Canada, Débats de la Chambre des communes, « La reconnaissance des droits des femmes », 32e parl, 1re sess (20 novembre 1981)
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Date: 1981-11-20
Par: Canada (Parlement)
Citation: Canada, Parlement, Débats de la Chambre des communes, 32e parl, 1re sess, 1981 à 12978-12980.
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LA CONSTITUTION
LA RECONNAISSANCE DES DROITS DES FEMMES
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L’hon. Flora MacDonald (Kingston et les Îles): Madame le Président, ma question s’adresse au premier ministre. Il doit se rappeler qu’il y a quelques jours, je lui ai demandé combien de provinces n’avaient pas encore accepté de retirer la disposition restrictive de l’article sur l’égalité, l’article 28. Après la période des questions, le premier ministre se souviendra de m’avoir laissé entendre officieusement à la Chambre des communes que deux provinces n’avaient pas encore donné leur
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accord. Puis il a signalé que s’il n’en restait qu’une seule, il envisagerait de rétablir l’article sous sa forme originale, mais qu’il ne pourrait pas le faire si deux ou plusieurs provinces s’y opposaient.
Comme il semble n’y avoir qu’une seule province qui refuse de donner son accord, je demande au premier ministre très sincèrement s’il pourrait convenir, de concert avec huit provinces, de rétablir l’article 28 afin de garantir l’égalité des hommes et des femmes comme le prévoyait la résolution initiale?
Des voix: Bravo!
Le très hon. P. E. Trudeau (premier ministre): Madame le Président, l’honorable représentante aurait dû conclure sa question en disant: «comme le prévoyait la résolution initiale que les conservateurs n’ont pas approuvée».
Des voix: Bravo!
M. Nielsen: Ce n’est pas vrai.
M. Crombie: Soyez sérieux!
Mme le Président: A l’ordre. Il reste très peu de temps avant la fin de la période des questions et il y a bien d’autres députés qui aimeraient poser une question.
M. Trudeau: L’honorable représentante me pose une question hypothétique car je ne sais pas combien de provinces approuveront finalement les modifications visant à rétablir la charte sous sa forme initiale, celle sous laquelle elle avait été proposée au départ. Je ne sais pas combien de provinces, finalement, l’approuveront: peut-être toutes, peut-être pas toutes.
Il en va de même des droits des autochtones. Peut-être toutes les provinces approuveront-elles le rétablissement de ces droits, mais peut-être pas. Cependant, la question demeure hypothétique dans la mesure où je ne puis dire à l’avance ce que les tribunaux appelleront un consensus des provinces. Nous savons déjà que le veto de deux provinces n’est pas suffisant, mais qu’il est inutile d’obtenir celui des dix provinces. J’ignore l’accord de combien d’entre elles il nous faudra pour envoyer la résolution à Londres afin de déterminer la constitutionnalité, tout en respectant le caractère de convention de la démarche. Je suppose que ce sont les tribunaux qui en décideront.
Si la question se pose, nous devrons décider, de ce côté-ci de la Chambre, si «tant» de provinces suffit ou non. J’espère que nous n’aurons pas à nous poser cette question car je suis convaincu que la Chambre adoptera toutes les modifications apportées à l’accord il y a deux semaines jeudi. Toutes les modifications seront apportées avec le consentement des provinces. C’est important, à mon avis.
Je ne comprends pas ce qui fait rire les députés d’en face. Peut-être l’un d’entre eux pourrait-il poser une question supplémentaire afin de débrouiller la question.
LE NOMBRE DE PROVINCES NON CONSENTANTES
L’hon. Flora MacDonald (Kingston et les Îles): Madame le Président, j’ai une question supplémentaire à poser. Le premier ministre se souviendra bien sûr que l’article 28 ne figurait pas dans le projet qu’il a soumis à la Chambre il y a eu un an en octobre.
Des voix: Bravo!
Mlle MacDonald: Cet article a été ajouté en avril de cette année avec le consentement et l’accord de tous les partis représentés à la Chambre, parce que nous voulons tous, je pense, le voir adopter. Je vais donc en revenir à la question que j’ai posée au premier ministre et à ce que je conclus de sa réponse de l’autre jour. Si j’ai bien compris, il estimait qu’il serait difficile d’apporter des changements quelconques au texte de l’article dont la Chambre est actuellement saisie si deux provinces s’y opposaient, mais qu’il pourrait y songer s’il se heurtait à l’opposition d’une seule province. Je lui demande maintenant s’il veut bien envisager la chose?
Le très hon. P. E. Trudeau (premier ministre): Madame le Président, le député tire argument de ce que l’article 28 ne figurait pas dans le texte initial de la charte. Elle a raison, bien sûr, et il est vrai que beaucoup d’autres changements ont été apportés à la charte depuis sa présentation à la Chambre en octobre de l’an dernier. Mais il faut lui rappeler pour quelle raison cela s’est fait.
Nous avions une charte assez bonne au mois de juin 1980. Le ministre de la Justice a essayé de rallier les provinces. Je pense que la Chambre se rend compte maintenant des difficultés que cela pose sur certains points de la charte et sur les droits des autochtones.
Le ministre de la Justice, en cherchant à rallier les provinces, a dilué la charte sur beaucoup de points, dans l’espoir d’obtenir un consensus en septembre de 1980.
Ce consensus, nous ne l’avons pas eu. Alors nous avons décidé d’agir de l’unique autorité du Parlement. Comme le Parlement était sur le point d’agir seul, du moins avec l’appui de notre parti et la grande majorité du groupe néo-démocrate, nous avions la possibilité d’améliorer la charte.
Je rappellerai au député quelle position elle a adoptée, avec son parti, à ce moment-là.
Des voix: Oh, oh!
M. Trudeau: Il y a des députés qui n’aiment pas se l’entendre rappeler, madame le Président.
Des voix: Bravo!
M. Siddon: Répondez à la question!
Une voix: Vous avez suivi une méthode bien canadienne!
M. Trudeau: C’était que nous rapatriions la constitution avec une formule d’amendement, et qu’ensuite, après coup, nous rédigions une charte au Canada.
M. Siddon: Alors faisons-là après!
M. Trudeau: Nous allons rapatrier la constitution avec une formule d’amendement, et nous allons avoir une charte assez bonne. Mais, faisons ce que ce parti-là n’a pas cessé de prôner. Donc, quand la Constitution reviendra, rédigeons une charte au Canada; alors, nous nous occuperons tous ensemble des parties qui ne sont pas complètes.
M. Siddon: Voilà ce qu’il faut faire!
M. Trudeau: Il est incontestable que les députés n’ont pas cessé de dire, pendant l’année écoulée, qu’il fallait rédiger la charte au Canada. Comment peuvent-ils maintenant dire:
«Rédigeons-la à la Chambre des communes, même si les provinces sont contre»? Voilà un an qu’ils disent le contraire.
Des voix: Bravo!
Mlle MacDonald: Vous avez changé de position. Ce n’est pas ce que vous disiez l’autre jour.