous avez également parlé d’une période
de transition, d’un certain calendrier et de certaines difficultés.
Pouvez-vous être plus précis? Quelle sorte de calendrier, quel-
les sortes de difficultés envisagez-vous en Ontario?
M. Maldoff: Je suis certain que M. St-Denis voudra ajouter
quelque chose à ce que je vais dire. Nous, Angle-québécois
avons étudié cette question qui revêt un intérêt vital pour nous,
et nous pensons avoir entendu le gouvernement de l’Ontario
répéter à plusieurs reprises—encore tout récemment mardi
dernier, M. McMurtry à Montréal—sa ferme intention d’amé-
liorer au plus vite les services en français de l’Ontario, notam-
ment dans les domaines touchés par l’artic1e 133.
Si telle est bien l’intention de l’Ontario,—et c’est ce qu’il
semble—le gouvernement doit certainement savoir dans quel-
les limites raisonnables il lui sera possible d’offrir tous les
services contenus dans l’article 133.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lévesque.
M. Lévesque: Monsieur le député a raison, monsieur le
président, de mentionner qu’il y a beaucoup de progrès déjà de
faits en Ontario pour en arrivera l’article 133.
Depuis trois ans il y a plusieurs lois qui ont été amendées,
par exemple dans le domaine de la justice, la loi sur la preuve
en Ontario, la loi sur les jurys, le «Adjudicature Act», ainsi de
suite, de telle sorte qu’en donnant un an ou deux, comme
mesures transitoires, comme temps pour la mise en oeuvre, on
pourrait en arriver à un service complet en ce qui concerne les
domaines mentionnés à l’article 133.
Il est sûr que les Franco-ontariens sont raisonnables. Si la loi
constitutionnelle de 1980 était pour entrer en vigueur le 1er
juillet prochain, nous ne nous attendrions pas en un mois à
avoir toute la gamme des autres services juridiques qui nous
attendent au niveau des causes civiles en Ontario ou des autres
domaines où on commence à peine à utiliser le français.
Nous sommes prêts à y aller dans un temps raisonnable, ce
que nous recherchons maintenant c’est un engagement formel,
un engagement constitutionnel pour que notre droit soit
reconnu.
Pour la mise en oeuvre, nous sommes prêts à faire preuve de
bonne volonté. Nous avons été patients jusqu’ici, et sûrement
trop patients pour obtenir nos droits, mais nous voulons l’enga-
gement constitutionnel au niveau de notre gouvernment.
Le coprésident (M. Joyal): Merci.
Monsieur De Jong.
[Traduction]
M. de Jong: Merci, monsieur le président. Votre mémoire ne
fait pas état d’autres groupes minoritaires, Je suis originaire
des Pays-Bas. La Saskatchewan est l’unique province dont la
majorité des citoyens n’appartienne a aucun des deux groupes
fondateurs.
A votre avis ce projet de charte accorde-t-il un traitement
équitable à d’autres groupes minoritaires du Canada ou esti-
mez-vous qu’on aurait à tout le moins dû les mentionner?
M. Maldoft’: Nous sommes venus au Comité pour discuter
essentiellement des questions figurant dans la résolution dont
le Comité est saisi.
Le seul fait que les droits fondamentaux aient été évoqués
dans cette résolution constitue en soi un avantage certain pour
tous les groupes minoritaires du Canada. Dexpérience améri-
caine montre que la garantie constitutionnelle des libertés
civiles tend à renforcer la vitalité des diverses cultures et
collectivités qui ensemble constituent la société américaine.
Ainsi que nous l’avons souligné, de nombreux points figu-
rant dans la Charte devraient être étudiés plus à fond. De
nombreux droits devraient y être ajoutés et la forme de la
Charte révisée.
Nous estimons, néanmoins, que ces dispositions, à condition
d’étre améliorées, devraient répondre en partie du moins à vos
préoccupations.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Levesque.
M. Levesque: Juste un court commentaire, monsieur le
président, pour mentionner que justement nous n’avons pas
étudié en détail les mesures proposées dans le projet de loi, en
ce qui concerne les autres groupes, mais une chose est certaine,
c’est que si les minorités de langue officielle ne peuvent pas
avoir une reconnaissance pleine et entière de leurs droits
fondamentaux, il est sûr que c’est montrer très peu d’espoir
pour d’autres groupes de voir une amélioration de quelque
sorte que ce soit.
Le coprésident (M. Joyal): M. de Jong.
[Traduction]
M. de Jong: Ce qui manque à mon sens dans la Charte, c’est
une note poétique et une vision d’ensemble de notre pays, Un
préambule à la Charte devrait évoquer le caractère original de
notre pays constitué par les peuples aborigènes, les deux
groupes fondateurs, ainsi que les personnes venues des quatre
coins du monde, Ce texte manque d’âme. Il s’agit d’un docu-
ment purementjuridique qui ne parviendra jamais à galvaniser
le peuple comme il pourrait le faire s’il évoquait une vision de
notre avenir.
