« Les libéraux tiennent à la théorie de la croissance économique indéfinie », Le Soleil [de Québec] (25 août 1975)
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Date: 1975-08-25
Par: Le Soleil
Citation: « Les libéraux tiennent à la théorie de la croissance économique indéfinie », Le Soleil [de Québec] (25 août 1975).
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Name of Publication Nom de la publication
LE SOLEIL
Date
AUG 25 1975
Les libéraux tiennent à la
théorie de la croissance
économique indéfinie
MONT-GABRIEL–Nom-
bre de militants libéraux ont
accueilli avec scepticisme,
sinon avec hostilité, le mes-
sage alarmiste de M. Maurice
Guernier qui a tenté de dé-
gonfler le mythe de la crois-
sance économique indéfinie,
si cher au parti du premier
ministre Robert Bourassa.
Ce dernier a d’ailleurs été
le premier à tenter de ren-
verser l’orientation pessi-
miste des propos du premier
orateur au colloque du Mont-
Gabriel sur le Québec des
années 80, en ouvrant la
période des questions à l’is-
sue de l’atelier de vendredi
soir.
Le chef politique ne com-
prend pas en effet qu’un
membre du Club de Rome
puisse évoquer les spectres
de la surpopulation, du gas-
pillage des ressources, de la
famine mondiale et de l’épui-
sement des sources d’énergie
sans pouvoir proposer aux
partis gouvernementaux des
pays développés (comme le
Québec) les chemins à pren-
dre pour gagner quand même
les élections.
Que se passera-t-il, deman-
dait M. Bourassa, aussi bien
au micro qu’en coulisses, si
un gouvernement occidental
proposait de prélever une
partie du produit national
pour le donner au Tiers-
Monde?
Même absence de réponse
finalement quand le ministre
des Affaires municipales,
Victor Goldbloom a clos la
soirée en demandant au spé-
cialiste français ce qu’il fal-
lait faire en matière d’immi-
gration, de natalité, d’éduca-
tion et de croissance de la
production.
M. Guernier venait d’évo-
quer les problèmes d’immi-
gration en soulignant qu’un
séjour de 24 heures qu Qué-
bec montre que les peuples
qui meurent de faim chez eux
sont déjà présents ici. Il
écartait ainsi la possibilité
que les pays riches ferment
leurs frontières et leurs yeux
à la misère du Tiers-Monde.
Citant la situation française,
il a notamment affirmé:
« Vous aurez à tout le moins
besoin des travailleurs étran-
gers pour ramasser vos or-
dures! »
Quant à savoir si les pays
industrialisés doivent freiner
la croissance de leur capa-
cité de production, le confé-
rencier s’est contenté de sou-
haiter que les chefs d’Etat
veuillent bien tenir compte
dans leurs comptabilité de
l’existence du Tiers-Monde
et des spectres du futur qu’il
a évoqués.
Enfin, il a carrément refusé
de se mouiller en indiquant
auw homes politiques du
Québec le type de politique
de natalité qui devrait les
guider.
Message pro-vie
Par contre, l’autre confé-
rencier à cet atelier sur les
relations humaines, le rec-
teur de l’université Laval, M.
Larkin Kerin, n’a pas hésité
de son côté à affirmer que
l’évolution de la natalité qué-
bécoise n’a qu’une influence
négligeable sur la population
mondiale. En conséquence,
les gouvernements ne doi-
vent pas s’en mêler et donc
laisser les choix à la cons-
cience individuelle.
Dans l’ensemble d’ailleurs,
M. Kerin a cherché à atté-
nuer le message alarmiste de
son « collègue » du Club de
Rome en affirmant que les
études de cet organisme de
recherches n’étaient pas en-
core assez poussées pour
qu’elles puissent indiquer
des modèles de décisions à
prendre. De même qu’il s’est
plu à répéter que la recher-
che pouvait encore innover
en matière technologique et
régler les problèmes évoqués
par M. Guernier. Ce dernier,
au contraire, affichait un
scepticisme sérieux quant à
la poursuite indéfinie de
l’expansion technologique
extraordinaire que connait
l’Occident depuis un siècle.
Le physicien de l’universi-
té Laval a de plus profité de
l’occasion que lui offraient
les libéraux pour passer un
message pro-vie, pour les res-
pect absolu de la vie humai-
ne individuelle, contra l’a-
vortement, l’euthanasie, l’eu-
génisme, etc.
Sa théorie morale sur les
relations humaines (qu’il a
longuement exposée à l’aide
de diapositives qui ont fait
sourire), implique en effet un
équilibre constant entre les
droits individuels et le bien
commun collectif. A ses yeux,
dans le Québec de 1975, cet
équilibre est « pas si mal ».
Même si, souvent les petits
sont menancés. Et de citer
l’exemple du petit
entrepreneur coincé entre
la concurrence des gros et la
réglementation gouverne-
mentale.
Par-dessus tout cependant,
le recteur de l’université
Laval croit à l’éducation et
aux instituts de recherches.
Ces derniers pouvant indi-
quer des modèles de compor-
tament aux hommes politi-
ques. La première pouvant
apprendre aux Canadiens ce
qu’ils vont perdre en ne se
montrant pas charitables en-
vers les pays pauvres.
Son message a été bien
accueilli. Mieux en tout cas
que celui du spécialiste
Guernier qui, fort révéren-
tieux, avait rappelé au début
de son allocution que les
membres du Club de Rome
ont rencontré, l’an dernier à
Salzbourg, une dizaine de
chefs d’Etat, dont le premier
ministre canadien, Pierre El-
liott Trudeau. Ce dernier,
a-t-il souligné, a particulière-
ment insisté pour que le Club
continue à diffuser son mes-
sage, inlassablement.