C’est de ce point de vue que nous devrions évoquer la
composition de notre pays et notamment les différents groupes
ethniques, qui, tous, ont beaucoup contribué à son développe-
ment.
D’après vous, la mesure unilatérale prise par le gouverne-
ment a-t-elle ranimé l’animosité entre anglophones et franco-
phones soit au Québec soit dans l’Ontario.
[Texte]
M. Lévesque: Nous sommes habitués en Ontario, monsieur
le président, d’avoir des problèmes pour avoir nos droits ct quel
que soit le projet fédéral ou provincial, c’est juste souvent de
l’eau au moulin de ceux qui veulent en profiter pour dire ou
peindre tout en noir que les Francophones veulent plus que
leurs droits ou veulent rendre la province de l’Ontario uni-
lingue française.
Je pense que c’est seulement une excuse que nous avons à ce
moment-là, que des gens utilisent quelque projet que ce soit,
que ce soit au niveau de la Constitution ou que ça soit au
niveau d’obtenir une école ou une classe de langue française
dans une région où nous avons le droit de l’obtenir, c’est
seulement une excuse a ce moment-là qu’on fournit à un
groupe qui ne veut rien savoir des droits.
Alors, je pense que l’on ne devrait pas tellement se demand-
er à ce moment-ci s’il y a plus ou moins d’animosité contre les
Francophones à l’effet d’avoir leurs droits, c’est de reconnaître
le principe que les Francophones y ont droit et devraient
obtenir ce droit-là au niveau de la Constitution.
[Traduction]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Bloom.
M. Bloom: Le seul fait que nos deux groupes représentant
ces deux minorités linguistiques vous ont soumis un mémoire
conjointement après s’être mis d’accord sur de nombreux
principes fondamentaux à inclure dans la charte constitue à
mon avis la meilleure réponse à votre question.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur de Jong, votre
dernière question.
[Traduction]
C’est votre dernière question.
M. de Jong: D’accord, Monsieur le président. Quelle impor-
tance la population francophone du Québec attache-t-elle à
l’application de l’article 133 à la province de l’Ontario?
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Maldoff.
M. Maldoff: Il m’est difficile d’exagérer l’importance pour
la population francophone du Québec de l’application de l’ani-
cle 133, article qui accorderait certains droits dans le Parle-
ment ct dans les tribunaux de l’Ontario. Permettez-moi de
vous rappeler que nous avons vécu récemment au Québec des
événements qui ont semé la division. Il semble que de nom-
breux canadiens oublient un peu rapidement ce qui s’est passé
il n’y a pas si longtemps, Que devions-nous répondre lorsqu’un
québécois francophone nous demandait pourquoi il devrait
rester canadien, alors qu’il ne se sent pas chez lui au Canada?
Or il est essentiel que canadiens anglophones et francophones
se sentent chez eux partout au Canada. à cette fin, il est
essentiel d’obtenir des garanties dans des domaines essentiels
pour la survie linguistique des deux groupes, notamment l’ac-
ces aux tribunaux et aux parlements provinciaux de façon que
les deux groupes linguistiques se sentent en sécurité et puissent
avoir confiance.
M. de Jong: Merci.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Merci, monsieur de Jong.
Monsieur Jean Lapierre, s’il vous plaît.
M. Lapierre: Monsieur le président, messieurs, je regrette
que monsieur La Salle ne soit pas de retour, parce que je
comprenais mal pourquoi il ne sympathisait pas plus avec vos
demandes, lui qui a pourtant le statut de minoritaire dans son
propre parti.
Le sénateur Asselin: Nous sommes ici, mon cher.
M. Lapierre: Et vous aussi.
Messieurs, je suis très heureux de voir votre union aujourd-
‘hui qui confirme que ce qui est bon pour les autres et qui fait
aussi que la démonstration que notre projet peut unir plutôt
que diviser.
De plus, la réciprocité tacite de votre présentation me plaît
et constitue, a mon point de vue, un pas en avant vers un
traitement égal et juste des minorités à travers le pays. Ca
évite pour ainsi dire l’ancienne pratique des deux poids, deux
mesures, qui a toujours exaspéré plusieurs de mes compatri-
otes.
Je suis aussi très fier de constater votre support à notre
détermination d’enchâsser une fois pour toutes certains droits
fondamentaux essentiels à vos communautés.
On nous reproche depuis le début des séances de ce Comité,
de ne pas être allés assez loin. Je suis convaincu que d’ici la
rédaction de notre rapport final, nous pourrons accueillir
favorablement vos suggestions et ainsi satisfaire partiellement
vos attentes fort légitimes.
Si j’arrive à la substance même de votre présentation, au
niveau de vos recommandations 1, 2 et 3, je les ai regroupées,
parce que la recommandation 1 qui dit que:
Toute personne doit pouvoir s’exprimer en anglais ou en
français durant les débats du Parlement canadien et de
toutes les assemblées législatives provinciales.
Et la troisième qui dit:
Toute personne faisant l’objet de poursuites judiciaires
pouvant entraîner son incarcération doit avoir la possibi-
lité de subir son procès en anglais ou en français.
En fait, l et 3 sont des éléments de l’article 133 actuel.
J’aimerais me faire expliquer, est-ce que ces deux élé-
ments-là sont un minimum pour toutes les provinces tandis que
133 au complet devrait être spécifiquement à l’Ontario et au
Nouvcau-Brunswick, parce que les trois semblent s’entremêler.
M. Bloom: En réponse à votre question, monsieur Lapierre,
notre idée là-dedans c’est que pour le point numéro 1 concer-
nant le débat au Parlement, on touche à toutes les provinces
ainsi que le Parlement fédéral évidemment. Donc ça couvre
toutes les provinces.
En ce qui concerne la suggestion numéro 2, la recommanda-
tion numéro 2, la section 133 devrait s’appliquer seulement à
quatre provinces, on dit du moins à quatre provinces. Donc les
autres provinces, en ce qui concerne toutes les conditions de
133 autres que les débats devant la législature provinciale,
devrait s’appliquer seulement à ces quatre provinces-là.
En ce qui concerne la troisième recommandation ça, égale-
ment devrait s’appliquer à toutes les provinces ainsi qu’au
Parlement, parce que là on dit:
En ce qui touche la liberté de l’individu, là, où l’emprison-
nement est possible comme peine lors d’une infraction,
lors d’un procès chaque individu, qu’il soit citoyen ou non,
devrait avoir le droit d’avoir le procès soit en anglais, soit
en français.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
M. Lapierre: Je vous remercie. Pour revenir à l’article 133,
j’ai lu avec beaucoup dïntérêt le télégramme que le Conseil
des Minorités a fait parvenir au ministre de l’Ontario et je
vous en félicite et j’espère bien que d’autres groupes comme le
vôtre et aussi représentatifs pourront poser des gestes
semblables.
Idéalement, et je ne sais pas si vous avez entendu le témoi-
gnage du ministre de la Justice, je pense que tous les membres
de ce Comité sont très sensibles à cette question, mais idéale-
ment on préférerait que ça se fasse de la part des législatures
plutôt que—et je sais que vous ne voulez pas vous adresser
vraiment à la méthode, mais vous voulez avoir le résultat—
notre position est celle-ci pour l’instant, qu’on préférerait
vraiment que ce soit la volonté directe des législatures.
Je sais qu’au Nouveau-Brunswick c’est comme ça, quel est
votre sentiment concernant l’Ontario actuellement et il y a la
déclaration de monsieur Davis tout à l’heure, mais puisqu’il dit
que ça ne dérange rien.
M. St-Denis: Bon, alors, si vous nous demandez, monsieur le
président, monsieur Lapierre, notre sentiment: oui, nous croy-
ons bien pour ce qui est du Nouveau-Brunswick que ça ne
semble pas causer de gros problèmes, au Manitoba il y a
l’article 23 provincial là-bas, alors le problème réside encore
une fois en Ontario. Et on a nettement le sentiment que le
gouvernement ontarien ne sera pas intéressé, si vous voulez, à
s’entendre ou à négocier dans ce sens-là. Alors, encore une fois
j’en reviens à cette idée que là où on ne peut s’entendre, où on
ne peut faire une concertation précise que ça doit être imposé.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
M. Lapierre: A ce moment-là, est-ce que vous voulez dire
que ça doit être le rôle du Parlement canadien de l’imposer?
M. St-Denis: Oui, monsieur le président, en l’enchâssant ce
droit-là dans la Constitution.
M. Lapierre: Merci.
Je reviens aussi à votre quatrième recommandation concer-
nant l’article 20 et est-ce que votre théorie de l’imposition tient
aussi pour l’obligation des provinces de servir leurs contribu-
ables dans les deux langues officielles aussi?
M. St-Denis: Je pense, monsieur le président, que quand
même tout ne doit pas être imposé, c’est là une mauvaise
tactique, on se contente du minimum obligatoire. Maintenant,
on peut, chez mes collègues, réagir également à la question.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Bloom.
M. Bloom: Monsieur Lapierre, on sait que l’article 20 dans
le projet actuel est divisé en deux. Il y a d’abord la partie qui
concerne les sièges sociaux, ainsi que l’autre partie qui parle
des régions.
Notre recommandation suit la même suggestion que le
projet. Donc. en ce qui concerne les sièges sociaux des législa-
tures ou des gouvernements provinciaux, on dit que les services
ainsi que les communications devraient être disponibles en
anglais et en français.
En ce qui concerne les régions, là où le nombre le justifie, tel
que le projet actuel.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
M. Lapierre: Même en l’étendant aux autorités provinciales,
ce qui n’est pas dans le projet actuel.
C’est ce que vous voulez faire.
M. Bloom: Mais, lorsqu’on dit, j’ai la version anglaise
devant moi, que
Section 20 of the draft resolution dealing with the use of
the official languages to communicate with and receive
the services of the federal government must also apply to
the governments of all the provinces.
Ce qu’on avait dans l’idée c’est exactement de l’appliquer,
mutatis mutandis, aux Provinces.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
M. Lnpierre: Là, vous parlez au nom des gens de Montréal
et on sait qu’actuellement, du Québec, on sait qu’actuellemcnt
vous bénéficiez de ce droit, à toutes fins pratiques, dans bien
des institutions, pour les gens de l’ACFO est-ce que c’est la
même position exactement?
M. Levesque: Cette section-là, monsieur le président, j’ai-
merais attirer l’attention à l’effet que la Charte des droits telle
qu’elle a été déposée à la Conférence constitutionnelle du mois
de septembre il y avait justement un article, l’article 20.2
concernant les rapports du public avec les gouvernements
provinciaux et encore là c’était pour assurer les services dans
les deux langues. On s’est dit, si après une négociation consti-
tutionnelle qui a duré tout l’été avec les gouvernements des dix
Provinces et si, lors de la conférence constitutionnelle les
négociateurs de tous les partis ont cru bon avoir ce docu-
ment-là comme document de travail, je pense qu’on ne peut
pas demander, nous, comme minorité, moins que ce à quoi ils
sont arrivés après toute un été de négociations entre les gens
qui représentent les majorités. Alors, c’est un peu l’une des
façons d’expliquer notre présentation ici au niveau des services
dans les deux langues venant des Provinces.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
M. Lapierre: Tout comme moi vous connaissez les résultats
de cette conférence-là et c’est pour cela qu’on ne peut pas
toujours s’en servir comme base de discussion.
Je reviens maintenant à l’article, en fait, à la cinquième
recommandation de votre mémoire, où vous parlez de «tout
citoyen ou résident permanent». Ce qui enlève ici notre notion
«où le nombre le justifiera, mais avant d’aborder «où le nombre
le justifie», vous comprendrez fort bien, et je m’adresse surtout
aux gens de la CMQ, vous comprendrez fort bien qu’à travers
tout le pays, la seule Province où les immigrants s’assimilent à
la langue de la minorité. c’est la province de Québec. Et c’est
un peu l’inquiétude que plusieurs Québécois ont à savoir si on
ouvre à tout citoyen et résident permanent, qu’effectivemcnt
les résidents permanents n’iront pas dans la langue de la
majorité comme c’est le cas dans les neuf autres Provinces.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Maldoff.
M. Maldoff: Ce que vous avez suggéré, ce n’est pas le sens
de notre amendement proposé. Nous pensons que le sens de
l’article proposé dans le projet de résolution est de donner à
chaque membre d’une communauté anglophone ou franco-
phone dans une Province, l’accès à l’enseignement dans le
français ou l’anglais.
Ce que nous disons ici, nous reprenons le critère de, si on
peut dire, la langue maternelle. Mais ce que nous disons c’est
que si quelqu’un arrive au Canada, de France par exemple. s’il
est un résidentwet ici je dis bien résident permanent—il
devrait avoir le droit d’aller à une école française en Ontario et
l’inverse au Québec pour un membre de la communauté
anglophone qui arrive au Québec.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
M. Lapierre: Oui, maintenant . . .
Le coprésident (M. Joyal): Vous voulez continuer?
Monsieur Bloom?
M. Mnldofl’: Puis-je ajouter quelque chose, s’il vous plaît?
Vous allez remarquer, monsieur Lapierre, que dans notre
texte, notre suggestion, on ne change pas les critères que vous
avez fixés dans le projet de résolution. Ce qu’on enlève, tout
simplement, c’est la nécessité d’être citoyen et deuxièmement,
la où le nombre le justifie. Mais autrement, à part de cela, on a
gardé le même genre de texte, le même sens et le même critère
que le projet.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
M. Lapierre: Justement, vous enlevez, en fait vous ajoutez
résidents permanents. Il y a une autre chose que vous ajoutez
aussi que j’aimerais savoir, vous ajoutez «collégial» et vous
enlevez «là où le nombre le justifie». Paimerais savoir pour
quelle raison vous voulez enlever «ou le nombre le justifie».
Qu’est-ce qui vous empêche de croire queça devrait être là,
dans les deux cas?
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Denis.
M. St-Denis: Oui. lci se pose, évidemment, un problème
crucial. Nous enlevons «là où le nombre le justifie» en pensant,
justement, à notre histoire.
Très souvent il nous est arrivé d’avoir des francophones qui
réclamaient des droits et qui constituaient un certain nombre
mais on n’a jamais su exactement quel était le nombre requis
pour qweffectivement nous ayons tels ou tels services. Alors,
nous nous méfions tout à fait, si je pense par exemple au
niveau scolaire qui relève de l’administration provinciale, alors
comment pouvons-nous nous fier que l’on reconnaîtra des
droits avec simplement cette étiquette «là où le nombre le
justifie». Il faudrait, si on veuille écrire cela, que ce soit
spécifié avec des chiffres absolus.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lapierre.
Monsieur Maldoff, peut-être.
M. Maldoff: Nous pensons, les deux groupes ici, que le droit
à l’enseignement est le droit le plus fondamental pour le futur
des minorités linguistiques et pour cette raison nous pensons
que le droit d’accès à l’enseignement dans la langue anglaise
ou française doit être absolu et nous avons l’expérience au
Québec qui indique que c’est très raisonnable de donner un
droit absolu quant a l’accès à l’enseignement. Les Anglophones
du Québec pourront obtenir leur enseignement en anglais dans
n’importe quel point de notre Province.
Le coprésident (M. Joyal): Merci.
Monsieur Lapierre, votre dernière question.
M. Lapierre: D’accord.
J’espère que d’autres minorités d’autres Provinces pourront
entendre la belle déclaration que vous venez de faire quant au
traitement de la minorité au Québec et je vous en remercie.
Le dernier point, malheureusement ne pourra pas passer
toute votre argumentation mais le sixième point où vous parlez
tfadministration de leurs propres institutions, en parlant des
minorités, encore là je trouve l’intention fort louable mais je
me pose la question est-ce que c’est vraiment aussi fondamen-
tal, le contrôle des institutions que le droit à Vinstruction,
parce qu’actuellement on n’a pas été jusque là et je me
demande qu’est-ce que c’est qui peut nous convraincre d’aller
jusque là. Quelle est votre argumentation à ce sujet-là?
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Denis.
M. St-Denis: Monsieur le président, il s’agit ici, pour nous,
du point le plus crucial du moins en Ontario. Il nous faut
absolument la gérance de notre système scolaire, Encore une
fois l’histoire nous prouve qu’on a eu toutes sortes de difficul-
tés. Nous avons actuellement des personnes préparées et fort
bien préparées pour prendre en main, de façon autonome, nos
systèmes scolaires et conduire l’éducation chez-nous à bonne
fin.
J’aimerais, si vous le permettez, que monsieur Lévesque
ajoute à ce sujet-là.
M. Lévesque: Monsieur le président, si nous n’obtcnons pas
la gestion de nos institutions scolaires nous allons être en
perpétuel conflit scolaire pour obtenir les droits que la Consti-
tution voudra bien nous reconnaître au niveau de l’accès à
l’école. L’histoire des francmontariens est semée de conflits
scolaires et on a eu dans l’équipe de rédaction de notre
mémoire, l’aide de l’historien Robert Choquette, qui est avec
nous, et il pourra certainement être une ressource inépuisable
pour les députés et sénateurs qui voudront comprendre jusqu’à
quel point notre histoire a été faite de luttes pour obtenir des
classes, des écoles un peu partout. Nous calculons que le temps
est venu, maintenant, que chaque communauté de langue
officielle soit habilitée à gérer ses institutions d’enseignement
en commençant, évidemment, par les Conseils scolaires au
niveau des écoles élémentaires et secondaires que nous
connaissons.
Si nous n’avons pas la gestion scolaire, nous n’en sortirons
pas de nous battre dans chaque région de l’Ontario contre une
majorité unilingue anglaise qui comprend difficilement les
aspirations, les revendications, les priorités en éducation pour
la minorité de langue française.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Denis.
M. St-Denis: Merci. Depuis 1968 nous avons une loi en
Ontario, une loi 140 ou 141 qui permettait la création d’écoles
françaises au secondaire. Or, nous avons actuellement 25
écoles françaises et 35 écoles dites mixtes. Quelques-unes se
portent bien, d’autres fort mal. Mais, ce que je veux dire c’est
que parmi nos 25 écoles françaises nous en avons décroché au
moins 8 à la pointe de l’épée, simplement pour citer, là,
Surgeon Falls, Cornwall, Essex, près de Windsor et récemment
Penetang.
Alors, est-ce qu’on devra jusqu’à la fin de nos jours, et les
générations qui nous suivront, continuer à se battre comme ça?
Nous pensons a ce moment-là que la Constitution, par des
droits bien enchâssés pourrait vraiment protéger nos droits et
nous les accorder.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Maldoff, vous voulez
rajouter aussi?
[Traduction]
M. Maldoff: Oui, monsieur le président. J’aimerais ajouter
quelque chose au sujet de la gestion et du droit d’administrer
les établissements scolaires.
Nous pensons que le droit de contrôler et d’administrer les
établissements et les commissions scolaires constitue un droit
essentiel et impératif. Il en est de même, d’après nous, pour la
liberté d’accès à l’éducation dans les deux langues.
On a très souvent entendu dire, du moins au Québec, que les
Québécois de langue anglaise sont la minorité la mieux traitée
du monde. Il n’y a qu’à regarder la puissance de la commu-
nauté anglophone québécoise!
Sans vouloir discuter de la valeur ou de l’intérêt de ce
commentaire, j’ajouterais que l’un des facteurs qui a contribué
à la viabilité de cette communauté est le fait qu’elle a pu, en
règle générale, contrôler et administrer ses propres institutions.
Je pense, par conséquent, que nous devrions essayer d’accorder
les mêmes privilèges à toutes les minorités linguistiques du
pays.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Merci, monsieur Maldoff.
J’ai maintenant, sur ma liste, l’honorable sénateur Martial
Asselin, et j’ai également sur ma liste monsieur Ron Irwin,
monsieur Corbin et également deux députés qui ne sont pas
membres de ce Comité mais qui ont sollicité le droit de parole,
l’honorable Warren Allmand et monsieur Louis Duclos.
Évidemment, je suis entre les mains de ce Comité, je com-
prends qu’il y a beaucoup d’intérêt autour de la table pour
continuer le débat avec nos témoins de cet après-midi. Je serais
certainement disposé à reconnaître l’honorable Martial Asselin
et monsieur Ron Irwin.
Monsieur Epp.
[Traduction]
M. Epp: Monsieur le président, je ne suis pas tout à fait
satisfait des dispositions qui ont été adoptées avant le vote; je
pense qu’on avait tous compris qu’on pourrait poursuivre le
premier tour de questions pour un certain temps en tout cas.
M. La Salle n’étant pas revenu, j’ai demandé au président si
on ne pourrait pas utiliser la période de temps allouée à M. La
Salle avant le vote. Je pense qu’à ce moment-là, le Comité
aurait dû se conformer aux dispositions prises avant le vote.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Corbin.
M. Corbin: Monsieur le président, il est vrai que nous étions
arrivés à un certain entendement juste avant le vote et je pense
qu’il est tout à fait convenable qu’on donne le reste du temps
de monsieur La Salle, qu’on le mette—dis-je—à la disposition
du sénateur Asselin et enfin qu’on respecte notre engagement
de part et d’autre, je suis tout à fait d’accord.
Le coprésident (M. Joyal): Merci, monsieur Corbin. Mon-
sieur Nystrom.
M. Nystrom: Moi, monsieur le président, je suis d’accord
pour donner cinq minutes, dix minutes, à monsieur Asselin,
c’est juste d’après nous et nous sommes d’accord.
Le coprésident (M. Joyal): Très bien. Alors, l’honorable
sénateur Martial Asselin pour cinq minutes.
Le sénateur Asselin: Alors, cinq minutes seulement pour
terminer le temps de mom confrère monsieur La Salle. Mais,
monsieur le président, avant de m’adresser au témoin, je
voudrais peut-être ouvrir une parenthèse, je voudrais dire à
mom ami Lapierre ici qu’on n’a pas de leçon, nous, de ce
côté-ci de la Chambre, à recevoir de lui en ce qui concerne
l’article 133, parce qu’à la Conférence fédérale-provinciale qui
a eu lieu au mois de septembre, c’est le premier ministre du
Canada qui a retiré l’article 133 et qui a dit:
Je n’exige plus que l’article 133 soit appliqué en Ontario.
Écoutez, c’est le premier ministre qui a décidé ça, qui l’a
déclaré en conférence.
Alors, en ce qui concerne l’article 133, on n’a pas de leçon à
recevoir du député Lapierre et si vous avez une motion for-
melle à mettre devant le Comité, vous verrez de quelle façon
nous allons voter,
Messieurs, je dois d’abord féliciter les Francophones de
l’Ontario qui font une bataille extraordinaire, je pense qu’on
les accompagne, nous, les Francophones du Québec. les
Canadiens-français du Québec dans leur bataille, je voudrais
dire et je voudrais répéter ce que j’ai dit hier à un groupe qui
est venu devant nous également.
Évidemment les Anglophones du Québec n’ont pas autant de
mérite que vous parce que les Anglophones du Québec, on l’a
dit et on le répète, sont les minorités qui sont les mieux traitées
et je prends encore comme témoin mon ami Mackasey qui a
dit que iorsqu’il a été député à Québec, il a trouvé qu’ii était
même bien traité par les membres du Parlement qui étaient
des péquistes.
M. Mackasey: (inaudible).
Le sénateur Asselin: Je n’aurais peut-être pas la même
expérience, parce que moi je suis Francophone.
M. Mackasey: (Inaudible).
Le sénateur Asselin: Merci, monsieur Mackasey.
Vous avez parlé de l’administration scolaire tout à l’heure.
Évidemment, c’est un point important de votre programme,
mais étant donné que toute la question scolaire, vous le savez,
relève des provinces, comment voudriez-vous qu’on puisse
enchâsser dans la Charte des Droits l’administration scholaire
qui serait donnée aux minorités, comme a une minorité de
l’Ontario; on ne pourrait pas faire ça.
Comment trouverons-nous la façon, le moyen d’enchâsser les
droits pour les minorités d’une province, d’administrer son
propre système scolaire, alors que nous savons que ce sont des
droits réservés exclusivement aux provinces?
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Denis.
M. St-Denis: Oui. Monsieur le président, historiquement,
monsieur le sénateur, nous reconnaissons que ce sont des droits
qui sont uniquement réservés aux Provinces. Mais les législa-
tions sont là pour légiférer et le besoin se fait encore très
fortement sentir, comme nous le mentionnions tantôt, se fait
toujours sentir pour la reconnaissance de nos droits scolaires.
Nous, par exemple, si nous ne trouvons pas à Toronto les
Francophones qui peuvent nous assurer ce droit-là, alors, c’est
à ce moment-là que nous nous tournons, comme je le disais au
début de notre présentation, que nous nous tournons vers notre
pays, le Canada, je parle du palier fédéral, à ce momenblà,
afin de les réclamer.
Le sénateur Asselin: Quelle sorte de fédération aurions-nous
si le fédéral se permettait, le gouvernement fédéral se permet-
tait d’intervenir dans des juridictions strictement réservées aux
Provinces pour dire, eh bien,
écoutez, vous ne l’avez pas fait, le fédéral va le faire à
votre place,
nous n’aurions plus la fédération que nous avons aujourd’hui.
il y aurait un gouvernement central qui serait dans toutes les
juridictions provinciales et vous auriez un gouvernement cen-
tral unitaire et les provinces seraient tout simplement con-
sidérées comme dcs agents administratifs du gouvernement
central.
J’aimerais avoir vos réflexions sur cela.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Dcnis ou monsieur
Bloom.
M. Bloom: Avec tout le respect, monsieur le sénateur, je ne
suis pas de votre avis.
Déjà on a, avec l’article l33, la Constitution, I’Actc de
l’Amérique Britannique du Nord, un article 133 que vous
prétendez affecte les droits provinciaux, évidemment parce
qu’on touche déja—excusez-moi, l’articlc 93. Je parle de 93.
Déjà dans l’Acte de l’Amérique du Nord, on touche des
questions provinciales. Et pourquoi pas avoir un autre article
qui est l’équivalent de 93, qui prévoit justement que là où il y a
une nécessité de protéger les droits minoritaires qu’un tel droit
soit enchâssé dans la Constitution pour que justement aucune
Province ne puisse jouer avec.
On sait fort bien qu’aujourd’hui on peut avoir un gouverne-
ment qui est là, qui est favorable, qui demain va être changé et
qui peut aussi facilement changer la loi.
On veut être absolument certain que ces droits que l’on
considère absolument fondamentaux pour non seulement les
Francophones de l’Ontario et du restant du Canada mais pour
les Anglophones du Québec, que ce soit enchâssé dans la
Constitution pour que personne, à moins qu’il y ait un con-
sentement selon la formule d’amendement qui serait adoptée, à
moins qu’il y ait un changement qui est formulé par la suite.
Mais une fois enchâssés dans la Constitution, au moins,
nous, les minorités auront ces droits déjà protégés.
Le coprésident (M. Joyal): Votre dernière question, mon-
sieur Asselin.
Le sénateur Asselin: Alors, je reviens encore sur ce point-là
parce que je pense que c’est extrêmement important, parce que
la vous êtes en train de changer la substance même de la
fédération canadienne où il y a des gouvernements provinciaux
avec des pouvoirs qui sont exclusivement donnés à ces gou-
vernements provinciaux-là et vous avez le fédéral.
Alors vous voudriez que l’on change tellement en vertu de
cette charte-là, qu’on change tellement la Constitution cana-
dienne qu’on empiète sur des domaines réservés aux provinces
sans leur consentement? C’est ça que vous voudriez?
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur St-Denis.
M. St-Denis: Oui. Votre question mc laisse toujours un peu
perplexe, monsieur le sénateur, en ce sens que, nous, nous
croyons que la où nous ne pouvons pas obtenir quelque chose
de notre Province, nous pensons que c’est au fédéral à y voir, à
jouer un rôle du moins de palliatif.
Maintenant, cela me surprend aussi un peu, votre question,
du fait que nous avons toujours. nous, les minorités franco-
phones hors Québec, senti quand même l’appui du peuple
francophone du Québec. J’ose croire que vous n’êtes pas contre
les droits des minorités franco-ontariennes. Je pensais avoir
toute la sympathie des Francophones québécois envers le mil-
lion de Francophones que nous formons, que nous constituons
à l’extérieur de la province de Québec.
Le sénateur Asselin: Evidemment, je voudrais soulever un
point d’ordre ici. Ma discussion est une discussion purement
juridique, ce n’est pas une discussion de fait.
Je pense que je vous ai dit tout à l’heure qu’en vertu de
l’article 133, je vous suis, en vertu de l’article 133, ces droits-là
doivent être donnés aux Francophones de l’Ontario, je l’ai dit
publiquement d’ailleurs, mais c’est sur la question juridique,
vous voudriez qu’on change complètement le statut juridique
de la Constitution justement pour permettre au fédéral d’empi-
éter directement sur des droits provinciaux, même s’ils sont si
importants pour les minorités.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Lévesque.
M. Lévesque: Monsieur le président, l’article 93 de l’Acte de
l’Amérique Britannique du Nord reconnaît déjà aux minorités
religieuses la gestion scolaire et concrètement ce que cela a
voulu dire au Québec, cela a été la minorité linguistique qui a
profité largement de cette gestion-là. Alors, nous voulons
transposer en Ontario l’équivalent pour nous-mêmes, avoir la
gestion scolaire.
Monsieur le sénateur soulève la question juridique. Nous
avons avec des experts au niveau constitutionnel étudié juste-
ment la constitutionnalité d’ajouter, non pas de diminuer les
droits en éducation au niveau confessionnel, d’ajouter des
garanties linguistiques.
Des experts comme Peter Hogg de Osgoode Hall nous ont
assurés que c’était possible d’ajouter et non pas de diminuer les
droits confessionnels en éducation, mais d’ajouter des garanties
linguistiques.
Si vous le’ voulez, ça me fera plaisir de remettre au greffier
du Comité des copies de ces avis juridiques-là qui montrent
qu’en Ontario cela serait possible d’avoir l’équivalent de ce qui
se passe au niveau du Québec où la majorité a reconnu via
l’article 93 des droits à la minorité c’est vrai que c’était à la
minorité protestante au niveau historique, mais le fait en
réalité qui existe aujourd’hui, c’est que la plupart des écoles
anglaises au Québec qui sont sous les conseils protestants sont
gérées presque exclusivement par la minorité de langue
officielle au Québec.
C’est un peu ça dont nous sommes un peu jaloux en Ontario,
nous aimerions avoir quelque chose d’équivalent avec une
garantie constitutionnelle que les Francophones de l’Ontario
pourront gérer leurs institutions d’enseignement.
M. St-Denis: Nous ne demandons pas plus, mais tout
autant.
Le coprésident (M. Joyal): Monsieur Maldoff.
[Traduction]
M. Maldoff: Permettez-moi simplement d’ajouter qu’il
s’agit en l’occurrence des droits fondamentaux de tous les
Canadiens. Il ne faudrait surtout pas mettre sur le même pied
les préoccupations politiques des gouvernements vis-à-vis de
leurs propres compétences et les droits des citoyens.
Le moment est venu de prendre des mesures qui permettront
à notre pays de faire face à l’avenir et de résoudre certains
problèmes mieux qu’il ne l’a fait par le passé.
The Joint Chairman (Mr. Joyal): Thank you, Mr. Maldoff.
[Texte]
Le coprésident (M. Joyal): Merci, monsieur Maldoff.
Alors, il me revient au nom des honorables membres de ce
Comité de vous remercier, vous, personnellement, monsieur
Maldoff ainsi que les représentants du Conseil des Minorités
du Québec, monsieur Bloom, monsieur Leavy; je voudrais
également, bien sûr, remercier monsieur Yves St-Denis, prési-
dent de l’Association canadienne-française de l’Ontario ainsi
que le secrétaire général, monsieur Gérard Lévesque et égale-
ment monsieur Robert Choquette qui vous accompagne mais
qui n’a pas pris la parole au cours de cet échange cet
après-midi.
S’il n’y a pas d’autres commentaires ou opinions à exprimer,
j’ajournerai donc le débat jusqu’à 9 h 30 demain matin, où
nous devrions entendre la Fédération canadienne des Munici-
palités et le National Action Committee on the Status of
Women.
[Traduction]
M. Maldoff: Un dernier mot, je vous prie, monsieur le
président. Au nom des deux groupes que nous représentons,
nous tenons a remercier le Comité de la patience dont il fait
preuve. Merci beaucoup.
[Texte]
M. St-Denis: Nous croyons que vous accomplissez un travail
extrêmement important et nous en sommes encore une fois à
un point crucial de notre histoire.
Merci beaucoup.
Le coprésident (M. Joyal): Je vous remercie tous les deux.
Avant d’ajourner, je voulais tout simplement vous informer
que les services de télédiffusion de nos débats me requièrent
l’autorisation de pouvoir diffuser la série complète de nos
sessions de cette semaine, samedi et dimanche prochain de
midi à 9 h 00 du soir.
S’il n’y a pas d’objection, j’accorderai l’autorisation deman-
dée par les services de télédiffusion.
Des voix: D’accord.
Le coprésident (M. Joyal): D’accord,
Alors, très bien, la séance est levée jusqu’à 9 h 30 demain
matin.
TÉMOINS
La Chambre de commerce du Canada:
M. William F. Dunn, président du Comité exécutif;
M. Sam Hughes, président;
M. Graeme T. Haig, c.r., président du Comité sur la réforme
de la Constitution;
M. André Bouchard, membre du Comité sur la réforme de la
Constitution.
Conseil des minorités du Québec:
M. Eric Maldoff, président;
M. Casper Bloom;
M. James Leavy.
Association canadienne-française de l’Ontario (AFCO):
M. Yves St-Denis, président;
M. Gérard Lévesque, secrétaire général.